Survie

A fleur de presse

Rwanda : A fleur de presse - Mai 2006

(mis en ligne le 1er mai 2006) - Victor Sègre

Génocide Tutsi

Le Monde
La France aurait pratiqué une évacuation "sélective" au Rwanda
Stéphanie Maupas, 07/04 :

« Dans les deux camps [camp génocidaire et camp du FPR], refusant toute négociation, les dirigeants vont conduire à leur terme leurs objectifs de guerre, considérant les victimes des massacres et du génocide comme quantité négligeable. »

Pas une commémoration du génocide au Rwanda sans une obscénité dans le journal Le Monde ? Telle semble être, d’année en année, le défi relevé par le « respectable » quotidien. Après un article tellement pauvre en informations sur le rôle de la France qu’il semble n’avoir d’autre fonction que de faire diversion, la phrase de conclusion est un véritable condensé des thèmes éculés véhiculés par des milieux que l’on ne connaît que trop bien. On peut sans doute, à l’instar du général Dallaire, reprocher au FPR de n’avoir pas progressé militairement plus rapidement, pour mettre fin plus tôt au génocide. Mais lui reprocher de n’avoir pas cherché de compromis (lequel ?) avec les génocidaires pendant le génocide, et le renvoyer dos à dos avec ces derniers, relève d’une bien étrange logique. Elle pouvait faire illusion au moment des faits, quand le génocide était dissimulé par les médias derrière le conflit armé. Mais persister douze ans après à mettre au même niveau les deux phénomènes est une grave banalisation du génocide.

Contrairement à ce que prétend ainsi Le Monde, les victimes « des massacres et du génocide » n’étaient pas « quantité négligeable » pour les instigateurs et les exécutants de la solution finale. De même que pendant la seconde Guerre mondiale les convois destinés aux camps d’extermination avaient priorité sur les transports militaires, de même pendant le génocide des Tutsi la logique de l’extermination l’a emporté sur la logique guerrière. Une pause dans le conflit militaire, loin de mettre fin au génocide, ne pouvait qu’être exploitée par les génocidaires pour parfaire leur sinistre besogne, ce qu’a tristement confirmé l’opération Turquoise menée par la France.

Au sujet du Monde, signalons par ailleurs que J.M. Colombani, J. Isnard et Le Monde SA viennent d’être à nouveau déboutés en appel, après la cassation du précédent jugement d’appel en 2004, pour le procès intenté à J.P. Gouteux, auteur de Un génocide secret d’État (Éditions sociales 1998). Ils considéraient diffamatoire la démonstration de l’auteur visant à prouver qu’ils avaient jouer le rôle d’ « honorables correspondants » des services secrets en relayant complaisamment leur propagande pendant le génocide. Le jugement en appel réaffirme que « l’enquête est sérieuse » et confirmée par « la lecture du livre de Claude SILBERZAHN, ancien directeur des services secrets français, qui révèle le particularisme des relations qui existaient entre lui-même et LE MONDE. » C’est la troisième fois que le tribunal de Paris déboutent Jean-Maris Colombani, Jacques Isnard et le journal Le Monde en faveur de Jean-Paul Gouteux.

Victor Sègre

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Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 147 - Mai 2006
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