Survie

Espoir d’embellies

(mis en ligne le 1er février 2008) - Odile Tobner

Depuis une dizaine d’années, l’est de la république du Congo est le théâtre
des exactions, des guerres et des massacres les plus atroces. Selon Human
Rights Watch (HRW), toutes les armées, l’armée congolaise et les
armées et milices ethniques, ont violé les droits des civils congolais,
pratiquant
meurtres, actes de violence sexuelle, déplacements forcés, vols,
extorsions et
destructions des biens.

Selon une enquête de l’International Rescue Committee (IRC), le conflit
et la
crise humanitaire en République démocratique du Congo ont coûté la vie à
5,4 millions de personnes depuis 1998 et continuent de tuer 45 000 personnes
chaque mois. Si la population totale du Congo est estimée à plus de 62
millions
d’habitants, l’essentiel de cette surmortalité affecte les provinces de
l’Est. Il faut
rapprocher ces chiffres de la population estimée dans l’Est du Congo, 2
millions
en Ituri, 3,5 millions au Nord Kivu, 3 millions au Sud Kivu. Une part
considérable
de la population de ces régions aurait donc disparu. Si on y ajoute le
nombre
des déplacés estimé, à l’intérieur du Congo, à 1,7 million, sans compter
tous
ceux qui se sont réfugiés dans les pays voisins, on a le tableau
apocalyptique du
plus grand désastre humanitaire contemporain, qui s’est déroulé dans
l’indifférence
du monde pour la raison principale que les intérêts des grandes puissances
n’étaient pas en danger. Pendant les massacres, les affaires continuent.
Le pillage
traditionnel des métaux rares et précieux dont le Congo abonde, loin de
cesser a
été amplifié par la guerre comme source de revenus pour tous les
belligérants.

Après un premier accord de paix en 2002, une recrudescence de violences
a marqué
2006 et 2007. Au terme d’une conférence tenue à Goma du 6 au 23 janvier
(page 2), un engagement a été signé par les groupes rebelles congolais
pour un
cessez-le-feu. Un mince espoir s’est donc levé, mais les plaies humaines
matérielles
et sociales seront longues à guérir. Comment vont cohabiter ceux que
tant de crimes et de haines ont opposé ? Les évêques congolais ont mis
en garde
contre un accord qui assurerait l’impunité des crimes commis. La clause
d’amnistie,
âprement disputée, a été réduite aux faits de rébellion armée. Les crimes
de guerre, crimes contre l’humanité et crimes de génocide en ont été exclus.

Dans un autre registre, la surprise agréable est venue, en France, le 15
janvier,
d’un discours inattendu du secrétaire d’État à la Coopération et à la
Francophonie,
Jean-Marie Bockel, qui énonçait rien moins que la volonté de « signer l’acte
de décès de la Françafrique »(page 5). Cette importante déclaration constitue
en soi une rupture puisque jamais auparavant le terme de « Françafrique
 » n’a
été prononcé par aucun responsable politique français en fonction. La
politique
africaine de la France serait-elle à un tournant ? On espère que cette
hardiesse,
non seulement ne sera pas désavouée, mais se prolongera en actes signifi
catifs.
Bockel a-t-il la carrure d’un Hercule pour nettoyer les écuries d’Augias
 ? On
l’espère fermement.

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Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 166 - Février 2008
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