Survie

Mali : Juppé, un diplomate boute-feu

(mis en ligne le 12 mars 2012) - Billets d’Afrique et d’ailleurs...

Pour un ministre des Affaires étrangères,
Alain Juppé n’est guère diplomate. Il n’a
eu qu’à ouvrir la bouche le 26 février au
Mali pour se mettre à dos la presse et la
rue maliennes. Avec la suffisance qu’on
lui connaît, il est venu à Bamako dicter
au gouvernement malien la voie à suivre
dans le conflit armé en cours contre la
rébellion touarègue.

S’il avait voulu
renforcer cette rébellion, il n’aurait pas fait
mieux que de proclamer la nécessité pour
les Maliens de négocier avec elle. Il avait
déjà, le 6 février, devant le Sénat français,
annoncé les « victoires » remportées par
cette rébellion, en fait les massacres de
soldats maliens prisonniers auxquels elle
s’est livrée, provoquant déjà la colère des
Maliens.

Ce qui apparaît dans ces fausses
maladresses, c’est la faveur dont jouit la
rébellion touarègue auprès des Français,
moins par le fait qu’elle s’est renforcée
d’anciens combattants pro-Kadhafi que
par celui qu’elle est une épine dans le pied
du Mali.

Le pouvoir français ne pardonne
pas au Mali d’avoir refusé la présence
de l’armée française sur son sol dans la
mobilisation contre AQMI, après avoir
refusé obstinément de ratifier les accords de
réadmission des immigrés expulsés par la
France. Cela fait vraiment trop d’offenses
de la part d’Africains qui devraient se
montrer plus dociles.

Juppé n’en est pas encore à proposer aux
rebelles les ministères de la Défense et de
l’Intérieur, comme à Marcoussis, mais il a
martelé qu’il n’y avait pas de solution dans
la force pour préserver l’unité du Mali. Bel
axiome, qu’on a superbement ignoré dans le
traitement des crises ivoirienne et libyenne.
Dans ces cas-là laisser des pays jonchés de
morts et divisés par la haine n’était pas trop
grave au regard du résultat à obtenir.

Les Maliens ne sauraient trop se méfier
des conseils de Juppé, qui sont de nature,
en interférant dans leurs divisions, à les
envenimer et les rendre insolubles. Le fait
que Juppé soit allé la veille chez Compaoré,
dont il a souligné la parfaite entente avec la
France, parler de la situation au Mali, ne
doit pas être de nature à les rassurer.

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 211 - mars 2012
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