Survie

La Cour européenne des droits de l’Homme condamne la France pour la lenteur de sa justice

(mis en ligne le 1er juillet 2004) - CPCR, CRF, FIDH, Juristes Sans Frontières, LDH, Survie
FRANCE / GÉNOCIDE AU RWANDA
La Cour européenne des droits de l’Homme condamne la France pour la lenteur de sa justice

Communiqué commun : CPCR (Collectif des parties civiles pour le Rwanda), CRF (Communauté rwandaise de France), FIDH (Fédération internationale des LDH), Juristes sans Frontières, LDH (Ligue des droits de l’Homme) et Survie, le 18/06/2004.

La France vient d’être condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme [CEDH] pour la lenteur de sa justice dans l’examen d’une plainte déposée contre un présumé génocidaire rwandais dans l’affaire MUTIMURA c. France (décision du 8 juin 2004).

En juillet 1995, des poursuites ont été engagées, à l’initiative de plusieurs victimes, contre l’Abbé Wenceslas MUNYESHYAKA, ressortissant rwandais. Cette affaire phare a donné lieu à de nombreux rebondissements judiciaires. Dans sa décision, la Cour de Strasbourg a estimé que la durée de la procédure (près de 9 ans) constituait une violation du droit à un procès dans un délai raisonnable et du droit à un recours effectif (articles 6 et 13).

Les organisations signataires rappellent que la France a une obligation de participation à la répression des crimes commis au Rwanda en 1994. Il s’agit d’une obligation légale mais aussi éminemment politique, participant ainsi au travail de mémoire et de vérité. [...]

Huit ans plus tard et alors que la communauté internationale vient de commémorer le dixième anniversaire du génocide au Rwanda, [... les associations signataires] se félicitent de la décision prise par la Cour de Strasbourg.

Les victimes rwandaises regroupées dans des collectifs et associations notent en effet que la plupart des plaintes ont été déposées entre 1995 et 2001 et qu’aucune d’entre elle n’a abouti à ce jour.

Dans les affaires rwandaises, comme dans la majorité des affaires fondées sur le principe de compétence universelle, l’inertie du Parquet démontre une certaine frilosité de la part des autorités judiciaires françaises, même si dans l’affaire en cause, le magistrat instructeur, nouvellement désigné, remplit sa mission.

Alors que la tendance au sein du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) est de se dessaisir au profit des juridictions nationales lorsque cela est possible, les autorités françaises semblent, elles, plus enclines à se décharger de cette lourde responsabilité.

La décision de la CEDH redonne un espoir certain aux victimes rwandaises qui attendent que justice soit faite en France.

Cette décision est en effet vécue comme une vraie victoire. Elle pointe vigoureusement l’inertie de la France dans la sanction du génocide de 1994. Une inertie que nos lecteurs s’expliqueront aisément.

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