Survie

Edito - G8 illégitime, Évian en déprime, en masse vers Annemasse...

(mis en ligne le 1er juin 2003)

La recolonisation de l’Irak, l’écrasement de la Tchétchénie, le procès Elf, les chaînes de la dette, l’obstruction au soin des malades du sida... montrent assez que les puissances conviées à Évian pour leur raout annuel, le G8, se sentent peu concernées par les droits des peuples et des gens : leurs dirigeants semblent de plus en plus soumis aux lobbies militaro-industriels, manipulés par les multinationales et les services secrets, vulnérables à la grande corruption qui, dans les paradis fiscaux, s’imprègne de logiques mafieuses.

Ce club des riches et des shérifs n’a jamais eu la légitimité de gouverner le monde. Il s’est pourtant auto-institué en comité de pilotage de l’avenir de la planète. La nuisance de cette usurpation est désormais manifeste. Qu’importe comme on l’appelle (mouvement altermondialiste, « société civile mondiale »... ), une marée montante refuse cette « gouvernance » aveugle. Elle s’est accordée sur un mot d’ordre, « G8 illégitime », qui touche au cœur la propagande du club.

À propos de l’Irak, Jacques Chirac a choisi une révérence judicieuse à la légitimité. Il a surfé durant un semestre sur la popularité que ce choix lui a value. Quel paradoxe pour le patron de la Françafrique néocoloniale !

Nous le suggérions le mois précédent, poursuivre dans la voie du droit international serait pour la France une option “révolutionnaire”, mais néanmoins raisonnable. Et même avantageuse. Mais, en Afrique, Jacques Chirac hésite entre deux conduites face aux lamineurs de leurs peuples : lâchage de Charles Taylor, soutien à Eyadema. Au G8, les quelques pistes novatrices (Conseil de sécurité économique et social, Agence mondiale de l’environnement...) auraient fâché un peu plus George Bush : pour sauver son Sommet, Chirac a préféré reprendre un profil bas, dans le sillage du bulldozer hégémoniste.

Du coup, les citoyens de France et du monde qui convergent en masse vers Annemasse n’auront pas de peine à disqualifier le club. Durant les trois jours d’un Sommet pour un autre monde (29-31 mai), ils le feront par le débat et les propositions. Puis ils exposeront leur nombre - en espérant qu’il n’aura pas été écorné par le réveil du mouvement social hexagonal.

Car l’idéologie hostile aux biens publics d’une droite française trop sûre d’elle-même a un rapport évident avec la dérégulation du monde orchestrée par le G8. Ouvrons les yeux : où mènent la dissolution des solidarités, le dédain des jeux collectifs à somme positive, la chasse aux biens de civilisation ? À la généralisation de l’arbitraire, sous le signe des hélicoptères de combat, des kalachnikovs, des mercenaires, des milices. À la coagulation des haines ethniques et des fanatismes religieux. À une criminalisation sans frontières.

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 115 - Juin 2003
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