Survie

Communiqué du COFANZO relatif à la visite de Blaise Compaoré en France

Publié le 28 mai 2006 - COFANZO

UNE VISITE POUR REDORER L’IMAGE DU “ BEAU BLAISE ” ?

Le Président du Burkina Faso M. Blaise Compaoré effectue une visite officielle en France du 29 mai au 4 juin 2006. Il prendra part dans différentes villes françaises à plusieurs rencontres consacrées à la coopération décentralisée franco-burkinabé.

N’eût été la réputation tenace de régime liberticide que traîne depuis des années le pouvoir de Ouagadougou (en dépit du trésor d’ingéniosité des médias commis à la tâche d’embellissement du palais présidentiel et de son occupant) il y aurait matière à se réjouir d’une telle visite compte tenu du rôle majeur que jouent désormais les collectivités locales françaises dans le cadre de leurs nombreuses actions de coopération décentralisée avec les pays du Sud, notamment ceux d’Afrique.

Hélas ! Force est de constater que les multiples liens des collectivités locales françaises avec le Burkina Faso soulèvent aujourd’hui plus de questions et de motifs d’inquiétude que d’enthousiasme et d’adhésion politique au niveau des citoyens burkinabé.

En effet, sans douter des bonnes intentions qui animent les élus et acteurs de l’Hexagone qui multiplient ces dernières années des projets de partenariat avec les autorités étatiques et communales de ce pays sahélien, l’on ne peut taire les nombreuses interrogations préalables qui doivent précéder toute action de coopération réellement soucieuse du bien être et des droits les plus élémentaires des populations censées en être bénéficiaires.

Lorsqu’on observe le contexte socio politique du Burkina Faso, ce qui saute aux yeux de tout observateur honnête et impartial c’est le lourd passif du régime en matière de violation des droits humains sur fond de corruption et de pauvreté généralisées.

Est-ce là le prix du calme relatif qui semble régner dans le pays ?
Sans remonter à la violence effroyable qui a caractérisé la prise du pouvoir par Blaise Compaoré le 15 octobre 1987 ( notamment l’assassinat de Thomas Sankara et de ses collaborateurs), la situation politique et sociale qui prévaut aujourd’hui “ au pays des hommes intègres ” illustre clairement le caractère illégitime, liberticide, anti-social et maffieux du pouvoir en place :

· l’élection présidentielle du 13 novembre 2005 a été entâchée de nombreuses irrégularités , avant, pendant et après le scrutin. Les nombreux recours des partis d’opposition n’ont pas pu empêcher (ni même retarder !) la proclamation de la victoire du “ président candidat du parti supra majoritaire ” ;

· les élections municipales du 23 avril 2006 (dont les résultats officiels sont encore attendus) ont été l’occasion d’une grande foire d’empoignes entre les dignitaires du régime qui se sont arrogés “ la part du lion ” à coups de fraudes, de corruption , de tripatouillages des urnes ; laissant aux partis d’opposition (qui acceptaient de s’engager dans cette “ parodie démocratique ”) quelques strapontins ;

· reconnu et complimenté comme meilleur élève en matière de politique sociale par le FMI et la Banque Mondiale, le régime Compaoré déroule sans pitié depuis une dizaine d’années un rouleau compresseur anti social contre les travailleurs burkinabé. Les résultats sont là : une privatisation des entreprises publiques juteuses au profit de copains du régime et d’entreprises étrangères (notamment françaises), des licenciements sans aucune indemnisation, un surenchérissement des prix des produits de première nécessité, bref une paupérisation croissante des couches populaires ; tandis qu’en parallèle l’on assiste à un enrichissement effréné de ceux qui sont “ en phase ” avec le “ beau Blaise ”. Toutes choses qui aliment à grande vitesse et à grande échelle la corruption dans tous les rouages et à tous les niveaux de l’Etat burkinabé . En riposte à cette politique des Programmes d’Ajustement Structurel, tous les syndicats du pays dans un élan unitaire salvateur ont massivement manifesté leur mécontentement à travers deux journées de grève et de manifestations, les 23 et 24 mai derniers ;

· ces nombreux crimes économiques viennent alourdir le passif d’un régime qui n’a jamais su (ou pu ?)se départir de la violence en politique, comme en témoigne la longue liste des assassinats crapuleux du pouvoir de Ouagadougou contre les personnes gênantes (Thomas Sankara, Norbert Zongo et des dizaines d’autres),

· à ces dizaines de crimes économiques et de sang commis à l’intérieur du pays, s’ajoutent des milliers d’autres perpétrés en Angola (sous l’ère du “ rebelle ” Jonas Sawimbi), au Libéria (aux côtés de Charles Taylor [aujourd’hui poursuivi par la justice internationale pour crimes de guerre]), en Sierra Léone (en soutien à Fodé Sankoh) , et plus récemment en Côte d’Ivoire. Des missions d’experts dûment mandatées par l’ONU ont réuni une masse impressionnante de faits qui étayent cette politique criminelle et maffieuse du régime de M. Blaise Compaoré en dehors de ses frontières.

Au regard de ces faits graves dont s’est rendu coupable le régime en place au Burkina Faso(qui sévit depuis bientôt vingt ans) les citoyens burkinabé et de nombreux démocrates de par le monde sont en droit de se demander quelles valeurs et quels intérêts défendent l’Etat français et les collectivités locales françaises qui déroulent aujourd’hui le tapis rouge de la République à un autocrate et sanguinaire qui a endeuillé tant de familles au Burkina Faso et en Afrique ?

Il est temps pour les autorité françaises , à quelque échelle du pouvoir public républicain , de sortir de la logique des faux semblants, de la diplomatie à géométrie variable (aux relents racistes) qui rend moralement soutenable et politiquement correct le soutien aux dictateurs africains.
Il n’est pas trop tard pour enfin amorcer avec le Burkina Faso et avec l’Afrique, une politique de coopération digne et vraie !

Il n’est pas trop tard pour exiger du pouvoir de M. Blaise Compaoré de répondre de l’assassinat de “ son frère d’arme ” Thomas Sankara, de l’assassinat du journaliste Norbert Zongo, de l’assassinat de l’étudiant Dabo Boukari, etc ; ainsi que de sa complicité avérée dans les abominations des tueurs de Jonas Sawimbi, de Charles Taylor, de ses nombreux trafics d’armes, de métaux précieux et de mercenaires qui alimentent les guerres en Afrique.

Pour notre part, nous entendons poursuivre le combat, aux cotés des démocrates burkinabé,
qui se mobilisent massivement contre l’impunité et contre la vie chère que génère la politique du régime Compaoré,
Dans le même élan, nous entendons poursuivre la lutte pour contester et contribuer à mettre un coup d’arrêt à la complicité de l’Etat français avec les dictatures africaines !

Nous en appelons à la vigilance des citoyens français qui doivent exiger plus que jamais que les nobles idéaux de la république ne soient pas mis au service d’intérêts douteux et contraires à l’amitié et à la solidarité entre les peuples !

Paris le 28 mai 2006
Le Bureau National du COFANZO

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