Depuis ses débuts, le macronisme met en œuvre un choc ultralibéral assumé qui a plusieurs fois été comparé à la politique de la Première ministre anglaise des années 1980. Lorsqu’Emmanuel Macron était ministre de l’Économie, il avait explicitement chanté les louanges de la « Dame de fer » dans une émission de la BBC [1]. Cette stratégie a pris de l’ampleur avec son accession à l’Élysée. Comme Thatcher en son temps, l’hyper président continue ses attaques en méprisant froidement les mobilisations sociales qui lui font face. La différence se trouve peut-être seulement dans le style de communication et le rictus hautain qui anime son visage de « premier de cordée » quand il s’agit de balayer une contradiction.
Et il y a de l’autoritarisme thatchérien aussi dans la manière qu’a eue Macron de traiter récemment les colonisés des Antilles et de Kanaky-Nouvelle Calédonie. Ainsi, le pouvoir a noyé l’archipel océanien sous les troupes pour s’assurer la supériorité en cas de confrontation lors de la troisième consultation sur l’indépendance (voir p.4). Bafouant la parole donnée de ne pas organiser ce référendum avant la présidentielle, il a ignoré les appels des indépendantistes au report du vote afin de respecter le deuil kanak pour les morts du covid. Tel un crachat à la figure, au lendemain d’un scrutin déserté par les premiers concernés, Macron a invoqué « les mots de la coutume » kanak de « respect et humilité » pour clamer la victoire de la domination française sur le peuple dont il venait justement de piétiner les valeurs.
Quelques semaines plus tôt, c’est auprès des Guadeloupéen.nes que le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, était dépêché pour faire face à un mouvement de blocage. Déclenchée par l’obligation de vaccination pour les salarié.es de certains secteurs, la mobilisation émane aussi d’une colère accumulée face à des problèmes lourds dans le pays. Il s’agit tout particulièrement de l’état catastrophique du réseau de distribution d’eau, du CHU de Pointe-à-Pître brûlé en 2017 et toujours pas remis en état ou encore des prix très élevés des produits de consommation. De nombreuses personnes ont été arrêtées et lourdement condamnées lors de ce mouvement. La visite de Lecornu a tourné court, quand il a exigé du « collectif des organisations en lutte » qu’il condamne « les violences » et ignoré la proposition de méthode et les revendications que celui-ci lui a présentées.
Les dizaines de jeunes Guadeloupéen.ne.s condamné.e.s à de la prison purgent leur peine et il n’y a toujours pas vraiment d’eau potable au robinet du pays. Lecornu, lui, est passé à autre chose car il doit désormais s’occuper de « l’Association de soutien à la réélection d’Emmanuel Macron » qu’il a créée pour la campagne. La mort de Thatcher a été célébrée par de multiples « fêtes de rues » au Royaume-Uni. Espérons que les peuples des colonies d’outre-mer et de France hexagonale auront eux aussi l’occasion de se réjouir, même pour un moment, de la fin du macronisme.
Mathieu Lopes
[1] Regards.fr, "Emmanuel Macron en flagrant délit d’apologie du thatchérisme", mars 2015.