Survie

Francophilie et économiphilie

rédigé le 30 août 2014 (mis en ligne le 25 octobre 2014) - Billets d’Afrique et d’ailleurs...

Finis, les discours faussement naïfs sur la
langue en partage, l’échange interculturel,
les « valeurs » comme la défense des
droits humains prétendument attachées à
la langue française : grâce au nouveau
rapport que Jacques Attali a remis à
François Hollande le 26 août, intitulé
« La francophonie et la francophilie,
moteurs de croissance durable », l’Elysée
est bien décidé à mettre le paquet sur la
« francophonie économique ».

Le rapport
assène sur une petite centaine de pages
des banalités sans doute chèrement
payées (ex. « Le nombre d’entreprises
exportatrices françaises est nettement
plus important dans les pays
francophones
 », p. 24) et des idées de
génie, comme par exemple « Mettre en
place une politique industrielle
francophone, dans le secteur de la
transition énergétique
 » (proposition
n°28). Pile poil ce que le gouvernement
ne fait pas en France... à moins qu’il ne
s’agisse encore de promouvoir le
nucléaire et les affaires d’Areva ? Ou
encore « Faciliter la collecte et la
mobilisation de l’épargne des pays
francophones d’Afrique
 » (proposition
n°32), c’est-à-dire
« Faire du secteur
financier français un acteur majeur en
Afrique : (…) les banques françaises
doivent s’implanter sur le territoire
africain
 ».

On voit, encore et toujours, à
qui profite la « croissance durable ». Tous
les secteurs y passent, et il faut donc aussi
« Renforcer une industrie minière
francophone
 » (proposition n° 35), c’est-à-dire
« Utiliser les compétences
techniques minières françaises dans les
pays africains francophones disposant de
ressources minières (Mauritanie, Guinée,
Egypte, RDC)
 », en mobilisant la
Compagnie nationale des Mines de
France (entreprise publique en cours de
création) et en « partage[ant] avec ces
pays la cartographie des gisements
miniers réalisés par le bureau de
recherches géologiques et minières
(BRGM) et dont dispose désormais cette
Compagnie
 ». Afin « d’organiser les
solidarités linguistiques
 », le communiqué
de l’Elysée signale que « le
Président de la République a demandé
que les propositions du rapport soient
rapidement mises en œuvre
 »… dont la
dernière, on le suppose, qui consiste à
« Transformer à terme l’Organisation
internationale de la Francophonie en
Union économique francophone
 ». Le
message à l’Afrique francophone est
simple : nous vous offrons notre langue,
offrez nous
(encore) vos richesses.

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 238 - septembre 2014
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