Survie

Le régime Gnassingbé assoit son pouvoir en installant la "démocratie apaisée" (Revue de presse fév-sept 2005)

Publié le 27 juin 2005

Revue de Presse sur l’actualité togolaise suite à l’élection présidentielle truquée du 24 avril.

Togo : de 4 à 500 morts lors des violences de la présidentielle

GENEVE (AFP) - 26/09/2005 11h28 - Les violences qui ont accompagné l’élection présidentielle d’avril dernier au Togo ont fait "entre 400 et 500 morts", selon un rapport publié lundi par les Nations unies, qui attribue "la responsabilité principale" de ces violences au pouvoir en place.

La "mission d’établissement des faits" nommée par le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme a indiqué avoir mis au jour "le caractère massif et la gravité des actes de violation des droits de l’Homme attestées par le nombre élevé des victimes (entre 400 et 500 morts et des milliers de blessés)".

Aucun bilan officiel n’a été publié par le pouvoir togolais, qui a nommé une commission d’enquête nationale chargée de remettre un rapport sur les événements du printemps dernier. Les estimations varient de 58 morts, selon une association proche du pouvoir, à 811 selon l’opposition. Le rapport de l’Onu note "l’ampleur des disparitions, l’utilisation à grande échelle de la torture et des traitements inhumains et dégradants, les destructions systématiques et organisées des biens et des propriétés".

La mission s’est rendue sur place en juin pour enquêter sur les violences qui se sont déroulées entre le 5 février, date du décès de l’ancien président Gnassigbé Eyadéma, et le 5 mai, après l’élection de son fils Faure Gnassingbé lors du scrutin contesté du 24 avril. La proclamation des résultats avait entraîné des violences, notamment dans la capitale Lomé.

La mission conduite par Doudou Diène, rapporteur spécial de l’Onu sur le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance, souligne "la responsabilité principale de la violence politique et des violations des droits de l’Homme de l’ensemble de l’appareil répressif et sécuritaire de l’Etat (police, gendarmerie, forces armées tous corps confondus)". Ces organes ont agi "en coordination avec des partisans organisés du pouvoir politique", souligne le rapport, qui dénonce "le principe de l’impunité" érigé par le pouvoir.

"La mission a reçu des informations concordantes permettant de confirmer l’existence d’une réelle stratégie de répression" et les forces de l’ordre "ont souvent fait un usage excessif de leurs armes", selon le rapport. Ainsi, "2.500 soldats habillés en civil et armés de coupes-coupes, machettes et gourdins cloutés" auraient prêté main forte aux militants du parti au pouvoir pour réprimer les manifestations de l’opposition. La mission dénonce cependant "le rôle important des militants des partis d’opposition tant dans la montée de la tension" que dans des "actes graves de violence ayant entraîné de nombreuses victimes". Les dirigeants de l’opposition ont péché par "manque d’encadrement de leurs militants".

A propos de l’élection présidentielle, le rapport estime qu’elle a donné lieu à "un bricolage constitutionnel". Le document déplore aussi "la culture de violence", "fondement de la pérennité du pouvoir du président Gnassigbé Eyadéma", et "l’instrumentalisation politique du facteur ethnique et xénophobe". Les violences ont ainsi pris pour cible des ressortissants maliens, dont huit ont été tués, et nigériens (quatre morts).

Les Français ont quant à eux "revécu le syndrome ivoirien", note le rapport, soulignant que "les déclarations d’amitié du président français" Jacques Chirac au défunt président togolais "et l’appui de la France au processus électoral ont été politiquement interprétés comme la confirmation du soutien de la France au pouvoir togolais". Afin de sortir de l’actuelle "impasse politique totale" à Lomé, le rapport suggère une politique de réconciliation nationale fondée sur la vérité et la justice. Or, la Commission nationale d’enquête créée par le nouveau président "ne bénéficie pas de la crédibilité nécessaire", selon le rapport.

La mission réclame le démantèlement de toutes les milices, une "réforme démocratique en profondeur de l’armée" et "la réouverture de négociations avec toutes les composantes de l’opposition" pour la mise sur pied d’un "gouvernement d’union nationale représentatif", avec le soutien des Nations unies.

Téléchargez le Rapport de l’ONU ci-dessous


40 000 Togolais ont maintenant fui l’instabilité post-électorale.

Centre de Nouvelles ONU 2 août 2005

Le nombre de Togolais qui ont fui la situation d’instabilité suite aux élections pour trouver refuge dans les pays voisins a maintenant dépassé les 40 000 personnes, dont 24 500 au Bénin et 15 500 au Ghana, indique aujourd’hui l’agence des Nations Unies pour les réfugiés. En l’absence de retour dans un avenir proche, l’agence indique qu’il lui fait 4,7 millions de dollars pour répondre aux besoins.

Le nombre de Togolais qui ont fui la situation d’instabilité suite aux élections pour trouver refuge dans les pays voisins a maintenant dépassé les 40 000 personnes, dont 24 500 au Bénin et 15 500 au Ghana, indique aujourd’hui l’agence des Nations Unies pour les réfugiés. En l’absence de retour dans un avenir proche, l’agence indique qu’il lui fait 4,7 millions de dollars pour répondre aux besoins.

« Notre équipe au Bénin indique que le taux d’arrivée décroît de façon constante ces dernières semaines, avec seulement 200 personnes enregistrées par semaine. Au plus fort de la crise, juste après les résultats des élections présidentielles d’avril suivis de manifestations violentes, le Bénin enregistrait plusieurs milliers de nouveaux arrivants chaque semaine. Aucune nouvelle arrivée n’a été rapportée au Ghana depuis la fin mai », a déclaré aujourd’hui la porte-parole du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), Jennifer Pagonis, lors de son point de presse à Genève.

La majorité des réfugiés sont dispersés le long de la zone frontière entre le Ghana et le Bénin. Au Bénin, 10 000 réfugiés logent dans deux camps à Come et Lokassa, alors que quelques 14 500 vivent dans les communautés locales. Nous évaluons actuellement l’impact de la présence d’un aussi grand nombre de demandeurs d’asile vivant en dehors des deux camps établis pour pouvoir fournir une assistance adéquate, a-t-elle précisé.

Au Ghana, les réfugiés togolais vivent exclusivement avec les communautés locales, répartis dans 114 lieux différents, le long des 400 km de la région du Volta. Quelque 12 000 des 15 500 réfugiés ont maintenant été enregistrés plus précisément. Une étude de « maison en maison » dans la région d’Aflao, la plus grande région adjacente de la capitale togolaise Lomé, a confirmé la présence de plus de 6000 réfugiés. 5600 autres réfugiés ont été enregistrés dans la partie nord de la région du Volta.

« L’enregistrement et la vérification se poursuivent dans les deux pays pour nous aider à réaliser nos plans et assister le mieux possible tant les réfugiés que les communautés d’accueil dans les secteurs vitaux de la santé, de l’alimentation en eau, des sanitaires et de l’éducation. Toutefois, nous faisons face à un déficit significatif dans le montant que nous avons sollicité de la part de nos donateurs pour réaliser cette tâche, ce qui pourrait sévèrement affecter l’assistance que nous fournissons ».

« L’UNHCR a besoin de 4,7 million de dollars pour satisfaire les besoins de tous les Togolais réfugiés au Ghana et au Bénin, ainsi que pour fournir une assistance limitée au Togolais déplacés internes. Jusqu’à présent, nous avons reçu 1,75 million de dollars pour le Bénin uniquement, et nous avons demandé une allocation de 1,5 million de dollars de notre réserve opérationnelle pour couvrir les besoins immédiats dans la région. Cela nous laisse avec un déficit de 1,45 million de dollars pour la totalité de l’opération. Il n’y aucun signe indiquant que les réfugiés rentreraient dans un futur proche et il est crucial que les donateurs répondent à notre appel de fonds pour assister cette population ».

© Copyright Centre de Nouvelles ONU


Le Rapport d’Amnesty International TOGO. L’HISTOIRE VA-T-ELLE SE REPETER ? Index AI AFR 57/012/2005, est disponible sur http://web.amnesty.org/library/inde...


Amnesty liste les exactions du nouveau régime au Togo
Réfugiés au Bénin, des opposants dénoncent « exécutions, torture et viols ».

Libération, par Thomas HOFNUNG

19 juillet 2005

Trois mois après l’élection contestée de Faure Gnassingbé à la tête du Togo, Amnesty International revient sur les événements sanglants qui ont endeuillé le scrutin présidentiel du 24 avril. Dans un rapport rendu public hier, l’association de défense des droits de l’homme dénonce « des exécutions extrajudiciaires, des enlèvements, des actes de torture et des mauvais traitements, y compris des viols et des tentatives de viols » perpétrées par les forces de l’ordre et par les partisans du régime contre les sympathisants réels ou supposés de l’opposition. Pour des raisons de sécurité, l’enquête s’est déroulée, en mai et en juin, auprès des milliers de personnes réfugiées au Bénin, pays frontalier du Togo.

Liste. L’ONG reconnaît ne pas être en mesure de fournir un bilan exhaustif des morts liées à cette répression aveugle, soulignant que les autorités de Lomé ont pris de nombreuses dispositions pour dissimuler l’ampleur des violations des droits de l’homme. Toutefois, Amnesty affirme avoir établi une liste de 150 noms qu’elle tient « à la disposition de toute commission d’enquête internationale », tout en la jugeant bien en deçà des chiffres réels. En mai, la Ligue togolaise des droits de l’homme (proche de l’opposition) avait cité le chiffre de 811 décès, tandis que le pouvoir en reconnaissait 58.

Viols. Au Bénin, Amnesty a observé « un grand nombre de blessés » par balles. Sur la base de témoignages sous couvert d’anonymat, l’ONG fait aussi état de viols commis « par des partisans armés du régime ». Le rôle des milices est souvent dénoncé dans le rapport. Un journaliste de Radio Lumière à Aného, une ville frontalière avec le Bénin où de violents affrontements ont éclaté après la proclamation de la victoire de Faure Gnassingbé, raconte aussi comment les militaires ont mis le feu au bâtiment abritant la station.

Dans ses conclusions, Amnesty appelle la communauté internationale à ne pas renvoyer chez eux les réfugiés qui redoutent d’être arrêtés au Togo. Selon l’association, plusieurs cas se sont déjà produits ces dernières semaines. Enfin, elle demande instamment à la France, ancienne puissance coloniale, d’interrompre les transferts de matériels militaires pouvant être utilisés à des fins de répression. L’ONG révèle avoir fait analyser des balles en caoutchouc ainsi qu’une grenade lacrymogène utilisées à Lomé : « Il en ressort que ces matériels sont de fabrication française. »


Fin de la mission UE au Togo : La Coalition réclame la dissolution du gouvernement actuel

Source MOTION D’INFORMATION - 19/07/2005

Fin de la mission UE d’évaluation des 22 engagements :
La Coalition réclame la dissolution du gouvernement actuel et la formation d’un vrai gouvernement d’union nationale

Par Carlos KEITH’S

La mission d’information et d’évaluation de la mise en œuvre des « 22 engagements » qui a séjourné toute la semaine dernière au Togo a quitté notre pays hier soir. Elle a rencontré les acteurs de la vie politique nationale et de la société civile togolaises tels que définis par la France pour les négociations inter togolaises ayant abouti au défunt Accord Cadre de Lomé.

Ce qui frappe les observateurs assidus de la scène politique que sont les médias, c’est d’abord, le manque d’originalité dans les méthodes et donc forcément dans les résultats. C’est ainsi que la mission d’évaluation de l’Union Européenne est arrivée au Togo et y a séjourné en se comportant comme si l’épisode de l’élection présidentielle n’a jamais existé.

Tout s’est passé comme si le scrutin présidentiel raté du 24 Avril n’était qu’une parenthèse ouverte qu’il fallait refermer rapidement afin qu’il n’en reste aucune trace visible pour revenir à la situation qui prévalait avant le décès du général président Eyadéma. Tout s’est passé comme si les centaines de morts, les milliers de blessés et de réfugiés occasionnés par les violences organisées par des proches du pouvoir RPT lors du scrutin mafieux du 24 Avril n’ont pas créé un nouveau contexte.

Le 19 Mai à Abuja, le mini sommet des chefs d’Etat qui s’étaient réunis sur la question togolaise avait préconisé la mise sur pied d’un cadre de dialogue entre le RPT et la Coalition afin de permettre le retour du pays à la normalité et la formation d’un gouvernement d’union nationale. L’UE avait appuyé cette initiative considérée comme étant l’unique voie de parvenir à vraie une solution de sortie durable de la crise qui secoue le pays depuis près d’une quinzaine d’années.

De même, l’Union Européenne avait été la première à applaudir lorsque le président de la Commission de l’Union Africaine avait décidé de nommer un médiateur pour faciliter le dialogue entre les acteurs politiques togolais. L’objectif des 22 engagements était de permettre l’organisation d’élections législatives démocratiques et transparentes devant déboucher sur la reprise pleine et entière de la coopération de l’UE avec le Togo.

Le scrutin présidentiel raté du 24 Avril aura révélé au monde entier, le refus permanent et systématique par le régime RPT, de toute idée de démocratie pluraliste passant par l’organisation d’élections libres et transparentes. Depuis l’élection présidentielle ratée du 24 Avril 2005, les Togolais sont plus divisés entre eux qu’avant le décès d’Eyadéma. De nouvelles plaies se sont ouvertes et la liste des contentieux opposant les Togolais et le régime dictatorial qui les gouverne depuis bientôt quarante ans, ne cesse de s’allonger.

Le dégoût provoqué auprès des Togolais par les violences militaires et policières perpétrées par les groupes organisés proches du régime est si fort qu’aujourd’hui, il est presque indécent de venir parler à nouveau d’élection à des populations togolaises apeurées, désespérées et qui ne croient plus en l’Etat.

Il n’est pas étonnant que cette vision des choses échappe aux tenants du régime RPT. Que ce soit au RPT ou à la CPP, on considère la situation actuelle issue du scrutin présidentiel du 24 Avril, comme une situation normale à gérer avec les solutions traditionnelles. C’est à peine si au sein de ces deux formations, l’on a conscience qu’il y a eu des morts, beaucoup de morts, des blessés et des dizaines de milliers de réfugiés à l’occasion de la dernière élection présidentielle.

« Même si les 22 engagements ont été pris avec le gouvernement de Koffi Sama, nous avons aujourd’hui la chance d’avoir à la tête du gouvernement l’un des témoins, l’un des signataires des 22 engagements, celui-là qui a vécu ces engagements dès leur phase de conception jusqu’à la phase de signature », déclarait gaillardement M. Cornélius Aïdam, 3ème Vice Président de la CPP (le parti de M. Edem kodjo, premier ministre) à sa sortie de l’entretien avec la mission de l’UE.

Il a parlé de « la volonté affirmée par le gouvernement que dirige M. Edem Kodjo de tout faire pour que les 22 engagements deviennent une réalité » car, dit-il « si les 22 engagements étaient appliqués dans leur intégralité, on fera un saut dans la petite communauté des démocraties avancées ».

L’engagement fondamental pris devant l’UE par le gouvernement togolais et ses alliés de la CPP et du PDR était d’assurer le plein respect des principes démocratiques, en annonçant sans délai « une reprise ouverte et crédible du dialogue national avec l’opposition traditionnelle et la société civile, dans un cadre structuré et transparent ».

C’est dans ce cadre de dialogue structuré et transparent que devait se réaliser l’autre engagement fondamental, celui de « procéder, en partant de l’Accord Cadre de Lomé, à une révision du cadre électoral, garantissant un processus électoral transparent et démocratique, et acceptable pour toutes les parties ». Aucun de ces deux engagements fondamentaux n’avait été respecté par le pouvoir RPT dans un contexte moins tendu que celui que vit le pays depuis le décès d’Eyadéma.

Edem Kodjo qui était, comme le confirme M. Aïdam, l’un des concepteurs des 22 engagements, était toujours monté au créneau pour soutenir que le défilé des délégations de partis politiques organisé par l’ancien premier ministre Koffi Sama pouvait tenir lieu de cadre de dialogue structuré et transparent et que le Code électoral inique jugé aujourd’hui non démocratique par la communauté internationale, était tout à fait acceptable et totalement libéral.

Le mini sommet des chefs d’Etat réuni à Abuja avait explicitement reconnu que l’élection présidentielle ratée du 24 Avril 2005 avait sorti le Togo de la normalité. C’est pourquoi ce sommet avait préconisé la mise sur pied d’un cadre de dialogue pour ramener le pays à la normalité. Le 14 Avril 2003, tout le monde avait salué la fermeté de l’Union Européenne face aux manœuvres dilatoires des autorités togolaises.

En imposant les 22 engagements au gouvernement togolais, l’UE avait tracé la voie qui devait conduire pour une fois au Togo, à des élections à peu près démocratiques. Cet objectif était compatible avec le contexte qui prévalait à l’époque. Le coup d’Etat électoral perpétré en 2003 par le défunt général Eyadéma n’avait pas fait 800 morts, plus de 4.000 blessés et plus de 30.000 départs en exil.

L’organisation d’élections législatives transparentes pouvait constituer un début de solution honorable au contentieux électoral de 2003. Cette fois, le contexte est différent. C’est pour tenir compte du nouveau contexte né de l’élection présidentielle du 24 Avril que le mini sommet d’Abuja avait préconisé la mise sur pied d’un cadre de dialogue, non pas pour organiser des élections dans l’immédiat, mais pour déboucher sur la formation d’un gouvernement d’unité nationale au sein duquel, RPT et Coalition travailleraient ensemble sur les nécessaires réformes institutionnelles devant faire du Togo, un Etat « civilisé ».

Cette option avait été saluée et soutenue par tous les partenaires de notre pays : la France, l’Allemagne, les Etats-Unis, l’Union Européenne, l’Union Africaine. Le tout est aujourd’hui de savoir dans quelle logique l’UE entend inscrire son action. Si elle privilégie la logique électorale, elle sort du cadre fixé par le mini sommet d’Abuja et porterait la responsabilité d’un échec plus que probable. Si elle se situe dans la logique du mini sommet d’Abuja, elle ne pourra pas ne pas faire siennes les analyses et les propositions de la Coalition.

« En réalité, dans un contexte politique comme le nôtre où l’appareil d’État est confisqué par le parti au pouvoir, il est illusoire de rechercher le changement par des élections précipitées. On expose inévitablement le pays à des rééditions de fraudes massives, au retour cyclique des protestations violentes et à de nouvelles vagues de répressions sauvages. Les élections n’ont de sens dans de pareils environnements qu’après qu’on eût adopté une démarche politique intérimaire pour « déconfisquer » l’État », lit-on dans le document cadre remis à la mission UE par les cinq partis de la Coalition.

S’inscrivant résolument dans la logique du mini sommet d’Abuja, la Coalition propose la formation d’un Gouvernement d’union nationale, une « solution qui a fait ses preuves dans des pays confrontés à des situations similaires à la nôtre ». « C’est dans cet esprit qu’il importe que les élections en perspective soient précédées d’un Gouvernement transitoire d’unité nationale à former à l’issue d’un dialogue national.
Il appartiendra, entre autres missions, à ce Gouvernement de définir et de mettre en œuvre les mesures d’apaisement des populations, de promouvoir le climat d’entente entre les diverses composantes de la classe politique, de procéder aux réformes électorales et institutionnelles et d’organiser les prochaines élections », écrit la Coalition qui considère que cette mesure ne sort pas du processus des 22 engagements dans la mesure où l’engagement n° 1-1 prévoyant le dialogue national.

Mais, c’est surtout la recommandation formulée par les Chefs d’État africains au mini sommet tenu à Abuja le 19 mai 2005 qui fonde la Coalition dans sa proposition. Pour la Coalition, « il va de l’intérêt du pays que les sacrifices nécessaires soient consentis pour que le schéma d’Abuja soit mis en œuvre ».

C’est pourquoi la Coalition « considère que l’organisation, dans le cadre de l’application de l’engagement n° 1-1, d’un dialogue national sous l’égide de l’Union Africaine et de l’Union Européenne avec le concours d’un facilitateur, et la formation d’un Gouvernement transitoire d’unité nationale à l’issue de ce dialogue, constituent les mesures appropriées pour un dénouement pacifique de la crise sociopolitique du Togo ».

Entre l’affirmation des principes et la réalité du contexte togolais, la grande question qui se pose aujourd’hui n’est pas tant de savoir la logique que suivra l’Union Européenne, mais de savoir si la Coalition saura dépasser ses rivalités internes, ses éternelles et ridicules susceptibilités qui la contraignent à une redoutable inertie, pour se donner les moyens de « vendre » sa solution à la communauté internationale.

Motion d’Information N° 313 du 18/07/2005

Copyright LETOGOLAIS © 2002


Document sur l’état d’application des 22 engagements remis à la mission d’évaluation de l’UE

La Coalition (ADDI - CAR - CDPA - UDS-Togo - UFC)

18/07/2005

1. Le Gouvernement-Sama a, au nom et sous l’autorité du feu Président, le Général Gnassingbé Eyadema, souscrit lors des consultations du 14 avril 2004 à Bruxelles avec l’Union Européenne, 22 engagements en vue de remédier au déficit démocratique et aux violations des droits de l’homme que les populations togolaises endurent depuis des années.

Quinze mois après le démarrage des consultations, la Coalition constate :

 que le Gouvernement ne s’est pas conformé à l’essentiel des engagements pris notamment aux deux fondamentaux concernant le dialogue national et le cadre électoral consensuel, et a par là, mis dans une situation précaire les quelques progrès relevés dans un certain nombre de domaines ; (I)
 que le non-respect des 22 engagements s’est révélé tout particulièrement à l’occasion du scrutin présidentiel du 24 avril 2005. (II)

2. Face à ce double constat, se pose la question de savoir comment amener le Gouvernement à se conformer aux engagements pris de façon à permettre aux populations togolaises de jouir pleinement des normes garantissant la démocratie, les droits de l’homme et les libertés fondamentales. (III)

 I - Quinze mois de manœuvres de contournement des engagements fondamentaux

3. Deux missions de l’Union Européenne ont séjourné à Lomé, la première en juin 2004, la seconde en juillet 2004 pour procéder à l’évaluation de l’état de mise en œuvre des engagements souscrits par le Gouvernement togolais.

Les trois partis (CAR, CDPA, UFC) ont, lors de chacune de ces deux missions, remis à la délégation de l’Union Européenne, des documents contenant leur appréciation de l’état d’application des 22 engagements.

Ils y ont notamment relevé les manœuvres par lesquelles le Gouvernement s’employait à se dérober aux deux engagements fondamentaux concernant le dialogue national et le cadre électoral consensuel. D’autres sont venus s’y ajouter par la suite.

4. Parmi les manœuvres de contournement il convient d’en citer six :

(i) Il en était ainsi des consultations conçues en forme de défilé des partis politiques et autres organisations aux lieu et place du dialogue national.
(ii) Il en était autant de la mise en place d’un comité consultatif dont les membres sont tous issus de la sensibilité présidentielle, pour élaborer le cadre électoral consensuel.

(iii) C’est dans la même stratégie de fuite en avant que le Chef de Gouvernement à l’époque M. SAMA, a, lors de deux réunions tenues le 25 août et le 10 septembre 2004, cherché à faire démarrer le dialogue, alors que le cadre qu’il avait proposé n’avait par recueilli l’assentiment de l’Opposition CAR, CDPA, UFC.

(iv) Il a même déclaré à la séance du 25 août 2004 que le Gouvernement pouvait se passer de l’application de l’engagement n°1-1 concernant le dialogue national, dès lors que les 21 autres viendraient à être mis en œuvre. Or, de par son libellé, l’engagement n° 1-1 est ouvert à toutes les questions figurant ou non dans les 21 autres engagements, dont l’examen serait de nature "à assurer le plein respect des principes démocratiques". Aussi, est-ce à tort que le Premier Ministre a écarté une proposition visant à faire inscrire à l’ordre du jour des discussions, la question relative à la formation d’un Gouvernement transitoire d’union nationale.

(v) On eut également du mal à comprendre que le Premier Ministre d’alors M. Sama ait transmis à l’Assemblée Nationale les quelques modifications apportées au Code électoral de 2003 sans avoir cherché à recueillir l’adhésion de l’Opposition CAR, CDPA, l’UFC.

C’était sans doute en réaction à ces manœuvres de contournement des deux engagements fondamentaux que le Conseil de l’Union Européenne, réunie le 15 novembre 2004 à Bruxelles a, entre autres décisions, recommandé au Gouvernement :

" (a) la mise en oeuvre du dialogue national dans un cadre structuré et transparent conformément à l’engagement n° 1-1 ;
(b) la révision (dans le contexte de ce dialogue) du cadre électoral garantissant un processus transparent et démocratique conformément à l’engagement n° 1-3".
En vue de l’application de ces recommandations, le CAR, la CDPA et l’UFC ont, à l’occasion d’une réunion tenue le 15 décembre 2004 remis au Premier Ministre, un document contenant leurs propositions de révision du cadre électoral. Il revenait au Premier Ministre de soumettre ces propositions au dialogue national une fois le cadre défini. Mais tel ne fut pas le cas.
Contre toute attente, le Général Gnassingbé Eyadema en a décidé autrement en faisant annoncer par un communiqué de la Présidence du 15 janvier 2005 qu’il a arrêté d’autorité à son niveau la version du code électoral à faire entériner par l’Assemblée Nationale.

5. Et c’est dans cet état déplorable de mise en œuvre des 22 engagements, que sera organisé quelques mois plus tard, le scrutin présidentiel le 24 avril 2005 pour la désignation du successeur du Chef de l’Etat décédé le 05 février 2005. Le dialogue national au sein duquel devait être examiné, entre autres sujets, le cadre électoral, n’avait même pas débuté, faute d’accord sur les modalités.

Les graves évènements qui ont émaillé le scrutin ont révélé que la normalisation de situation recherchée à travers les 22 engagements est un véritable échec.

 II -Mise à nu du non-respect des 22 engagements par le scrutin présidentiel du 24 avril 2005

6. L’élection présidentielle du 24 avril 2005 a abondamment illustré l’échec du processus des 22 engagements par le Gouvernement.

(i) Le pouvoir a, au mépris de l’engagement n°1-3, réédité à l’occasion de ce scrutin et à une plus grande échelle, les fraudes qui ont émaillé le scrutin présidentiel de juin 2003.

(a) falsification du fichier électoral par gonflement des listes électorales dans les préfectures favorables au pouvoir, et par omission des milliers d’électeurs des listes électorales des préfectures considérées comme proches de l’Opposition ;
(b) rétention des cartes d’électeurs dans les milieux considérés comme proches de l’Opposition et remise de plusieurs cartes d’électeurs pour des votes multiples dans les milieux favorables au RPT ;
(c) bourrage et enlèvement frauduleux des urnes opérés parfois par des agents des forces de l’ordre ;
(d) refoulement des délégués du candidat de la Coalition des bureaux de vote notamment au moment du dépouillement des urnes ;
(e) falsification des procès-verbaux de dépouillement ; (f) blocage de la transparence des opérations de décompte par interruption des réseaux de communication ;
Etc.
(ii) Nonobstant l’engagement n° 2-2, des milliers de jeunes ont été arrêtés, incarcérés, pourchassés ou contraints à l’exil pour avoir contesté la proclamation par la CENI du candidat du RPT comme vainqueur du scrutin.
(iii) En violation de l’engagement n° 2-1, plus de 500 personnes ont été victimes d’exécution extrajudiciaires, plus 2000 autres blessés, torturés, portés disparus pour des raisons également d’ordre politique ;
(iv) En dépit des engagements n° 3-1 et 3-5, plusieurs journaux proches de l’Opposition ont été interdits de parution et des stations de radio et de télévision privées nationales ainsi qu’une station de radio internationale ont été obligées de suspendre leurs émissions ; des sites de Web ont été suspendus d’accès.
(v) Face à ces violations massives des droits de l’homme, les juridictions togolaises n’ont pu faire preuve de l’impartialité que le Gouvernement a promis de leur assurer par l’engagement n° 2-7.
(vi) La Sous Commission du Contentieux de la CENI, la Cour constitutionnelle, la HAAC et la Commission Nationale des Droits de l’homme ont, en ce qui les concerne, affiché sans retenue leur docilité envers le régime. (engagements 1-3, 2-5, 2-7, 3-6)
Le processus des 22 engagements a été donc incontestablement mis en échec par le Gouvernement.

- III - Mesures de rétablissement du processus des 22 engagements

7. À l’occasion du présent bilan de mise en œuvre des 22 engagements, il convient de rechercher les mesures susceptibles d’assurer de façon effective et non-précaire, le respect des 22 engagements.

8. Le Gouvernement risquerait de pourrir davantage la situation et de faire encourir au pays des lendemains encore plus explosifs en cherchant à précipiter de nouvelles élections avec l’offre d’accepter de prendre des dispositions légales d’amélioration du cadre électoral.

Ce ne sont pas fondamentalement les textes régissant des élections qui sont la racine de la crise togolaise. Si en 1998, en 2003 comme en 2005, les élections n’ont pas débouché sur l’alternance, c’est pour la simple raison que le parti au pouvoir, le RPT a la mainmise sur tous les départements ministériels et les institutions qui ont géré ces élections ou en ont déterminé le sort.

Avec le gouvernement qui vient d’être formé, cette confiscation ne s’est nullement desserrée. Les propos faisant croire qu’il s’agirait d’un Gouvernement d’Union Nationale relèvent de la pure intoxication. Le parti au pouvoir, le RPT, était tout au plus disposé à accepter la formation d’un Gouvernement "ouvert" à ses alliés (CPP, PDR, PSR).

9. A l’examen de la composition du Gouvernement du 20 juin 2005, on constate que tout comme par le passé, le RPT s’est attribué tous les portefeuilles clés dont il a besoin pour décider de l’issue des élections à venir : Ministère de la Défense, Ministère de l’Intérieur, Ministère de la Sécurité, Ministère de la Justice, Ministère de l’Économie et des finances, Ministère des Affaires Étrangères et de la Coopération, Ministère de l’Équipement et des Télécommunications, Ministère de la Communication.

10. On n’entrevoit guère comment un Gouvernement ainsi composé peut organiser des élections régulières et crédibles aux résultats acceptables par tous.

En réalité, dans un contexte politique comme le nôtre où l’appareil d’État est confisqué par le parti au pouvoir, il est illusoire de rechercher le changement par des élections précipitées. On expose inévitablement le pays à des rééditions de fraudes massives, au retour cyclique des protestations violentes et à de nouvelles vagues de répressions sauvages. Les élections n’ont de sens dans de pareils environnements qu’après qu’on eût adopté une démarche politique intérimaire pour "déconfisquer" l’État. De ce point de vue, la formation d’un Gouvernement d’union nationale constitue la solution qui a fait ses preuves dans des pays confrontés à des situations similaires à la nôtre.

11. C’est dans cet esprit qu’il importe que les élections en perspective soient précédées d’un Gouvernement transitoire d’unité nationale à former à l’issue d’un dialogue national.

Il appartiendra, entre autres missions, à ce Gouvernement de définir et de mettre en œuvre les mesures d’apaisement des populations, de promouvoir le climat d’entente entre les diverses composantes de la classe politique, de procéder aux réformes électorales et institutionnelles et d’organiser les prochaines élections.

12. Cette mesure ne sort pas du processus des 22 engagements dans la mesure où l’engagement n° 1-1 prévoyant le dialogue national en est le fondement, ainsi que nous l’avions précisé au point 4. (iv).

Il s’agit en somme de sortir l’engagement n°1-1 concernant le dialogue national de l’approche formelle dans laquelle le gouvernement RPT l’a jusqu’ici enfermé pour lui assigner une fonction opérationnelle.

13. La solution s’inscrit du reste dans la droite ligne de la recommandation formulée par les Chefs d’État africains au mini-sommet tenu à Abuja le 19 mai 2005 ; laquelle recommandation a préconisé "la mise sur pied d’un cadre de dialogue destiné à ramener le pays à la normalité et à permettre la formation d’un gouvernement d’union nationale représentatif de l’ensemble de la classe politique. "

La recommandation d’Abuja n’a pu s’appliquer pour l’instant parce que le parti au pouvoir, le RPT, préfère un Gouvernement d’ouverture au Gouvernement d’union nationale.

Or, il va de l’intérêt du pays que les sacrifices nécessaires soient consentis pour que le schéma d’Abuja soit mis en œuvre.

14. La Coalition considère que l’organisation, dans le cadre de l’application de l’engagement n° 1-1, d’un dialogue national sous l’égide de l’Union Africaine et de l’Union Européenne avec le concours d’un facilitateur, et la formation d’un Gouvernement transitoire d’unité nationale à l’issue de ce dialogue, constituent les mesures appropriées pour un dénouement pacifique de la crise socio-politique du Togo.

Fait à Lomé, le 14 juillet 2005

Ont signé pour la Coalition :

Me Yawovi Agboyibo
Prof. Léopold Gnininvi
M. Jean-Pierre Fabre

Copyright LETOGOLAIS © 2002


TOGO : Des personnes fuient encore les persécutions au Togo - LTDH

LOMÉ, le 18 juillet (IRIN) - De nombreux Togolais craignant les représailles des forces de l’ordre continuent d’affluer dans les locaux de la Ligue togolaise des droits de l’homme (LTDH) pour se plaindre des persécutions dont ils sont victimes, malgré les garanties de sécurité données par le gouvernement aux candidats au retour, a indiqué un représentant d’une association de droits de l’homme.

« La situation des droits de l’homme aujourd’hui au Togo est catastrophique », a déclaré le secrétaire général de la LTDH, Togoata Apedo-Amah, au cours d’une entrevue, jeudi dernier. « Le Togo a sombré dans la barbarie ».

Près de trois mois après la proclamation des résultats du scrutin présidentiel très controversé qui a déclenché de violentes protestations et provoqué la fuite de près de 38 000 Togolais vers le Bénin et le Ghana, les opposants au gouvernement vivent encore dans la crainte d’être arrêtés et persécutés, a affirmé Apedo-Amah.

De nombreuses plaintes enregistrées en juin et juillet pour violation des droits de l’homme se trouvent sur son bureau. « Cette semaine, un jeune est venu de Kpalimé pour nous dire que son père a été enlevé vers 23 heures par des individus non identifiés », a déclaré Apedo-Amah.

Les autres plaintes déposées concernent des viols, notamment celui d’une vieille dame de 92 ans dont le fils aîné a 71 ans.

Apedo-Amaha a également fait état d’un autre cas de violation de droits de l’homme au cours duquel 13 adolescentes de la ville de Kpalimé, à 150 km au nord de Lomé, près de la frontière ghanéenne, ont été détenues et violées pendant trois jours par des hommes en tenue militaire.

Les jeunes gens arrêtés avec ces filles ont également subi des sévices sexuels pendant le viol, a-t-il ajouté.

Selon Apedo-Amah, dont l’organisation est critiquée par les autorités pour ses affinités avec l’opposition, la LTDH a enregistré des plaintes de nombreuses personnes qui craignent d’être arrêtées parce qu’elles ont travaillé dans un bureau de vote comme délégués de l’opposition pendant les élections présidentielles du 24 avril.

Ces élections furent convoquées hâtivement après le décès du président togolais, Gnassingbe Eyadema, qui dirigea le Togo pendant 38 ans. Et malgré les vives protestations de l’opposition, qui a dénoncé de nombreuses fraudes et irrégularités, son fils, Faure Gnassingbe, fut officiellement déclaré vainqueur à l’issue du scrutin.

Le transfert du pouvoir de père en fils a provoqué de violentes manifestions de rue, réprimées par les forces de sécurité.

Début juillet, le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) estimait qu’entre 20 et 60 réfugiés togolais remplissaient chaque jour des demandes d’asile à Hilacondji, la ville frontalière située sur le territoire du Bénin voisin.

Selon le HCR, ces réfugiés sont, pour la plupart, des jeunes gens qui craignent d’être kidnappés ou arrêtés pendant la nuit.

Dans un rapport du HCR, l’agence estimait que plus de 3 000 nouveaux réfugiés étaient arrivés au Bénin et au Ghana pendant le seul mois de juin.

Malgré les assurances données par le nouveau gouvernement du président Faure Gnassingbe d’aider les réfugiés qui reviendront au Togo et de garantir leur sécurité, seuls quelques-uns des 38 000 réfugiés installés au Bénin et au Ghana ces dix dernières semaines sont rentrés chez eux, ont ajouté les représentants du HCR.

Il convient d’apporter une aide alimentaire d’urgence aux réfugiés et aux familles béninoises et ghanéennes qui les hébergent et partagent leurs maigres ressources, a fait savoir le Programme alimentaire mondial (PAM).

Le PAM avait lancé un appel de fonds d’un montant de 3 millions de dollars pour fournir une aide alimentaire à près de 66 500 personnes.

« Les victimes de la crise togolaise sont les moins reconnues », a déclaré Moustapha Darboe, le directeur régional du PAM pour l’Afrique de l’Ouest.

Selon le PAM, une aide alimentaire est nécessaire pour nourrir les 21 000 réfugiés togolais du Bénin, les 17 000 du Ghana et les 10 000 personnes déplacées à l’intérieur du Togo, ainsi que les 18 500 ressortissants béninois et ghanéens qui hébergent des réfugiés.

D’après les estimations du gouvernement, 100 personnes ont trouvé la mort pendant les violentes manifestations qui ont émaillé les élections présidentielles, alors que la LTDH en dénombrait 790, victimes, pour la plupart, de la répression des forces de sécurité et des milices pro-gouvernementales.

A Lomé, le ministre de la Communication et de la Formation civique, Kokou Tozoun, a rejeté les allégations de la LTDH selon lesquelles les persécutions se poursuivaient. « Qu’on me donne les noms des personnes poursuivies et arrêtées », a-t-il lancé à IRIN.

« Pendant la période électorale, il y a des gens qui ont commis des crimes de sang ; ils ont tué, il y a eu des Maliens brûlés. Les coupables de ces crimes ne peuvent pas échapper à la justice », a-t-il ajouté.

Tozoun, ministre des Affaires étrangères dans le précédent gouvernement du président défunt, Gnassingbe Eyadema, a fait remarquer que les autorités exhortaient encore les réfugiés à revenir et que de nombreux prisonniers avaient été libérés des prisons togolaises.

Mais selon Apedo-Amah, cette libération de prisonniers n’est qu’un exercice de propagande visant à obtenir des fonds de l’Union européenne.

« C’est à cause de la mission d’évaluation de l’Union européenne qu’ils les libèrent », a-t-il précisé.

Une mission de l’Union européenne va séjourner au Togo pendant une semaine. Elle est chargée de vérifier que le nouveau gouvernement respecte l’accord d’avril 2004 par lequel le Togo prenait 22 engagements pour promouvoir la démocratie et les droits de l’homme.

En 1993, l’UE avait bloqué une aide financière accordée à l’ancienne colonie française en raison du « déficit démocratique » constaté dans ce pays et avait conditionné la reprise de l’aide aux progrès réalisés sur le plan démocratique.

La semaine dernière, le ministre de la Justice, Abi Tchessa annonçait que 105 prisonniers détenus à Lomé avaient bénéficié d’une libération anticipée et que des centaines d’autres seraient relâchés dans le cadre d’un programme de désengorgement des prisons.

Les principaux bénéficiaires de cette mesure seront les prisonniers qui ont presque accompli leur peine de prison et ceux qui ont été gardés en détention provisoire depuis longtemps.

La mission de l’UE, qui a visité les prisons du Togo, a également rencontré des membres de la coalition des six partis d’opposition dont le candidat unique a perdu les élections d’avril dernier.

Cette opposition « radicale » a refusé de participer au gouvernement d’union nationale formé par le nouveau président. Ce gouvernement a en son sein certains transfuges de l’opposition et des partisans de la ligne dure du régime d’Eyadema.

Agé de 39 ans, le nouveau président est diplômé de grandes école française et américaine.


Le PAM lance un appel de fonds pour quelque 60.000 réfugiés togolais au Bénin et au Ghana.

Centre de nouvelles des Nations Unies.

15 juillet - Le programme alimentaire de l’ONU a lancé aujourd’hui un appel de fonds de 3 millions de dollars pour nourrir quelque 66.500 réfugiés togolais réfugiés dans les pays voisins du Bénin et du Ghana après les affrontements politiques dans le pays.

« Pour l’instant, le PAM a réussi à emprunter des fonds suffisants de ses autres programmes. Mais à présent les stocks de nourriture sont au plus bas et les réfugiés ne semblent pas prêts à rentrer chez eux », a indiqué la porte-parole du Secrétaire général, Marie Okabe, lors de son point quotidien avec la presse.

L’aide alimentaire est destinée aux 21.000 réfugiés togolais au Bénin, aux 17.000 réfugiés togolais au Ghana, aux 10.000 personnes déplacées à l’intérieur du Togo même et aux 18.500 membres des communautés locales qui abritent les personnes déplacées, indique par ailleurs un communiqué du PAM publié aujourd’hui.


BENIN-TOGO : Des réfugiés togolais continuent d’affluer au Bénin

AGAME, le 7 juillet (IRIN) - Des nombreuses personnes continuent de fuir le Togo chaque jour pour se réfugier au Bénin, plus de deux mois après les émeutes qui ont suivi la proclamation des résultats très controversés de l’élection présidentielle et provoqué l’exode de dizaines de milliers de togolais, selon le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).

Entre 20 et 60 réfugiés togolais continuent de demander l’asile après avoir traversé la frontière d’Hilacondji, ont indiqué mardi des responsables du HCR.

Pour la plupart, il s’agit de jeunes gens qui craignent d’être enlevés ou arrêtés la nuit, ont-ils ajouté.

Dans le camp du HCR à Agamé, dans la localité de Lokossa, Benjamin Ahou, 41 ans, est guérisseur traditionnel. Il expliqué comment il a fuit son domicile de Bé Aklassou, à Lomé, parce qu’il craignait d’être arrêté.

Selon lui, la police pensait qu’il avait fait usage de ses pouvoirs surnaturels pour protéger les militants de l’opposition.

« La semaine avant mon départ du Togo, ma femme n’a dit que des individus suspects s’étaient présentés à mon domicile en mon absence », a ajouté Ahou.

« J’ai eu si peur que j’ai amené ma famille chez mes beaux-parents au village. A mon retour, le dimanche, j’ai constaté que ma maison a été saccagée. Alors j’ai vraiment compris que je figurais sur une liste noire et j’ai fui pour refuge au Bénin ».

La vie n’est pas facile à Lomé, a indiqué Ahou. « On surveille tout le monde. Il suffit que tu sortes la nuit et, pour une raison ou pour une autre, tu peux te faire kidnapper, agresser ou battre à mort ».

Un sentiment de peur qui persiste

Malgré les assurances données par le nouveau gouvernement du président Faure Gnassingbe d’aider et de garantir la sécurité des personnes qui retourneront au Togo, seuls quelques-uns des 38 000 réfugiés installés au Bénin et au Ghana au cours des dix dernières semaines sont revenus chez eux.

Comme Ahou, de nombreux autres réfugiés togolais sont récemment arrivés dans les camps du HCR du Bénin, mais les forces de sécurité et des miliciens continuent de poursuivre les opposants au président Gnassingbe.

Agé de 39 ans et diplômé des écoles de commerce françaises et américaines, le nouveau président a été élu le 24 avril. Il succède à son père défunt, Gnassingbe Eyadema, un militaire qui a dirigé le Togo pendant 38 ans.

Mais selon l’opposition, le scrutin présidentiel a été entaché d’irrégularités et la proclamation des résultats à donné lieu à de violentes manifestations politiques.

D’après une organisation des droits de l’homme proche de l’opposition, près de 800 personnes ont trouvé la mort pendant les manifestations de rues organisées par les militants de l’opposition en colère et après la répression des forces de sécurité.

Bien que le calme soit revenu au Togo, le sentiment de peur persiste.

Selon le HCR, très peu de réfugiés sont retournés au Togo par crainte des représailles.

Rien qu’au mois de juin, plus 3 000 nouveaux réfugiés sont arrivés au Bénin et au Ghana, précise le HCR.

Au total, 38 942 réfugiés togolais ont été enregistrés, 23 221 vivant actuellement au Bénin, et plus de 15 000 au Ghana.

A en croire le HCR, 62 pour cent de ces réfugiés sont hébergés chez des parents ou des amis. Les autres vivent dans des camps. Le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) a lancé cette année un appel de fonds de 1 million de dollars pour le financement de programmes d’éducation, d’assainissement et de soins médicaux pendant 18 mois, en faveur de 8 000 enfants togolais vivant dans des familles ghanéennes.

Le nouveau gouvernement exhorte les réfugiés à rentrer

Le retour des réfugiés est un des points importants de la plate-forme de gouvernement présenté le week-end dernier par le nouveau Premier ministre, Edem Kodjo.

« Le gouvernement s’attellera à résoudre la douloureuse question des réfugiés », a déclaré le Premier ministre le 2 juillet en présentant son programme de gouvernement à l’Assemblée nationale.

Le Premier ministre a également promis de nouvelles lois et mesures « pour aider les togolais à transcender le passé et à aller au-delà de leurs récriminations pour tenter de recréer l’harmonie et retrouver un destin commun ».

Pour promouvoir la réconciliation nationale, Kodjo a affirmé qu’il comptait lutter contre le sentiment de méfiance qui existe entre le peuple togolais et l’armée qui, pendant des décennies, a étroitement été contrôlée par le clan Eyadema.

Mais l’appel du Premier ministre aux réfugiés ne semble pas avoir eu un écho favorable auprès des 8 000 Togolais vivant dans les camps de réfugiés d’Agamé et de Comé, dans le sud-ouest du Bénin.

« Nous avons appris sur les ondes que le Premier ministre Edem Kodjo a déclaré qu’il va négocier le rapatriement des réfugiés. Mais comme moi je suis poursuivi, je en peux pas rentrer maintenant », a indiqué Denis Amouzou, un agent commercial de 30 ans.

Kodjovi Sipokpé a 26 ans. Il est imprimeur et vivait à Hedjranahoue, un quartier de Lomé. Selon lui, il a fait partie de la garde rapprochée du leader de l’opposition Gilchrist Olympio. « Moi je ne peux même pas approcher la frontière, a plus forte raison la traverser », a-t-il fait remarquer.

Blandine Wakesso, 20 ans, élève en classe de première, affirme avoir représenté l’opposition dans un bureau de vote. Mais après la proclamation des résultats du scrutin qui, selon l’opposition, a été entaché d’irrégularités, elle a érigé des barricades et jeté des pierres aux forces de l’ordre.

« Avec ce gouvernement, , je ne peux pas retourner au Togo. De toutes les façons, nous voulons le changement », a-t-elle déclaré.

Pour certains collaborateurs de Gnassingbe, de nombreux réfugiés ont choisi d’aller dans les camps parce qu’on y distribue des vivres gratuitement ou pour une hypothétique demande d’asile et une vie plus confortable aux Etats-Unis ou en Europe.

Selon Fatima Issifou, représentante du HCR au camp de réfugiés d’Agamé, de nombreux jeunes parmi ceux qui ont fui le Togo après les combats de rues contre les forces de l’ordre ont, en effet, tenté de convaincre le HCR de les envoyer vivre en Europe.

« Il n’y a pas un jour où je ne reçois pas une vingtaine de jeunes demandant si le HCR peut les aider à rejoindre un frère ou ami en Europe », a-t-elle indiqué.

Mais dans les consulats de France, d’Allemagne et des Etats-Unis, à Cotonou, la capitale du Bénin, les autorités consulaires soulignent qu’il n’y a pas eu d’augmentation significative du nombre de demandes de visa, au cours de ces dernières semaines.

De nombreux réfugiés pensent que, après quatre décennies de pouvoir autoritaire de Gnassingbe père, il y a très peu de chance que leur vie s’améliore sous le régime du fils, soutenu par l’armée.

« J’ai sacrifié toute ma vie ; nous avons de tout temps vécu dans la médiocrité. Mieux vaut essayer de refaire sa vie ailleurs », a confié Kuami Affagnon, 25 ans, qui était venu solliciter l’intervention du HCR pour rejoindre son frère en Italie.


La nomination de Kojo, un sabotage, selon Me Yaovi Agboyibo

(AngolaPress 01/07/2005)

La nomination de M. Edem Kojo au poste de Premier ministre du Togo "est un acte de sabotage du processus (dunion nationale), a déclaré, jeudi à Cotonou, lopposant togolais, Me Yaovi Agboyibo, président du Comité daction pour le renouveau. Dans un entretien accordé à la PANA en marge du Forum des partis politiques, médias et Société civile sur la consolidation de la démocratie en Afrique de lOuest démarré mardi à Cotonou, Me Agboyibo a indiqué que cet acte de sabotage remet en cause le processus initié par les chefs dEtat de la CEDEAO lors de la rencontre dAbuja.

Cette nomination bouleverse totalement les données et il nest pas question de baisser les bras, a martelé lopposant togolais, précisant que le dialogue préconisé par les chef dEtat à Abuja et qui devait déboucher sur la formation dun gouvernement dunion nationale doit se poursuivre. M. Edem Kojo, à qui le chef de lEtat nigérian aurait personnellement déconseillé daccepter loffre du camp présidentiel, a choisi de saboter le processus, installant, selon Me Agboyibo, le Togo dans une "situation bancale" plus tragique que celle de février dernier, quand Faure Gnassingbé avait pris le pouvoir à la mort de son père.

"Cest inacceptable et nous ferons ce qui est de notre devoir pour en arriver au dialogue et à la paix", a conclu lavocat.

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Un responsable de l’opposition dénonce la position de la Cedeao dans le processus politique

(Xinhuanet 29/06/2005)

LOME,(XINHUANET) — Le secrétaire exécutif de la Coalition de l’opposition togolaise Jean-Pierre Fabre a dénoncé la position de la Cedeao dans le processus politique au Togo et a indiqué que les populations ouest-africaines devaient être impliquées dans de "sérieuses résolutions" et apprendre à prendre leur destin en main, a-t-on appris mardi de BBC.

"Ce qui s’est passé au Togo a été planifié et exécuté par la Cedeao instrumentalisée par une puissance coloniale", a déclaré M. Fabre qui assistait à Cotonou au Bénin à un forum des partis politiques, des médias et de la société civile des pays de l’Afrique de l’ouest avec la participation du Tchad et du Cameroun.

"Je tiens à rendre responsable la Cedeao de la mort de centaines de Togolais et du départ en exil de plusieurs milliers d’autres", a-t-il ajouté, disant qu’il faut qu’on tire les " conséquences de ce qui s’est passé" au Togo pour que plus jamais cela ne se répète.

M. Fabre a estimé qu’au delà des dénonciations il faut des résolutions sérieuses en impliquant les populations togolaises et dans une large mesure les populations ouest-africaines et à les sensibiliser à prendre leur destin en main.

Il a résumé sa participation à ce forum en une présence pour informer davantage les acteurs politiques, les médias et la société civile de l’Afrique de la situation politique au Togo et des événements qui se sont succédés depuis le décès le 5 février dernier du président Gnassingbé Eyadèma après un règne de 38 ans.

Qualifiant de "tragédie" le processus qui a abouti à l’élection de l’actuel président togolais Faure Gnassingbé, Jean-Pierre Fabre a indiqué qu’une "telle accumulation de faits graves, une telle succession de faits graves ne peut être imputée à de la négligence, à de la légèreté ou au hazard". Fin

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La presse juge le nouveau gouvernement

Source www.republicoftogo.com

26/6/2005

Les journaux togolais ont largement commenté cette semaine la formation du gouvernement du Premier ministre Edem Kodjo, le premier sous le régime du président Faure Gnassingbé (photo) élu le 24 avril.

Selon l’hebdomadaire "La Matinée", en réussissant à former un gouvernement d’union nationale, "Faure et Edem Kodjo ont gagné la bataille mais pas la guerre".

"Il reste la guerre qui consiste à mettre en oeuvre le programme de société du président Faure Gnassingbé", ajoute le journal, soulignant que l’absence des figures de proue de l’opposition
radicale doit plutôt être perçue comme un garde-fou.

"La Dépeche" estime pour sa part que le président Faure Gnassingbé a tenu sa promesse en faisant entrer dans le gouvernement quatre membres de l’opposition radicale.

"Le Point de la Semaine" souligne que le nouveau gouvernement "est loin d’être d’union nationale, mais sa composition peut rassurer plus d’un sur ses aptitudes à dépasser les querelles de bas étage et à se remettre au service général".

"Liberté Hebdo" soutient que ce gouvernement est "en déphasage criard avec le peuple", estimant que "l’équipe pléthorique de Edem Kodjo est une véritable mangeoire qui permettra à chacun de savourer un temps les délices du pouvoir".

"Ce n’est pas un gouvernement d’union nationale, mais un gouvernement d’union familiale et amicale", ajoute le journal.

"Comment peut-on expliquer la présence d’hommes et de femmes qui n’ont jamais eu de poste de responsabilité mais qu’on bombarde au sein d’une équipe gouvernementale sensée relever des défis très capitaux ? ", s’interroge l’hebdomadaire "Forum de la Semaine".

Le journal affirme que dans ce gouvernement "il y a des noms qui font froid dans le dos".


Entretien entre M. Philippe Douste-Blazy et M. Edem Kodjo, nouveau Premier ministre togolais (25 juin 2005)

Déclarations du Porte-parole du Quai d’Orsay
(Paris, 27 juin 2005)

Le ministre des Affaires étrangères, M. Philippe Douste-Blazy, s’est entretenu avec le nouveau Premier ministre togolais, M. Edem Kodjo, le samedi 25 juin. Cet entretien a été l’occasion de faire le point sur les derniers développements de la crise que le Togo vient de traverser.

Le Premier ministre, qui rentrait de Bruxelles, a confirmé sa volonté de reprendre le plus rapidement possible le processus de mise en œuvre des engagements souscrits par le Togo auprès de l’Union européenne. A cet égard, M. Philippe Douste-Blazy a fait part à son interlocuteur de l’appui de la France pour que le Togo puisse retrouver toute sa place au sein de la communauté internationale.


Togo-Union Européenne : A quoi sert la reprise de la coopération avec Bruxelles...

LETOGOLAIS.COM - 27/06/2005

Le nouveau chef du gouvernement togolais ne perd pas de temps. A peine investi de ses attributs, il annonce la couleur et fixe la priorité des priorités de son agenda : la reprise de la coopération avec l’UE. Un objectif qui apparaît désormais comme un des facteurs-clés du marchandage qui a déterminé son retour aux affaires. Seulement, la problématique qui a sous-tendu la mise au ban du pouvoir togolais par Bruxelles demeure entière, avec la circonstance aggravante de la farce électorale qui vient de se dérouler dans le pays. Le ralliement à la dictature a malheureusement un prix et il va falloir le payer.

Par Franck Essénam EKON

On s’est énormément creusé la tête ces derniers jours pour s’expliquer les raisons qui ont motivé la nomination d’Edem KODJO comme Premier ministre du Togo. Dérive provocatrice du clan au pouvoir ou conséquence de l’interventionnisme des réseaux françafricains ? Chacun y allait de sa petite conjecture pour essayer de comprendre. Même si ces tentatives d’explication sont loin d’être fictives, les déclarations du chef du gouvernement togolais lors de sa visite à Bruxelles en milieu de semaine offrent des pistes intéressantes pour aborder la question. « Nous estimons que le gouvernement formé aujourd’hui est un gouvernement qui devrait permettre à l’UE de dire qu’il y a des pas en avant et de hâter la reprise de la coopération, sinon de la reprendre immédiatement », proclame M. KODJO pour lever les dernières zones d’ombre sur l’objet de sa mission. Quelques jours seulement après sa prise de fonction, on aurait tort de banaliser ces propos. Ils éclairent d’une lumière particulièrement vive, l’axe principal du chantier confié au nouveau gouvernement. La normalisation des relations avec Bruxelles, synonyme d’ouverture du robinet de l’aide financière européenne est le principal enjeu de ce cahier de charge. Elle est certainement la monnaie d’échange qui a fait pencher la balance en faveur de la soudaine pôle position « accordée » au ticket KODJO dans la course à la primature et scellé le sort des négociations entre les partis de la coalition de l’opposition avec la bande au pouvoir.

L’empressement du Premier ministre de Faure Gnassingbé à demander la reprise de la coopération ne peut se comprendre qu’en tenant compte du fait que ses prises de position depuis quelques années allaient déjà dans ce sens au grand dam des autres formations politiques de l’opposition. En avril 2004, il s’était lourdement invité comme « sparing partner » des 22 engagements conclus entre l’UE et le gouvernement togolais, officialisant un retour sur la scène politique nationale après quasiment un an de « retrait volontaire ». Cette période peut, objectivement, être considérée comme marquant le point de départ du renouveau des relations entre le nouveau Premier ministre et le clan au pouvoir. Alors que les consultations entre l’Union européenne et le gouvernement peinaient à démarrer véritablement et qu’un scepticisme unanime avait gagné les esprits quant à une réelle volonté du pouvoir de donner les gages sincères d’une ouverture politique, le tandem Kodjo-Ayéva monta en première ligne pour défendre avec bec et ongles les « acquis du dialogue » et fustiger par la même occasion l’irrédentisme du reste de l’opposition...C’est, du reste, cette idylle qui aurait dû être concrétisée vers la fin du mois de février 2005 par la nomination de Kodjo comme chef du gouvernement si le Général Eyadéma n’avait pas eu la mauvaise idée de rendre l’âme trop vite. C’est apparemment l’épilogue de ce projet que les Togolais connaissent aujourd’hui. Et c’est le nouveau Premier ministre lui-même qui le reconnaît : « Les engagements ont reçu un début d’exécution impeccable jusqu’à la mort du président Eyadéma. Les troubles que nous avons connus depuis le 5 février n’ont pas permis d’ »avancer dans leur application », souligne-t-il comme pour signifier la fin de l’inopportune parenthèse ouverte par le raz-de-marée populaire exprimé en faveur du changement au Togo lors des élections présidentielles d’avril dernier. « Nous sommes venus signaler que nous sommes prêts à reprendre le processus », poursuit-il dans son plaidoyer de la semaine dernière à Bruxelles, un processus, qui dans sa terminologie n’aurait donc jamais dû être interrompu et dont les troubles survenus dans le pays ont différé l’apothéose naturelle, à savoir son intronisation à la tête du gouvernement.

Il apparaît ainsi clairement que les raisons pour lesquelles la reprise de la coopération est réclamée aujourd’hui n’ont rien à voir avec le respect des grands principes démocratiques au Togo. A preuve, avant même d’avoir pris en charge la gestion de la complexe problématique post-électorale, l’épineuse question des 40.000 togolais réfugiés de part et d’autre des frontières du pays et surtout le problème du dialogue entre le pouvoir et l’opposition dite « radicale », le patron du nouveau gouvernement file à Bruxelles pour demander une normalisation pourtant conditionnée par des exigences dont il connaît bien la teneur. La situation politique au Togo en juin 2005 est-elle meilleure à celle qui prévalait avant le décès de Gnassingbé-père ? Des élections libres démocratiques et transparentes ont-elles eu lieu dans le pays ? Dans cette espèce de géographie de la terreur et d’espace de non-droit est-il permis de croire que la question du déficit démocratique (et celle connexe de l’irrespect accentué des droits de l’homme) est solutionnée ? Le nouveau chef du gouvernement a tout l’air de répondre à ces questions par l’affirmative. Le plus inquiétant dans cette situation, c’est le caractère emphatique de ses projections candides dans un contexte qu’il connaît à merveille. Il ne s’agit, par conséquent, pas d’un noviciat mais d’une sorte de slalom en terrain connu. Déduction : l’enjeu de la reprise de la coopération avec Bruxelles, comme du vivant d’Eyadéma, s’inscrit toujours dans une optique d’orgueil et de fanfaronnade pour la bande au pouvoir et il s’est agi de miser sur un porte-voix qui correspond à ces standards.

L’unique et pathétique argument mis en avant aujourd’hui pour demander à l’UE de reconsidérer sa position sur le Togo, c’est la mise sur pied d’une équipe gouvernementale majoritairement truffée de membres et associés du Rassemblement du peuple togolais( parti au pouvoir) et la « ferme conviction » de réaliser les réformes souhaitées par Bruxelles. Un bien maigre dossier de défense pour celui qui est supposé être une pointure de la persuasion. Le comportement du camp présidentiel à la souscription des 22 engagements en 2004 ne laisse subsister aucune illusion sur le sort qui leur est réservé. Vanter, comme le fait le nouveau Premier ministre leur « mise en œuvre impeccable » avant le 5 février est un artifice rhétorique que ses interlocuteurs de la commission apprécieront. Les parlementaires européens, eux ne s’y sont pas trompés en soulignant le 12 mai dernier que tout ce qui s’est passé dernièrement au Togo « ne répond pas aux engagements préalables à la reprise de la coopération ».

Le respect des termes du « contrat » est décidément mal engagé dans ces conditions puisque l’insupportable réalité d’une répression aveugle est venue se greffer sur une réputation bien établie de régime politique obtus que traîne le pouvoir togolais depuis des années. Les vrais artisans de l’obscurantisme au Togo (le clan Gnassingbé et ses prolongements militaires) étant toujours en place avec la même conception de la direction des affaires du pays, il eut été plus décent de poser des actes concrets allant dans le sens voulu par la majorité des togolais avant de se livrer à ce triste numéro de séduction à l’égard de la Commission européenne. Alors même que l’illégitimité (dans tous les sens du terme et sans exception) des actuels dirigeants du Togo recommande un minimum d’humilité dans les postures, le chef du gouvernement vient de présenter ce que sera certainement la trajectoire de son équipe sur le chemin de la reconstruction de champ de ruines qu’est devenu le pays : cécité volontaire sur les tares internes du clan au pouvoir et rejet des responsabilités sur des causalités externes. Il faut s’attendre donc aux sempiternelles imprécations sur l’anti-patriotisme de l’opposition radicale insensible à la main tendue du pouvoir. On entendra aussi bientôt la rengaine habituelle sur la nécessité qu’a le Togo « d’aller à la démocratie à son propre rythme »...pendant que chasse à l’homme et assassinats politiques se poursuivent.

Avec le passif qui est celui de la bande aux commandes du Togo aujourd’hui, et au vu du traitement réservé aux engagements souscrits il y a un an, on comprend que Bruxelles fasse montre d’une telle circonspection face au cas togolais. Une vigilance qui n’a visiblement que faire des contrats secrets qui ont été passés entre les mains avides qui se sont partagé le pays.

La rédaction le togolais.com


Togo-Gouvernement : Retour en grâce des « bannis »

LETOGOLAIS.COM - 24/06/2005

Le pouvoir a fait son marché à la bonne adresse : celle de ceux qui, tapis dans l’ombre, n’attendaient que la première occasion pour resurgir des oubliettes dans lesquelles leurs turpitudes les avaient relégués. Les « vieilles connaissances » qui célèbrent leur come-back ministériel ces temps-ci, ne sont pourtant que la partie visible de l’iceberg. Dans les conseils d’administration des lucratives sociétés d’Etat ou encore les ambassades du Togo à l’étranger, une nuée d’artisans confirmés ou occasionnels de la dictature s’apprêtent à fondre sur un butin qu’il estiment avoir contribué à sauvegarder.

Par Franck Essénam EKON

Pascal Akoussoulelou BODJONA, précédemment ambassadeur du Togo aux Etats-Unis, peut se frotter les mains et exhiber fièrement son embonpoint comme signe évident de la bonne marche de ses affaires. Le ministère des affaires étrangères lui était destiné mais il se « contentera » du poste de directeur de cabinet de Faure Gnassingbé au lendemain du scandaleux scrutin présidentiel qui a eu lieu fin avril dans le pays. Une promotion probablement due au zèle débordant de celui qui après avoir laissé de tristes souvenirs dans les esprits lorsqu’il dirigeait des milices proches du pouvoir sur le campus universitaire de Lomé, s’est fait quelque peu oublier ces derniers temps. Fanatique aux limites du concevable, son départ du Togo est intervenu dans un contexte où feu Eyadéma, après avoir sécurisé son règne, cherchait à aseptiser une déplorable image internationale en se débarrassant d’éléments encombrants de son acabit. Son discours pendant la campagne électorale n’a rien à envier à celui des caciques du régime comme l’ancien ministre de la communication Pitang TCHALLA par exemple. Le retour en grâce de ces anciens fonctionnaires de la terreur au Togo traduit avec une vibrante clarté la logique affichée dans ce que l’on ose nommer pompeusement le nouveau mode de gestion des affaires nationales.

Dossouvi et ses amis étudiants qui ont expérimenté en 1990 les talents de tortionnaire du colonel Laokpessi ont certainement cru rêver en entendant le nom de cet officier qui aura été de toutes les campagne de matraquage de tous les réseaux de l’opposition dans le pays.
Et pourtant, c’est bien de lui qu’il s’agit. Dans sa clairvoyante dynamique de modernisation du pouvoir politique au Togo, le nouveau pouvoir n’a rien trouvé de mieux que de faire appel à un personnage qui a toujours figuré en bonne place dans tous les rapports publiés à l’époque par la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), la Ligue togolaise des droits de l’homme ou encore AMNESTY international. C’est entre les mains de cet homme que le pouvoir remet les clés de la sécurité au Togo. Limogé par Eyadéma lui-même en 1990, il retrouve aujourd’hui son domaine de prédilection qui est la planification de la répression. C’est ce module qui l’a rendu célèbre sous le règne du défunt dictateur, c’est celui-là qui lui permettra de verrouiller le pouvoir du fils. Sa nomination comme ministre de la sécurité est, dans tous les cas, un signal important pour les Togolais qui savent qu’avec un client de ce calibre, les choses sont claires désormais.

A l’orée de son règne, c’est visiblement sur ce capital de terreur que la clique au pouvoir cherche à établir les fondations d’une légitimité usurpée. En rameutant la fine fleur des bannis des années 1990, l’idée est peut-être de se servir des traumatismes de ces années de larmes et de deuil pour conjurer les germes de la contestation. Et au besoin, les vieilles méthodes peuvent toujours servir face aux entêtés. Comment comprendre autrement cette résurgence d’un passé si traumatique pour les togolais ? La démarche est quasi-dogmatique dans les arcanes du Rassemblement du peuple togolais(RPT, le parti au pouvoir) : clamer les vertus du dialogue tout en installant aux postes-clés des hommes qui y sont absolument réfractaires. L’ombre inquiétante des autres dignitaires piaffant d’impatience sur le banc de touche ne constitue pas exactement un facteur d’optimisme pour les partisans d’un changement au Togo. Tout ce monde revendique une part du butin présidentiel. Du général d’armée aux membres influents du parti en passant par les petites frappes sorties de l’anonymat pendant la campagne électorale, une longue file d’attente se forme dans la perspective de la kermesse qui se déroule en ce moment.

Dans les juteuses sociétés d’Etat, le tocsin sonne déjà et avant même d’avoir été nommés, plusieurs francs-tireurs de la mascarade qui a amené Faure Gnassingbé au pouvoir arborent les insignes de leur future promotion. Reconnaissance oblige, et la charité bien ordonnée commençant par soi-même, l’armée et le parti au pouvoir seront les premiers servis. Les « associés » de l’opposition modérée devront au mieux attendre les restes de ce festin. La formation du gouvernement confirme cette vision des choses puisque le RPT s’est réservé la quasi-totalité des grands ministères laissant aux transfuges de l’opposition des portefeuilles de gala comme au bon vieux temps. Nul doute que dans les prochains jours, les « oubliés » du gouvernement investiront les conseils d’administrations et les directions générales de ces sociétés pour perpétuer ce qu’ils appellent eux-mêmes « les habitudes de la maison ».

Joseph Kokou Koffigoh, lui n’y croyait presque plus. Ancien Premier ministre au début des années1990, il se voit catapulter à la tête d’une intrigante Commission nationale d’enquête sur les exactions ayant eu lieu lors du scrutin présidentiel d’avril dernier. Lorsqu’on connaît le destin de ces commissions au Togo, on se doute bien que le « soldat Koffigoh » saura mériter la confiance que ses mandataires ont placée en lui. Il a lui aussi montré du vivant du Général Eyadéma qu’en dépit de son idylle passée avec l’opposition, le parti au pouvoir pouvait compter sur lui pour des missions de cette envergure. Accusé journellement sur les médias d’Etat d’avoir vidé les caisses du trésor public pendant qu’il était chef du gouvernement(1991-1994), il fait aujourd’hui partie de ces revenants dont les togolais pensaient ne plus jamais entendre parler, tant leur nom est associé au symbolisme de la consolidation du régime du défunt dictateur.

Mais c’est majoritairement dans les représentations diplomatiques togolaises à l’étranger que la bataille fait le plus rage. Ici aussi les maîtres d’œuvre de l’intronisation de Faure Gnassingbé se mettent en rang pour occuper le terrain. Si certains savent depuis longtemps dans quelle capitale ils poseront leurs valises, de nombreux autres font le pied de grue devant Lomé 2( résidence présidentielle) pour exiger les dividendes des « efforts consentis ». Pendant ce temps les actuels pensionnaires des ambassades scrutent avec angoisse la météo des humeurs du nouveau maître du Togo...Il sera toujours temps de faire les cartons.

La rédaction letogolais.com


Offensive de charme. Edem Kodjo plaide la fin des sanctions

LE SOIR 23.06.2005

Quelques heures après avoir formé son gouvernement « d’union nationale », le nouveau Premier ministre togolais, Edem Kodjo était à Bruxelles, ce mercredi, pour demander à l’Union européenne de lever les sanctions économiques imposées au Togo depuis 1993.

Bien que l’UE continue à financer certains « programmes d’appui décentralisé au bénéfice direct des populations », Edem Kodjo estime qu’il s’agit là d’un compromis insuffisant. Il fait valoir que la plupart des 22 engagements pris par le Togo en avril 2004 afin de régulariser le déficit démocratique du pays ont reçu des mises en exécution tout à fait remarquables depuis l’arrivée au pouvoir de Faure Gnassingbé Eyadéma. Ce dernier a été élu président le 26 avril à l’issue d’une élection controversée, qui a poussé 22.290 Togolais à se réfugier au Bénin, selon le Haut Commissariat pour les réfugiés de l’ONU.

L’accord de 2004 prévoyait aussi la tenue d’élections législatives. Or, l’Assemblée n’a toujours pas été dissoute. Bien qu’Edem Kodjo exprime le désir de tenir des élections le plus vite possible, aucune date n’a encore été fixée. Selon Comi Toulabor, directeur de recherche à la Fondation nationale des sciences politiques de Bordeaux, le gouvernement d’Edem Kodjo n’est qu’une façade. Concernant la reprise du financement centralisé, il est plutôt en faveur du statu quo. Cet argent-là, c’est pour faire la fête ! Si l’UE accepte, une tranche de ce montant partira en France pour financer les partis politiques pro-régime tandis qu’une autre sera investie dans les paradis fiscaux. A la fin, il ne restera plus rien pour les Togolais.

J.L. (St.)


Des Togolais continuent de fuir au Bénin

Carine Frenk, RFI [23/06/2005]

Deux mois après l’élection présidentielle contestée du 24 avril, des Togolais continuent de fuir leur pays pour trouver refuge au Bénin. De sources officielles, le bilan des violences post-électorales au Togo s’établit à plusieurs dizaines de morts. Selon la Fédération internationale des droits de l’Homme, il y a eu plusieurs centaines de tués. Une commission internationale d’enquête s’est rendue sur place. Son rapport est attendu.

Selon le Haut commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR), plus de 37 000 personnes ont fui le Togo pour le Bénin et le Ghana depuis le 26 avril, date de la proclamation des résultats de la présidentielle qui donnait le fils du général Eyadema, Faure Gnassingbé, vainqueur avec plus de 60% des voix. Officiellement, l’ordre est rétabli depuis longtemps à Lomé. Pourtant des centaines de jeunes togolais continuent de fuir leur pays et, ceux qui l’ont quitté, refusent de rentrer chez eux.
Notre envoyée spéciale Carine Frenck est allé à leur rencontre dans les 2 camps de réfugiés togolais du Bénin.


Quel avenir pour le Togo, 2 mois après l’élection présidentielle ?

France Inter

(Reportage réalisé à la suite de la conférence de presse organisée par Survie le 15 juin, pour la présentation de son Rapport sur les élections au Togo : Avril 2005. Le choix volé des Togolais.)

Chronique du 23 juin 2005, 7h15 que vous pouvez écouter sur le site de France Inter :

http://www.radiofrance.fr/chaines/f...

Quel avenir pour le Togo, 2 mois après l’élection présidentielle du 24 avril dernier ? Faure Gnassingbé, le fils du général Eyadéma, a proclamé sa victoire, alors que l’opposition togolaise crie au hold-up électoral et se bat depuis 2 mois pour faire respecter le verdict des urnes, la victoire du candidat de l’opposition Bob Akitani. Une situation explosive.

Le général Eyadéma avait régné d’une main de fer sur le Togo pendant près de 40 ans. A sa mort, le 5 février dernier, son fils Faure Gnassingbé, prend le pouvoir. Sous la pression internationale, il doit démissionner. Mais pour mieux reprendre ce pouvoir de façon illégale. L’ensemble des observateurs présents aux Togo lors de la présidentielle du 24 avril décrivent en effet un scrutin complètement truqué.

Benjamin Préciado, membre du comité de soutien au peuple togolais ... a suivi le déroulement de l’élection sur place.
Toutes les communications ont été coupées lors du scrutin. Le bureau de contrôle informatique mis en place par l’opposition a été saccagé.

Sans compter le vol d’urnes ou le vote d’étrangers comme ont pu le constater Sirima Ardiouma, envoyé sur place par l’association « Survie » et Izidore Latzoo, le président du comité togolais de résistance.

L’opposition togolaise conteste le résultat des élections et dénonce également des représailles. Siméon Clumson, le vice-président de la Ligue togolaise des droits de l’Homme parle de 811 morts et de plus de 4 500 blessés entre le 5 février et le 5 mai. Il décrit des opposants à Faure Gnasingbé systématiquement traqués. Dans ce climat de « chasse à l’homme », plusieurs milliers de Togolais ont choisi la fuite vers les pays voisins, le Bénin ou le Ghana. L’ancien secrétaire d’Etat à l’intégration, Kofi Yamgane, franco-togolais, était dans la région il y a quelques jours pour constater l’étendue des dégâts. Benoît Collombat l’a joint alors qu’il venait de quitter le Bénin pour le Burkina-Faso.

Et la France dans tout ça ? Elle n’est évidemment pas étrangère à cette situation. A la mort du général Eyadéma, Jacques Chirac avait salué un « ami personnel ». Dans un premier temps, la France a donné le sentiment de laisser clairement la voie libre à Faure Gnassingbé. L’ancien ministre des affaires étrangères, Michel Barnier, avait même parlé d’un déroulement « satisfaisant » du scrutin, avant d’affirmer plus diplomatiquement : « il n’y aura pas d’ingérence » de Paris au Togo.

Sauf qu’on touche là au domaine réservé de l’Elysée. Siméon Clumson de la Ligue des droits de l’Homme et Izidore Latzoo du comité togolais de résistance réclament le droit de pouvoir décider de leur destin. Alors, quelle sortie de crise possible ?

Un gouvernement d’union nationale a été formé mardi dernier mais il est rejeté par la majeure partie de l’opposition. Le blocage est donc total et commence à sérieusement inquiéter certains chefs d’état africain. Ce n’est sûrement pas un hasard si le président gabonais, Omar Bongo, pilier de la « Françafrique », rencontre Jacques Chirac, demain, à Paris. Et pour cause ! Des élections sont prévues d’ici la fin de l’année au Gabon, sachant que les précédents scrutins gabonais n’avaient pas vraiment été des modèles de démocratie ! Pour tenter de dénouer la crise togolaise, Kofi Yamgane, joint par Benoît Collombat à son retour en France, annonce qu’il souhaite fédérer l’ensemble des mouvements d’opposition togolais. Mettre sur pied d’ici la rentrée prochaine un « Solidarnosc » à la togolaise.

Une enquête de Benoît Collombat.


Fidèles de Gnassingbe et déserteurs de l’opposition dominent le nouveau gouvernement

LOMÉ, le 22 juin (IRIN) - Le Premier ministre Edem Kodjo a présenté son nouveau gouvernement, dominé par des proches du père du président Faure Gnassingbe, qui avait gouverné le Togo pendant 38 ans, et des déserteurs de la coalition d’opposition.

La composition du gouvernement de Kodjo, qui compte 30 membres, a été annoncée sur la chaîne de télévision nationale lundi soir. Politicien d’expérience, Kodjo a occupé la fonction de Premier ministre au milieu des années 1990, sous la présidence de feu Gnassingbe Eyadema, le père de l’actuel président.

Le frère aîné de Gnassingbe, Kpatcha Gnassingbe, a été nommé ministre de la Défense. Il s’agit d’une fonction clé au Togo, où l’armée, dominée par le groupe ethnique Kabiye, dont est issu la famille Eyadema, a depuis toujours maintenu les Eyadema au pouvoir.

Kpatcha Gnassingbe dirigeait auparavant la zone franche industrielle de Lomé. Il est connu pour avoir des liens étroits avec l’armée.

Autre figure clé du nouveau gouvernement : le Colonel Pitalouna-Ani Laokpessi, commandant de la gendarmerie dans les années 1990, qui a été accusé à maintes reprises par l’opposition de torturer les prisonniers politiques. Il fait aujourd’hui ses débuts au sein du gouvernement en tant que ministre de la Sécurité.

Gnassingbe a été élu président en avril, à l’issue d’un scrutin controversé, qualifié de frauduleux par l’opposition. L’élection avait suivi la mort soudaine d’Eyadema, deux mois auparavant, alors que celui-ci était encore au pouvoir.

Olusegun Obasanjo, chef d’Etat du Nigeria et actuel président en exercice de l’Union africaine (UA), a tenté en vain de convaincre Gnassingbe et Gilchrist Olympio, leader en exil de l’opposition, de former un gouvernement d’union nationale afin de guider le Togo vers une nouvelle ère de réforme démocratique.

En fin de compte, la coalition des six partis de l’opposition a en grande partie été mise à l’écart du nouveau gouvernement en faveur des fidèles du parti au pouvoir, le Rassemblement du peuple togolais (RPT) - qui détient la majorité des sièges à l’Assemblée nationale - et d’une poignée de déserteurs de l’opposition.

« Il n’y a aucun membre du bureau national de l’Union des forces de changement (UFC) dans le gouvernement. Si un membre de l’UFC est dans cette équipe, alors il y est à titre personnel », a déclaré Jean Pierre Fabre, secrétaire général de l’UFC, le principal parti de l’opposition, en faisant allusion à la nomination de Gabriel Sassouvi Dosseh-Anyroh, membre de l’UFC, comme ministre de la Culture et du Tourisme.

Pour sa part, Yawovi Agboyibo, leader du Comité d’action pour le renouveau (CAR) et coordinateur officiel de la coalition d’opposition, a accusé Tchessa Abi, le leader du Pacte socialiste pour le renouveau (PSR), d’avoir abandonné la coalition pour devenir ministre de la Justice.

« Depuis le 6 juin, il me dit en termes clairs que son parti ne se reconnaît plus dans la coalition », a déclaré à IRIN Agboyibo.

Agboyibo s’est également dissocié d’Agnele Christine Mensah, une ancienne membre du CAR, son propre parti, qui a été nommée secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Population, des Affaires sociales et de la Promotion féminine.

« Mensah a quitté le CAR en 1998. Elle n’est plus, à présent, qu’une représentante de la société civile ! », a déclaré le leader de l’opposition.

Selon les résultats officiels, Gnassingbe a obtenu 60 pour cent des voix à l’issue de la présidentielle du 24 avril, contre 38 pour cent pour Emmanuel Bob-Akitani, le candidat de l’opposition unifiée.

L’annonce des résultats a été suivie d’une flambée de violence politique qui a contraint plus de 36 000 habitants à se réfugier au Ghana et au Bénin, des pays voisins.

Bien qu’Obasanjo ait pu organiser deux réunions entre Gnassingbe et Olympio à Abuja, la coalition a refusé d’accepter la victoire électorale de Gnassingbe et de faire partie d’un gouvernement d’union nationale avant que de nouvelles élections ne soient organisées.

Gnassingbe, dont l’élection a été validée par l’UA et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a rejeté catégoriquement les demandes de l’opposition.

Le porte-parole officiel du président ne s’est pas exprimé mardi au sujet du nouveau gouvernement.

Néanmoins, Richard Atippoe, membre du comité central du RPT, le parti au pouvoir, a exprimé un optimisme mesuré.

« C’est une bonne chose que le gouvernement ait été formé et nous espérons que cela débloquera la situation », a déclaré Atippoe. « Quant à la composition du gouvernement, je dirai ceci : c’est en contemplant son travail qu’on peut juger de l’habileté de l’artisan ».

Les diplomates occidentaux, qui avaient cessé de soutenir le gouvernement de Gnassingbe père pour protester contre l’absence de démocratie et la mauvaise gouvernance au Togo, ont accueilli avec réserve le nouveau gouvernement.

« Bien sûr la plupart des membres du gouvernement sont des fidèles d’Eyadema, mais il y a assez de nouveaux arrivés pour que l’on puisse espérer un progrès », a déclaré un diplomate à IRIN.

« Mais tout dépend des pouvoirs réels du Premier ministre au sein de ce gouvernement », a-t-il averti. « Nous verrons avec le temps. »

Le Premier ministre Kodjo devra en premier lieu tenter de convaincre les réfugiés qui ont fui vers le Togo et le Bénin qu’ils ne seront plus en danger chez eux.

Les réfugiés affirment avoir fui par peur des persécutions et du harcèlement des forces de sécurité, toutefois le gouvernement a rejeté ces allégations à plusieurs reprises.

Les autorités maintiennent que la plupart des réfugiés ont fui pour des raisons économiques ou bien par peur d’être arrêtés pour vandalisme.

Le gouvernement togolais a établi une commission chargée de déterminer les causes des violences qui ont suivi l’élection.

Mais lundi, la Ligue togolaise des droits de l’homme (LTDH), une organisation proche de la coalition, a déclaré avoir refusé de faire partie de la commission.

Togoata Ayayi Apedo-Amah, le secrétaire général de la LTDH a déclaré : « Nous ne pouvons pas faire partie de cette commission, créée par Faure Gnassingbe. Nous avions demandé une commission d’enquête indépendante et internationale. Cette commission n’est pas indépendante. Qui plus est, beaucoup de ses membres sont des proches du gouvernement. »

« Parmi les personnes nommées pour en faire partie, huit sur dix ont des liens avec la dictature militaire », a-t-il poursuivi.

La commission est dirigée par Joseph Kokou Koffigoh, Premier ministre sous Eyadema, qui avait mené une première tentative de réforme démocratique au début des années 1990.

Apedo-Amah s’est insurgé : « Les victimes ne pourront pas parler librement si elles craignent d’être livrées aux soldats ! »

Selon les estimations de la LTDH, 810 personnes ont trouvé la mort pendant la flambée de violence post-électorale. Une autre organisation de défense des droits de l’homme, proche du gouvernement, annonçait quant à elle un total de 58 morts.

La commission a un délai de trois mois pour remettre ses conclusions, qui seront rendues publiques.

Quant à la commission des Nations unies chargée d’enquêter sur les violences post-électorales, elle a terminé vendredi dernier une enquête qui avait duré deux semaines.

Son rapport sera soumis à Louise Arbour, Haut Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, avant d’être rendu public, dans les semaines à venir.

© Copyright IRIN


Refugiés : Les Togolais refusent toujours de retourner chez eux

(Le Togolais.com 22/06/2005)

AGAME, sud-ouest du Bénin, 18 juin (IPS) - ’’Je ne peux plus retourner chez moi au Togo jusqu’à ce que les choses changent au sommet de l’Etat’’, confie à IPS Koffi Kodjo (un surnom), qui se trouve dans un camp de réfugiés d’Agamé, dans le sud-ouest du Bénin voisin.

Kodjo a fui son pays, comme beaucoup d’autres Togolais, après les violences post-électorales survenues à la suite des manifestations de contestation de la victoire de Faure Gnassingbé au scrutin présidentiel du 24 avril.

Kodjo, 30 ans environ, qui enseignait dans la ville d’Aného, frontalière avec le Bénin, s’est enfui après avoir reçu une balle dans la jambe. ’’C’est au Bénin ici que j’ai été soigné, j’ai fui avec la balle dans la jambe’’, témoigne-t-il à IPS, montrant le point de la blessure.

Agée d’une vingtaine d’année, Ama Amavi (un surnom), affirme également, elle, avoir perdu son mari dans les violences. ’’Il a été tué par une balle perdue devant moi et mes enfants’’, dit-elle à IPS, en pleurant. Elle rejette aussi toute idée de retour au Togo. Selon elle, si les gens continuent par arriver dans le camp d’Agamé, c’est la preuve que la situation n’est pas calme.

Kokou Koffi (un surnom), 30 ans, est nouvellement arrivé du Togo. Il a indiqué à IPS avoir quitté le pays sans sa famille. ’’J’ai fui à la suite de l’arrestation d’un ami médecin accusé à tort d’avoir soigné des manifestants de l’opposition lors des violences’’.

Ces réfugiés vivent dans deux camps, sous des tentes offertes par le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Le HCR indique que le Bénin accueille actuellement 21.000 réfugiés togolais, dont presque la moitié sont des enfants. Plus d’une centaine serait arrivée encore cette semaine.

Malgré la situation inconfortable dans laquelle ils vivent dans ces camps, la plupart des réfugiés rencontrés par IPS ne souhaitent plus rentrer au Togo, du moins pas pour le moment.

’’Je me suis décidé à partir quand j’ai appris que le ministre de l’Intérieur par intérim a déclaré qu’ils vont poursuivre les arrestations’’, a dit à IPS, Serge Léon (un surnom), un étudiant de 20 ans à l’université de Lomé, réfugié à Comé, une localité béninoise.

Katari Foli-Bazi, le ministre de l’Intérieur par intérim, a rejeté ces accusations devant la presse, le 7 juin : ’’Nous sommes désolés..., nous ne pouvons pas les arrêter’’. Selon lui, ’’Les vrais coupables de violences et atrocités, pendant le processus électoral, doivent être arrêtés et punis conformément aux lois en vigueur’’.

Mais, pour Togoata Apédo-Ama, secrétaire général de la Ligue togolaise des droits de l’Homme (LTDH), cette assurance apparente fait partie de la stratégie de terreur du régime en place au Togo. Puisque, dit-il, des militaires rodent dans les quartiers, la nuit, autour des maisons des gens supposés proches de l’opposition.

’’Les gens partent encore vers le Bénin et le Ghana parce qu’ils sont inquiétés et les Togolais n’ont plus de recours, ni de protection, et donc, la solution c’est de fuir vers l’étranger’’, a affirmé Apédo-Ama à IPS.

Selon lui, des Togolais viennent quotidiennement par dizaines se plaindre à la LTDH qu’ils sont menacés par des milices du parti au pouvoir ou par des militaires qui rodent autour de leurs domiciles.

Une affirmation contestée par le Mouvement togolais pour le défense des libertés et des droits de l’Homme (MTDLDH). Claude Vondoly, le président du MTDLDH, estime que les gens se disent menacés dès qu’un de leurs proches est interpellé pour des interrogatoires à la police.

’’Dans la plupart des cas, ces personnes sont relaxées après avoir été interrogées par la police dans la cadre des enquêtes’’, a souligné Vondoly, proche du pouvoir, qui reconnaît toutefois qu’il y a eu des actes de violences avec une chasse à l’homme, et des règlements de compte après les élections. ’’Cette situation a touché des partisans du pouvoir comme ceux de l’opposition qui se sont réfugiés à l’intérieur du Togo et à l’étranger’’.
Les nouvelles autorités ont créé un ’’Haut commissariat aux rapatriés et à l’action humanitaire’’, qui, selon un décret signé du nouveau président Gnassingbé, est chargé notamment de collecter tous les éléments d’information sur les réfugiés togolais, les rapatriés et les personnes déplacées, et de mobiliser les ressources nécessaires pour leur venir en aide.

Au Bénin, la situation des réfugiés n’est pas du tout enviable dans les camps de Comé et d’Agamé, a constaté IPS sur place. ’’Ceux qui partent savent que la vie dans les camps n’est pas facile, mais comme ils ont peur pour leur vie, ils sont obligés d’y aller’’, explique Apédo-Ama.

’’Afin de répondre aux besoins des réfugiés, le gouvernement du Bénin et la coordination humanitaire de l’ONU ont lancé, le 13 mai dernier, un appel d’urgence pour une aide humanitaire’’, indique le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies, dans un communiqué. ’’À ce jour, aucune réponse n’a été donnée à la procédure d’appel global’’, ajoute le texte.

’’Ils nous faut de l’aide et si les réfugiés continuent à venir, nous pourrions avoir des problèmes de gestion de l’espace et des épidémies’’, a dit à IPS, Epiphane Yélomé, coordinateur de la fédération de la Croix-Rouge à Agamé.

L’Allemagne a offert plus de 300.000 euros (369.000 dollars) pour assurer l’approvisionnement des réfugiés togolais en matériels de première nécessité dont des médicaments, des vêtements, des couvertures, des ustensiles de cuisine. Ce don concerne également les mesures sanitaires et logistiques, et la fourniture d’eau potable.

’’C’est largement insuffisant pour faire face à la situation’’, a déclaré Catherine Harding, membre du HCR au Bénin, indiquant que l’institution attendait toujours de l’aide de généreux donateurs.

Selon le HCR, plus de 35.000 personnes se sont réfugiées dans les pays voisins du Togo tandis que plus d’un millier d’autres se sont déplacées à l’intérieur du pays.

A l’intérieur, certains déplacés rejettent également toute idée de retour à Lomé, la capitale ou dans d’autres grandes villes togolaises.

Adjovi Komlan, la trentaine, accompagnée de son enfant de trois ans, raconte avoir perdu toute trace de son mari depuis les troubles d’avril à Lomé. ’’Nous étions dans notre quartier quand les violences ont commencé et depuis, je n’ai plus de ses nouvelles’’. Prise de peur, elle s’est réfugiée à Hahotoé, son village natal situé à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de la capitale.

En ce jour (6 juin) de distribution de vivres par différentes structures locales appuyées par le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Adjovi s’est présentée très tôt dans la matinée devant la chapelle de l’église de la localité, dans l’espoir d’obtenir le nécessaire pour survivre.

Accueillie par sa famille dans le village, Adjovi n’entend pas y rester sans rien faire, parce qu’elle ne veut surtout pas constituer un poids pour ses parents déjà vieux. ’’Mon souhait, c’est d’avoir un peu d’argent pour faire un petit commerce ici’’, dit-elle, excluant tout retour à Lomé. ’’Avec ce que j’ai vu là-bas, je ne compte plus retourner pour y vivre’’.

Pour venir en aide aux personnes déplacées les plus vulnérables, notamment celles qui ont perdu leur toit et d’autres biens, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et la Croix-Rouge togolaise ont entamé, le 9 juin dans une vingtaine de localités, une distribution d’articles non alimentaires - nattes, pagnes, savon, seaux et ustensiles de cuisine.

Selon le CICR, cette assistance touche environ 5.000 déplacés dans la région centrale du pays, et elle devra s’étendre, dans les prochains jours, à plus d’un millier de déplacés dans une autre région du pays. (FIN/2005)

Par Noël Kokou Tadégnon

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De nouvelles vagues de réfugiés togolais affluent vers le Bénin

(Xinhuanet 22/06/2005)

LOME,(XINHUANET) — De nouveaux réfugiés togolais continuent d’affluer vers le Bénin, augmentant le nombre de près de 22 500 déjà enregistré par le Haut commissariat aux réfugiés depuis les violences qui ont émaillé le scrutin présidentiel du 24 avril au Togo, a-t-on appris mardi de BBC.

Le Chargé de protection pour le HCR au Bénin, M. Mamadou Balde qui a confirmé cet afflux, a nuancé cependant que le flux a sensiblement diminué par rapport aux premiers temps, notamment les périodes d’après le 26 avril.

Il a évalué de 30 à 50 le nombre de Togolais qui arrivent par jour au Bénin, ajoutant que les conditions dans les camps ne sont pas idéales.

Selon M. Baldé, ces nouvelles vagues de réfugiés déclarent, dans certains cas, qu’ils continuent à faire face à des exactions, et dans d’autres, qu’ils avaient rencontré des difficultés à quitter leur pays et avaient dû trouver refuge à l’intérieur du Togo.

Ces déplacements de Togolais s’effectuent au moment où la Commission nationale d’enquête sur les violences venait de donner le coup d’envoi de son travail et qu’une mission de l’Onu est arrivée au Togo déjà pour enquêter sur ces mêmes violences.

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Togo : la composition du gouverment Edem Kodjo

Edem Kodjo, Tchessa Abi, Kpatcha Gnassingbé, Zarifou Ayéva, Jean-Lucien Savi de Tové, Me Loreta Mensah Akuété, Kokouvi Dogbé , Gilbert Kodjo Atsu....Le premier gouvernement du fils du dictateur Eyadéma, Faure Gnassingbé , compte 30 ministres (22 nouveaux, 8 anciens). Ces personnages sont la plupart issus du parti unique le Rassemblement du Peuple Togolais et ses partis satellites : la Convergence patriotique panafricaine (CPP), le Parti pour la démocratie et le renouveau (PDR), le Pacte socialiste pour le renouveau (PSR), le Nouvelle Dynamique populaire (NDP), ect... Pour les Togolais la clarification entre les traîtres, les collabos et les véritables combattants de la liberté continue....

LE NOUVEAU GOUVERNEMENT TOGOLAIS DU 20 JUIN 2005

 Premier ministre, chef du gouvernement : Edem Kodjo
 Ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et de l’Intégration africaine : Zarifou Ayéva (nouveau)
 Ministre d’Etat, ministre de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche : Charles Kondi Agba (changement de poste)
 Ministre des Enseignements primaire et secondaire : Komi Klassou (inchangé)
 Ministre de l’Environnement et des Ressources forestières : Issifou Okoulou-Kantchati (changement de poste)
 Ministre du Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat : Jean-Lucien Savi de Tové (nouveau)
 Ministre de la Communication et de la Formation civique : Kokou Tozoun (changement de poste)
 Ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation : Katari Foli-Bazi (inchangé)
 Garde des sceaux, ministre de la Justice : Tchessa Abi (nouveau)
 Ministre de la Santé : Mme Suzanne Aho, épouse Assouma (inchangé)
 Ministre de l’Economie, des Finances et des Privatisations : Payadowa Boukpessi (nouveau)
 Ministre de la Sécurité : Colonel Pitalouna-Ani Laokpessi (nouveau)
 Ministre des Droits de l’Homme, de la Démocratie et de la Réconcilation : Me Loreta Mensah Akuété (nouvelle)
 Ministre du Développement et de l’Aménagement du territoire : Yendja Yentchabré (nouveau)
 Ministre de la Jeunesse et des Sports : Agouta Ouyenga (inchangé)
 Ministre des Relations avec les institutions de la République : Comlangan Mawutoè d’Almeida (inchangé)
 Ministre de la Population, des Affaires sociales et de la Promotion féminine : Docteur Kangni Sokpo Diallo (nouveau)
 Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche : Professeur Fidèl Comlan Mensah Nouboukpo (nouveau)
 Ministre de l’Equipement, des Transports et des Postes et Télécommunications : Kokouvi Dogbé (nouveau)
 Ministre de la Ville : Marc Aklessou Akitèm (nouveau)
 Ministre du Travail, de l’Emploi et de la Fonction publique : Yves Mado Nagou (nouveau)
 Ministre des Mines, Energie et Eau : Kokou Solété Agbémadon (nouveau)
 Ministre de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle : Antoine Agbéwanou Edoh (nouveau)
 Ministre de la Culture, du Tourisme et des Loisirs : Gabriel Sassouvi Dosseh-Anyroh (nouveau)

MINISTRES DELEGUES
 Ministre délégué à la présidence de la République, chargé de la Défense et des Anciens combattants : Kpatcha Gnassingbé (nouveau)
 Ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé du secteur privé et du développement de la zone franche : Idrissa Dermane (nouveau)
 Ministre délégué auprès du ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et de l’Intégration africaine, chargé de la coopération : Gilbert Bawara (nouveau)
 Ministre délégué auprès ministre d’Etat, ministre de l’agriculture et de l’élevage et de la pêche, chargé de l’hydraulique villageoise : Kasségné Adjonou (nouveau)

SECRETAIRES D’ETAT
 Secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Population, des Affaires sociales et de la Promotion féminine, chargé de la protection de l’enfant et des personnes âgées : Mme Agnélé Christine Mensah (nouvelle)
 Secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Jeunesse et des Sports, chargé de la promotion des jeunes : Gilbert Kodjo Atsu (nouveau)


Violences lors de l’élection présidentielle au Togo : la commission d’enquête à l’oeuvre

(Xinhuanet 21/06/2005)

La Commission nationale spéciale d’enquête, chargée de faire la lumière sur les violences survenues lors de l’élection présidentielle du 24 avril, a donné lundi le coup d’envoi de son travail et promis de faire preuve de "rigueur" et d’"impartialité" dans la gestion de ce dossier.

"Nous promettons la rigueur et l’impartialité dans la gestion de ce dossier, car il nous revient de déterminer notamment les circonstances de ces violences", a déclaré lors d’une conférence de presse, le président de la Commission, Joseph Kokou Koffigoh, dont la nomination à la tête de cette commission a été critiquée et diversement commentée.

"Nous ferons un travail approfondi, afin de déterminer les causes de ces violences", a-t-il précisé, lançant un appel aux partis politiques, à la société civile, aux administrations et aux chefs traditionnels à apporter leur concours à ce travail.

La Commission nationale d’enquête doit diligenter des investigations en vue de déterminer les circonstances des actions faites de violences et de vandalisme".

Elle aura aussi à évaluer les préjudices subis par l’Etat et toute autre victime et faire entreprendre des poursuites judiciaires contre les auteurs et les commanditaires présumés.

Joseph Kokou Koffigoh a annoncé que la Commission se rendra dans les localités théâtres de violences et visitera les Togolais, estimés à plus de 20 000, qui se sont réfugiés au Bénin et au Ghana.

Le rapport de la Commission sera "rendu public" au bout d’une durée de trois mois de travail.

Le 26 avril, les résultats provisoires de la présidentielle, donnant vainqueur Faure Gnassingbé, fils du président Gnassingbé Eyadéma décédé le 5 février, avait déclenché une vague de graves violences à travers le territoire togolais.

Le bilan de ces violences, qui ont commencé depuis le 5 février avec aussi le jour du scrutin le 24 avril, est présenté avec beaucoup d’écart selon les sources gouvernementales, des organisations de la société civile et de l’opposition togolaise. Fin

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Togo : des membres de l’opposition entrent au gouvernement

LOME (AFP) - mardi 21 juin 2005 - 9h14 -

Le gouvernement togolais du Premier ministre Edem Kodjo, comprenant des ministres de l’opposition, dont un d’une petite formation de l’opposition radicale, le Pacte socialiste pour le renouveau (PSR), a été constitué lundi, a annoncé la télévision nationale, citant un décret présidentiel.
Ce premier gouvernement du nouveau président togolais Faure Gnassingbé, élu le 24 avril lors d’un scrutin présidentiel controversé, compte 30 ministres (22 nouveaux, 5 gardant leurs portefeuilles et 3 qui changent de poste).

Le gouvernement de M. Kodjo, lui-même président d’une formation de l’opposition modérée, la Convergence patriotique panafricaine (CPP), est notamment marqué par l’entrée de l’avocat Tchessa Abi, président d’un des six partis de l’opposition radicale, à la Justice et de Zarifou Ayéva, président du Parti pour la démocratie et le renouveau (PDR, l’un des principaux partis de l’opposition modérée), nommé ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et de l’Intégration africaine.

Le bâtonnier de l’ordre des avocats togolais, Me Loreta Mensah Akuété intègre l’équipe gouvernementale comme ministre des Droits de l’Homme, de la Démocratie et de la Réconcilation. Plusieurs membres du Rassemblement du peuple togolais (RPT, ex-parti unique), au pouvoir depuis près de quarante ans, font partie de ce gouvernement, élargi à l’opposition et à la société civile. La coalition de l’opposition dite "radicale", emmenée par l’Union des Forces de Changement (UFC, de l’opposant historique Gilchrist Olympio) avait demandé le 27 mai à M. Gnassingbé, fils du président Gnassingbé Eyédama décédé le 5 février, de désigner le Premier ministre dans "ses rangs".

M. Gnassingbé, favorable à la constitution d’un gouvernement d’union nationale, avait rejeté "catégoriquement" les propositions de cette coalition pour la formation d’un tel gouvernement. L’un des autres fils du général Eyadéma, Kpatcha Gnassingbé, fait également son entrée dans ce gouvernement au poste de ministre délégué à la Présidence de la République, chargé de la Défense et des Anciens combattants. Plusieurs autres personnalités proches de l’opposition sont également nommés dans ce gouvernement qui compte trois femmes contre cinq dans l’ancienne équipe gouvernementale de M. Koffi Sama, en place depuis juin 2002. L’opposition modérée avait fait savoir qu’elle était favorable à une participation au gouvernement.

M. Kodjo avait promis de constituer avec M. Gnassingbé, un gouvernement d’union nationale "le plus large possible". M. Gnassingbé avait lancé l’idée d’un gouvernement d’union nationale, avant l’élection du 24 avril. Un sommet avait réuni, le 19 mai, à Abuja (Nigeria), l’opposition et le pouvoir togolais sous l’égide de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) et de l’Union africaine (UA).

Gilchrist Olympio avait réaffirmé vendredi à Paris, où il vit en exil, que l’UFC, ne ferait pas partie du gouvernement sans un "dialogue" préalable et un accord sur les conditions de sa participation. Il avait souhaité la formation d’un "gouvernement de transition, chargé de préparer les scrutins à venir, et non un gouvernement d’union nationale" pour appliquer un "cahier des charges", avec notamment une révision constitutionnelle, et d’une durée de vie entre 6 et 18 mois. M. Gnassingbé avait été élu avec 60,15% des voix contre 38,25% au candidat de la coalition de l’opposition radicale, Emmanuel Akitani Bob, premier vice-président de l’UFC.


CRISE TOGOLAISE : La Ltdh accuse Chirac

(Sud Quotidien 16/06/2005)

Le vice président de la Ligue togolaise des droits de l’homme (Ltdh) Siméon Clumson, a accusé hier dans une conférence presse organisée à Paris, le président français Jacques Chirac d’être derrière la crise qui secoue actuellement le Togo.

« Tout ce que nous faisons, tout ce qui se passe au Togo ou en Afrique, est téléguidé de la France par le président Jacques Chirac. Les racines du mal qui rongent le Togo sont en France », a affirmé Siméon Clumson, au cours de la conférence initiée par l’association "Survie", qui vient de publier un rapport sur les élections au Togo intitulé « Avril 2005 : le choix volé des Togolais ».

Le vice-président de la Ltdh a en outre accusé l’Union Africaine d’avoir commis « une grave erreur » et d’avoir « décrédibilisé les institutions panafricaines » en apportant sa caution au régime de Faure Gnassigbé. Siméon Clumson a indiqué enfin, que la déclaration du président en exercice de l’Union africaine, Olusogun Obansajo, qui a affirmé être en étroite relation avec la France sur la situation au Togo, démontre la connivence et l’implication de la France dans la crise au Togo.

Le vice-président de la Ltdh a invité les dirigeants politiques français, à faire pression sur Chirac et à mieux l’informer sur la situation au Togo.

(Pana) -


TOGO : Deux semaines pour faire la lumière sur les présumés actes de violation des droits de l’homme

N A T I O N S U N I E S
Bureau de Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA)
Réseaux d’Information Régionaux Intégrés (IRIN)

LOMÉ, le 15 juin (IRIN) - Six enquêteurs ont été dépêchés au Togo par Louise Arbour, le Haut commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, pour vérifier le bien-fondé d’allégations portant sur les meurtres, la torture, les enlèvements et les persécutions politiques qui auraient suivi le scrutin controversé d’avril.

La délégation, qui compte entre autres un expert médico-légal, a ouvert lundi dernier une enquête de deux semaines. Elle prévoit de rencontrer des représentants du gouvernement, des partis politiques, des réfugiés, des victimes présumées ainsi que « toute personne désirant lui parler », a déclaré un des membres à IRIN.

Plus de 36 000 personnes, craignant pour leur vie, ont fui le Togo depuis les élections présidentielles du 24 avril. Sept semaines plus tard, plus de 50 Togolais fuient quotidiennement vers le Bénin voisin, selon l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR).

Les réfugiés prétendent que les personnes suspectées de soutenir l’opposition sont encore aujourd’hui enlevées et torturées, a déclaré le HCR.

Une source diplomatique a indiqué à IRIN que la délégation de l’ONU avait été envoyée, à la demande de l’Union africaine (UA) et de la communauté internationale, pour enquêter et faire la lumière sur les violences politiques présumées, qui auraient fait des douzaines voire des centaines de morts, ainsi que d’autres violations des droits de l’homme.

La situation politique est extrêmement tendue dans ce petit pays d’Afrique de l’Ouest à l’issue d’un scrutin que l’opposition considère comme frauduleux et qui avait confirmé la passation des pouvoirs présidentiels de Gnassingbe Eyadema, décédé après 38 ans au pouvoir, à son fils Faure Gnassingbe.

Dans un communiqué, la délégation de l’ONU déclare vouloir « reconstituer les événements qui ont conduit aux violations présumées des droits de l’homme » entre le 5 février, jour du décès de Eyadema, et le 5 mai, date à laquelle son fils lui a officiellement succédé.

Gnassingbe, 39 ans, ex-homme d’affaires formé aux Etats-Unis et ex-membre du Conseil des ministres, subit les pressions constantes des chefs d’Etat de la région, qui souhaitent que le Togo comble ses lacunes démocratiques. Le nouveau président a aussi demandé une enquête nationale sur les violences provoquées par le scrutin qui lui a permis d’accéder au pouvoir.

La commission d’enquête togolaise, qui doit remettre ses conclusions dans un délai de trois mois, est dirigée par Joseph Kokou Koffigoh, un ex-Premier ministre, avocat et défenseur des droits de l’homme. La commission doit déterminer les circonstances des violences, évaluer les pertes et poursuivre en justice les responsables.

Cette commission comprend dix membres, parmi lesquels les représentants de deux associations togolaises des droits de l’homme ; l’une évaluant le nombre de décès causés par les violences post-électorales à 58, et l’autre à 790.

La délégation de l’ONU devrait rencontrer les membres de la commission togolaise, a déclaré, de Genève, un porte-parole du Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme.

Les enquêteurs de l’ONU voyageront à travers le pays, ainsi qu’au Bénin et au Ghana voisins pour rencontrer des réfugiés. Ils s’entretiendront sous peu avec Edem Kodjo, le Premier ministre récemment nommé, un modéré qui avait assumé brièvement ces fonctions au milieu des années 90, sous Eyadema.

Une des premières tâches de Kodjo sera de superviser le Haut commissariat national aux réfugiés et à l’action humanitaire, une instance créée récemment et destinée à rapatrier les exilés.

Le gouvernement de Faure Gnassingbe a exhorté les réfugiés à revenir, promettant aux militants de l’opposition « d’être graciés et, à terme, dédommagés ».

Alors qu’un petit pays comme le Bénin se débat pour contenir le flot des réfugiés, la communauté internationale a fait la sourde oreille aux appels lancés pour aider les 21 640 togolais qui ont fuit dans les camps ou chez des proches.

Plus de quatre semaines après avoir demandé 5,95 millions de dollars américains, le Bureau pour la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) a déclaré mardi de ses bureaux de New York qu’« une fois encore, l’appel des Nations unies pour résoudre une crise africaine n’a pas suscité un intérêt substantiel de la part des bailleurs internationaux ».


Une mission du Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme attendue au Togo

(Xinhuanet 14/06/2005)

LOME,(XINHUANET) — Une mission du Haut Commissariat des Nations Unies aux Droit de l’Homme attendu lundi au Togo, indique lundi la presse indépendante locale, citant un communiqué de cette institution.

Mise sur pied par le Haut Commissariat aux Droits de l’Homme, Louise Arbour, cette mission vient enquêter sur des allégations de violations des droits de l’homme qui se seraient produites au Togo entre le 5 février et le 5 mai de cette année. Ses investigations devraient durer deux semaines.

Dirigé par l’expert des droits de l’homme, Doudou Diène, et composé des fonctionnaires en la matière ainsi que de médecins légistes, la mission devra évaluer la question des droits de l’homme avec le déroulement des élections présidentielles du mois d’avril dernier, vérifier les informations relatives aux violations de ces droits et rassembler les informations sur les responsables, précise la presse indépendante locale citant toujours le communiqué du Haut Commissariat.

L’équipe des enquêteurs rencontrera des responsables gouvernementaux ainsi que des représentants de la société civile, et s’entretenir avec des témoins et d’autres personnes dont les droits auraient été violés, notamment les réfugiés togolais au Bénin et au Ghana voisins.

Rappelons que le président élu du scrutin du 24 avril dernier Faure Gnassingbé a déjà mis sur pied une commission nationale d’enquête sur des violences meurtrières qui ont émaillé cette période électorale. Fin

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Togo : Le retour des réfugiés, une équation que tente de résoudre le nouveau pouvoir

LOME, 11 juin (XINHUANET)

Selon le Haut Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés (HCR), plus de 19.000 Togolais ont trouvé asile au
Bénin tandis qu’un peu plus de 10.000 ressortissants du même pays se sont exilés au Ghana, depuis fin avril dernier suite aux violences post-électorales qui ont ensanglanté et secoué le Togo, résultats d’un mouvement de protestation contre la victoire de Faure Gnassingbé au scrutin présidentielle du 24 avril dernier.

ls ont fui leur bercail pour se mettre à l’abri des menaces qui pesaient alors sur leur vie. Mais deux semaines après cet exode massif, les autorités issues de ce scrutin présidentiel ont appelé leurs ressortissants à revenir au pays, alléguant que la sécurité y a été restaurée. Le régime en place a, par la même occasion, fustigé les témoignages de certains réfugiés qui, un peu plus tard, sont arrivés aux frontières des deux pays voisins, se prévalant encore d’une situation d’insécurité pour justifier leur exil.

Selon ces témoignages, des Togolais continueraient de faire l’objet de la chasse à l’homme, de sévices de tout genre et d’intimidation. Bref, leur sécurité serait menacée, d’après ces dires.

Les autorités en place à Lomé ont vu dans ces allégations une certaine instrumentalisation de la question des réfugiés togolais et n’ont pas tardé à prendre certaines mesures d’apaisement dont la mise en palce d’une commission naitonale d’enquête chargée de faire la lumière sur les événements douleureux de l’avant et de l’après 24 avril, afin d’établir les responsabilités, mais aussi d’accorder des réparations aux victimes, tant du côté des partisans du pouvoir que de l’opposition.

Sans attendre les résultats de cette enquête, le gouvernement, à travers les affaires sociales, a déjà fait des gestes compatissants àl’endroit de certains sinistrés : distribution de vivres et autres produits de première nécessité.

Politiquement parlant, en attendant des réparations significatives pour les victimes de tous bords, les nouvelles autorités togolaises ont fait face au défi de rassurer leurs compatriotes, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur.

D’abord à l’intérieur, le pouvoir en place doit parvenir à
convaincre les Toglais restés au pays en dépit des événements post-électoraux que le pire a été évité et que le présent et le lendemain se promettent à la quiétude, afin de les empêcher de rêver d’un exil : cela suppose l’accélération de la prise et de la mise en oeuvre des mesures d’apaisement et de restauration de la confiance entre dirigeants et administrés et de la cohésion entre les différentes compsantes politiques du pays, notamment entre partisans du vainqueur de la présidentielle du 24 avril dernier et ceux de la Coalition de l’opposition radicale perdante.

A l’extérieur, le pari à gagner va procéder d’un rapatriement des réfugiés. Un processus difficile, puisqu’il faut assurer des citoyens qui ont échappé au fait post-électoral que la paix et la sécurité sont rétablies dans leur pays d’origine.

C’est certainement pour s’être rendu compte de la délicatesse et de la difficulté de cette opération que le régime en place à Lomé a créé un haut commissariat national aux réfugiés et à l’action humanitaire susceptible de mettre fin au malheureux feuilleton du phénomène des réfugiés togolais apparu au lendemain du 24 avril dernier. Mais il faut agir vite.


Edem Kodjo, un Premier ministre sans transition

Les Togolais ont appris sans grande surprise le contenu du décret signé par Faure Gnassingbé, que le ministre de la Communication est venu lire à la télévision mercredi soir : « Edem Kodjo est nommé Premier ministre ». La veille, le chef de l’Etat avait opposé une fin de non-recevoir catégorique aux revendications de la Coalition de l’opposition. Celle-ci réclamait un « gouvernement transitoire d’unité nationale » dirigé par un Premier ministre issu de ses rangs, pour apurer le passif politico-militaire de ces dernières décennies et préparer de futurs scrutins incontestables. Faure Gnassingbé refuse et campe sur ses positions présidentielles. Edem Kodjo a mission de composer un « gouvernement d’union nationale », pour tourner la page de la contestation en évitant tout véritable changement.

« Réconciliation » est le maître mot d’Edem Kodjo. C’est déjà la tâche qu’il avait accepté d’accomplir pour Gnassingbé Eyadema, en 1994. L’année précédente, les bulletins à son effigie de présidentiable étaient restés dans les urnes, finalement boycottées par l’opposition. Edem Kodjo portait alors son flambeau, du moins celui d’une partie des opposants. Chef d’un parti d’opposition de forte audience, le Comité d’action pour le renouveau (Car), l’avocat Yawovi Agboyibo, ne s’était en effet pas résigné à s’effacer devant Edem Kodjo. Mais au final, Gnassingbé Eyadéma seul en lice avait conservé son fauteuil présidentiel, sa garde prétorienne réduisant en charpie les dernières velléités d’indépendance du Premier ministre sorti de l’opposition, Kokou Koffigoh, et de l’Assemblée nationale multicolore. Avec Edem Kodjo, Premier ministre de 1994 à 1996, Gnassingbé père avait alors retrouvé la tranquillité de la « démocratie apaisée », celle où aucune tête d’opposant ne dépasse. Aujourd’hui, Gnassingbé fils demande au même Edem Kodjo de rééditer l’entreprise, dans des circonstances somme toute analogues et avec une classe politique à peine recomposée.

Au début des années quatre-vingt-dix, la petite « Suisse de l’Afrique » avait, à la surprise quasi-générale, vu des foules de manifestants braver le pouvoir militarisé de Gnassingbé Eyadéma. Quelques militaires courageux étaient même venus en pleurs s’expliquer sur leurs exactions passées devant une Conférence nationale à la souveraineté rapidement bafouée. Le vent avait quand même menacé de tourner pour le parti unique, le Rassemblement du peuple togolais (RPT), dont Edem Kodjo fut l’un des pères fondateurs et le secrétaire général, de 1969 à 1971. Mais outre la mémoire des morts tombés au champ de l’espoir démocratique, il reste surtout de cette époque un pluralisme politique en trompe-l’œil, avec, comme arrière-goût amer pour les partisans du changement, le souvenir des ratages à répétition de l’opposition face aux recettes éculées du pouvoir. Cette fois, c’est le dernier acte de la succession de Gnassingbé Eyadema qu’il s’agit de régler.

Agboyibo moque un Premier ministre « d’ouverture à qui veut »

Après les trop nombreux morts et les innombrables départs en exil provoqués par la présidentielle du 24 avril dernier, Edem Kodjo veut « tout mettre en œuvre pour que le pays retrouve sa sérénité ». Le nouveau Premier ministre va donc former un gouvernement « d’ouverture à qui veut », selon le mot de maître Agboyibo, le coordinateur de la Coalition de l’opposition, qui se déclare « consterné ». Reste, dit-il, la plate-forme revendicative de l’opposition. Elle a le mérite d’exister et même d’avoir permis de tester la bonne volonté du pouvoir qui vient de la rejeter par deux fois, en bloc mardi et en détail mercredi, avec la nomination d’un Premier ministre à l’écart de la Coalition. En travaillant à l’élaboration de ce document, la Coalition a pu aussi « se faire une idée claire sur ce qu’il y a lieu d’entreprendre pour mettre le pays sur les bons rails », explique Martin Aduayom, le numéro deux de la Convention des peuples africains (CDPA). L’opposant ajoute qu’il n’est pas question « d’aller à la soupe, ni même de saisir une main tendue », celle d’Edem Kodjo en l’occurrence. Ce qui compte, c’est le contenu et les objectifs de l’hypothétique concertation.

Edem Kodjo, préside aujourd’hui une formation politique baptisé Convergence patriotique panafricaine (CPP), après avoir conquis un fauteuil de député à Lomé, sous les couleurs de son ancien parti, l’Union togolaise pour la démocratie (UTD). Edem Kodjo n’est pas indifférent à la sémantique. Comme intellectuel et comme diplomate, nul doute qu’il aspire à voir gommer les épines de son pays pour lui donner meilleure figure. Diplômé de l’Ecole nationale d’administration française (ENA), ancien administrateur de l’Office de radiodiffusion et télévision français (ORTF), il a aussi été gouverneur au Fonds monétaire international (FMI), entre 1967 et 1973, gouverneur de la Banque africaine de développement (BAD) entre 1973 et 1976 et même secrétaire général de l’Organisation de l’unité africaine (OUA, l’ancêtre de l’Union africaine), de 1978 à 1983. Ministre de l’Economie en 1973 et chef de la diplomatie togolaise en 1976, toujours sous Eyadéma, Edem Kodjo enseignait (depuis 1983) l’économie du développement, à la Sorbonne parisienne quand l’appel d’air démocratique a fait vibrer le Togo. Son CV officiel de nouveau Premier ministre laisse un blanc, entre 1991 et 1994, date de sa première expérience en la matière.

Edem Kodjo vient de célébrer son soixante-septième anniversaire. Il est né le 23 mai 1938 à Sokodé, à quelque 380 kilomètres au nord de Lomé. Le destin ne lui a pas compté les honneurs. Mais s’il peut effectivement être présenté comme un homme de consensus, c’est surtout à l’extérieur, à Paris par exemple où en 1993, il se plaisait à laisser croire qu’il était le candidat alternatif de la diplomatie française, face à Eyadéma. Dix ans plus tard, les résultats officiels de la présidentielle de 2003 lui donnaient 0,96% des suffrages. Il ne s’est pas représenté en avril dernier, soutenant en revanche l’idée de gouvernement d’union nationale soutenue par l’UA et retenue par Faure Gnassingbé.

Edem Kodjo succède à Koffi Sama, en poste depuis juin 2002. Entre temps, Gnassingbé Eyadéma est mort, le 5 février dernier. Son fils Faure s’est imposé, manu militari d’abord, dans un scrutin contesté ensuite. Cela a suscité quelques froncements de sourcils internationaux imposant de renouer un dialogue. Le problème, c’est le contenu politique du projet de réconciliation nationale d’Edem Kodjo. Pour ou contre le changement des modes de gouvernement en vigueur ces quatre dernières décennies, autrement dit, pour ou contre la perspective d’une possible alternance politique ? Telle est la question.

Monique Mas
Article publié le 09/06/2005


Le président de l’Union africaine refuse la nomination d’un médiateur pour la crise du Togo

(Xinhuanet 07/06/2005)

LAGOS,(XINHUANET)

Le président de l’Union africaine (UA) , Olusegun Obasanjo, également président du Nigeria, a rejeté la nomination d’un médiateur dans la crise du Togo, affirmant que cela n’était pas nécessaire puisque toutes les parties avaient accepté de former un gouvernement d’union nationale, a indiqué lundi sa porte-parole.

M. Obasanjo a refusé la nomination de l’ancien président kenyan Kenneth Kaunda comme médiateur de l’UA mais cela ne veut pas dire qu’il y ait une crise ou une scission au sein du bloc de 53 membres, a déclaré à l’agence Xinhua la porte-parole, Remi Oyo.

Selon les informations, M. Obasanjo a déclaré vendredi à Lomé, capitale du Togo, que la nomination annoncée par le président de la Commission de l’UA, Alpha Oumar Konaré, avait été faite sans qu’il soit consulté.

Les médias ont rapporté que M. Obasanjo était furieux et qu’il refusait de devenir un président ratificateur, laissant entendre qu’une crise menaçait l’UA.

"Ce n’est rien", a déclaré Mme Oyo, "Ceux qui veulent voir une crise là-dedans ne souhaitent pas la réussite de l’Afrique", a-t- elle ajouté.

Le Togo a sombré dans une crise début février suite à la mort du président Gnassingbé Eyadema qui avait dirigé le pays pendant 38 ans. Son fils avait été désigné chef d’Etat par l’armée puis avait été contraint de se retirer pour participer à une élection en avril.

Faure Gnassingbé a remporté l’élection présidentielle et les résultats ont donné lieu à de violentes manifestations.

L’UA, qui souhaite que les problèmes africains soient résolus par les Africains, est intervenue pour que Faure Gnassingbé et l’opposition négocient. Ils ont convenu de former un gouvernement d’union nationale mais la situation reste tendue au Togo.


Le président togolais entend avancer avec ou sans la Coalition de l’opposition

(Xinhuanet 04/06/2005)

LOME,(XINHUANET)

Le processus de réconciliation avec la formation d’un gouvernement d’union nationale avancera avec ou sans la Coalition de l’opposition radicale, a laissé entendre vendredi le nouveau chef de l’Etat togolais Faure Gnassingbé lors d’une rencontre avec la presse.

"Ou vous venez et nous avançons ou vous restez en dehors et nous avançons quand-même sans vous", a-t-il lancé comme appel à la Coalition de l’opposition qui adhère difficilement au processus des consultations qu’il a entamées pour la formation du gouvernement d’union nationale.

Il a souligné qu’en adoptant cette position, il rencontre la " compréhension et l’adhésion" de ses paires et l’adhésion de ses collègues, faisant remarquer que "nul ne peut attendre indéfiniment, nul ne peut prendre un pays en otage".

"La formation du gouvernement d’union nationale est une tâche délicate qui impose beaucoup de patience, beaucoup de bonne volonté et beaucoup de grand sens de responsabilité", a indiqué le nouveau président togolais dont la Coalition conteste toujours la légitimité.

"Le Togo n’est plus isolé sur le plan dilomatique, le Togo avance, le Togo agit en concertation avec les pays voisins", a-t- il souligné, précisant qu’on ne règle pas la succession d’un régime de 38 ans en deux ou trois jours.

Après le décès du président togolais Gnassingbé Eyadèma le 5 février dernier, Faure Gnassingbé a été imposé par l’armée comme " succédant" à son père puis confirmé par le Parlement qui a modifié un article de la Constitution pour lui permettre de terminer le mandat d’Eyadèma en 2008.

La Communauté économique des Etats de l’afrique de l’ouest ( CEDEAO), l’Union africaine et des pays ont imposé des sanctions contre le Togo en réclamant le retour à la légalité constitutionnelle.

Sous pressions, Faure a démissionné le 26 février et une élection est organisée le 24 avril à l’issue de laquelle il est proclamé élu avec 60,15% des voix devant le candidat de la Coalition de l’opposition Bob Akitani (38,25%).

Les sanctions sont levées alors que la Coalition parle toujours de fraudes électorales et n’entend pas reconnaître la légitimité de Faure Gnassingbé pour entrer dans un gouvernement d’union nationale qu’il a proposé.

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France-Afrique : la part de l’ombre

Nouvel Afrique-asie Juin 2005

Le Togo, bien davantage que ne l’avait été la Côte-d’Ivoire d’Houphouët-Boigny, était-il devenu, sous le règne de Gnassingbé Eyadéma, le dernier domicile connu de la diplomatie françafricaine de l’ombre ? Celle des coups tordus, des mystères bien entretenus, des mensonges méthodiquement orchestrés et des secrets bien gardés sur des intérêts particuliers qui tiennent lieu de "politique franco-africaine"... La mort du dictateur Eyadéma a, sans nul doute, fait basculer un ordre établi depuis le deal néocolonial qui a cours depuis 1958, réduit à un cercle d’initiés français et africains. On saisit mieux aujourd’hui les contours de cette obscure galaxie entretenue, au mépris des règles proclamées et des peuples africains et français, par ses acteurs et lieutenants, dont les actes et projets se sont invariablement révélés contraires à la simple morale qu’ils sont si prompts à prôner par ailleurs. Dans une Afrique sous l’empire de cet ordre, nulle place pour une démocratie qui s’apparente à un "luxe" superfétatoire, ainsi que l’a signifié sans ambages Jacques Chirac, en 1990, à l’heure de la montée des espoirs démocratiques sur le continent... Le général Eyadéma était l’un des gardiens de ce cercle aussi singulier qu’opaque, une galaxie jalousement gardée, masquée par les discours officiels, mais dont les contreforts ne sauraient indéfiniment résister aux assauts du temps et d’une histoire qui évolue et impose fatalement des règles et exigences nouvelles.

Quelles que soient les péripéties prochaines de la tragédie togolaise, elle indique, à l’instar du drame qui se déroule en Côte-d’Ivoire, et de ceux qui se préparent demain sous d’autres cieux de la Françafrique, la fin d’une époque. Aussi les acteurs de cette galaxie sont-ils confrontés à un choix : soit poursuivre obstinément la défense d’un ordre désormais assiégé par les opinions publiques et le cours des événements, soit accepter de négocier avec l’inexorable mouvement de l’histoire qui sonne le glas d’un système périmé. Un système qui, pour survivre, se défait de son masque désormais superflu, pour n’avoir recours qu’à la violence aveugle et à une diplomatie de la honte comme unique religion. Au nom d’une imprenable raison d’Etat à laquelle l’opinion - française et africaine - ne croit plus et refuse dorénavant de souscrire.

PAR FRANCIS LALOUPO

© Copyright Nouvel Afrique-asie


COTONOU, (IRIN)

Les forces de sécurité togolaises continuent de perpétrer
meurtres, viols et enlèvements, poussant la population à quitter le pays,
rapportent les réfugiés et les associations de défense des droits de l’
homme.

« Il y a eu plusieurs centaines de victimes », a déclaré lors d’une entrevue à
Radio France Internationale Sidiki Kaba, président de la Fédération
internationale des droits de l’homme (FIDH). « Il y a une chasse à l’homme ».

Nombreux sont les Togolais qui ont fui le pays qui compte cinq millions d’
habitants après que les élections présidentielles du 24 avril dernier aient
officialisé la passation de pouvoir du père au fils.

Selon l’agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), près de 1 500
réfugiés ont quitté le petit pays d’Afrique de l’ouest ces trois derniers
jours et se sont réfugiés au Ghana et au Bénin limitrophes pour échapper à
la répression exercée contre les militants suspectés d’appartenir à l’
opposition.

L’agence a indiqué que 33 385 Togolais étaient réfugiés dans ces deux pays à
la date de lundi, contre 31 964 à la date de vendredi.

Dans la seule journée de lundi, le bureau du HCR basé à Cotonou, la capitale
du Bénin, a enregistré 162 personnes fuyant les violences politiques, a
déclaré à IRIN le représentant du HCR au Togo, Rafick Saidi.

« Ils viennent de tout le Togo. La plupart des arrivées récentes sont des
jeunes gens qui préfèrent venir à Cotonou afin de trouver de quoi faire,
chercher du travail, car contraints d’abandonner leurs études ». Selon Rafick
Saïdi, « les réfugiés justifient leur arrivée au Bénin par des enlèvements et
des persécutions qui continueraient toujours dans le pays. »

La FIDH préoccupée par les violations « graves et systématiques » des droits
de l’homme

Dans une lettre adressée aux Nations unies et à l’Union africaine, la FIDH a
dénoncé lundi dernier les violations des droits de l’homme au Togo
qualifiées de « graves et systématiques » et a appelé l’ONU à établir une
commission internationale d’enquête.

Après plusieurs jours de confrontations entre militants de l’opposition et
les forces de l’ordre en fin avril, le calme est revenu dans les rues de
Lomé. Mais les leaders de l’opposition et les groupes de défense des droits
de l’homme affirment que le gouvernement continue de s’en prendre violemment
aux membres de l’opposition.

Errant dans les rues de Cotonou, Agboti Yao, un jeune homme de vingt ans aux
cheveux ébouriffés et vêtu d’un pantalon en denim délavé, explique à IRIN
que son père a dû fuir au Ghana en avril lorsque l’armée a réprimé une
marche de protestation de l’opposition dans la ville d’Aklakou, au sud.

« Maintenant, c’est notre tour », a dit Yao. « À défaut d’arrêter nos parents,
ils viennent nous enlever à l’école. J’ai mon voisin de classe qui a été
emporté par les militaires le jeudi dernier et depuis pas de nouvelles.
Alors j’ai pris peur et moi aussi j’ai pris la fuite deux jours après ».

« Notre péché, c’est d’être les fils de militants de l’opposition », a-t-il
dit.

Coffi Agbonou, son ami, a déclaré que dans sa ville natale d’Aného, près de
la frontière béninoise, les forces de sécurité « passent de maison en maison
la nuit pour tabasser et massacrer les gens à coups de machettes. Il y a
même un de mes cousins blessé à la tête qui a succombé à ses blessures,
faute de secours ».

Une femme, serrant un nouveau-né sur sa poitrine, affirme que les abus
sexuels sont aussi légion. Elle est originaire d’une ville au centre Togo, à
180 km au nord de la capitale.

« Je viens d’Attakpamè », explique Mawule Adjevi. « Je suis arrivée à Cotonou
le lundi dernier. Je vis chez une compatriote sour qui s’est mariée ici. J’
ai subi toutes sortes d’atrocités et j’ai été humiliée en tant que femme ».

Le HCR a établi deux camps de réfugiés à Come et à Lokossa, au sud du Bénin.
L’agence a récemment lancé un appel de fonds de 4,97 millions de dollars
américains pour venir en aide aux réfugiés. Plusieurs d’entre eux vivent
chez des proches à Cotonou ou ailleurs.

Kaba, le président d’origine sénégalaise de la FIDH, a déclaré que l’
organisation basée à Paris continuait de recueillir des témoignages d’
exécutions sommaires et de disparitions forcées perpétrées par les membres
des forces armées et la gendarmerie nationale, avec le concours de miliciens
affiliés au Rassemblement du peuple togolais (RPT).

« Nous voulons une commission internationale », a-t-il dit. La situation est
extrêmement grave ».

Furieux, les jeunes militants veulent prendre les armes

Jean Kouassi, enseignant de 38 ans, a confié à IRIN qu’il a abandonné sa
classe d’élèves du niveau primaire et fui à Cotonou.

« Si j’ai abandonné mes élèves pour me rendre à Cotonou, c’est parce que je
me suis opposé à l’enlèvement d’un de mes élèves dont le papa est un
militant de l’opposition et j’ai organisé sa fuite. Donc pour me protéger, j
’ai dû prendre la route de l’exil », explique-t-il.

Joseph Kossi, étudiant de 20 ans à l’Université de Lomé, est très critique
vis-à-vis de la communauté internationale, et particulièrement la Communauté
économique des états d’Afrique de l’ouest (CEDEAO) qui a entériné les
résultats du 24 avril en les déclarant « globalement satisfaisants ».

Pour lui, la seule solution est une rébellion armée contre Gnassingbé et le
RPT.

« C’en est assez, nous avons trop souffert, nous voulons que l’opposition
nous arme comme c’est le cas de la rébellion armée [du leader des rebelles
des Forces nouvelles] Guillaume Soro en Côte d’Ivoire ».

« Notre souhait est que l’opposition trouve une nouvelle stratégie de lutte »,
poursuit-il. « Car on ne peut pas continuer d’affronter les mains nues des
gens armés ».

La FIDH, une fédération de 141 associations de défense des droits de l’homme
a déclaré que « cette situation révèle la perpétration de violations des
droits humains qualifiables, selon la FIDH, de ’graves et systématiques’
menaçant au surplus la paix et la sécurité de la sous-région ».

En réponse à la menace d’une enquête internationale, le gouvernement de Gnassingbé a déclaré sur son site web [www.republicoftogo.com] que les allégations de violations des droit de l’homme étaient une « pure invention et opération de manipulation organisée dans le seul but de mobiliser la communauté internationale contre le nouveau pouvoir en place à Lomé ».

La Ligue togolaise des droits de l’homme (LTDH) - une association affiliée à la FIDH et liée à l’opposition - a affirmé la semaine dernière que près de 790 personnes ont été tuées dans les violences post-électorales.

Un autre rapport du Mouvement togolais de défense des libertés et des droits humains (MTDLDH), une organisation proche du gouvernement, évalue le nombre de décès à seulement 58.

La semaine dernière, les négociations d’Abuja entre Gnassingbé et les
principaux partis d’opposition relatives à la formation d’un gouvernement d’
union nationale ont échouées en dépit des efforts déployés par le président
nigérian Olusegun Obansanjo et d’autres chefs d’état ouest-africains pour
mettre un terme aux violences.

Obasanjo, qui préside également l’Union africaine, a exhorté les deux
parties à honorer l’engagement pris 24 heures avant les élections présidentielles de partager les pouvoirs quel que soit le vainqueur.

Mais les leaders de l’opposition refusent de concéder la victoire à Gnassingbe.

« Les chefs d’état africains veulent nous voir conclure rapidement un accord avec Gnassingbé, et ne tiennent même pas compte des allégations de fraudes aux élections », a déclaré à IRIN un partisan de l’opposition après la rencontre d’Abuja. « C’est absolument inacceptable », a-t-il ajouté.


N A T I O N S U N I E S
Bureau de Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA)
Réseaux d’Information Régionaux Intégrés (IRIN)

TOGO : Reprise des cours pour les enfants réfugiés togolais, mais dans un autre pays

AGAME, le 1 juin (IRIN)

A quelques semaines de la fin de l’année scolaire
et du début de la période des examens, 1 600 enfants réfugiés togolais sont
retournés à l’école lundi dans les camps d’hébergement installés au Bénin
pour les réfugiés ayant fui les émeutes post-électorales au Togo.

Des élèves de tous âges, de la maternelle à la terminale, suivent les cours
sur des nattes posées à même le sol dans des salles de classe de fortune
érigées par le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) dans le camp
de réfugiés de Lokossa, à 18 km de la frontière togolaise.

"L’éducation est le meilleur moyen de ramener une forme de normalité dans la
vie de ses enfants" a estimé Philippe Duhamelle, représentant de l’UNICEF au
Bénin. "Retourner à l’école va leur permettre de retrouver une vie plus
structurée, rythmée par l’école et le jeu, ce qui devrait les aider à mieux
surmonter les traumatismes qu’ils viennent de vivre".

"Certains enfants ont, par exemple, été victimes ou témoins directs de
violences", a ajouté Duhamelle. "L’école va leur donner la possibilité de se
reconstruire, de se projeter à nouveau dans l’avenir".

Selon l’UNICEF, les enfants représentent près de 50 pour cent du nombre de
réfugiés qui fui le Togo pour s’installer au Bénin, après le scrutin
présidentiel très controversé du 24 avril dernier. Parmi ces enfants, près
de 200 sont des mineurs séparés de leurs parents ou des mineurs accompagnés
âgés de 9 à 17 ans.

Lundi matin, plus de 1 000 élèves ont été conduits dans les 14 salles de
classe construites en bois et recouvertes d’une bâche en plastique dans le
camp de Lokossa qui héberge près de 5 500 personnes.

500 autres enfants ont été inscrits dans les classes du camp de Comé, un
centre d’accueil plus petit situé près de la frontière et qui héberge
quelque 1 400 personnes. A Comé, les cours se déroulent dans le hall de la
maison des jeunes et de la culture, et dans le bruit assourdissant des
premières tornades tropicales.

De nombreuses personnes ont quitté le Togo pour se réfugier au Bénin et au
Ghana depuis que les partisans de l’opposition sont descendus dans les rues
pour protester contre l’élection en avril dernier de Faure Gnassingbe. Son
père, l’ancien chef d’Etat togolais Gnassingbe Eyadema avait dirigé le pays
pendant 38 ans jusqu’à son décès en février dernier. Pour la coalition des
partis de l’opposition togolaise, le scrutin présidentiel du mois dernier a
été entaché de nombreuses irrégularités et de fraudes massives.

A en croire certains diplomates, plus de 100 personnes ont été tuées pendant
les émeutes qui ont éclaté après la proclamation des résultats du scrutin,
alors que la ligue togolaise des droits de l’homme en dénombrait près de
800.

34 416 réfugiés ont été enregistrés au Bénin et Ghana a indiqué vendredi
dernier l’agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Sur les quelque
20 000 personnes qui ont trouvé refuge au Bénin, près d’un tiers sont
hébergés dans les camps de Lokossa et de Comé, deux sites gérés par le HCR,
le reste des réfugiés ayant choisi de vivre chez des amis ou des parents.

Cinq semaines après la proclamation des résultats très controversés du
scrutin présidentiel, près de 200 personnes quittent chaque jour le Togo
pour échapper aux actes d’intimidation et de harcèlement commis par les
forces de sécurité dans les bastions de l’opposition, ont indiqué des
fonctionnaires des Nations unies.

Selon Rafick Saidi, représentant du HCR au Bénin, certains élèves réfugiés,
en majorité des jeunes filles, sont rentrés la semaine dernière au Togo pour
passer leur examen probatoire.

Mais de nombreux garçons sont revenus dans les camps parce qu’ils ont appris
qu’ils étaient recherchés par la police, a-t-il indiqué.

L’UNICEF a lancé un appel de fonds de 395 000 dollars américains pour
financer sur une période de six mois l’éducation des enfants hébergés dans
les camps installés au Bénin. L’agence emploie 53 enseignants, tous réfugiés
togolais, pour dispenser les cours dans les classes.

Ces fonds sont destinés aux 2 000 enfants des camps et serviront à couvrir
les besoins scolaires de 2000 autres enfants réfugiés dans les communautés
d’accueil.

Mais les programmes scolaires des deux pays sont différents.

Pour Ayéna Arouna, inspecteur de l’enseignement et consultant à l’UNICEF au
Bénin, le programme scolaire des élèves de terminale n’est pas tout à fait
le même au Bénin et au Togo. Et comme il y a eu des grèves au Bénin et que
la date des examens a été repoussée, les élèves togolais auront suffisamment
de temps pour rattraper leur retard avant les examens prévus en juillet
prochain.

Pour Blandine Wakesso, 20 ans, c’est une bonne nouvelle.

"Nous sommes très contents de continuer les cours et de terminer l’année",
a-t-elle confié à IRIN. "Vu qu’il n’y a pas le probatoire au Bénin, quelque
soit la situation, c’est ici que moi je passerai mon baccalauréat.


UA : Rencontre sur les sanctions contre le Togo

Le Figaro 27/05/2005

Le Conseil de paix et sécurité (CPS) de l’Union africaine (UA) doit se réunir vendredi sur le Togo et se prononcer sur la possibilité de "lever" les sanctions imposées à ce pays depuis trois mois, a-t-on appris auprès de l’organisation.

"La réunion va servir à examiner la situation depuis la démission de Faure Gnassingbé fin février", a déclaré vendredi à l’AFP un haut responsable de l’UA sous couvert d’anonymat.

"Il se pourrait que le CPS se prononce sur les sanctions contre le Togo, parce qu’elles n’ont pas encore été levées et sur la possibilité d’une présence plus forte dans le dossier togolais", a poursuivi la même source, sans plus de détails.

L’UA n’a pas actuellement de représentant au Togo, contrairement à ce qui est le cas dans les Etats-membres de l’organisation panafricaine en situation de crise.

Le CSP devrait envisager la possibilité "d’ouvrir une mission civile africaine au Togo ou de nommer un envoyé spécial", selon un autre représentant de l’UA, qui a requis l’anonymat.

"L’objet de la réunion va être d’analyser la situation au Togo, à la lumière de l’évolution de la situation dans le pays et des efforts entrepris depuis février" notamment par la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) "et de voir quelle action l’Union africaine peut prendre au Togo", a précisé el-Ghassim Wane, chef du centre de gestion des conflits à l’UA, à Addis Abeba, siège de l’UA.

Le CPS a imposé le 25 février des sanctions contre le Togo, notamment sa suspension de toutes les activités de l’UA, et une interdiction de voyager pour tous les dirigeants togolais pour protester contre l’accession controversée au pouvoir du président investi Faure Gnassingbé après la mort de son père Gnassingbé Eyadéma début février.

Le jour même, M. Gnassingbé avait fait savoir qu’il acceptait finalement de démissioner et de se présenter à une élection présidentielle. L’UA n’avait cependant pas levé les sanctions, alors que la Cedeao, qui avait imposé des sanctions au Togo le 19 février, les avait immédiatement levées.

M. Gnassingbé a été élu président le 24 avril lors d’une élection controversée. Depuis, l’UA a gardé le silence et a systématiquement refusé de commenter l’évolution de la situation au Togo.

"C’est un silence désapprobateur", a commenté le représentant de l’UA.

Le CPS, qui réunit les ambassadeurs de 15 pays membres de cet organe et est l’équivalent africain du Conseil de sécurité de l’Onu, doit débuter vendredi à 15h00 locales (12h00 GMT). Il est le seul organe de l’UA à pouvoir prononcer des sanctions et à les lever contre des Etats-membres de l’organisation panafricaine.

© Copyright Le Figaro


Répressions tous azimuts et chasse à l’opposant au Togo
Les habitants fuient par centaines. Le HCR craint une « crise humanitaire ».

Par Thomas HOFNUNG

Libération, vendredi 27 mai 2005

Un mois après l’élection présidentielle contestée au Togo, qui a déclenché une vague de violence sans précédent, des centaines de personnes fuient toujours leur pays en direction du Ghana et du Bénin voisins. « L’affluence a un peu chuté avec une moyenne de 300 arrivés par jour, mais nous allons dépasser bientôt le seuil de nos prévisions qui est de 20 000 personnes », a indiqué, mercredi, un responsable du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) au Bénin. Le HCR redoute « une crise humanitaire » si la communauté internationale ne débloque pas d’urgence des fonds pour leur venir en aide. Paris vient de mobiliser 100 000 euros à ce titre.

Les violences au Togo ont éclaté au lendemain de la mort, le 5 février, du général-président Gnassingbé Eyadéma, qui a confisqué le pouvoir durant trente-huit ans. Elles ont redoublé après la proclamation, le 26 avril, de la victoire du fils d’Eyadéma, Faure Gnassingbé. Débordées dans un premier temps par l’ampleur de la contestation, les forces de l’ordre ont rapidement maté les sympathisants de l’opposition qui s’étaient révoltés dans plusieurs quartiers de Lomé, la capitale, ainsi que dans de nombreuses localités du sud et du centre du pays. Avant de se livrer à une chasse en règle aux opposants qui, selon les témoignages des réfugiés au Bénin, se poursuivrait jusqu’à aujourd’hui.

Chape. Ces événements se déroulent dans une indifférence quasi-générale. Pour tenter de briser la chape de silence, la Fédération internationale des droits de l’homme (Fidh) a récemment interpellé publiquement l’ONU et l’Union africaine. Elle leur demande de diligenter une enquête internationale afin d’établir le bilan des violations des droits de l’homme commises au Togo. Accusé par l’opposition togolaise d’avoir cautionné le trucage des élections et la répression qui a suivi, Paris dit « attendre » la réaction des destinataires de cette demande avant de se prononcer. Une enquête indépendante paraît d’autant plus nécessaire, aujourd’hui, que le régime et l’opposition se livrent à une bataille de chiffres par organisations des droits de l’homme interposées. Un mouvement affilié au régime parle de 58 morts et de 317 blessés. De son côté, dans un rapport « préliminaire », la Ligue togolaise des droits de l’homme recense 811 morts et plus de 4 000 blessés. Cette organisation proche de l’opposition affirme notamment avoir « reçu des témoignages concordants faisant état de plus de 200 morts » à Atakpamé, au nord de Lomé. Jointe par téléphone au Togo, une source diplomatique estime que le pouvoir minore l’ampleur de la répression, mais émet aussi des doutes sur les chiffres de la Ligue.

Français. Dans son rapport, cette organisation mentionne également des témoignages accusant des militaires français d’avoir pris part aux opérations de répression. A Paris, l’état-major des armées a vigoureusement démenti, précisant que le détachement d’une centaine d’hommes présent sur l’aéroport de Lomé comprenait « exclusivement » des hommes chargés « du soutien logistique » aérien de l’opération Licorne en Côte-d’Ivoire. S’il paraît en effet peu crédible que des soldats français aient été impliqués d’une quelconque manière dans les affrontements qui ont suivi la présidentielle au Togo, la France maintient sur place une vingtaine de coopérants militaires, y compris dans l’état-major togolais, mais selon Paris sans rôle opérationnel.


Le président français réitére son soutien à un gouvernement d’union nationale au Togo

(Xinhuanet 27/05/2005)

PARIS, (XINHUANET) — Le président français Jacques Chirac a réitéré jeudi à son homologue nigérian Olusegun Obasanjo son soutien aux initiatives africaines pour la formation d’un gouvernement d’union nationale au Togo.

"Le président de la Répubique a réitéré l’appui de la France à l’action de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest et de l’Union africaine au Togo pour aboutir à la formation d’un gouvernement d’union nationale, et au respect des engagements pris par le Togo vis-à-vis de l’Union européenne", a rapporté le porte-parole de la présidence Jérôme Bonnafont à l’issue du déjeuner de travail entre les deux présidents.

M. Obasanjo, en visite en France, est le président en exercice de l’Union africaine. Au cours de son entretien de jeudi avec M. Chirac, ils ont évoqué la Côte d’Ivoire, et M. Chirac a fait part de la vigilance de la France sur "le processus qui doit conduire à des élections en octobre", selon M. Bonnafont.

M. Chirac a également détaillé à son homologue nigérian les efforts engagés par l’Union européenne pour apporter son appui au processus de rétablissement de la paix au Darfour, a indiqué le porte-parole. Fin

© Copyright Xinhuanet


Assassinats, disparitions forcées et viols poussent les Togolais à fuir leur pays

IRIN 25/05/2005.

COTONOU, le 25 mai (IRIN) - Un mois après le scrutin présidentiel contesté, les forces de sécurité togolaises continuent de perpétrer meurtres, viols et enlèvements, poussant la population à quitter le pays, rapportent les réfugiés et les associations de défense des droits de l’homme.

« Il y a eu plusieurs centaines de victimes », a déclaré lors d’une entrevue à Radio France Internationale Sidiki Kaba, président de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH). « Il y a une chasse à l’homme ».

Nombreux sont les Togolais qui ont fui le pays qui compte cinq millions d’habitants après que les élections présidentielles du 24 avril dernier aient officialisé la passation de pouvoir du père au fils.

Selon l’agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), près de 1 500 réfugiés ont quitté le petit pays d’Afrique de l’ouest ces trois derniers jours et se sont réfugiés au Ghana et au Bénin limitrophes pour échapper à la répression exercée contre les militants suspectés d’appartenir à l’opposition.

L’agence a indiqué que 33 385 Togolais étaient réfugiés dans ces deux pays à la date de lundi, contre 31 964 à la date de vendredi.

Dans la seule journée de lundi, le bureau du HCR basé à Cotonou, la capitale du Bénin, a enregistré 162 personnes fuyant les violences politiques, a déclaré à IRIN le représentant du HCR au Togo, Rafick Saidi.

« Ils viennent de tout le Togo. La plupart des arrivées récentes sont des jeunes gens qui préfèrent venir à Cotonou afin de trouver de quoi faire, chercher du travail, car contraints d’abandonner leurs études ». Selon Rafick Saïdi, « les réfugiés justifient leur arrivée au Bénin par des enlèvements et des persécutions qui continueraient toujours dans le pays. »

La FIDH préoccupée par les violations « graves et systématiques » des droits de l’homme

Dans une lettre adressée aux Nations unies et à l’Union africaine, la FIDH a dénoncé lundi dernier les violations des droits de l’homme au Togo qualifiées de « graves et systématiques » et a appelé l’ONU à établir une commission internationale d’enquête.

Après plusieurs jours de confrontations entre militants de l’opposition et les forces de l’ordre en fin avril, le calme est revenu dans les rues de Lomé. Mais les leaders de l’opposition et les groupes de défense des droits de l’homme affirment que le gouvernement continue de s’en prendre violemment aux membres de l’opposition.

Errant dans les rues de Cotonou, Agboti Yao, un jeune homme de vingt ans aux cheveux ébouriffés et vêtu d’un pantalon en denim délavé, explique à IRIN que son père a dû fuir au Ghana en avril lorsque l’armée a réprimé une marche de protestation de l’opposition dans la ville d’Aklakou, au sud.

« Maintenant, c’est notre tour », a dit Yao. « À défaut d’arrêter nos parents, ils viennent nous enlever à l’école. J’ai mon voisin de classe qui a été emporté par les militaires le jeudi dernier et depuis pas de nouvelles. Alors j’ai pris peur et moi aussi j’ai pris la fuite deux jours après ».

« Notre péché, c’est d’être les fils de militants de l’opposition », a-t-il dit.

Coffi Agbonou, son ami, a déclaré que dans sa ville natale d’Aného, près de la frontière béninoise, les forces de sécurité « passent de maison en maison la nuit pour tabasser et massacrer les gens à coups de machettes. Il y a même un de mes cousins blessé à la tête qui a succombé à ses blessures, faute de secours ».

Une femme, serrant un nouveau-né sur sa poitrine, affirme que les abus sexuels sont aussi légion. Elle est originaire d’une ville au centre Togo, à 180 km au nord de la capitale.

« Je viens d’Attakpamè », explique Mawule Adjevi. « Je suis arrivée à Cotonou le lundi dernier. Je vis chez une compatriote sœur qui s’est mariée ici. J’ai subi toutes sortes d’atrocités et j’ai été humiliée en tant que femme ».

Le HCR a établi deux camps de réfugiés à Come et à Lokossa, au sud du Bénin. L’agence a récemment lancé un appel de fonds de 4,97 millions de dollars américains pour venir en aide aux réfugiés. Plusieurs d’entre eux vivent chez des proches à Cotonou ou ailleurs.

Kaba, le président d’origine sénégalaise de la FIDH, a déclaré que l’organisation basée à Paris continuait de recueillir des témoignages d’exécutions sommaires et de disparitions forcées perpétrées par les membres des forces armées et la gendarmerie nationale, avec le concours de miliciens affiliés au Rassemblement du peuple togolais (RPT).

« Nous voulons une commission internationale », a-t-il dit. La situation est extrêmement grave ».

Furieux, les jeunes militants veulent prendre les armes

Jean Kouassi, enseignant de 38 ans, a confié à IRIN qu’il a abandonné sa classe d’élèves du niveau primaire et fui à Cotonou.

« Si j’ai abandonné mes élèves pour me rendre à Cotonou, c’est parce que je me suis opposé à l’enlèvement d’un de mes élèves dont le papa est un militant de l’opposition et j’ai organisé sa fuite. Donc pour me protéger, j’ai dû prendre la route de l’exil », explique-t-il.

Joseph Kossi, étudiant de 20 ans à l’Université de Lomé, est très critique vis-à-vis de la communauté internationale, et particulièrement la Communauté économique des états d’Afrique de l’ouest (CEDEAO) qui a entériné les résultats du 24 avril en les déclarant « globalement satisfaisants ».

Pour lui, la seule solution est une rébellion armée contre Gnassingbé et le RPT.

« C’en est assez, nous avons trop souffert, nous voulons que l’opposition nous arme comme c’est le cas de la rébellion armée [du leader des rebelles des Forces nouvelles] Guillaume Soro en Côte d’Ivoire ».

« Notre souhait est que l’opposition trouve une nouvelle stratégie de lutte », poursuit-il. « Car on ne peut pas continuer d’affronter les mains nues des gens armés ».

La FIDH, une fédération de 141 associations de défense des droits de l’homme a déclaré que « cette situation révèle la perpétration de violations des droits humains qualifiables, selon la FIDH, de ’graves et systématiques’ menaçant au surplus la paix et la sécurité de la sous-région ».

En réponse à la menace d’une enquête internationale, le gouvernement de Gnassingbé a déclaré sur son site web [www.republicoftogo.com] que les allégations de violations des droit de l’homme étaient une « pure invention et opération de manipulation organisée dans le seul but de mobiliser la communauté internationale contre le nouveau pouvoir en place à Lomé ».

La Ligue togolaise des droits de l’homme (LTDH) - une association affiliée à la FIDH et liée à l’opposition - a affirmé la semaine dernière que près de 790 personnes ont été tuées dans les violences post-électorales.

Un autre rapport du Mouvement togolais de défense des libertés et des droits humains (MTDLDH), une organisation proche du gouvernement, évalue le nombre de décès à seulement 58.

La semaine dernière, les négociations d’Abuja entre Gnassingbé et les principaux partis d’opposition relatives à la formation d’un gouvernement d’union nationale ont échouées en dépit des efforts déployés par le président nigérian Olusegun Obansanjo et d’autres chefs d’état ouest-africains pour mettre un terme aux violences.

Obasanjo, qui préside également l’Union africaine, a exhorté les deux parties à honorer l’engagement pris 24 heures avant les élections présidentielles de partager les pouvoirs quel que soit le vainqueur.

Mais les leaders de l’opposition refusent de concéder la victoire à Gnassingbe.

« Les chefs d’état africains veulent nous voir conclure rapidement un accord avec Gnassingbé, et ne tiennent même pas compte des allégations de fraudes aux élections », a déclaré à IRIN un partisan de l’opposition après la rencontre d’Abuja. « C’est absolument inacceptable », a-t-il ajouté.

© Copyright IRIN


Togo : La FIDH réclame une commission d’enquête

RFI, le 24/05/2005.

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) dénonce la dégradation de la situation suite à l’élection présidentielle controversée du 24 avril dernier. Elle réclame l’envoi d’urgence d’une commission d’enquête internationale afin d’établir les faits et de fixer les responsabilités

C’est par une lettre ouverte, datée du 23 mai, au président de la Commission de l’Union africaine, Alpha Omar Konaré, au secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan et au Haut commissaire aux droits de l’Homme des Nations unies, Louise Arbour que la FIDH souligne sa préoccupation de la situation qui prévaut au Togo. Reprenant largement des faits avérés, Sidiki Kaba, le président de la FIDH montre la gravité de la situation qui nécessite un autre traitement de la part de la communauté internationale. En effet, contrairement à quelques dizaines de morts et de blessés annoncés par le pouvoir togolais, la FIDH insiste sur les massacres à grande échelle et ciblés de l’ordre de quelques centaines de victimes.

Selon des témoignages qu’elle a recueillis, les Forces armées togolaises et la gendarmerie nationale avec le concours de miliciens affiliés au rassemblement du peuple togolais (RPT), le parti au pouvoir, auraient participé à des exécutions sommaires. En dehors de la répression des manifestations de rue à Lomé, la FIDH fait souligne les chasses à l’homme perpétrées à l’intérieur du pays et dans certaines grandes agglomérations. « L’impossibilité d’accès aux morgues, la disparition de dossiers médicaux dans les hôpitaux et centres de santé, l’afflux persistant de réfugiés dans les pays limitrophes (Ghana et Bénin) sont révélateurs de l’existence d’une situation de répression particulièrement grave et récurrente », poursuit Sidiki Kaba dans sa lettre.

Le devoir de protection des populations civiles

La FIDH espère, cette fois-ci, être entendue, car depuis le décès le 5 février dernier du général président Gnassingbé Eyadéma, elle est à sa troisième lettre ouverte aux éminentes personnalités politiques sans oublier les multiples communiqués pour attirer l’attention sur le cas particulier du Togo. Le 7 février Sidiki Kaba avait cosigné avec Adoté Gandhi Akwei, président de la LTDH et Michel Tubiana, président de la Ligue des droits de l’Homme (France), une lettre ouverte au président de la République française, Jacques Chirac, dans laquelle ils exprimaient leur préoccupation après « le coup d’Etat militaire » qui installa le fils dans le fauteuil du père. Les signataires de la lettre demandaient à la France de « condamner fermement ce coup de force et d’user de son influence internationale afin que l’ordre constitutionnel soit rétabli ».

Le 28 avril, quelques jours après l’élection présidentielle, Sidiki Kaba et Michel Tubiana ont signé une nouvelle lettre ouverte à Jacques Chirac dans laquelle ils appellent les autorités françaises à « condamner publiquement » la mascarade électorale au Togo. Après avoir souligné des faits flagrants de violation des droits de l’homme, intimidations, arrestations arbitraires, vol d’urnes par des militaires, coupures des lignes téléphoniques, interdiction d’émettre pour certaines radios et télévisions privées, la FIDH et la LDH ont déploré « la caution regrettable apportée à ce stade par la France à cette mascarade électorale et à sa faible réaction face aux violations en cours ».

Dans sa lettre au président de la Commission de l’Union africaine, au secrétaire général de l’ONU et haut commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU, Sidiki Kaba rappelle également l’absence totale de crédibilité des « initiatives nationales » pour insister sur le rôle primordial de la FIDH, de la Ligue togolaise des droits de l’Homme (LTDH), des organes des Nations unies et de l’Union africaine dans la mise sur pied d’une commission d’enquête pour établir des faits et des responsabilités. En effet, les autorités togolaises ont accepté le principe d’une commission d’enquête mais qu’elles organiseraient elles-mêmes. « L’obligation de protéger » les populations civiles et de « prévenir l’aggravation de cette situation » est un devoir de la communauté internationale que rappelle le président de la FIDH.
Didier Samson


TOGO, MIROIR DE LA DUPLICITE DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE

Sanfinna du 23 au 29 mai 2005.

La scène qui se joue au Togo depuis le décès du Président Eyadema est tout à fait révélatrice des relations équivoques que la communauté internationale entretient avec nombre de pays africains et de sa tendance à se défausser de ses responsabilités, voire même à plonger les mains dans le soutien direct ou indirect à des autocraties. Pour la forfaiture au Togo, elle s’en est remise à la CEDEAO et à l’Union Africaine. Si l’on foule aux pieds la démocratie, pousse des milliers de pauvres hères à l’exil, les Africains n’auront qu’à s’en prendre à ces organisations !

En attendant, dans ce petit pays voué au martyr, abandonné de quasi tout le monde, le peuple continue de refuser. Il y a eu certes comme une bouffée d’espérance avec la résolution du Parlement européen mais le coup est en train d’être digéré : c’est ce qu’on peut observer avec cette réunion d’Abuja de jeudi passé qui ressemble, par certains aspects, à cette autre mémorable au cours de laquelle quelques chefs d’Etat africains se sont donnés rendez-vous pour féliciter l’armée française d’avoir fait un carnage à Abidjan.

Cette fois-ci, il s’agissait de donner l’illusion qu’il y avait la possibilité de rattraper le coup des massacres, d’envisager avec les Togolais des voies de sortie de crise.

Pour une invitation aussi solennelle, les opposants ont dû réfléchir par deux fois avant d’y aller. Refuser de s’y rendre, c’était se mettre au ban de la communauté internationale et s’exposer à ce que les médias internationaux vous tombent dessus à bras raccourcis pour votre " radicalité " et cela aurait fait l’affaire du régime en place. Y aller, c’était courir le risque d’accréditer une comédie pour adouber en fait le nouveau pouvoir, lui donner du répit et bien sûr pour tenter de diviser les opposants.

Ca n’a pas manqué : sitôt leur acceptation confirmée, les médias se sont mis à présenter la rencontre comme une rencontre devant uniquement discuter de la formation d’un gouvernement d’union. Ce n’est pourtant pas faute pour Agboyibo et autres d’avoir expliqué que s’il y avait entente, il s’agirait d’aller à un gouvernement de transition et pour reprendre notamment la dernière élection présidentielle calamiteuse. Mais l’intention de la CEDEAO et de l’Union Africaine, c’était tout simplement de donner une tribune aux nouvelles autorités togolaises et de tenter de faire oublier la demande du Parlement européen. C’est ce qui explique qu’au terme de cette rencontre, on n’en finisse pas de parler de la reconnaissance de Faure Eyadema par ses pairs et de l’amorce d’un dialogue. Pour Mr Dramani, secrétaire général du RPT, " Aucun chef d’Etat ne peut accepter de nouvelle élection puisqu’ils ont reconnu la légitimité du président Faure. Selon notre constitution, le mandat est de cinq ans donc les prochaines élections auront lieu dans cinq ans".

Mais de toute cette comédie de la CEDEAO, de l’Union africaine appuyées par la communauté internationale, on en parle même dans les hameaux les plus reculés de bien de contrées africaines. C’est dire que la conscience est éveillée sur toutes ces singeries ; c’est en soi un signe que la duplicité est mise à nu et que cet autre refus togolais peut gagner tout le continent !

Victory Toussaint
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Des réfugiés togolais au Bénin et au Ghana justifieraient leur exil par l’insécurité au Togo (HCR)

(Xinhuanet 23/05/2005)

Les centaines de réfugiés togolais nouvellement enregistrés aux frontières du Bénin et du Ghana voisins justifieraient leur exil par des problèmes d’insécurité dans leur pays, a indiqué dimanche, dans une interview à la radio BBC, le responsable du Bureau du Haut Commissariat des Nations- Unies pour les réfugiés (HCR) Rafik Saïdi.

"Les réfugiés allèguent d’une situation d’insécurité qui les amènerait à fuire leur pays", a précisé ce responsable régional du HCR.

Selon cette agence onusienne, le nombre de Togolais réfugiés au Bénin et au Ghana suite aux violences post-électorales sanglantes des 26 au 28 avril dernier s’élèverait actuellement à 30 000.

Le Bénin qui a accueilli la masse la plus importante de réfugiés togolais (plus de 22 000) a lancé un apel à l’aide internationale pour pouvoir prendre ces derniers en charge.

Pendant ce temps, les autorités togolaises continuent de rassurer leurs concitoyens exilés pour qu’ils regagnent le bercail, affirmant que le calme est revenu dans le pays. Fin

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L’opposition évalue les résultats du minisommet d’Abuja

TOGO - 22 mai 2005 - PANAPRESS

Le minisommet d’Abuja sur le Togo a permis à la Coalition de l’opposition d’exposer aux chefs d’Etat africains "les vérités" sur la situation socio-politique avant, pendant et après la présidentielle du 24 avril, a assuré le coordonnateur de ce collectif, Me Yawovi Agboyibo.
S’exprimant samedi à Lomé au cours d’un point de presse, Me Agboyibo a affirmé que la rencontre de la capitale nigériane n’était qu’une "étape intermédiaire" dans la résolution de la crise née de ce scrutin controversé dont les résultats officiels ont donné gagnant Faure Gnassingbé, le fils de l’ancien président.

Le coordonnateur de l’opposition togolaise a estimé qu’une autre réunion était nécessaire, voire "salutaire", pour régler le différend, car, a-t-il souligné, "le dossier togolais est complexe et on ne peut pas lui trouver des solutions en six heures d’horloge (Ndlr : durée de la réunion d’Abuja du 19 mai).

Pour Me Agboyibo, la Coalition, qui n’adhère pas totalement aux recommandations des chefs d’Etat, a en revanche exprimé sa satisfaction devant les "acquis intermédiaires" réalisés, notamment un consensus sur le volet social de la crise.

Ce volet concerne les persécutions contre les populations civiles et le cas des réfugiés, dont le nombre est estimé à plus de 20.000 personnes réparties entre le Bénin et le Ghana...

Après avoir jugé impossible la formation d’un quelconque gouvernement sans passer au préalable par un dialogue national, le coordonnateur a réitéré l’une des exigences de l’opposition, à savoir la formation d’un gouvernement de transition et non d’union nationale, comme le suggère le Rassemblement du peuple togolais (RPT, au pouvoir).

La formation de ce gouvernement serait suivi, dans un délai précis, de l’organisation d’une autre élection présidentielle sous la supervision d’institutions nationales et internationales crédibles, a ajouté Me Agboyibo.

Le minisommet d’Abuja a regroupé les composantes de la classe politique togolaise en présence des présidents Omar Bongo Ondimba du Gabon, Mathieu Kérékou du Bénin, Blaise Compaoré du Burkina Faso, John Kufuor du Ghana et Mamadou Tandja du Niger, sous l’égide de leur homologue nigérian Olusegun Obasanjo, président en exercice de l l’Union africaine.

La rencontre a exhorté la classe politique togolaise à la réconciliation, à la cessation des actes de violence, à la poursuite du dialogue politique et surtout à la formation d’un gouvernement d’union.


L’armée française dément l’implication de soldats français dans les violences au Togo

Source XINHUA - 21/05/2005

L’armée française a démenti vendredi l’implication de soldats français dans les violences le soir de l’élection du 24 avril au Togo comme le laissait entendre un rapport préliminaire rendu public par la Ligue togolaise des droits de l’homme (LTDH), a rapporté samedi la presse locale.

"L’état-major des armées dément catégoriquement les accusations non fondées et calomnieuses que la LTDH porte dans son rapport préliminaire sur les violations massives des droits de l’homme par le régime avant, pendant et après le scrutin présidentiel du 24 avril", a déclaré le colonel Gérard Dubois, responsable de l’information à l’état-major.

Selon le rapport de la LTDH, "le soir du 24 avril 2005, lorsque les militaires emportaient les urnes ou les détruisaient et tiraient à balles réelles sur les électeurs et manifestants qui s’opposaient à leurs actes illégaux, des témoignages concordants faits à la LTDH indiquent que des soldats français faisaient partie des forces de répression qui tiraient à balles réelles pour massacrer la population".

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La chasse aux opposants se poursuit au Togo, selon les témoignages des réfugiés au Bénin

LE MONDE 21.05.05

COMÉ ET LOKOSSA (Bénin) de notre envoyé spécial

Il suffit que le jour s’estompe sur l’immense palmeraie de Lokossa, couverte de centaines de tentes de toile verte du Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) des Nations unies, pour que ressurgissent les fantômes de l’exil. Alors, leurs occupants togolais revivent les événements qui les ont conduits à fuir leur pays tout proche et à se réfugier au Bénin.

L’obscurité, l’isolement, la précarité, les violences gravées dans les mémoires entretiennent la peur. "La nuit dernière -jeudi 19 mai-, une panne de courant a provoqué la panique, témoigne un volontaire de la Croix-Rouge. Les gens sont sortis des tentes. Ils croyaient que des soldats venaient les tabasser. Ils voyaient des espions partout."

Pendant la journée, il faut montrer patte blanche, jurer que l’on ne prendra aucune photo, promettre que l’on ne demandera pas le moindre nom, pour qu’un dialogue s’instaure. Car les rumeurs, invérifiables, courent : de faux réfugiés "à la solde de Faure -Gnassingbé, le nouveau chef de l’Etat et fils du président décédé Eyadéma-" auraient tenté de s’introduire dans le camp pour prendre des photos avec des portables ; "on" aurait vu une femme tentant d’empoisonner des réfugiés...

Passé le premier moment de méfiance, les témoignages fusent par dizaines, convaincants à force d’être répétitifs : militants de l’opposition ou jeunes émeutiers décidés à en finir avec la dictature, ils ont, selon leurs propos, affronté l’armée dans la rue, entendu siffler les balles, parfois été blessés, à moins que des soldats ne soient nuitamment venus les chercher et qu’ils aient fui. Aux récits des victimes de la répression qui a suivi la proclamation de la victoire du "petit Faure" ­ elle aurait fait entre 58 et 811 morts, selon les sources ­ s’ajoutent ceux des nouveaux arrivants, repérés parce qu’ils promènent des sacs de vêtements et ont l’air hagard. Ces derniers affirment que "les militaires continuent d’entrer dans les maisons" , qu’ils "cherchent les jeunes pour les emmener vers des destinations inconnues" . Ils tendent à expliquer pourquoi, près d’un mois après le scrutin, près de 500 Togolais continuent de chercher refuge chaque jour au Bénin ou au Ghana, l’autre pays frontalier.

"NOUS AVONS ÉTÉ DOIGTÉS"

"Hier -mercredi 18 mai-, on a kidnappé mon frère. Il avait fait la campagne de l’opposition" , témoigne Kofi, un menuisier d’Aneho, en arrivant à Lokossa avec dix membres de sa famille. "Ce que j’ai vu, je n’ai même pas la bouche pour en parler, finit par lâcher une vieille femme venue de Lomé. Les militaires sont rentrés chez moi, ils ont pris mon fils. Maintenant, ils font ça en cachette, en pleine nuit."

Laurent, Sylvestre ou Théophile, des jeunes rencontrés dans la file d’attente du HCR à Cotonou, ou dans les camps de Lokossa et Comé, utilisent tous la même expression : "Nous avons été doigtés" , disent-ils pour signifier que des mouchards de l’ex-parti unique les ont désignés aux forces de l’ordre. Certains admettent avoir participé à des violences. Tous expliquent qu’ils ont traversé la frontière "par la lagune" ou la rivière, afin d’éviter les douaniers qui, selon eux, possèdent un fichier de noms et de photos.

Daniel, 26 ans, qui "encadrait les meetings" de l’opposition à Lomé, avait constitué "un petit groupe de résistants comme Lech Walesa en Pologne" . Le soir du scrutin, il affirme avoir refusé de remettre l’urne du bureau de vote qu’il surveillait aux "bérets rouges" qui voulaient s’en emparer, puis s’être enfui en mobylette quand "des jeunes du quartier" ont donné son nom.

Edouard, 22 ans, délégué de l’Union des forces de changement (UFC, le principal parti d’opposition), lui, a quitté Atakpamé avec sa soeur "parce qu’on tirait sur tout ce qui bouge" . Il ne rentrera que "quand l’opposition aura rééduqué l’armée" : ses copains qui ont cru aux messages rassurants et sont rentrés depuis "se sont fait bastonner ou ont disparu" . Lui dit avoir marché trois jours durant, avant de trouver un automobiliste qui l’a conduit au Bénin. Mike, un étudiant de 23 ans, observateur du vote "pour l’église catholique" , a demandé, le 13 mai, à un copain d’aller prendre chez lui "deux chemises et deux pantalons" parce que sa mère l’avait prévenu que des militaires étaient venus le chercher.

Plusieurs autres affirment avoir vu tomber des proches, brûler leur maison ou appris qu’elle avait été saccagée. Ils montrent leurs crânes couturés, leurs pansements, leurs multiples cicatrices, ils tendent des photos d’eux blessés, de leur maison incendiée.

Les responsables sanitaires des camps le confirment : de "nombreux blessés par balles" ont été soignés à la fin avril. Quatorze d’entre eux ont été recensés au camp de Comé, le premier à avoir été ouvert.

"FATIGUÉS, FATIGUÉS"

"Tout le monde est sur les nerfs" , témoigne un humanitaire. Une femme dont le fils et le frère ont été tués erre en divaguant tandis que Nicolas, 22 ans, serre les dents en répétant sur un rythme saccadé : "Mon pays n’est pas un royaume. On est fatigués, fatigués."

La réalité de cette concentration humaine politisée mais isolée paraît bien éloignée de la perception de ce proche du pouvoir togolais qui voit des réfugiés "manipulés et intoxiqués, accumuler les armes pour repartir à la conquête du pays" . Venue d’un cadre de l’UFC qui rêve d’une radicalisation des jeunes réfugiés dans les camps, la réponse claque : "Si nous avions des armes, et si la France ne tuait pas la démocratie chez nous, nous ne serions pas ici."

Philippe Bernard


M. Akitani hospitalisé en France en urgence

Emmanuel Bob Akitani, 74 ans, le principal candidat de l’opposition lors de l’élection présidentielle du 24 avril, a été hospitalisé, vendredi matin 20 mai, de toute urgence à l’Hôpital américain de Neuilly, en région parisienne, pour des "problèmes neurologiques" , a-t-on appris de source médicale. L’accident cérébral dont il a été victime au Togo aurait provoqué une paralysie de la partie gauche du visage ainsi que du bras gauche de M. Akitani, mais on ignore si une intervention chirurgicale est prévue.

Emmanuel Bob Akitani avait recueilli 38,19 % des suffrages, Faure Gnassingbé, fils du défunt président Eyadéma Gnassingbé, remportant 60,22 % des voix. ­ (AFP.)


Barnier : ’’Peuple togolais, peuple ami’’

19/5/2005

Source : www.republicoftogo.com

Le ministre français des Affaires étrangères Michel Barnier (photo) a annoncé jeudi qu’il irait expliquer "dans quelques semaines en Afrique" une "nouvelle" approche vis-à-vis du continent axée autour d’un "vrai partenariat d’une Union européenne qui respecte les Africains".

M. Barnier, qui envisage de prononcer début juin dans un pays africain un discours qualifié d’"important" par un diplomate, a déclaré sur les ondes de Radio France internationale (RFI) que cette "attitude nouvelle", davantage multilatérale, s’appliquait notamment au Togo et à la Côte d’Ivoire.

Pour le Togo, maintenant qu’une élection présidentielle a eu lieu, la France souhaite, "derrière" l’Union africaine et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest (CEDEAO), qu’un "gouvernement d’union nationale" soit formé. Un souhait partagé par le nouveau président du Togo, Faure Gnassingbé, qui l’a appelé de ses voeux à plusieurs reprises pendant la campagne.

"Nous aiderons le peuple togolais, un peuple ami, à reconstruire, dans le cadre de l’Union africaine et avec l’Union européenne. Nous le ferons avec cette attitude nouvelle, que je vais expliquer dans quelques semaines en Afrique, d’un vrai partenariat d’une Union européenne qui respecte les Africains et qui veut être partenaire de leur développement", a encore indiqué le chef de la diplomatie française.


Gilchrist Olympio, chef de l’opposition togolaise en exil

"Nous voulons la constitution d’un gouvernement démocratique"

LE MONDE édition du 20.05.05

ilchrist Olympio, chef historique de l’opposition togolaise, en exil, vous avez déclaré que vous n’entreriez pas dans le gouvernement d’union nationale que dit vouloir former Faure Gnassingbé. Pourquoi participez-vous à la réunion d’Abuja, qui porte précisément sur cette perspective ?

Ceux qui croient que nous allons discuter de notre entrée dans le gouvernement du "petit Eyadéma" -Faure Gnassingbé- se trompent. Nous allons parler de la crise humanitaire provoquée par l’afflux de réfugiés fuyant la répression. Nous allons demander au pouvoir s’il accepte la compétence de la Cour pénale internationale pour juger ceux qui, lors de l’élection présidentielle, ont fait sortir les troupes de combat pour tuer des civils désarmés. Nous allons exiger aussi de consulter les procès-verbaux électoraux authentifiés, qui ne nous ont jamais été communiqués.

L’heure est-elle encore à la contestation de l’élection présidentielle du 24 avril ?

Faure Gnassingbé n’a pas gagné l’élection : il a été élu par moins de 10 % des voix et a tué 800 personnes. Il faut reprendre le processus électoral, non plus sous l’autorité du gouvernement togolais, mais d’une commission électorale indépendante appuyée par l’Union africaine -UA-, l’Union européenne -UE-, les Etats-Unis et le Canada. L’organisation d’une nouvelle élection présidentielle est la condition sine qua non de notre participation à un gouvernement de transition. Il s’agit de se donner six mois pour rendre possible la tenue d’une élection libre : révision transparente des listes électorales, réforme constitutionnelle et de la législation sur les médias. Le respect d’un cahier des charges doit être garanti par des partenaires extérieurs et prévoir la présence d’une force militaro-policière de l’UA afin d’assurer la liberté du vote.

L’armée togolaise laissera-t-elle s’accomplir un tel scénario ?

Le passage à une armée nationale et républicaine est un enjeu primordial. Beaucoup de gens servent aujourd’hui dans l’armée pour des raisons économiques. La réduction des effectifs doit s’effectuer très progressivement, avec des compensations financières et sous le contrôle de la communauté internationale. Le recrutement doit aussi changer, avec un plan de formation et une modification des missions. La police doit être équipée pour s’occuper des problèmes quotidiens, non pour tuer.

En multipliant les exigences, n’allez-vous pas au-devant d’un échec ?

Nous allons précisément à Abuja pour éviter ce scénario. Tout ce que nous voulons, c’est la constitution d’un gouvernement démocratique. Il en existe en Afrique. Le Togo ne deviendra pas le Danemark du jour au lendemain. Ce que nous refusons, c’est de marcher à reculons.

Le conflit ne risque-t-il pas de dégénérer en opposition ethnique entre le Nord acquis au pouvoir et le Sud favorable à l’opposition ?

Nous craignons effectivement que les événements ne dégénèrent en lutte ethnique. Ceux qui tuent les opposants appartiennent à 80 % à la tribu de M. Eyadéma. Il n’est donc pas étonnant que, dans l’imagination populaire, les tueurs soient des Kabyés. Mais l’opposition Nord-Sud est une invention de Gnassingbé Ier -le général Eyadéma- que la France a très bien adoptée. Il avait fondé son pouvoir sur l’armée et le tribalisme. La réalité est qu’il n’existe pas d’entités monolithiques. Certains dirigeants de mon parti sont du Nord.

Les Togolais ne sont-ils pas las de l’éternel affrontement entre la famille Olympio et la famille Gnassingbé ?

Le débat politique togolais n’est pas une affaire de familles. Les jeunes voient leur avenir hypothéqué par "Eyadéma bis" . Si j’avais 20 ans, je serais sur les barricades comme eux. Que le leader soit moi ou un autre change peu. Mais la réalité est que beaucoup de mes amis ont été tués et que, pendant des années, il n’y a pas eu beaucoup de candidats pour faire la guerre à Eyadéma.

Propos recueillis par Philippe Bernard

Le pouvoir et l’opposition face à face à Abuja

Le pouvoir et l’opposition devaient se retrouver, jeudi 19 mai à Abuja, au Nigeria, en présence de plusieurs chefs d’Etat de la région, pour des discussions sur la formation du gouvernement que le Togo attend depuis l’élection, le 3 mai, de Faure Gnassingbé à la présidence. Convoquée à l’initiative du chef de l’Etat nigérian et président en exercice de l’Union africaine (UA), Olusegun Obasanjo, la rencontre devrait être le point d’orgue des pressions exercées par les Etats de la région pour amener le pouvoir et l’opposition à trouver une solution permettant d’assurer au Togo un minimum de stabilité. Côté togolais, les représentants du pouvoir font face aux représentants de l’opposition "modérée" , prête à participer au gouvernement, mais surtout aux dirigeants de la coalition des six partis d’opposition, qui estime que la victoire électorale lui a été ravie par la fraude. L’attitude de Gilchrist Olympio devrait être, à cet égard, cruciale. La controverse née du bilan de la répression (de 58 à 811 morts, selon les sources) devrait aussi peser sur les discussions.


Togo : Plus de 800 morts depuis la mort d’Eyadema, selon une ONG

Source INTER PRESS SERVICE - 17/05/2005

Par Noël Kokou Tadégnon

Le Togo a enregistré 811 morts et 4.508 blessés des suites de violences politiques depuis le décès de l’ancien président Gnassingbé Eyadema, le 5 février, affirme un rapport de la Ligue togolaise des droits de l’Homme (LTDH).

Publié ce week-end à Lomé, le rapport de la LTDH est rejeté par le gouvernement. La LTDH est une organisation non gouvernementale (ONG) basée dans la capitale togolaise.

Ce rapport devrait être publié vendredi, à Lomé, au cours d’une conférence de presse qui n’a pas pu se tenir. Selon un communiqué de la LTDH, une cinquantaine de miliciens du Rassemblement du peuple togolais (RPT), le parti au pouvoir de Faure Gnassingbé, ont fait irruption dans les locaux de la LTDH pour perturber la conférence de presse.

Intitulé ’Stratégie de la terreur au Togo (II) - Un règne aussi court que sanglant’, le rapport qui recense les violations des droits de l’Homme commises dans le pays depuis le 5 février, a été finalement rendu public samedi.

Le rapport indique qu’il y a eu 21 morts et 163 blessés avant la campagne de l’élection présidentielle du 24 avril, et 790 morts et 4.345 blessés depuis la période de révision des listes électorales jusqu’au 5 mai. "Soit au total 5.319 victimes occasionnées par la répression organisée par le gouvernement".

Selon la LTDH, "c’est du jamais vu dans toute l’histoire du Togo". Elle demande l’intervention urgente d’une force d’interposition et la mise sur pied d’une commission d’enquête internationale indépendante sur les "crimes abominables perpétrés par les putschistes contre le peuple togolais".

"Les droits de l’Homme avant, pendant et après l’élection présidentielle ont été violés au Togo, la dignité humaine n’est pas respectée et nous tenons le pouvoir pour responsable", a déclaré à IPS, Eklou Clumson, vice-président de la LTDH.

Pitang Tchalla, ministre togolais de la Communication et porte-parole du gouvernement togolais, a récusé le rapport qu’il a qualifié de "plaisanterie de mauvais goût". Selon lui, "Cela frise le ridicule, ce genre de chiffres".

"Avant la tenue des élections, les leaders les plus extrémistes de l’opposition avaient proclamé que les résultats se joueraient dans la rue, et dès la proclamation des résultats provisoires, des actions violentes et concertées ont été menées conformément à ce plan", a ajouté Tchalla.

"Ce rapport de la LTDH est partisan, il ne prend pas en compte les victimes du RPT", regrette Chantal Labane, une étudiante en droit à l’Université de Lomé.

La coalition des six partis de l’opposition radicale demande également une enquête internationale indépendante. "La mise en place d’une commission d’enquête internationale indépendante est un préalable à toute discussion", a dit à IPS, Yaovi Agboyibo, coordinateur de la coalition.

"Nous n’avons aucune confiance en des experts indépendants togolais, de la CEDEAO, voire africains en général, il faut que l’enquête soit menée par une commission indépendante internationale", a déclaré aux journalistes, Zeus Ajavon, porte-parole d’un collectif des associations et organisations de la société civile.

La CEDEAO est la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest qui a avalisé les résultats de l’élection présidentielle du 24 avril remportée par Faure Ganssingbé, le fils de l’ancien président. Mais l’opposition et les organisations de la société civile du Togo ont dénoncé le parti pris de la CEDEAO.

Claude Vondoli, président du Mouvement togolais de défense des libertés et des droits de l’Homme (MTDLDH), proche du pouvoir, a demandé également aux nouveaux dirigeants du Togo de faire la lumière sur les violations des droits de l’Homme pendant et après le scrutin. Il demande au gouvernement de situer les responsabilités dans les actes de vandalisme et de violation des droits civiques, et de dédommager les victimes.

Vondoli s’est refusé à commenter le rapport de la LTDH. Son mouvement se propose de rendre public, la semaine prochaine, un autre rapport sur la situation des droits de l’Homme au Togo. Il est également le porte-parole du Réseau des associations, organisations de la société civile du Togo, une autre structure de la société civile regroupant des associations proche du parti au pouvoir. Selon des observateurs à Lomé, tout laisse croire que ce rapport du MTDLDH portera uniquement sur les violences subies par les membres du parti au pouvoir.

Le 12 mai, les médias officiels ont annoncé que le président déclaré élu, Faure Gnassingbé, envisageait la mise sur pied d’une commission d’enquête nationale indépendante.

Pendant ce temps, les Togolais continuent de fuir leur pays. "Nous avons fui depuis les attaques de l’armée contre notre quartier, et nous sommes revenus du Ghana dimanche (8 mai) pour reprendre les cours parce que nous sommes en période d’examen, mais le mercredi matin, des militaires sont partis arrêter mon frère à l’école", témoigne à IPS, un jeune élève de Lomé qui a requis l’anonymat.

Selon les derniers chiffres du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), plus de 26.000 réfugiés togolais se trouvent au Bénin et au Ghana, deux pays voisins.

"Le flux de réfugiés du Togo vers les pays voisins, Bénin et Ghana, a ralenti aux points de frontière officielle, mais des groupes de réfugiés ayant traversé la frontière à des points de passage non gardés ont été récemment localisés dans les deux pays, portant le total de réfugiés à 26.084", a indiqué Ron Redmond, le porte-parole du HCR, lors d’un point de presse à Genève, vendredi.

Le MTDLDH a demandé, dans un communiqué publié vendredi, aux Togolais réfugiés dans les pays voisins de regagner le Togo. "Le MTDLDH lance un appel à tous les compatriotes ayant fui le territoire à cause des violences, à revenir dans leurs foyers respectifs, afin de reprendre leurs activités et de participer à la construction nationale".

Le mouvement déclare les rassurer qu’aucun climat de terreur ne règne au Togo, contrairement aux rumeurs. "Les activités économiques reprennent leur cours normal et les populations vaquent librement à leurs occupations dans un climat détendu et de quiétude", affirme le MTDLDH.

"Les gens reviennent, mais ils sont arrêtés, c’est pourquoi moi, je demande à mes frères qui sont au Bénin et au Ghana de ne pas rentrer pour le moment", conseille le jeune élève qui a requis l’anonymat.

Inter Press Service (Johannesburg)

16 Mai 2005
Publié sur le web le 16 Mai 2005
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Lettre de la Ligue togolaise des droits de l’Homme au ministre de la Défense.

Le 13 mai 2005

Demande de protection de la population

Excellence Monsieur le Ministre,

Nous avons l’honneur de porter à votre connaissance en vertu de l’article 48 de la constitution de la IV République les faits suivants.

Après la visite du Ministre de la Justice et chargé de l’Intérieur par intérim, du Ministre chargé des Relations avec de Parlement et la Ministre de la Culture à Aného dans la Préfecture des Lacs invitant les réfugiés togolais ayant fui au Bénin et au Ghana à rentrer au pays en toute sécurité et quiétude, leur appel a été entendu par certains réfugiés qui sont rentrés dans leurs localités.

Mais la LTDH a eu à constater, avec consternation, que cet appel au retour n’a été qu’un piège tendu à ces personnes dont certaines étaient des délégués de l’opposition dans les bureaux de vote de l’élection présidentielle du 24 avril 2005.

Certains réfugiés ont été arrêtés arbitrairement ou ont dû reprendre le chemin de l’exil et d’autres sont activement recherchés. La chasse à l’homme se poursuit sur toute l’étendue du territoire.

La LTDH déplore l’irruption nocturne des gendarmes dans les maisons après avoir escaladé les murs d’enceinte et défoncé les portes des habitations ainsi que les arrestations illégales et arbitraires dans presque toutes les préfectures du pays.

La LTDH attire votre attention sur le fait que des gendarmes ont tiré des coups de feu dans la nuit du 10 au 11 mai 2005 à Agbodrafo et dans l’enceinte du CEG avec tout le risque que cela comportait pour la sécurité des enfants.

Face à cette situation qui n’honore pas notre pays, la LTDH vous demande, Monsieur le Ministre, d’user de votre autorité pour faire cesser les exactions et les violations massives des droits de l’Homme qui contribuent à créer un climat de terreur et d’anarchie au Togo.

La LTDH vous demande la libération immédiate de toutes les personnes arrêtées arbitrairement au cours de la campagne de répression.

Veuillez agréer, Excellence Monsieur le Ministre, l’expression de notre haute considération.

Le Vice-Président,
Etsri Hihédéva CLUMSON-EKLU

Ampliations
  Ministre de l’Intérieur, de la Sécurité et de la Décentralisation
  Monsieur le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice
  Ministre Chargé de la Démocratie et de l’Etat de Droit
  Ministre de la Communication et de la Formation Civique


TOGO Trois semaines après l’élection présidentielle, entachée de violences et de fraudes, les arrestations se poursuivent.

Les eurodéputés critiquent la politique africaine de la France

Le Figaro
Patrick de Saint-Exupéry
[13 mai 2005]

La diplomatie française en Afrique est dans le collimateur du Parlement européen. Dans une résolution d’une rare fermeté, les eurodéputés n’ont pas hésité à mettre en cause l’attitude observée par Paris au lendemain du scrutin présidentiel togolais du 24 avril, un scrutin marqué par de nombreuses violences et irrégularités.

Pour les députés de Strasbourg, qui n’y vont pas par quatre chemins, « les conditions dans lesquelles s’est déroulée l’élection du 24 avril (...) ne permettent pas de reconnaître la légitimité des autorités issues de ce scrutin ». En conséquence, les Etats membres sont invités « à s’abstenir de toute déclaration unilatérale sur la régularité des élections » afin de « rechercher une position commune au sein de l’UE ».

La pique à l’attention de Paris est évidente. Au lendemain du scrutin du 24 avril, la diplomatie française était montée au créneau pour souligner les « conditions globalement satisfaisantes » dans lesquelles avaient eu lieu les opérations de vote. Mais elle dépasse le seul Quai d’Orsay pour toucher également l’Elysée qui, voici une semaine, a adressé au vainqueur proclamé du scrutin, le fils du général Eyadéma, ses « félicitations » accompagnées de « vœux de plein succès ».

La réserve présente dans le télégramme signé du président jacques Chirac - « mettre concrètement en œuvre l’ouverture politique » - n’a visiblement pas permis d’atténuer l’ire des eurodéputés.
La France est le seul pays occidental à s’être autant impliqué, au risque du parti pris, dans la crise togolaise.

Le commissaire européen à la Coopération, Louis Michel, s’est contenté de « prendre note » du résultat des élections tout en souhaitant que le pays « entre dans la voie de la réconciliation ». Washington a émis de nombreuses réserves. Et différents diplomates, visiblement outrés, se sont arrangés pour faire « fuiter » des rapports accréditant la thèse d’une fraude massive.

Conscientes du côté « calamiteux » de cette élection, pour reprendre un mot déjà entendu sur le dossier ivoirien, les nouvelles autorités togolaises s’efforcent aujourd’hui de présenter un profil plus avenant : l’ancien premier ministre du général Eyadéma, Agboyomé Kodjo, arrêté peu avant le scrutin alors qu’il revenait d’exil, a été relâché et Faure Gnassingbé vient d’annoncer la mise sur pied d’une commission chargée d’enquêter sur les violences liées au scrutin du 24 avril.

Dans le même temps, les négociations lancées afin de mettre en place un gouvernement d’union nationale semblent progresser.

Mais il est à craindre que ces annonces, cosmétiques selon de nombreux observateurs, qui relèvent que le général Eyadéma en avait usé en son temps, ne suffisent pas. De passage à Paris, le président de la Ligue togolaise des droits de l’homme (LTDH), Adote Ghandi Akwei, a fait part de son extrême pessimisme : « Nous étions, a-t-il expliqué au Figaro, l’une des rares organisations de la société civile à avoir encore l’oreille de la population et nous constatons qu’aujourd’hui nous n’avons plus aucune prise.

Les jeunes ne voient comme seule issue que la violence. Et quand nous tentons de leur expliquer que ce n’est pas la meilleure voie, qu’il faut attendre, ils ne nous écoutent plus. »

Évoquant une « paix des cimetières », le président de la LTDH affirme que les « ratissages, les arrestations et les chasses à l’homme » se poursuivent toujours : « Les gens sont terrorisés, il est impossible de faire un travail d’enquête au Togo et, moi-même, je suis un demandeur d’asile en sursis », conclut-il.


Résolution du 12 Mai du Parlement européen condamnant les élections togolaises

Gravement préoccupé par la flambée de violence qui a suivi les élections présidentielles contestées du 24 avril au Togo, le Parlement a adopté par 56 voix pour, 3 contre et 4 abstentions, une résolution commune condamnant fermement la répression violente par les forces de l’ordre contre les personnes contestant la régularité du scrutin.

Les violences qui secouent aujourd’hui le Togo ont débuté le 26 avril, lorsque Faure Gnassingbe, fils d’Eyadéma Gnassingbe, a été déclaré vainqueur des élections avec 60% des voix contre 38% à son adversaire Emmanuel Bob-Akitani.

Une répression brutale a suivi à l’encontre des membres de l’opposition qui dénonçaient de graves irrégularités dans l’établissement des listes électorales et la distribution des cartes d’électeurs. Par ailleurs, dans plusieurs bureaux de vote, les urnes ont été emportées par les forces armées dès la fermeture des bureaux et les représentants de l’opposition n’ont pas été autorisés à prendre part aux travaux de la Commission électorale indépendante. Pourtant, la Cour constitutionnelle du Togo a confirmé Faure Gnassingbe comme vainqueur de l’élection présidentielle et a rejeté un appel de l’opposition arguant que l’élection avait été faussée.

Les réactions internationales concernant le scrutin ont été diverses jusqu’à présent, la France et la Communauté économique des états de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) le qualifiant de satisfaisant malgré quelques irrégularités, alors que les États-Unis contestent la légitimité des résultats.
Le Parlement européen, pour sa part, considère que les conditions dans lesquelles s’est déroulée l’élection du 24 avril ne permettent pas de reconnaître la légitimité des autorités issues de ce scrutin. Il demande aux autorités togolaises d’envisager de nouvelles élections présidentielles démocratiques, libres, équitables et transparentes sous contrôle international, et après une révision consensuelle du code et des listes électorales.

Les députés demandent la mise en place d’une commission d’enquête indépendante pour faire la lumière sur les exactions commises et établir les responsabilités aux fins de juger leurs auteurs conformément au droit à un procès équitable.

Finalement, les députés soulignent que ces élections ne répondent pas aux conditions préalables à la reprise de la coopération entre le Togo et l’Union européenne. Il exhorte les autorités togolaises à respecter les engagements pris dans le cadre de l’accord de Cotonou en ce qui concerne la restauration de la démocratie et le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.


Le HCR enregistre plus de 26 000 réfugiés togolais au Bénin et au Ghana

13 mai 2005 -

Le nombre de Togolais qui ont fui le Togo depuis l’annonce du résultat des élections le 26 avril dernier, pour se réfugier au Bénin et au Ghana, pays voisins, s’élève maintenant à 26.084, selon l’agence des Nations Unies pour les réfugiés qui indique que si le flux a ralenti, des réfugiés continuent de traverser aux points de passage non gardés.

« Le flux de réfugiés du Togo vers les pays voisins Bénin et Ghana a ralenti aux points de frontière officielle mais des groupes de réfugiés ayant traversé la frontière à des points de passage non gardés ont été récemment localisés dans les deux pays, portan le total de réfugiés à 26 084, a indiqué aujourd’hui le porte-parole du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), Ron Redmond, lors d’un point de presse à Genève.

« Au Ghana, les arrivées quotidiennes au point de frontière officiel d’Aflao, situé tout près de la capitale togolaise, Lomé, se comptent sur les doigts de la main puisque seulement trois personnes s’y sont présentées jeudi. Pourtant, a expliqué Ron Redmond, une mission d’évaluation a localisé des arrivées additionnelles, quelques-unes dans des régions très éloignées et difficiles d’accès le long de la frontière ».

Le nombre de réfugiés au Ghana pourrait s’élever à 12 800, selon le porte-parole.

« Alors que la plupart des réfugiés au Ghana ont trouvé un abri grâce à des familles généreuses et des amis, leurs ressources commencent à diminuer et nous devons d’urgence distribuer de la nourriture et fournir une assistance non alimentaire telle que des nattes, des jerrycans, des moustiquaires, du savon », a indiqué Ron Redmond.

« Une mission d’évaluation conjointe en besoins alimentaires entre les différentes agences des Nations Unies se met en place le long des 200 km de frontière Est avec le Togo depuis la zone sud de Jasikan / Kadjebi vers Aflao. Les résultats de cette mission sont attendus pour la fin de la semaine prochaine ».

Au Bénin, 15 218 réfugiés ont été maintenant enregistrés avec un rythme soutenu d’arrivées qui se situe entre 140 et 150 arrivées par jour. Ces réfugiés sont enregistrés au point de frontière officiel de Hilakondji », a affirmé le porte-parole.

« C’est, de loin, nettement moins que le pic d’afflux massif de plus de 1000 arrivées quotidiennes. Alors que la plupart des réfugiés continuent d’arriver à Hilakondji, plusieurs centaines de réfugiés ont été localisés dans des camps au centre du Bénin, dans les Collines, dans les régions de Otola et Djidja à près de 230 km au nord de la capitale Cotonou », a-t-il expliqué.

« Près de 59 % de la population réfugiée au Bénin sont hébergés par des membres de leurs familles ou des amis et 41 % vit dans les deux camps de Lokossa et Comé. Il n’y a plus de réfugiés restant au centre de transit de Hilakondji basé dans des églises. Les installations sanitaires dans les deux camps ont été améliorées avec la construction de latrines supplémentaires et de douches ».

Source : Centre de Nouvelles ONU


Paris et Berlin font des analyses contradictoires de la crise au Togo
LE MONDE | 13.05.05 | 14h07

Paris, par la voix de Jacques Chirac, lui a adressé ses "félicitations" et ses "voeux de plein succès" . L’Allemagne s’en est bien gardée, préférant exprimer ses "doutes concernant le déroulement des élections" du 24 avril qui ont porté Faure Gnassingbé à la présidence du Togo. La Commission de Bruxelles a sobrement "pris note" de l’élection du fils du défunt dictateur Eyadéma officiellement proclamée le 3 mai. Synthèse européenne ? Non, car le Parlement européen a mis les pieds dans le plat, jeudi 12 mai, en affirmant qu’il ne pouvait pas "reconnaître la légitimité" de M. Gnassingbé.

Trois semaines après un scrutin très controversé suivi d’émeutes, le nouveau président est non seulement en quête de partenaires au sein de l’opposition, pour constituer le "gouvernement de large union" qu’il a promis, mais aussi d’une légitimité internationale que les fraudes constatées lors du vote et la répression rendent incertaine. M. Gnassingbé a obtenu un brevet de respectabilité de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) dont les observateurs avaient avalisé le scrutin, au grand dam de l’opposition qui estime que la victoire lui a été volée. Les Etats-Unis lui ont même donné du "président Gnassingbé" , tout en l’"exhortant à mettre fin à la violence" .

Mais c’est surtout dans ses relations avec l’Union européenne, dont l’aide a été suspendue voici douze ans pour manquements graves à la démocratie, que se joue l’avenir du Togo. Officiellement, le retour de cette manne, qui doit récompenser la satisfaction de 22 conditions liées au retour des libertés démocratiques, figure au premier rang des priorités du nouveau président. Les négociations sur ces 22 points étaient d’ailleurs déjà avancées au moment du décès de son père. Or il se trouve que les deux principaux partenaires diplomatiques du Togo ­ la France et l’Allemagne ­, garants potentiels de ces avancées, sont loin de partager le même regard sur l’élection togolaise et de nourrir des exigences identiques quant à la démocratisation de ce pays après 38 ans de régime totalitaire.

Cette rivalité n’est pas nouvelle : plongeant ses racines dans l’histoire coloniale qui vit la France et la Grande-Bretagne se partager le Togo allemand après 1918, elle s’est manifestée tout au long du règne Eyadéma. La République fédérale n’a jamais caché son hostilité à un régime considéré par Jacques Chirac comme ami de la France. Le récent scrutin n’a fait que renforcer cet antagonisme. Au point qu’un haut responsable diplomatique français estime qu’"il existe presque un conflit avec l’Allemagne sur le Togo" . "Peut-être une différence d’appréciation" , concède-t-on de source diplomatique allemande. De fait, alors que l’Allemagne n’a pas caché son scepticisme à l’égard de l’élection du 24 avril et sa réprobation à propos des interventions de l’armée, la France analyse comme un "moindre mal" l’arrivée au pouvoir à Lomé du fils Eyadéma.

Officiellement, la France ne fait que suivre les positions de la Cedeao dont les représentants, estime-t-on à Paris, "sont mieux placés que nous pour faire accepter des concessions politiques" . "Il faut faire évoluer l’idée selon laquelle les décisions se prennent à Paris" , avance-t-on encore.

Mais ce discours du désengagement masque une forte implication et des jugements marqués. Certes, reconnaît un autre haut responsable, l’élection de M. Gnassingbé a été marquée par des irrégularités, mais les résultats auraient été identiques sans fraude. D’ailleurs, fait-on valoir, "la pratique de la démocratie ne va pas s’imposer immédiatement dans un pays qui ne l’a pas connue depuis quarante ans. L’exigence est moindre, non parce qu’il s’agit de l’Afrique, mais parce qu’il s’agit d’une élection de sortie de crise" .

Réputée proche de l’opposant Gilchrist Olympio, l’Allemagne ne l’entend pas de cette oreille. Après avoir pesé pour que soit coupée l’aide européenne en 1993, elle place la barre haute pour son rétablissement. Deux épisodes récents risquent de compliquer le dialogue franco-allemand. Depuis le 6 mai, un ensemble de notes confidentielles d’un représentant de l’Union européenne au Togo faisant état de "présomptions de fraude massive" à la présidentielle, est diffusé sur un site Internet d’opposants togolais (diastode.org). Désavouées dans l’entourage de Louis Michel, commissaire au développement, ces notes n’ont toutefois pas été qualifiées de faux. Des rumeurs invérifiables, à Bruxelles, attribuent la fuite à une indiscrétion allemande, démentie à Berlin.

L’autre affaire concerne le sort de François Boko, le ministre de l’intérieur togolais démis de ses fonctions après qu’il eut dénoncé le processus électoral. M. Boko, avait choisi pour refuge l’ambassade d’Allemagne à Lomé. Mais cette situation lourde de tension germano-togolaise ne pouvait s’éterniser. Il a fallu les bons offices de la France auprès de M. Gnassingbé et de son armée pour que, le 5 mai, l’ancien ministre puisse quitter son refuge sans risquer sa vie et être exfiltré vers Paris. Tandis que, de source allemande, on exprime de la "gratitude" à l’égard de l’intervention de la France, on ne cache pas, à Paris, que ce service rendu vaudra un renvoi d’ascenseur, lorsqu’il s’agira d’aider le nouveau président togolais à sortir son pays d’un climat d’opprobre persistant.

Philippe Bernard
Article paru dans l’édition du 14.05.05


L’intenable position de la France au Togo. Alors que l’UE et les Etats-Unis dénoncent une présidentielle entachée de fraudes, Paris félicite le nouvel élu.

Par Christophe AYAD
Libération. Samedi 07 mai 2005

C’est une fuite dont Paris se serait bien passé. Selon une série de notes d’information confidentielles, rédigées par la représentation de l’Union européenne à Lomé et mises en ligne par l’opposition togolaise (1), l’élection le 24 avril du nouveau président togolais Faure Gnassingbé ­ qui a succédé à son père au terme d’un scrutin controversé ­ est entachée de fraudes majeures, à même de fausser les résultats. Les auteurs de ces notes relèvent ainsi l’existence de 900 000 électeurs fictifs, principalement concentrés dans le nord du pays, favorable au pouvoir, sur 3,5 millions d’inscrits. A l’inverse, 390 000 électeurs ont été empêchés de voter à Lomé, la capitale acquise à l’opposition, faute de carte d’électeur. Le jour du scrutin, les observateurs de l’UE ­ qui a officiellement refusé de superviser le scrutin tant les conditions d’une élection honnête n’étaient pas réunies ­ ont noté des enlèvements d’urnes par les forces de l’ordre, la présence de faux bulletins pré-imprimés, etc. Bref un « système de fraude généralisée ».

Félicitations. Cela n’a pas empêché Jacques Chirac de féliciter le nouvel élu, dans un message rendu public vendredi : « Permettez-moi de vous adresser mes félicitations et mes voeux de plein succès », écrit le chef de l’Etat français. « Je formule le voeu que vous puissiez désormais concrètement mettre en oeuvre l’ouverture politique », ajoute-t-il. Le ministre français des Affaires étrangères s’était déjà félicité en début de semaine du « bon déroulement » de la présidentielle au Togo. Face au tollé provoqué par ces propos, le Quai d’Orsay s’était alors abrité derrière la thèse du malentendu : Barnier se serait contenté de saluer le fait que le scrutin avait pu se tenir...

Mais les représentants européens battent cette explication en brèche : les Etats-Unis et l’UE, écrivent-ils en substance, estiment, « contrairement à la France », que l’élection de Faure Gnassingbé s’est déroulée dans des conditions contestables. Force est de constater que Paris n’a rien trouvé à redire, contrairement à Washington, qui a avalisé les résultats tout en estimant que les élections n’étaient « pas à la hauteur de ce qu’on pouvait attendre ». La France s’abrite derrière la décision de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) d’avaliser le scrutin.

Paris est sur la défensive, gêné au point qu’un haut responsable a dû effectuer une longue mise au point cette semaine. « De toute façon, en Afrique, il n’y aura jamais d’élections de la qualité du Danemark ou de la Suède », s’agace-t-il. D’après lui, ce qui s’est appliqué au Togo, c’est la « nouvelle politique africaine de la France ». Le principe de base censé la gouverner est « l’Afrique aux Africains » : en conséquence de quoi Paris s’est aligné sur les avis de la Cedeao. Et, quand il s’est agi de convaincre Faure Gnassingbé de renoncer à la « folie » des généraux qui ont voulu le placer sur le fauteuil de son père décédé, Paris s’est employé sans compter. Le problème, c’est que Paris a son propre plan pour le Togo. Persuadée qu’une victoire de l’opposition aurait provoqué « une guerre civile ou un coup d’Etat militaire », la diplomatie française considère que seul Faure Gnassingbé, paré de toutes les vertus de la « jeunesse » et de la « modernité », est en mesure de mater les généraux qui tiennent le Togo. Seuls nos « amis allemands », aveuglés par leur soutien à l’opposition « radicale » de Gilchrist Olympio, n’auraient rien compris à ce sage raisonnement. Depuis les élections, les relations entre Paris et Berlin sont d’ailleurs glaciales sur le Togo. Un dossier compliqué par la présence à l’ambassade d’Allemagne du ministre sortant de l’Intérieur, François Boko, qui avait appelé au dernier moment au report d’une élection qu’il jugeait « suicidaire » pour le pays. Boko, dont la femme est française et qui avait demandé dans un premier temps l’asile à la France, a été en effet prié de s’adresser à nos voisins allemands. Qui ont depuis vu leur centre culturel incendié à Lomé par des inconnus proches du pouvoir.

Pressions. Que faire maintenant dans un Togo au bord de la guerre civile ? Ce haut responsable, qui assure que Faure Gnassingbé « ne partage en rien les convictions politiques de son père », estime qu’il faudra « peser sur le président fraîchement élu pour qu’il fasse des gestes d’ouverture », notamment en formant un gouvernement d’union nationale. « Mais évidemment, ajoute le responsable français, il ne faut pas que les opposants jouent la politique du pire. »

(1) www.diastode.org, site rendu public par RFI.


Voici comment le Bébé Doc togolais a gagné : "fraude massive" selon un rapport confidentiel

AFP, Lomé - 06/05/05—"C’est dans ces régions que le taux de distribution des cartes d’électeurs est exceptionnellement élevé (80 à 95%), que le taux de participation est exceptionnellement élevé (80 à 99%) et que le score de M. Faure Gnassimbé est exceptionnellement élevé (75 à 95%)", précise l’auteur du rapport.

Un rapport confidentiel d’un diplomate de l’Union européenne estime qu’il y a "des présomptions de fraude massive" à l’élection présidentielle au Togo, a annoncé vendredi Radio France Internationale (RFI).

"L’analyse des données communiquées sur les listes électorales et l’observation menée à petite échelle par des missions diplomatiques à Lomé et en province, conduisent à constater de nombreuses irrégularités et à renforcer des présomptions de fraude massive", indique le rapport d’un diplomate européen, dont l’AFP a obtenue une copie.

"L’analyse des listes électorales fait apparaître un écart anormal entre le nombre d’inscrits et l’estimation de la population en âge de voter (+34% soit 900.000 électeurs présumés fictifs)", affirme le rapport.

"Ces écarts sont particulièrement importants dans les régions réputées favorables au parti au pouvoir (+75%, soit 440.000 électeurs présumés fictifs)", poursuit le document.

"C’est dans ces régions que le taux de distribution des cartes d’électeurs est exceptionnellement élevé (80 à 95%), que le taux de participation est exceptionnellement élevé (80 à 99%) et que le score de M. Faure Gnassimbé est exceptionnellement élevé (75 à 95%)", précise l’auteur du rapport.

"A contrario, sur Lomé, zone favorable à l’opposition, le taux de distribution des cartes d’électeurs est de 41% et le taux de participation de 35% seulement (390.000 électeurs inscrits n’ont pas voté ou n’ont pas pu voter)".

"C’est une note que nous n’assumons pas. Il y a une seule position de la Commission européenne, c’est celle qui est exprimée par son responsable principal", a indiqué à l’AFP le porte-parole de la Commission européenne au Développement et à l’Aide humanitaire, Amedeu Altafaj, joint par téléphone.

"Ce n’est pas une note qui est passée par Bruxelles", a-t-il précisé. "On n’aurait d’ailleurs jamais requis une telle note de notre délégation à Lomé".

Dans une déclaration vendredi, le commissaire européen au Développement, Louis Michel, "prend note de l’annonce des résultats officiels de l’élection présidentielle faite par la Cour constitutionnelle du Togo et de l’investiture de M. Faure Gnassingbé comme nouveau président du Togo".

© 2005 AFP
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L’opposition dénonce les arrestations de ses militants

TOGO - 11 mai 2005 - PANAPRESS

La Coalition de l’opposition togolaise a dénoncé mercredi à Lomé les arrestations et les persécutions de ses membres dans plusieurs localités du pays, indique-t-elle dans un communiqué de presse.
Elle affirme que ses partisans ont été arrêtés notamment dans les villes de Atakpamé, Tsévié, Aného et Aklakou, affirmant qu’ils ont été conduits à des destinations inconnues.

"Cette attitude est contraire aux déclarations des autorités togolaises appelant au retour des réfugiés", déplore-t-elle, demandant avec "insistance" aux autorités de mettre immédiatement fin à cette "chasse à l’homme".

La Coalition invite la communauté internationale à "user de son influence pour emmener les autorités togolaises à la raison".

Selon des sources indépendantes, plusieurs jeunes militants de l’opposition ont été arrêtés à Lomé où les forces de l’ordre organisent des rafles quotidiennes.


Faure Gnassingbé officiellement élu président du Togo

AFP Mercredi 04 mai 2005 - 07h32

LOME (AFP) - Faure Gnassingbé, le candidat du parti au pouvoir et fils du président défunt Gnassingbé Eyadéma, a été mardi officiellement déclaré élu président de la République du Togo par la Cour constitutionnelle, qui a confirmé les résultats provisoires du scrutin présidentiel contesté du 24 avril.
"Ayant obtenu le plus grand nombre de voix, le candidat Faure Gnassingbé doit être déclaré président de la République du Togo", a proclamé le président de la Cour constitutionnelle, Atsu-Koffi Amega.

Faure Gnassingbé, candidat du Rassemblement du peuple togolais (RPT) et fils du président Gnassingbé Eyadéma, décédé le 5 février, a obtenu 60,15% des voix.

Son principal adversaire, le candidat de la coalition d’opposition, Emmanuel Akitani Bob, a obtenu 38,25% des voix.

Ces résultats officiels et définitifs confirment les résultats provisoires publiés le 26 avril par la Commission électorale nationale indépendante (CENI).

L’annonce de la victoire de Faure Gnassingbé avait provoqué de violentes manifestations pendant trois jours à Lomé et dans plusieurs villes de province, faisant au moins une trentaine de morts.

Le principal parti de l’opposition, l’Union des forces de changement (UFC), a réagi en appelant à "résister avec l’arsenal des moyens que la Constitution met à notre disposition", selon son secrétaire-général, Jean-Pierre Fabre.

"Je lui promets que nous résisterons, nous ne le laisserons pas faire, je lui promets des insomnies", a lancé M. Fabre à l’adresse de Faure Gnassingbè, rejetant à nouveau toute participation à un gouvernement d’union nationale.

L’opposant historique Gilchrist Olympio (qui préside l’UFC et vit en exil en France) a réclamé l’organisation de nouvelles élections présidentielles et législatives dans un délai de six mois, réaffirmant que l’opposition avait remporté le scrutin.

La coalition a entamé une campagne de "sensibilisation" diplomatique pour expliquer la crise togolaise, a affirmé M. Fabre. Deux délégations se sont rendues l’une à Abuja pour "évoquer le dossier togolais" au niveau de l’Union Africaine (UA), que préside le Nigeria, et l’autre à Libreville.

Mardi soir, cette proclamation officielle n’avait été suivie d’aucun incident, a-t-on constaté.

Dans les quartiers de l’opposition, quadrillés par un important dispositif militaire et policier, l’annonce de la victoire d’un des fils du président défunt Gnassingbé Eyadema a été accueillie sans signe de protestation particulier.

Les portes de nombreuses maisons étaient fermées et peu de monde circulait dans les avenues et les ruelles de ces deux quartiers en début de soirée. Plus tard dans la nuit, la plupart des rues étaient désertes.

Seuls patrouillaient tous phares allumés des véhicules de l’armée équipés de mitrailleuses lourdes et chargés de soldats, sur le boulevard Dékon et l’avenue Houphouët-Boigny, situés à la périphérie de Bè.

Plusieurs barrages ont été mis en place sur les axes principaux de la capitale togolaise, a constaté l’AFP, et les patrouilles de véhicules militaires sont plus nombreuses.

"Tout est calme. Ne vous inquiétez pas", a affirmé un des militaires en faction avant de lancer avec enthousiasme : "et bonne fête hein !" en référence à la victoire de M. Gnassingbé.

"Pour l’instant les militaires ne demandent pas d’argent, comme le font les policiers, mais ils vont prendre l’habitude et après nous racketter", a confié un chauffeur de taxi.

Dans les secteurs favorables au président élu, plus au nord de la capitale, l’animation était normale. Les boutiques étaient ouvertes et les bars déversaient leur habituel flot de musique.

Deux autres candidats, Harry Olympio (opposition modérée) et Nicolas Lawson (qui s’était retiré la veille du scrutin), ont obtenu respectivement O,55% et 1,04% des voix.

Le taux de participation s’élève à 63,57%.

La Cour a rejeté deux recours, l’un du RPT, qui accusait l’opposition de destruction d’urnes, et le second de l’opposition, qui avait signalé des dépassements du nombre de votants par rapport à celui des inscrits dans des circonscriptions.

L’opposition a aussi accusé la Cour d’avoir "ignoré" un "mémoire" déposé mardi midi et qui aurait dû "être pris en compte avant la proclamation des résultats" dans l’après-midi.

"C’est la satisfaction totale, puisque le candidat de la paix, le candidat de la réconciliation et de l’unité nationale, a été confirmé par la Cour constitutionnelle", a commenté le directeur de campagne de Faure Gnassingbé, Komi Klassou.

Il a souhaité pour ce faire "un gouvernement de transition pendant six mois" et une "présidence tournante tous les mois" pendant cette transition.

Suivant les recommandations de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), qui a avalisé l’élection, et de l’Union africaine (UA), Faure Gnassingbé a proposé à plusieurs reprises la création d’un gouvernement d’union nationale.

Les partisans de la coalition d’opposition refusent cette offre, privilégiant la "mobilisation populaire" à la façon des marches de protestation de l’opposition à Madagascar.

A Lomé, dans les quartiers de l’opposition, quadrillés par un important dispositif policier, l’annonce de l’élection de Faure Gnassingbé a été accueillie dans l’indifférence, sans signe de protestation particulier, a constaté l’AFP.

Les portes de nombreuses maisons étaient fermées et peu de monde circulait dans les avenues et les ruelles des quartiers de l’opposition.

En revanche, des militants du RPT commençaient à fêter leur victoire. Le défilé d’une caravane du parti qui devait parcourir les rues de la ville a été annulé "en raison de la nuit", mais des centaines de partisans du parti se sont rassemblés à leur siège à Wuiti (quartier du nord de Lomé) pour célébrer l’événement.


Les forces de sécurité quadrillent Lomé

TOGO - 3 mai 2005 - PANAPRESS

Les forces de sécurité, armes au poing, circulent dans les rues de Lomé, surtout aux abords des quartiers supposés fiefs de l’opposition, quadrillant la ville quelques minutes seulement après la proclamation, mardi après-midi, des résultats définitifs de la présidentielle par la Cour constitutionnelle donnant Faure Gnassingbé vainqueur avec 60,15% des suffrages.
Aussitôt les résultats publiés, le dispositif de sécurité mis en place depuis la veille a été renforcé dans les quartiers chauds de la capitale, notamment à Bè, au Sud-Est de la capitale et à Kodjoviakopé au Sud-Ouest.

Des éléments des forces de sécurité, à bord de véhicules et armés jusqu’aux dents, patrouillent dans la ville.

Dans les quartiers acquis à l’opposition, les rues sont désertes et les commerçants ont tiré leurs rideaux. Seuls quelques téméraires osent pointer le nez dehors.

Dans les quartiers favorables au pouvoir en place, l’ambiance est plutôt festive. Une longue file de voitures et de minibus a sillonné les rues avec à leur bord des militants du Rassemblement du peuple togolais (RPT, parti au pouvoir), chantant et scandant le nom de Faure Gnassingbé, déclaré vainqueur du scrutin présidentiel du 24 avril avec 60,15% des suffrages.

Aucun incident n’a été signalé, les populations, dans leur grande majorité, préférant se terrer chez elles.

Le 26 avril dernier, suite à la proclamation controversée des résultats par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) donnant vainqueur Faure Gnassingbé, plusieurs jeunes de l’opposition avaient érigé des barricades, creusé des tranchées et affronté les forces de sécurité pendant trois jours à Lomé et dans certaines villes de l’intérieur.

Ces émeutes suivies de répression de l’armée ont fait, selon des sources proches des organisations des droits de l’homme et hospitalières, une centaine de morts, plusieurs centaines de blessés et des milliers de réfugiés au Bénin et au Ghana.


France-Togo : Les mots de trop

L’Express 03/05/2005

Paris a réveillé les vieux démons en donnant l’impression de soutenir la victoire contestée de Faure Gnassingbé.
Parfois, le silence est d’or. En deux phrases navrantes, Paris a ruiné au Togo les efforts entrepris afin de conjurer le procès en néocolonialisme que lui vaut depuis des lustres sa complaisance envers les satrapies africaines. Il y eut d’abord, après la mort du tyran Gnassingbé Eyadéma, l’hommage de Jacques Chirac, affligé à l’en croire par la perte de cet « ami personnel ». Et voilà que Michel Barnier, au lendemain de l’élection à la hussarde, le 24 avril, de l’héritier Faure Gnassingbé, crédité de 60,22% des suffrages, contre 38,19% à son rival Emmanuel Akitani-Bob, salue le « succès » d’un scrutin censé s’être déroulé dans des « conditions globalement satisfaisantes ». On sait depuis le bilan du soviétisme dressé par Georges Marchais ce que l’adverbe recèle d’ambiguïté.

D’ordinaire mieux inspirée, la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) estime pour sa part que la consultation « répond globalement aux critères et principes universellement admis ». Formule alambiquée qui passe sous silence un large éventail de fraudes grossières. Deux exemples. Dans la préfecture de la Kozah, fief de la famille régnante, on a enregistré plus de bulletins en faveur de Faure que d’inscrits. A Lomé, dans le quartier de Bé, bastion de l’opposition, des militaires en uniforme ont escamoté les urnes et déchiré les listes électorales. A quoi bon, dans un tel contexte, se griser d’appels angéliques au « dialogue », à la « réconciliation » ou à l’ « union nationale » ? Et comment s’étonner que les 3 000 Français résidant au Togo subissent, comme tous les expatriés à la peau claire, Libanais en tête, les foudres des « patriotes » et des pillards ? Dire que certains ont fui Abidjan voilà six mois en quête d’une quiétude perdue...

par Vincent Hugeux


L’ordre règne à Lomé

Sûr de sa victoire, le parti du pouvoir a repris le contrôle de la rue et refuse la moindre concession. Dans la capitale, la peur est partout.

L’Humanité
Lomé (Togo), envoyée spéciale.

Comme si rien ne s’était passé. Dans les rues de Lomé, ce dimanche, des jeunes vont à la plage faire du sport, des femmes en chapeau se rendent à la messe, taxis et motos circulent. Même dans le quartier de Bé, fief de l’opposition, le calme règne. Au carrefour principal, des commerçantes tentent d’alpaguer les rares clients, et il ne reste rien des combats qui ont opposé ici l’armée aux militants de l’opposition, après la proclamation officielle mardi de la victoire de Faure Gnasimbé, candidat du Rassemblement du peuple togolais (RPT), le parti au pouvoir. Les tranchés creusées par les jeunes ont été rebouchées, les pavés remis à leur place et les troncs d’arbres destinés à arrêter les forces de l’ordre ont disparu.

La violence des militaires semble plus ciblée.

La peur est partout. « Si on me voit avec des journalistes, ils vont venir me chercher, me faire des problèmes », se justifie un jeune gars qui refuse de parler.

La plupart des jeunes vivent en semi-clandestinité, par crainte des descentes de militaires, changeant chaque nuit de maison, quand ils ne sont pas enfuis vers leur village ou à l’étranger. Dans chaque maison, la moitié des habitants sont partis. D’autres, comme cette vendeuse de chouchous, voudraient bien s’en aller mais n’en ont pas les moyens. Un jeune militant de l’opposition avoue même que, faute d’armes, il n’est pas prêt à repartir manifester. « On sait de quoi ils sont capables. Notre vie est en danger. »

Le mouvement de résistance populaire aura du mal à se relever de la répression subie cette semaine. « Tout ce qui s’est passé est inimaginable, certains ont même été tués devant leur famille », résume une femme, les yeux dans le vide. Les portes cassées des maisons attestent des visites musclées et systématiques des soldats. Une petite femme enroulée dans un pagne explique que les militaires sont venus jeudi vers 16 heures. « Ils étaient trois mais il y en avait d’autres dans la voiture. Ils ont frappé deux garçons qui ont eu un bras cassé. Un autre a perdu ses quatre dents de devant. » Le désordre, la difficulté d’accès aux morgues, aux hôpitaux et, surtout, la volonté de dissimulation du pouvoir rendent difficile toute évaluation précise du nombre de victimes. À la Ligue togolaise des droits de l’homme (LTDH), on confirme une cinquantaine de morts. La coalition de l’opposition a affirmé de son côté samedi soir en avoir décompté 106. Et parmi les nombreux blessés, certains perdent encore la vie des suites de leurs blessures.

Désormais, la violence semble plus ciblée. Dans les quartiers, les habitants parlent de mouchards infiltrés, de descentes de militaires munis de listes dans les maisons des militants ou encore de bastonnades pour faire livrer des noms. Selon les témoins, les rondes de 4 × 4 surmontés de mitraillettes ont encore lieu, suscitant chaque fois la fuite éperdue des populations.

L’inaction de la communauté internationale.

Sûr de sa victoire politique et militaire, le RPT ne fait aucun signe de concession. « C’est l’opposition qui a saccagé, vandalisé et tué des victimes innocentes », a déclaré samedi soir son président, Dama Dramani, en sortant d’une énième réunion de médiation avec les représentants de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). S’appuyant sur le meurtre de huit Maliens par les militants de l’opposition, tragédie montée en épingle par les autorités, il a rejeté sur ses adversaires toute la responsabilité de la violence. Conformément aux déclarations de son candidat pendant la campagne, le RPT affirme qu’il y aura un gouvernement d’union nationale, mais il semble décidé à le faire à ses conditions, avec les acteurs qui lui conviendront, comme ça a toujours été le cas au Togo. « Nous n’en sommes pas encore là, répond pour le moment maître Agboyibo, porte-parole de l’opposition. La priorité pour nous, c’est la vérification de la conformité des résultats proclamés avec les résultats réels. » La coalition a donc demandé à la CEDEAO « des mesures de protection des populations civiles » et la « mise en place d’une structure » pour vérifier les résultats. Mais, en dehors du recours à la communauté internationale, elle semble avoir du mal à savoir comment répondre à la crise. Faute de stratégie, ses membres les plus faibles pourraient céder aux pressions et se laisser tenter par un rapprochement avec le pouvoir.

La communauté internationale semble peu décidée à agir. Dimanche matin, les membres de la CEDEAO sont repartis de Lomé après s’être contentés d’appeler les deux partis à « rester dans les voies légales pour régler la crise ». Reste à savoir si la rencontre discrète qu’a eue Faure Gnassingbé samedi à Kinshasa avec Javier Solana et Louis Michel, les deux responsables de la politique étrangère de l’Union européenne, aura permis de dégager quelques avancées.

Camille Bauer


18.5OO Togolais ont fui vers le Bénin et le Ghana

GENEVE (AFP) - mardi 03 mai 2005 - 13h05 -

Environ 18.500 personnes ont fui le Togo pour se réfugier au Bénin et au Ghana voisins depuis l’élection présidentielle contestée du 24 avril, a annoncé mardi à Genève le Haut commissariat aux réfugiés de l’ONU.
10.000 Togolais sont déjà arrivés au Bénin et 8.500 environ au Ghana, a précisé une porte-parole du HCR, Jennifer Pagonis. "Au Bénin, les réfugiés signalent que d’autres personnes sont en route", notamment en provenance de Lomé et Aného (50 km à l’est de Lomé), tandis que le flot de Togolais gagnant le Ghana a tendance à ralentir, a précisé Mme Pagonis.

Depuis dimanche, 1.150 réfugiés ont été transférés de la zone frontalière avec le Bénin vers le camp de Lokossa. Des travaux d’agrandissement sont menés dans ce camp pour qu’il puisse accueillir 5.000 personnes. Le HCR prépare un nouveau camp de transit mieux équipé pour accueillir les arrivants ainsi que quelque 300 réfugiés installés pour l’instant dans une église proche de la frontière.

"Certains réfugiés qui espéraient trouver un hébergement auprès de membres de leur famille ou d’amis demandent maintenant à aller dans les camps car ils n’ont pas pu localiser leurs proches", a précisé la porte-parole. Au Ghana, les arrivées ont diminué par rapport aux jours précédents : lundi, 1.079 nouveaux réfugiés ont été recensés au poste frontière de Aflao près de Lomé mais dans l’après-midi le trafic transfrontalier était redevenu quasiment normal.

Il semble que certains Togolais "cherchent refuge au Ghana pendant la nuit mais retournent travailler au Togo la journée", a indiqué Mme Pagonis. "Presque tous les réfugiés entrant au Ghana sont hébergés par de la famille ou des amis". Selon le porte-parole à Genève de l’Unicef (Fonds des Nations unies pour l’enfance) Damien Personnaz, 72 enfants togolais non accompagnés ont été pris en charge au Bénin, "la plupart en bon état, physique et mental". Au Togo, "on n’a toujours pas pu avoir accès aux deux régions en proie à des violences", a-t-il déploré.

Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’Onu (OCHA) a créé un groupe de travail "pour surveiller au plus près la situation", a indiqué sa porte-parole Elisabeth Byrs. "Il faut éviter une répétition de la crise ivoirienne", qui avait débordé sur les pays voisins, a-t-elle ajouté.


Des réfugiés togolais mettent en cause les militaires

(Reuters 02/05/2005)

Des Togolais réfugiés au Bénin expliquent qu’ils ont peur de regagner leur pays après avoir vu les forces de sécurité y tirer sur des civils sans défense, au cours des troubles qui ont suivi l’annonce, mardi, de la victoire controversée de Faure Gnassingbé à l’élection présidentielle du 24 avril.
A Lomé, des batailles rangées ont opposé la police à des manifestants retranchés derrière des barricades enflammées, tandis que dans d’autres villes, les forces de sécurité recherchaient les partisans de l’opposition et les battaient chez eux, ont rapporté des réfugiés.
"Juste après l’annonce des résultats, les bérets rouges se sont éparpillés dans les rues et ont commencé à tirer sur les garçons", raconte Marthe, 60 ans, qui s’est réfugiée au Bénin, où le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés a ouvert des camps.
"Ils ont tiré seulement sur les garçons. Ils ont pillé les magasins et ont accusé les jeunes gens, qui n’étaient pas armés", poursuit elle au milieu d’une mer de tentes vertes du HCR plantées près du village de Come.
Tout comme Marthe, Lawson, 30 ans, a fui la ville togolaise d’Aneho, située à 45 km à l’est de la capitale, et où des responsables de l’hôpital ont fait état de neuf morts.
"Dès que les résultats ont été annoncés, nous sommes descendus dans les rues pour protester. Les militaires ont tiré dans la foule et j’ai été touché au pied", raconte Lawson de son lit d’hôpital à Come, où sont soignés une douzaine d’autres réfugiés togolais, blessés par balle ou à la machette.
"J’ai peur de retourner à Aneho parce que j’ai peur des représailles. Je ne sais pas comment les gens du RPT (parti au pouvoir) réagiront lorsqu’ils me verront", confie-t-il.
BATTU CHEZ LUI
Le HCR a précisé qu’entre vendredi et samedi, le nombre de personnes réfugiées au Bénin et au Ghana était passé de 7.000 à 11.500.
"Ils sont venus chez moi et ils ont perquisitionné. J’avais fait campagne pour l’opposition. Mon mari a été giflé et mes enfants ont été battus", raconte Evelyne, une quinquagénaire qui attend dans un centre de transit, à la frontière, après avoir fui Tsevie, au nord de Lomé.
Elvis Edorh, 25 ans, dit lui aussi avoir été battu chez lui, à Aneho, et il explique qu’il a dû traverser une lagune à la nage pour s’échapper.
"J’ai nagé et je me suis retrouvé ici. J’ai perdu deux neveux sur lesquels les forces de sécurité ont ouvert le feu", dit-il.
Le président par interim, Abass Bonfoh, a assuré qu’aucun ordre de tirer sur les manifestants n’avait été donné et que des membres des forces de sécurité étaient morts dans les violences pour avoir respecté cette consigne.
L’opposition avance un bilan de 100 morts dans l’ensemble du pays tandis que la Ligue togolaise des droits de l’homme parle d’au moins 40 morts et de nombreux blessés par balle et disparus.
Le HCR a précisé que le camp de Come hébergeait 800 réfugiés, dont de nombreuses femmes et des enfants que l’on vaccine contre la polio et la rougeole. Un demi millier d’autres réfugiés devraient être installés dans un nouveau camp situé non loin de là, à Lokossa.
Des camions chargés de tentes, de bâches en plastique, de couvertures et de savon ont quitté samedi Accra, la capitale du Ghana, pour le Bénin, mais le voyage prendra quatre jours parce que le convoi devra transiter par le Burkina Faso pour éviter le Togo, a dit le HCR.

© Copyright Reuters


Berlin manifeste son mécontentement

30/4/2005

Le gouvernement allemand a demandé vendredi à ses ressortissants de quitter le Togo, après les actes de violences qui ont visé le centre culturel et l’ambassade d’Allemagne à Lomé ces derniers jours, a annoncé le ministère des Affaires étrangères.

"Le ministère des Affaires étrangères demande à tous les ressortissants allemands au Togo de quitter provisoirement le pays", explique le ministère sur son site internet, évoquant "des contestations après l’élection présidentielle du 24 avril" et "l’agitation importante" dans le pays.

Une porte-parole du ministère a précisé qu’aucun plan d’évacuation des ressortissants allemands n’était prévu pour le moment par le gouvernement.

L’ambassade d’Allemagne, première ancienne puissance coloniale, est la cible des attaques du gouvernement togolais qui l’accuse de soutenir l’opposition. L’ancien ministre de l’Intérieur, François Esso Boko, qui avait dénoncé le processus électoral, est actuellement réfugié dans ses locaux et utilise les installations de la représentation diplomatique pour mener son activité politique.

De manière générale, Berlin a toujours affiché un soutien quasi-officiel à l’opposition togolaise depuis 15 ans. C’est une réalité.

Vendredi, le centre culturel allemand, l’Institut Goethe, a été quasiment détruit par un incendie déclenché par des inconnus.


Plainte en invalidation du résultat proclamé du scrutin présidentiel du 24 avril 2005

Source PRESIDENT BOB AKITANI - 01/05/2005

À La Commission Electorale Nationale Indépendante.

Je soussigné Emmanuel Akakpovi Bob AKITANI, candidat de la Coalition des partis politiques ADDI, CAR, CDPA, PSR, UDS-Togo et UFC, au scrutin présidentiel du 24 avril 2005, voudrais vous saisir par la présente lettre de graves irrégularités entachant les opérations du scrutin présidentiel du 24 avril 2005 et qui sont de nature à affecter la sincérité et la validité du résultat proclamé le mardi 26 avril 2005 à 11 heures.

Parmi les multiples irrégularités de nature à invalider le résultat provisoire proclamé par la CENI, les plus significatives sont celles constituant l’objet des deux griefs ci-après :

1- Premier grief en deux branches : le processus électoral a été fondamentalement vicié dans les préfectures que le parti au pouvoir considère comme étant ses fiefs, par la falsification grossière des listes électorales et un calendrier électoral conçu de manière à empêcher les recours en contestation des listes en question.

(i)Falsification grossière des listes électorales

a) Il est constant que la validité du résultat d’un scrutin repose avant tout sur la fiabilité du fichier électoral.

Aussi est-il de règle que soit invalidé tout résultat électoral basé sur des listes électorales comportant des irrégularités atteignant un seuil substantiel par rapport au nombre total des inscrits.

b) En l’espèce, les grandes lignes du fichier électoral ayant servi de base au scrutin présidentiel du 24 avril 2005 ont présentées aux partis politiques, le 7 avril 2005 par le Ministre de l’Intérieur lors d’une réunion qu’il a tenue avec eux.

Selon ce fichier le nombre total des électeurs inscrit s’élève à : 3.552.845, pour une population officiellement évaluée à 5.092.000 habitants. Les détails concernant la répartition de ce fichier par région et préfecture figurent sur le tableau joint à la présente plainte ; lequel tableau indique également les détails afférents à la population globale par région et préfecture ainsi que le fichier électoral de 2005.

L’examen des différentes listes préfectorales constituant le fichier national révèle que les listes de plusieurs préfectures ont été abusivement « gonflées ». Il importe, à cet égard, de rappeler que suivant les normes observées dans tous les pays où l’âge de voter est fixé à 18 ans, la population électorale est généralement de l’ordre de 50% de la population globale.

Or à l’examen du tableau en annexe on est scandalisé par la différence entre les populations électorales de plusieurs préfectures en 2005 comparativement à leurs populations électorales de 2004 au regard de leurs populations globales de cette année.

Il s’agit des préfectures ci-après :

PRÉFECTURES POP GLOBALE 2004 POP ÉLECTORALE NORMALE EN 2004 POP ÉLECTORALE SUR LE FICHIER ÉLECTORAL DE 2005
1 SOTOBOUA 134.000 65.019 164.674
2 BINAH 65.000 32.226 68.318
3 KOZAH 209.000 103.618 221.586
4 DANKPEN 73.000 36.192 67.929
5 DOUFELGOU 83.000 41.150 76.509
6 TCHAMBA 79.000 38.332 65.813
7 BLITTA 107.000 51.919 84.137
8 TCHAOUDJO 164.000 79.576 137.418
9 BASSAR 103.000 51.065 85.617
10 OTI 131.000 53.052 83.686
11 AMOU 100.000 47.408 74.416
12 WAWA 157.000 74.431 120.981
13 KLOTO (KPELE) 187.000 88.653 151.012
TOTAL 1.592.000 762.641 1.402.096

Soit des écarts s’élevant au total pour les 13 préfectures à : 639.455.

Dans ces 13 préfectures, que le parti au pouvoir considère comme étant ses fiefs les listes électorales ont été falsifiées par des inscriptions irrégulières dans des proportions qui enlèvent tout sens au score attribué par la CENI au candidat du RPT, Monsieur Faure Gnassingbe.

Ces listes falsifiées et les cartes électorales fictives auxquelles elles ont donné lieu sont à l’origine des votes multiples constatées le 24 avril 2005.

(ii) Calendrier conçu de manière à empêcher les contestations des listes électorales falsifiées.

Une fois terminées le Dimanche 10 avril 2005 les opérations de révision des listes électorales et de distribution de cartes d’électeurs commencées le 28 mars 2005, le Ministère de l’Intérieur était tenu d’afficher les listes révisées et informatisées de manière à permettre aux citoyens de faire valoir en application des articles 68 et 69 du Code Electoral les recours en contestation des anomalies entachant ces listes. Il importe de préciser à ce propos que selon l’article 68 alinéa 2 du Code Electoral, la procédure de recours est initiée dans les 5 jours suivant la date d’affichage des listes électorales et peut, avec les incidents s’étendre sur 15 jours.

Il va de soi que l’informatisation et l’affichage des listes électorales nécessitent un délai minimal de deux semaines.

Ces deux diligences ne pouvaient pas se réaliser avant la date du scrutin du 24 avril 2005. De sorte que par la manœuvre du calendrier électoral les citoyens étaient privés du droit d’exercer les recours en radiation des inscriptions irrégulières « gonflant » les listes électorales des 13 préfectures.

Compte tenu de l’ampleur des falsifications, la manœuvre est de nature à faire invalider le résultat proclamé du scrutin. Il est au demeurant surprenant que les observateurs de la CEDEAO après avoir constaté que les listes électorales n’ont pas été publiées aient tout de même déclaré le résultat du scrutin valable.

2- Deuxième grief : les délégués du candidat ont été empêchés de remplir leur mission dans les régions des Savanes, Kara, et Centrale, en violation des dispositions des articles 103 et 122 du Code Electoral

La coalition des six (6) partis ayant investi le requérant a désigné 5320 délégués titulaires et 5320 suppléants dans tous les bureaux de vote sur toute l’étendue du territoire national.

Il a été constaté que dans les bureaux de vote de la Région des Savanes, de Kara et Centrale, les délégués du candidat Bob Emmanuel AKITANI ont été chassés de la plupart des bureaux de vote soit au début du scrutin, et en tout cas au moment du dépouillement des urnes. La CENI faute d’avoir des procès-verbaux de recensement dûment signé par les délégués de tous les candidats dans les bureaux de vote s’est contentée des fiches récapitulatives des résultats provenant des CELI ; lesquelles fiches sont transmises sans être accompagnées de procès-verbaux des bureaux de vote et des CELI.

Au cas où la CENI mettrait en doute l’exclusion de la plupart de ses délégués des bureaux de vote dans les régions susvisées, le requérant la somme solennellement de lui communiquer dans les 24 heures, copie de tous les procès verbaux des 5320 bureaux de vote qui doivent constituer le support du résultat provisoire de l’élection.

Il doit être d’ores et déjà acquis que tous les procès verbaux des bureaux de vote qui ne comporteront pas la signature de ses délégués soient déclarés nuls les résultats y figurant n’ayant pas été décomptés de façon contradictoire en présence du délégué du candidat comme le requiert l’article 122 du Code Electoral.

Le requérant demande qu’il lui soit donné acte de ce qu’il se réserve le droit de déposer un mémoire ampliatif après que la CENI lui aura communiqué, copie des procès verbaux des résultats de vote.

Le requérant se réserve également le droit de fournir tout document complémentaire à l’appui de la présente plainte.

CONCLUSION

Le requérant demande à la CENI d’invalider le scrutin du 24 avril dans les treize préfectures ci-dessus visées et de rétracter en conséquence sa décision proclamant Monsieur Gnassingbé Faure président élu du Togo.

Pièce jointe :
Tableau statistique de la population globale électorale (Source : Direction Générale de la Statistique et de la Comptabilité Nationale)

Fait à Lomé, le 27 avril 2005
Monsieur Emmanuel Bob Akitani

Copyright LETOGOLAIS © 2002


En finir sans témoins

L’Humanité, le 29 avril 2005.

Lomé (Togo), envoyée spéciale.

Cette fois, le pouvoir togolais semble avoir décidé d’en finir. Dans le quartier rebelle de Bé, dans la ville de Lomé, ce sont les bérets rouges, compagnie de parachutistes connue pour être une des plus dures, qui sont entrés en action hier matin. Même scénario à Aného, à la frontière avec le Bénin, où ces troupes de choc ont commencé mardi à ratisser la ville. Selon certains témoins, ils seraient rentrés dans les maisons, tabassant tout le monde, tirant à coup de gaz lacrymogènes et à balles réelles.

Tabassage systématique

Dans cette jolie bourgade d’où sont issus trois dirigeants de l’opposition, la répression aurait commencé mardi, après que la jeunesse eut pris d’assaut le commissariat pour protester contre les résultats officiels des élections qui venaient d’être proclamés. L’armée a immédiatement investi la ville mais, selon certains habitants, la violence a pris depuis l’arrivée des bérets rouges une tournure plus dramatique. Le nombre de morts et de blessés serait important, mais le directeur de l’hôpital a refusé de donner des chiffres à la presse. Hier Aného était comme morte, toutes les boutiques fermées et des camions de militaires circulant dans les rues. Les villageois qui se trouvent sur la route entre Lomé et Aného n’ont pas non plus été épargnés. Ils décrivent les mêmes scènes de maisons pénétrées et de tabassage systématique. Apeurés, ils racontent avoir été depuis mardi la cible de quatre attaques successives, qui ont permis à l’armée d’enlever les troncs d’arbres et les barrages, qui, la veille, bloquaient encore le passage.

« Est-ce que nous sommes des animaux pour se faire tuer comme ça ? » s’interroge un Togolais. À en juger par l’attitude de la communauté internationale, la question ne semble pas dénuée de sens. Chargée de surveiller l’élection présidentielle pourtant entachée de nombreuses et visibles irrégularités, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a donné sa bénédiction au scrutin, avant même la cour constitutionnelle togolaise. Même chose pour la France qui, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Michel Barnier s’est félicité dès lundi du bon déroulement du processus électoral, avant de se rétracter hier en estimant « ne pas avoir à porter d’appréciation ». Face aux critiques, le ministre français a également déclaré qu « il n’y avait pas d’ingérence de la France » dans la politique intérieure du Togo. Sans doute exaspéré par l’attitude inconséquente de l’opposition togolaise qui, après l’avoir acceptée, a rejeté sa dernière tentative de conciliation, Olesegun Obasandjo, chef d’État nigérian et président de l’Union africaine, a lui aussi entériné les résultats donnés par le pouvoir. Il a qualifié d’irresponsables les déclarations de l’opposition, qui s’était la veille proclamée victorieuse du scrutin, estimant qu’il y avait bien « un vaincu et un vainqueur ». Même son de cloche à l’ONU où Kofi Annan s’est réjoui de « la responsabilité de la classe politique togolaise ». Seule voie discordante, le département d’État américain a jugé hier « insatisfaisant le déroulement des élections ». Son porte-parole a évoqué « des irrégularités durant la préparation du scrutin » et des « vices de procédures » le jour du vote.

La presse internationale semble être la prochaine cible du pouvoir togolais. Hier, le ministre de la Communication, Pitang Tchalla, s’en est pris lors d’une conférence de presse au « comportement de certains journalistes ». Il a estimé « longue la liste des manquements à l’éthique » et accusé certains d’être « venus avec des idées préconçues ». Particulièrement dans la ligne de mire, Radio France internationale, dont les antennes locales sont coupées depuis mercredi matin et TV5, qui est parvenu à filmer des militaires emportant une urne. Décidé à empêcher ces témoins de travailler, le ministre a ensuite annoncé qu’aucune accréditation ne serait renouvelée au-delà du 30 avril.

Interdiction de filmer

Ce discours correspond bien au comportement observé hier sur le terrain. Un groupe de cameramans qui se rendaient à Bé s’est vu signifier l’interdiction de filmer. À Aného, une dizaine de journalistes ont été convoqués par le lieutenant de la zone, moins d’une demi-heure après être arrivés en ville. Malgré des accréditations en bonne et due forme, l’autorité militaire leur a, poliment mais fermement, intimé l’ordre de rentrer sur Lomé. Seuls témoins des massacres, les journalistes semblent de plus en plus gênants pour les autorités togolaises. À en juger par l’attitude de l’ambassadeur de France, Alain Holleville, ils le sont aussi pour Paris. Recevant avant le scrutin un groupe de journalistes, il s’est permis de leur faire la leçon. En termes diplomatiques, il les a accusés de porter la responsabilité d’éventuels débordements à venir.

Camille Bauer


Intervention musclée des forces de sécurité à Bè

TOGO - 28 avril 2005 - PANAPRESS

Les forces de sécurité ont fait une descente musclée très tôt ce jeudi matin dans le quartier de Bè, fief de l’opposition, faisant usage de gaz lacrymogènes pour disperser des regroupements de jeunes opposants.
Les jeunes sont sortis très nombreux dans les rues, peu après 7 heures, affirmant obéir à l’appel lancé mercredi par Emmanuel Akitani-Bob de la coalition de l’opposition leur demandant de résister.

Les forces de sécurité ont lancé des gaz lacrymogènes dans des maisons sises sur le boulevard Houphouët Boigny, non loin du collège d’enseignement technique et commercial "Ora et Labora", défonçant les portes et bastonnant les riverains à coups de bâton et de pied.

Les habitants ont été ensuite obligés à balayer les rues, remblayer les tranchées creusées et ramasser les ordures, les briques et branches d’arbres ayant servi à faire des barricades.

Certains habitants ont profité du calme qui semblait revenir vers 9h45 pour tenter de réparer les dégâts causés par les forces de sécurité sur leurs maisons, tandis que d’autres, vu ces exactions, ont préféré tout simplement quitter le quartier en attendant le retour du calme.

La Commission électorale nationale indépendante (CENI) avait donné, mardi, Faure Gnassingbé, fils du défunt président Gnassingbé Eyadéma, vainqueur du scrutin avec 60,22% des voix, contre 38,19% à M. Akitani-Bob.


Au Togo, « les militaires n’arrêtent personne, ils tirent »

La ville natale du principal opposant togolais subit les représailles du pouvoir.

Par Thomas HOFNUNG
Libération, vendredi 29 avril 2005

Aneho (frontière Togo-Bénin) envoyé spécial

Le décor serait presque féerique : des palmiers qui s’agitent sous une brise légère et une plage de sable fin léchée par les vagues de l’océan Atlantique. Mais, sur une langue de terre, c’est un défilé ininterrompu d’enfants et de femmes portant sur leur tête quelques maigres effets personnels. « Le strict nécessaire », dit Regina, qui trimballe dans une bassine quelques pagnes et de la vaisselle. Des familles tentent de contourner les barrages policiers pour se réfugier au Bénin. Depuis mardi, plus de 3 000 Togolais ont passé la frontière, a-t-on appris hier à Lomé de source diplomatique occidentale.

Emeutes. Dernière localité du Togo avant la frontière, à une cinquantaine de kilomètres à l’ouest de Lomé, Aneho s’est embrasé mardi, dès la proclamation de la victoire à la présidentielle de Faure Gnassingbé, le candidat du régime. La ville natale du principal candidat de l’opposition, Emmanuel Bob Akitani, s’est hérissée de barricades. Les émeutes ont duré deux jours. Des jeunes ont pris d’assaut et brûlé le commissariat, avant de s’enfuir avec des armes, selon un témoin rencontré sur place. « La ville était hors de contrôle, explique Daniel, un ancien instituteur. Mais des renforts militaires ont été acheminés par hélicoptères. »

Hier, un calme de façade était revenu. Quadrillé par les gendarmes et les parachutistes, Aneho ressemble à une ville fantôme. Des minibus pleins à craquer, traversent la localité sans s’arrêter. Des femmes chargées de paquets interpellent les rares voitures qui passent pour tenter de rallier la frontière. Les magasins sont fermés, les regards lourds. En représailles, les forces de sécurité ont arrêté le chef traditionnel de la localité, par ailleurs membre de l’opposition.

Dans le centre-ville, quelques personnes se sont regroupées devant l’hôpital. A l’intérieur, le personnel refuse de parler aux journalistes. Pas question de communiquer le moindre chiffre sur les personnes admises depuis le début des troubles. Interrogé près de la carcasse calcinée du commissariat, Henri assure, pour sa part, avoir vu « six cadavres » et de nombreux blessés. De son côté, la Croix-Rouge fait état de 9 morts. Selon lui, comme à Lomé, les forces de sécurité auraient commencé à « nettoyer » les quartiers rebelles. « Les militaires défoncent les portes et tabassent les gens. Ils n’arrêtent personne, ils tirent », dit-il, avant d’enfourcher sa moto, direction le Bénin. Prévenu de l’arrivée des journalistes étrangers, le directeur de l’hôpital s’empresse d’avertir les gendarmes, qui leur intiment l’ordre de quitter la ville, malgré les accréditations du ministère de la Communication. Des gendarmes menacent les accompagnateurs togolais : « Vous les nationaux, on va vous tuer ! »

Barrage. La route côtière qui relie Aneho à Lomé est jalonnée par les résidus des barricades. Hier matin, un nouveau barrage tenu par des jeunes armés de machettes, de lance-pierres et de bâtons était en place au lieu-dit d’Agbodrafo, à 35 kilomètres de la capitale. « Les soldats entrent dans nos maisons la nuit et nous battent, témoigne Albert, 23 ans. Nous n’avons reçu aucune instruction de nos dirigeants, mais nous allons nous défendre jusqu’à la victoire de notre candidat, Bob Akitani. » Deux heures plus tard, le barrage avait disparu, tandis qu’un parachutiste au béret rouge levait le pouce, sourire aux lèvres.


Le candidat de l’opposition radicale Emmanuel Akitani Bob se proclame président
LOME, 27 avr (AFP) - Le candidat de la coalition de l’opposition à la présidentielle Emmanuel Akitani Bob a affirmé mercredi à Lomé qu’il se proclamait président de la République du Togo, dans une déclaration au Togolais faite devant des journalistes.

"Togolais, Togolaises, votre président vous parle, oui votre président, car nous n’avons pas perdu les élections présidentielles. Cette élection présidentielle du 24 avril 2005. Vous devez le savoir pour rester mobilisés", a déclaré M. Akitani Bob.

"Moi Bob Akitani et vous l’avenir de notre pays au prix de notre vie, nous devons nous opposer à l’arbitraire. La lutte sera longue, mais la lutte populaire est invincible", a-t-il ajouté.

La commission électorale togolaise avait annoncé mardi que le candidat du parti au pouvoir Faure Gnassingbé avait remporté l’élection présidentielle du Togo avec 60,22 % des suffrages devant Emmanuel Akitani Bob (38,19%) et Harry Olympio (0,55%).

L’opposition et le parti au pouvoir le Rassemblement du peuple togolais (RPT) se sont accusé notamment de fraudes et de "bourrages d’urnes".


La FIDH condamne la mascarade électorale
http://www.fidh.org/article.php3?id...

Mardi 26 avril 2005

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) condamne les nombreuses irrégularités observées au cours du scrutin présidentiel du dimanche 24 avril 2005, et les violences ayant entraînées la mort d’au moins 7 personnes ainsi que de nombreux blessés. Ces informations lui ont été transmises par le chargé de mission de la FIDH, présent dans le pays au moment du scrutin et la Ligue togolaise des droits de l’Homme (LTDH), organsiation membre de la FIDH.

Ainsi, le chargé de mission de la FIDH a été témoin dans le quartier de Bé de l’exécution extra-judiciaire d’un manifestant. Le lundi 25 avril 2005 à 10h15 à côté de l’hôtel Rosalie, une voiture de police s’est en effet présentée au niveau d’une dizaine de manifestants de l’opposition et depuis le véhicule, un agent des forces de l’ordre à ouvert le feu touchant mortellement au front un manifestant.

Selon les informations reçues, le déroulement du scrutin a été entaché par des fraudes massives : bourrages d’urnes, manipulation des listes électorales, distribution en grand nombre de cartes électorales vierges aux partisans du parti au pouvoir, comptage des votes dans le plus grand secret, intimidations des partisans de l’opposition, interventions de militaires et de civils armés afin de prendre possession d’urnes électorales, etc... Ces éléments constituent de graves et flagrantes violations des droits de l’Homme et du droit à des élections libres et pluralistes consacré par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

En outre, les membres de la LTDH et d’autres organisations de la société civile ont été écartés du processus d’organisation et de suivi de ce scrutin, des médias indépendants ont été fermés, des correspondants de la presse internationale ont été empêchés de se rendre dans le pays et les moyens de communication tels que les téléphones mobiles, les fax et internet sont coupés depuis le milieu de l’après-midi du 24 avril 2005. Ces faits constituent des violations systématiques du droit de communiquer et d’informer garanti par les instruments internationaux de protection des droits de l’Homme.

La FIDH considère ainsi que les conditions dans lesquelles s’est tenue cette élection sont en violation flagrante des principes de transparence, de pluralisme et de libre détermination du peuple garantis par les instruments régionaux et internationaux en la matière.

La FIDH déplore la caution regrettable apportée par la France et la CEDEAO à cette mascarade électorale.


Lomé s’embrase.

Grâce aux manœuvres de l’Elysée,
le fils Eyadéma vole le suffrage des Togolais pour perpétrer la dictature.

François-Xavier Verschave.

Alors que de nombreux observateurs ont constaté un vote massif des Togolais en faveur du candidat de l’opposition unie, le pouvoir dictatorial a organisé le décompte des suffrages dans l’opacité la plus absolue, démontrée par la longue coupure de la quasi-totalité des moyens de télécommunication. Pourquoi empêcher la société civile de communiquer si l’on veut un scrutin transparent, si l’on n’a rien à cacher ?

Toutes les manipulations pré-électorales (truquage des listes, distributions iniques des cartes électorales, etc.) n’ont pas suffit à empêcher un rejet très net dans les urnes d’une dictature quadragénaire. Alors, les commandos du régime se sont mis à voler les urnes, ou les bourrer, ou les brûler. Ils ont systématiquement écarté tout contrôle du dépouillement par d’autres que les suppôts de la dictature. Et ils ont confié à la Commission électorale nationale « indépendante » (une « indépendance » scandaleusement usurpée) le soin de mijoter un score de 60 % en faveur de Faure Gnassingbé, l’héritier de la dictature.

Jacques Chirac n’a cessé d’aider à ce processus électoral que le ministre de l’Intérieur togolais, devenu soudain lucide à 48 heures du scrutin, a qualifié de « suicidaire ». L’Elysée a poussé l’organisation régionale CEDEAO à fermer les yeux sur les fraudes et, plus généralement, la confiscation du scrutin par le régime en place.

Le peuple togolais n’acceptera pas la prolongation de sa servitude. Déjà, il manifeste son exaspération. Lomé s’embrase. Jacques Chirac est personnellement comptable des conséquences qui résulteront de son « amitié personnelle » avec la dictature togolaise, à la fois pour les Togolais et pour les Français qui vivent dans ce pays.


Témoignages en direct de Lomé

Texte écrit à Lomé par les témoins du Comité de Soutien au Peuple Togolais et de Solidarité 24 avril (Survie France, Fédération Française des clubs UNESCO, ASAHinwent et infotogo.de) lu au téléphone et retranscrit par le Comité (www.soutientogo.org).

Nous avons pu constater :

 Une forte mobilisation de la population qui est allée voter en masse dès l’ouverture des bureaux.

 Un impossibilité de vote pour les électeurs inscrits manuellement (absence de registre) dans tous les bureaux que nous avons visité.

 Nous avons vu un jeune béninois avec une carte pré-votée "Faure" qui a été démasqué à Keta Akoda, préfecture de Vo (circonscription électorale n°2).

 Un président RPT de bureau de vote est parti avec la clef de l’urne au quartier Bé (Lomé)

 Une dame qui est arrivée avec 3 cartes d’électeurs, sans procuration, s’est confiée au responsable de l’UFC. Elle n’a pas voté. Les cartes supplémentaires lui ont été donné par des membres du RPT.

 Des mouvements de véhicules militaires transportant des civils pour aller voter.

 Au siège du CAR, le sac à main d’une militante RPT (carte d’adhésion au comité de soutien de Faure) avec plusieurs centaines de cartes d’électeurs, une dizaine de bulletins de vote pré-votés pour Faure, de l’argent liquide, un carnet d’adresse avec le numéro personnel du Ministre de l’Intérieur par intérim.

 Des militaires sont venus fermer un bureau de vote, centre du Collège Protestant à Lomé, ils ont tiré à balles réelles sur la foule. Nous avons vu un enfant d’une dizaine d’années, avec une blessure à la cuisse.

 Des civils se revendiquant du RPT et portant les foulards du candidat Faure armés de fusils à pompe et d’armes de poing flambant neuves menaçant de mort les gens du quartier ahanoukofe (?problème de son sur l’enregistrement)

 Le 24 avril à partir de 16h, internet et deux des trois réseaux téléphoniques ont été coupés.

 Le 25, les communications internationales sont presque complètement coupées.

 Le 25 les rues sont presque désertes, les magasins fermés ainsi que les administrations et les écoles. Les gens semblent sur le qui-vive.

Nos impressions sont les suivantes :

 Les fraudes ou tentatives de fraude de la part des partisans du RPT semblent massives. Pendant le déroulement du scrutin la population, notamment la jeunesse, s’est montrée très vigilante pour démasquer les fraudes.

 Le 25 la population est dans l’attente des résultats. Tout semble prêt pour un affrontement parce que les gens ne sont plus prêts à accepter une victoire frauduleuse de Faure. Le ressentiment contre les français est généralisé car pour la majorité des togolais, Jacques Chirac est le principal obstacle pour un vrai changement.

 Le pouvoir a armé les milices, le peuple togolais qui ne veut plus accepter la situation est en grand danger.

Plus que jamais la solidarité internationale s’impose.


Deuxième journée d’émeutes à Lomé

Mercredi 27 avril 2005 (Reuters - 12:09)

LOME - Des émeutes ont éclaté pour la seconde journée consécutive mercredi dans les rues de Lomé où les forces de sécurité ont tiré des grenades lacrymogènes contre des opposants protestant contre la proclamation la veille de la victoire de Faure Gnassingbé, fils du défunt dictateur Eyadéma, à l’élection présidentielle de dimanche au Togo.

Dans le quartier de Bé, fief de l’opposition, de jeunes manifestants ont érigé des barricades et incendié des pneus. Des militaires se sont ensuite déployés et ont tiré des grenades lacrymogènes dans les ruelles de ce quartier de Lomé, d’où s’est élevé une colonne de fumée noire, un immeuble au moins étant en flammes.

Confirmant les craintes de nombreux observateurs, des affrontements avaient déjà éclaté mardi après l’annonce officielle de la victoire de Gnassinbgé à la présidentielle de dimanche avec 60,22% des voix.

D’après le Comité international de la Croix-Rouge, au moins 70 blessés ont été soignés mardi dans le principal hôpital de Lomé, où la plupart d’entre eux ont été admis après avoir été atteints par des balles.

Un habitant de la capitale togolaise dit avoir vu les cadavres d’au moins deux personnes tuées par balles devant son domicile, mais les autorités n’ont pas fourni de bilan précis des affrontements survenus mardi.

L’opposition accuse les partisans de Fauré Gnassingbé de fraude massive au scrutin de dimanche, pour lequel elle était parvenue à s’unir derrière un seul candidat.

Le fils d’Eyadéma avait été porté à la présidence par l’armée à la suite du décès de son père le 5 février après 38 années de pouvoir sans partage. Cédant aux pressions de la communauté internationale, Fauré Gnassingbé avait par la suite démissionné en promettant la tenue d’un scrutin présidentiel.

De nombreuses voix s’étaient élevées au Togo, notamment des rangs de l’opposition, pour réclamer le report de l’élection en raison du manque de préparation du pays.


Retranscription du communiqué de la Ligue togolaise des droits de l’homme à Lomé le 25 avril 2004 à 15h30, heure de Lomé.

Comme prévu par le Ministre de l’Intérieur, de la Sécurité et de la Décentralisation, Akila Esso Boko, qui est arrivé aux mêmes conclusions que la LTDH, l’élection présidentielle s’est déroulée dans une pagaille indescriptible et une violence inouïe, qui a contrasté avec la discipline et la détermination des électeurs.

Malheureusement, les dirigeants dépourvus du sens du patriotisme et aveuglés par leur intérêt égoïste ont décidé de faire fi des recommandations du Ministre Boko. Les bourrages d’urnes, les listes électorales tripatouillées, les électeurs privés du droit de vote, les intimidations, les lynchages, les opérations commandos de militaires dans les bureaux de vote pour emporter ou détruire des urnes, occasionnant des pertes en vies humaines et des blessés, les dépouillements des bulletins de vote en l’absence des délégués de l’opposition et des électeurs, les votes parallèles et multiples, la présence tardive des listes d’électeurs détenteurs de cartes nouvellement inscrits, la vente des cartes d’électeurs par les partisans du pouvoir, les arrestations arbitraires etc... sont les incidents qui ont émaillé l’élection sur toute l’étendue du territoire.

La Ligue Togolaise des Droits de l’Homme (LTDH) eu égard à toutes ces violations scandaleuses du droit de vote, qui constituent des violations de la souveraineté du peuple togolais à travers son droit d’élire librement les dirigeants de son choix, considère que l’élection présidentielle du 24 avril 2005 est une énorme mascarade visant à donner un habillage faussement démocratique à un coup d’Etat électoral après l’échec relatif du coup d’Etat constitutionnel de Faure Gnassingbé et du quarteron d’officiers du clan Gnassingbé.
La LTDH dénonce par conséquent cette mascarade électorale et rejette les résultats d’un scrutin qui n’est autre qu’un hold-up électoral parce que non conforme aux principes universels de transparence, de démocratie et de respect des droits humains.
La LTDH tient informé la communauté internationale que les putchistes ont même coupé ou brouillé les communications téléphoniques les 24 et 25 avril en vue d’empêcher les délégués des bureaux de vote de l’opposition de communiquer les résultats à leur Quartier Général. Même des médias privés ont été fermés arbitrairement.
La LTDH dénonce l’immixtion violente et frauduleuse de l’armée dans le processus électoral en vue d’en fausser les résultats, ainsi que la complicité criminelle de la CEDEAO aux ordres de la France.
La LTDH exhorte le peuple français à se désolidariser de la position honteuse du Président Jacques Chirac.

Fait à Lomé le 25 avril 2005
Le vice-président Etsri Huhedeva Clunson Eklu


A la frustration des jeunes répond la violence des forces de sécurité

TOGO - 26 avril 2005 - AFP

Troncs d’arbres, parpaings, pneus enflammés, les jeunes de l’opposition togolaise ont dressé des barricades sur l’avenue Malfakassa. Brandissant machettes et gourdins, ils entonnent l’hymne de leur candidat qui demande le changement.

"Ils veulent nous voler l’élection, mais on ne se laissera pas faire. On sait qu’on a gagné", lance Amédé un des habitants de cette zone située dans le quartier de Bè-Kpota, un fief traditionnel de l’opposition à Lomé. "On en a marre de la famille Gnassingbé, on veut le changement, on souffre trop, il faut qu’ils partent sinon le Togo c’est fini", dit un autre qui accuse la France de soutenir le fils du défunt président Gnassingbé Eyadéma, Faure Gnassingbé, 39 ans, candidat du Rassemblement du peuple togolais (RPT, ancien parti unique).

"Les Français on n’en veut plus chez nous, on va tout brûler", ajoute-t-il en brandissant son gourdin. Mais la colère des jeunes d’Akodessewa est aussi exacerbée par les violences des forces de l’ordre qu’ils dénoncent, et quand ils évoquent ce qui s’est passé dans la matinée lundi, la colère l’emporte rapidement dans une grande cacophonie. Ils accusent les militaires d’être arrivés dans le quartier et d’être entrés dans les cours "sans raison". Selon plusieurs témoignages, les soldats ont tiré sur des civils, certains endormis dans leur chambre.

Le grand frère d’Antoine, un enseignant de 28 ans, "dormait quand les militaires ont cassé la porte, il a essayé de se cacher sous le lit mais ils lui ont tiré dessus directement". Hospitalisé au CHU de Tokoin, cet homme, Kokou Azianblé a reçu quatre balles. "Son état est stable mais on doit encore extraire les balles", précise un médecin. Dans les "vons", les ruelles non goudronnées et boueuses perpendiculaires aux grandes artères de Lomé, des militaires à bord de véhiculent tout terrain patrouillent, mais changent de position dès qu’ils constatent la présence de journalistes.

Là, les gens se terrent, les coups de sifflet des guetteurs résonnent dès qu’une voiture approche. Après leur passage, les portes s’ouvrent : "ils sont entré ici, ils ont frappé cette femme" affirme un vieil homme en désignant le bras meurtris d’une jeune fille. "S’il m’avaient vu, ils m’auraient tué", ajoute-t-il, encore effrayé. Dans une maison, le propriétaire raconte comment les militaire sont entrés dans une chambre et ont tiré sur une femme qui a été gravement blessée. Un peu plus loin, un médecin de quartier soigne avec les moyens du bord deux jeunes hommes qui ont reçu des éclats de grenades.

Ces violences lundi ont fait de sources médicales une dizaine de blessés, dont trois par balle. Mais le reste de la ville est calme. Dans le centre, la grande majorité des magasins sont toutefois fermés, portes barricadées. La circulation est beaucoup moins dense qu’à l’accoutumée et les badauds sont rares, mais il n’y a pas de barricades.


Réponses du porte-parole du Quai d’Orsay à des questions du point de presse

Paris, 26 avril 2005

(On a l’impression que le président Obasanjo s’est avancé, en annonçant un accord bi-national au Togo puisque l’opposition a déclaré qu’elle n’a rien signé et que de toute façon elle n’accepterait un accord bi-national que dans le cas où elle serait victorieuse. Et par ailleurs, je crois que plusieurs ambassadeurs étaient réunis aujourd’hui avec M. Olympio. Est-ce que l’Ambassadeur français notamment a essayé de convaincre M. Olympio d’accepter l’accord bi-national quels que soient les résultats des élections. Quelle est la position de la France ?)

Sur le Togo, vous savez que le ministre a eu l’occasion de s’exprimer hier à ce sujet. Il a rappelé que nous étions globalement satisfaits de la façon dont s’était déroulé le scrutin, malgré certains incidents et ses déclarations faisaient suite aux déclarations à la fois du Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, qui avait félicité les électeurs togolais pour le déroulement pacifique des élections et également à celles du représentant de la CEDEAO qui confirmait le fait que l’élection s’était déroulée correctement, malgré un certain nombre d’incidents. Et nous avions indiqué hier que le déroulement de ce scrutin témoignait du sens des responsabilités et du civisme de la population togolaise.
Pour ce qui est de l’initiative du président Obasanjo, nous avions pris note avec intérêt de cette initiative. Et en ce qui nous concerne, nous relevons que les dirigeants des partis politiques togolais ont jusqu’à présent fait preuve d’une grande retenue et nous restons en contact étroit à la fois avec la CEDEAO et l’Union africaine pour poursuivre dans cette voie.
Sur les points spécifiques que vous évoquez, s’agissant de la prise de position de l’opposition, j’ai lu un certain nombre de déclarations juste avant de venir, mais je n’ai pas de commentaire à porter.
Et en ce qui concerne la participation éventuelle de notre Ambassadeur à une réunion avec M. Olympio, là non plus, je n’ai pas d’élément particulier à vous apporter. Je n’ai pas de confirmation à vous apporter sur ce point.
Ce que nous souhaitons, c’est que le calme et la retenue soient respectés jusqu’à la proclamation des résultats et au-delà. C’est notre souhait.

Déclaration de la porte-parole adjointe du Quai d’Orsay

Paris, 25 avril 2005

La France prend note avec satisfaction de ce que l’élection présidentielle au Togo s’est déroulée dans des conditions satisfaisantes même si on a dû constater des incidents isolés.
Nous tenons à rendre hommage au sens des responsabilités dont ont su faire preuve les dirigeants politiques et le peuple togolais dans des conditions difficiles.
Il faut maintenant que le dépouillement du scrutin se déroule dans le calme et sous l’égide de la CEDEAO, présente depuis le début, et dont nous tenons à saluer le rôle déterminant.

(Les autorités togolaises, qui avaient interdit aux radios et télévisions privées du Togo la couverture de la présidentielle, ont refoulé vendredi soir, dès son arrivée à Lomé, l’envoyé spécial du Figaro. Comptez-vous intervenir auprès des autorités togolaises ?
Ne craignez-vous pas qu’un scénario ’à l’ivoirienne’ de chasse aux Français ne se produise à Lomé où le sentiment anti-français monte selon des témoignages de Français sur place ? Combien de Français vivent-ils au Togo et à Lomé ? Avez-vous mis en place un dispositif pour leur venir en aide en cas de besoin, notamment pour une éventuelle évacuation ?
Quelle est votre réaction aux violences qui ont marqué la présidentielle de dimanche au Togo ?
De nombreuses fraudes ont été signalées, notamment par des journalistes internationaux, estimez-vous que cette élection peut-être qualifiée de démocratique ?
Qu’entendez-vous par ’incidents isolés’ à Lomé ? Parlez-vous des fraudes ? Des tués et blessés ? Enfin, avez-vous un dispositif de sécurité pour les Français ?)

Je viens de m’exprimer sur les élections au Togo, et vous renvoie donc à ma déclaration.
S’agissant du point particulier concernant l’envoyé spécial du Figaro, je vous rappelle que les autorités togolaises avaient notifié la fermeture des frontières terrestres, maritimes et aériennes à compter de vendredi, information d’ailleurs relayée par la rubrique ’conseils aux voyageurs’ du site france.diplomatie.
Quant aux Français vivant au Togo, ils sont au nombre de 3.000 environ, pour leur très grande majorité à Lomé.


Togo : Paris soutient le scrutin contesté

Patrick de Saint-Exupéry
[Le Figaro 26 avril 2005]

Après s’être longtemps retranché derrière les prises de position de la Communauté économique de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), Paris est sorti hier du bois afin d’apporter tout son crédit au scrutin présidentiel togolais, marqué par de violents affrontements et de multiples accusations de fraude.

Intervenant du Luxembourg, le ministre des Affaires étrangères, Michel Barnier, a qualifié de « succès » les opérations de vote : « Nous sommes heureux des conditions globalement satisfaisantes dans lesquelles se sont déroulées les élections d’hier malgré un certain nombre d’incidents. » Au moins trois personnes ont été tuées dimanche à la clôture du scrutin et des dizaines d’autres blessées. De nouveaux affrontements étaient signalés hier en début d’après-midi.

Le porte-parole du Quai d’Orsay a surenchéri en affirmant « prendre note avec satisfaction » du bon déroulement du scrutin. La France, a poursuivi Cécile Pozzo di Borgo, tient « à rendre hommage au sens des responsabilités dont ont su faire preuve les dirigeants politiques et le peuple togolais dans des conditions difficiles ».

Interrogé par Le Figaro, le vice-président PS du Conseil général du Finistère, Kofi Yamgnane, qui possède la double nationalité franco-togolaise, a qualifié ces déclarations de « grotesques » : « C’est à faire pleurer, j’ai honte. Comment le pays des droits de l’homme peut-il dire cela ? Je suis scandalisé. Il y a eu tellement d’irrégularités que ces élections ne peuvent être déclarées que nulles. »

« Kofi Yamgnane tient des propos irresponsables, réplique-t-on de source autorisée. Il y a certes eu plus d’irrégularités en faveur de Faure Gnassingbé qu’en faveur de l’opposition, poursuit-on, mais cela ne remet pas en cause la légitimité d’un scrutin que contestent violemment 2 à 3% d’excités à Lomé. »

Cette position française, admet-on à Paris, n’est pas partagée par Bonn, ancienne puissance coloniale du Togo et partenaire privilégié de Paris en Europe. L’ancien ministre togolais de l’Intérieur, qui a pris ses distances avec le régime, a ainsi trouvé refuge dans les locaux de l’ambassade d’Allemagne a Lomé. Deux jours avant les opérations de vote, François Esso Boko, responsable de l’organisation du scrutin, avait qualifié cette élection de « suicidaire ». Depuis, l’ambassade d’Allemagne à Lomé est présentée par les partisans togolais du pouvoir comme la « base arrière de l’opposition ».

La différence d’approche entre Paris et Bonn s’explique en raison du passé. À la différence de Paris, Bonn n’a jamais entretenu de relations de « famille » avec les autorités togolaises. Les liens historiques entre le Togo et l’Allemagne sont pourtant très forts. Comme étaient importants les programmes de coopération financés par l’Allemagne au Togo avant que l’Union européenne ne décide en 1993 d’un gel de la coopération en raison d’un « déficit démocratique ».

Paris, en revanche, n’a eu de cesse de vouloir lever les sanctions contre le Togo, arguant que celles-ci n’avaient aucun effet contraignant sur les autorités. Cette position, basée sur la profonde conviction que la démocratie n’est pas possible en Afrique, n’a jamais eu gain de cause auprès des partenaires européens de Paris, souvent perplexes quand à la nature des liens unissant la France au Togo. En témoigne cette observation paradoxale d’un responsable français convenant tout à la fois que « si l’opposition gagne, cela voudra dire que le scrutin a été correct » mais ajoutant dans la foulée que l’option n’est guère envisageable.

Entamé au début des années 90, le processus de démocratisation au Togo a été extrêmement violent. Plusieurs centaines de civils sont morts et de nombreux premiers ministres sont restés à jamais dégoûtés de la vie politique. Joseph Koffigoh, assiégé par les chars de l’armée togolaise dans une « primature » dévastée au canon, est un fantôme. Agbéyomé Kodjo, également ancien premier ministre du général Eyadéma, vient d’être arrêté au Togo alors qu’il revenait d’un exil en France de trois ans. Accusé de détournement de fonds, il sera jugé aujourd’hui à Kara, dans le fief du clan au pouvoir...


Togo : violences et accusations de fraude après la victoire de Faure Gnassingbé à la présidentielle
AFP 16h28 - 26/04/05

LOME (AFP) - Le candidat du pouvoir Faure Gnassingbé a été déclaré mardi vainqueur de l’élection présidentielle togolaise, résultat qui a aussitôt déclenché à Lomé de violentes manifestions de jeunes de l’opposition qui dénonçaient "une fraude massive".
Le chef du parti au pouvoir le Rassemblement du peuple togolais (RPT) Faure Gnassingbé a remporté l’élection, à un tour, organisée dimanche - à la suite du décès de son père le général Gnassingbé Eyadama le 5 février - avec 60,22 % des suffrages, a annoncé la présidente de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) Mme Kissem Thangaï Walla.

Il a devancé le candidat de la coalition de l’opposition Emmanuel Akitani Bob (38,19%) et Harry Olympio (0,55%), selon cette source, qui a précisé que ces résultats étaient "provisoires", dans l’attente de leurs proclamations officielles par la Cour constitutionnelle.

La présidente de la CENI a souligné que la Commission n’avait pas tenu compte des bulletins "des urnes détruites par les manifestants à l’issue du scrutin".

Dimanche soir, à l’issue de l’élection, des incidents avaient éclaté au cours desquels des manifestants avaient volé ou détruit des urnes, entre autres à Lomé dans les quartiers favorables à l’opposition, mais aussi dans certaines localités de l’intérieur du pays.

Dès l’annonce du résultat, de violents incidents ont éclaté dans la capitale où de nombreux jeunes, criant "on nous a volé notre victoire" ont érigé des barricades et enflammé des pneus en de nombreux endroits, ont constaté des journalistes de l’AFP.

"Ils marcheront sur nos corps pour aller à la présidence", lance un étudiant Yawovi Jean Rosé. "Plus de trente ans que ça dure, et maintenant c’est le fils qui prend la relève, c’est la meilleure ! Mais soyez sûr que ça ne se passera pas comme ça", renchérit Romuald Yao, tailleur.

Ces manifestations d’opposants favorables à Emmanuel Akitani Bob ont provoqué des mouvements de panique dans la population et les habitants de Lomé se pressaient pour regagner leur domicile.

Les forces de l’ordre ont commencé à intervenir, en lançant des grenades lacrymogènes. Elles sont intervenues dans le quartier populaire de Bé, un des bastions de l’opposition, en début d’après-midi où des jeunes en possession de cocktails molotov ont déterré des pavés pour renforcer leurs barricades.

L’annonce de la victoire du fils du président Gnassingbé Eyadema, décédé le 5 février après avoir dirigé le Togo d’une main de fer pendant 38 ans, a été violemment dénoncé par l’opposition qui parle de "fraude massive".

Le chef historique de l’opposition, Gilchrist Olympio, qui n’a pu se présenter pour des raisons de résidence vivant en exil en France, a affirmé qu’il s’attendait à ce résultat et a prévenu que la situation dans Lomé menaçait d’être incontrôlable. "Nous nous y attendions, il y a eu une fraude massive. Nous rejetons le résultat". "Il sera très difficile de contrôler nos jeunes supporteurs dans Lomé" a-t-il ajouté.

Il a aussi émis de très fortes réserves sur la constitution d’un gouvernement d’union nationale annoncé lundi soir à Abuja, après une rencontre avec le président nigérian Olusegun Obasanjo, qui avait également rencontré Faure Gnassingbé. "Je dois consulter mon bureau politique, mais je peux vous dire déjà, à 90% que nous n’accepterons pas d’entrer dans ce gouvernement", a-t-il affirmé à l’AFP joint par téléphone au Ghana, où il se trouve actuellement. M. Olympio a indiqué qu’il avait l’intention de se rendre au Togo.

Un proche collaborateur du candidat de la coalition de l’opposition, Emmanuel Akitani Bob, avait démenti auparavant un éventuel accord sur un gouvernement d’union nationale.

Jean-Claude Homawoo a indiqué à l’AFP : "Si nous sommes gagnants, si la coalition (de l’opposition) est gagnante, Gilchrist Olympio a dit qu’il n’y aurait pas de problèmes" pour une union nationale.

"En revanche, avait-il ajouté, si Faure Gnassingbé est déclaré vainqueur, c’est non. Nous ne serons pas prêts à rentrer dans un gouvernement".


Chirac au Togo : la politique du pire
Edito de Billets d’Afrique et d’ailleurs n° 136 de mai 2005 (à paraître) de François-Xavier Verschave

Il s’est passé au Togo depuis notre Édito d’avril exactement ce que nous redoutions. Jacques Chirac a joué à fond la carte d’une élection truquée de Faure Gnassingbé, fils de son « ami personnel », le tyran Gnassingbé Eyadéma : il a circonvenu l’arbitre principal, l’organisation régionale CEDEAO (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest), et dépêché sur place une série de "conseillers" en tout genre. D’innombrables démarches et d’insistants coups de téléphone ont amené cette CEDEAO initialement courageuse (elle avait désavoué le coup d’État eyadémesque) à fermer complètement les yeux sur l’accaparement du processus électoral par la dictature en place, notamment l’énorme truandage qui a accompagné la révision des listes électorales et la distribution des cartes d’électeurs.

Dans le même temps, la répression multiforme de l’opposition se poursuivait, et le régime faisait sortir dans la rue ses milices armées de gourdins cloutés : celles-ci font immanquablement penser aux Interahamwe rwandais, espérons qu’elles ne leurs sont pas identiques. L’opposition unifiée (si l’on exclut les partis créés par le pouvoir) n’a évidemment pas l’intention de se laisser voler sa victoire : une victoire certaine si le scrutin se déroulait un tant soit peu selon les règles universellement admises. Elle n’a cessé de demander à la CEDEAO et, plus généralement, à la communauté internationale, de faire respecter ces règles, et pour cela de reporter la date du scrutin pour mieux vérifier la composition du corps électoral, garantir le bon fonctionnement des bureaux de vote et le décompte des résultats.

Signe de la nécessité de ce report, le ministre de l’Intérieur du régime a convoqué la presse et les diplomates à 48 heures du scrutin pour signifier que sa tenue le 24 avril reviendrait à pousser à bout un « processus électoral suicidaire », induisant un affrontement aux dimensions et conséquences imprévisibles. Ce ministre impudent a été aussitôt démis.

Nous en sommes-là ce lundi matin 25 avril, où nous achevons ce numéro de Billets. Les avertissements n’auront pas manqué, ceux notamment de la « coalition Togo » (une dizaine d’ONG françaises et internationales, dont Survie) et du Comité de Soutien au Peuple Togolais, créé dans l’urgence à Paris (medias@soutientogo.org). Vous trouverez dans ce numéro les dernières nouvelles du week-end, y compris celles que nous a envoyées le délégué que nous avons dépêché sur place (comme l’ont fait aussi d’autres organisations françaises et allemandes). En prolongeant l’insupportable soutien à l’une des plus grotesques dictatures africaines, Jacques Chirac soumet le peuple togolais à tous les risques. Il en est comptable devant l’histoire.

Le sont de même, de manière de plus en plus précise, tous les responsables français qui ont poursuivi en 1994 l’alliance de la France avec le noyau dur rwandais auteur du génocide. À cet égard, les révélations émises sur France Culture (voir "Ils ont dit"), le 22 avril, par le sous-officier français Thierry Prungnaud sont édifiantes. Ceux qui misent sur l’éternité de l’impunité devraient se méfier.


Violences à Lomé : au moins trois morts et 13 blessés
Source AFP - 25/04/2005

AFP,Lomé-24/04/05 —Au moins trois personnes ont été tuées et treize blessées, dont trois par balle, dimanche à Lomé, lors de violences au moment de la fin du vote pour l’élection présidentielle, selon des sources diplomatique et hospitalière.

Une source diplomatique occidentale a déclaré à l’AFP avoir "vu trois cadavres dans le quartier entre le boulevard Jean-Paul II et l’aéroport près de l’école primaire Hedzranawoe, aux alentours de 18h00 GMT".

"Il s’agissait des cadavres de jeunes hommes", a précisé cette source. Selon les témoins sur place, les jeunes ont résisté quand des hommes non identifiés ont tenté d’emmener les urnes de ce bureau de vote de l’école, a dit cette source diplomatique.

A l’hôpital du troisième district de Bè, un fief traditionnel de l’opposition, une source médicale a affirmé avoir enregistré douze blessés, dont quatre grave qui ont été transférés sur un autre hôpital entre 16H00 et

"Sur les quatre blessés graves il y en avait deux blessés par balle et deux fractures", a ajouté ce médecin qui a requis l’anonymat. Au même moment, un autre blessé, qui avait reçu une balle dans le poignet, est arrivé dans cet hôpital, selon un journaliste de l’AFP.

Les blessés interrogés par l’AFP affirmaient avoir été victimes des coups de feu tirés par l’armée qui cherchait à récupérer des urnes dans certains bureaux de vote.

Ces informations n’étaient pas été confirmées de sources indépendantes.

Une source policière a indiqué à l’AFP que les forces de l’ordre avaient tiré à balles réelles dans quatre zones différentes de la capitale, dont le quartier de Bè.

Des manifestants se réclamant de l’opposition avaient dressé des barricades sur plusieurs artères de Lomé en fin d’après-midi.


Le Togo a voté pour un successeur au général Eyadéma, l’opposition accuse
TOGO - 24 avril 2005 - AFP

Les Togolais ont voté en nombre dimanche pour élire un successeur au général Gnassingbé Eyadéma, dans un climat de tension, l’opposition radicale dénonçant dès avant la fin du scrutin des "fraudes massives" pour porter au pouvoir Faure Gnassingbé.

Au moins trois personnes ont été tuées et treize blessées, dont trois par balles, dimanche à Lomé, lors de violences au moment de la fin du vote pour l’élection présidentielle, selon des sources diplomatique et hospitalière.

Fils du président décédé en février après 38 ans de pouvoir absolu, Faure Gnassingbé est le candidat du Rassemblement du peuple togolais (RPT - ex-parti unique, fondé par son père).

A Lomé, la capitale, des groupes de dizaines de jeunes gens se réclamant de l’opposition, certains armés de machettes et de gourdins, ont érigé dans la soirée des barricades et brûlé des pneus sur plusieurs artères pour protester contre "la fraude".

Le coordinateur de l’opposition, Me Yaowi Agboyibo a dénoncé des "fraudes graves et délibérées", et il a cité l’exemple d’une femme trouvée en possession de 767 cartes d’électeurs, qu’il a montrées.

"Les heures à venir vont être déterminantes", a-t-il dit. La population se mobilise, a-t-il affirmé, et "elle est déterminée à se battre".

L’élection, un scrutin majoritaire à un tour, se résumait en un duel entre le RPT et la coalition de l’opposition radicale. Un petit candidat de l’opposition modérée, Harry Olympio ne semblait pas en mesure de s’imposer.

Faure Gnassingbé, 39 ans, brièvement installé par l’armée à la tête de ce petit pays d’Afrique de l’Ouest à la mort de son père, le 5 février, se trouvait donc face à Emmanuel Akitani Bob, 74 ans, candidat de la coalition de l’opposition, qui avait en vain réclamé un report du vote.

"Nous connaissons bien le système du RPT, mais on dirait qu’ils agissent comme si l’impunité était toujours garantie. Mais cela ne sera pas le cas", a déclaré Emmanuel Akitani Bob, en dénonçant des "bourrages d’urnes à grande échelle".

Plus tôt dans la journée, le candidat du RPT, avait, pour sa part, affiché sa sérénité, et s’était exprimé comme un futur président.

"Nous avons déjà remporté une première bataille : l’élection a eu lieu au moment prévu par la Constitution", a déclaré M. Gnassingbé, décontracté et vêtu d’une chemisette blanche, après avoir déposé son bulletin au bureau de vote du camp militaire RIT, dans le centre de Lomé, là où le général Eyadéma avait coutume de dormir et de voter.

Il a réaffirmé son intention de former un "gouvernement d’union et d’ouverture". "Si (l’opposition) parle de fraude c’est peut-être qu’elle sent déjà qu’elle va perdre", a-t-il dit. "Je ne pense pas qu’il y aura explosion de violence parce que j’ai confiance dans les forces de sécurité".

A Lomé, des tentatives de fraude ont été notées dans plusieurs bureaux, selon des témoins, impliquant des personnes trouvées en possession de plusieurs cartes d’électeurs ou de bulletins de vote pour le RPT. Les bureaux étaient surveillés par des observateurs du RPT et de l’opposition.

Le risque d’affrontements à l’annonce des résultats a suscité les craintes de certains électeurs.

"C’est un virage dangereux et glissant que le pays négocie", a expliqué Salifou Amidou, un retraité septuagénaire A Sokodé (centre), deuxième ville du pays.

"J’ai voté pour le vrai changement", dit Evariste, 20 ans, à Tsévié (35 km au nord de Lomé). Une octogénaire raconte avoir choisi "celui qui va donner à manger à mes enfants ".

L’opposition, dont le leader, Gilchrist Olympio, vit en exil à Paris et ne pouvait pas se présenter, a promis la fin de "l’ancien système", et veut empêcher l’instauration d’une "monarchie". "Faure" s’est présenté comme le candidat de la jeunesse et de la stabilité.

Le 25 février, il avait dû se retirer, sous la pression internationale, de la présidence intérimaire, que lui avait "confiée" l’armée dès la mort de son père.

Pendant la campagne, des affrontements entre militants du RPT et de l’opposition ont fait plusieurs dizaines de blessés.

Vendredi, le ministre de l’Intérieur François Esso Boko avait fait encore monter la tension, en réclamant la suspension de l’élection face aux risques de "guerre civile", avant d’être limogé. Il est depuis réfugié à l’ambassade d’Allemagne.

Dans les années 90, le Togo avait connu une transition démocratique chaotique, qui avait fait des centaines de morts.

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Le centre de décompte de l’opposition attaqué
Source : www.togoelections.org

Un important groupe d’hommes armés a attaqué ce soir le QG de l’opposition. Ils se sont comportés comme des forcenés en cassant des ordinateurs et emportant d’autres.

C’est dans ce centre que la coalition de l’opposition avait installé son QG chargé notamment de faire le décompte parallèle du vote.

On signale aussi que plusieurs ONG de la société civile ont reçu la visite des milices du RPT.


TROIS PERSONNES ENLEVEES A NOTSE
Source : www.togoelections.org

Trois personnes, deux hommes et une femme ont été enlevés ce soir à Notsè, dans la préfecture de Haho. D’après des témoin, il s’agirait de délégués de l’opposition ayant suivi les opérations de vote dans cette ville.

Ils auraient été forcés à monter dans un véhicule dans lequel se trouvait des gens armés. Ledit véhicule (une 4x4 Toyota prado noire) a pris "la direction de Lomé"...


DES URNES ENLEVEES A ATAKPAME
Source : www.togoelections.org

Dans plusieurs bureaux de vote dans l’Ogou et précisément à Atakpamé, les urnes ont été emportées par des agents en armes dès la fermeture des bureaux de vote. Le préfet de la localité en aurait donné l’ordre.

A Agbonou, Dzama et Hihietro, ces interventions indues ont occasionné des heurts avec les populations mécontentes. Ces faits sont contraires au code électoral qui prévoit que le dépouillement soit fait sur le lieu du vote, immédiatement après la fermeture des bureaux.


Le ministre togolais de l’Intérieur, limogé, a trouvé refuge dans l’ambassade d’Allemagne à Lomé
(A.P. 24/04/2005)

BERLIN (AP) - L’ancien ministre de l’Intérieur du Togo, François Boko, limogé vendredi, a trouvé refuge dans l’ambassade d’Allemagne à Lomé, a annoncé dimanche le gouvernement allemand, sans préciser s’il avait demandé l’asile politique.

Une porte-parole du gouvernement allemand a déclaré à l’Associated Press que M. Boko s’était rendu à l’ambassade dans la capitale togolaise vendredi et qu’il s’y trouvait depuis.

Le gouvernement allemand "envisage la possibilité de le laisser quitter" l’ambassade, mais seulement quand il pourra le faire sans crainte, a-t-elle précisé, sans donner davantage de détails.

Le président togolais par intérim Abbas Bonfoh avait maintenu vendredi l’élection présidentielle de ce dimanche et limogé le ministre de l’Intérieur qui avait demandé le report d’un scrutin jugé "suicidaire" en raison de la montée des tensions dans ce petit pays d’Afrique de l’Ouest. AP


Confusion au sein du gouvernement togolais
AFP 22 avril 2005

L’élection aura lieu dimanche "comme prévu", le ministre de l’Intérieur sera "changé".

LOME - Le ministre de l’Intérieur togolais François Esso Boko, qui avait demandé dans la nuit de jeudi à vendredi la suspension du "processus électoral suicidaire" de l’élection présidentielle, "sera changé", a affirmé le président par intérim togolais Abass Bonfoh.

"Le ministre de l’Intérieur sera changé et le processus (électoral) se poursuit. Il a pris une décision. Il ne m’a pas consulté. Ce que je regrette", affirmé M. Bonfoh à des journalites.

"Il m’a toujours dit que le processus se déroule bien. Je ne sais pas ce qu’il voulait. Nous pensons que le processus se déroule normalement tous les candidats sont sur le terrain".

Interrogé sur une possible arrestation de M. Esso Boko, M. Bonfoh a répondu : "non, même pas. Nous ne comprenons pas. nous ne lui avons pas encore parlé".


Source AP - 22/04/2005
Togo : le ministre de l’Intérieur demande le report de la présidentielle par crainte de violences

Mettant en garde comme de possibles violences, le ministre de l’Intérieur du Togo a appelé vendredi au report de l’élection présidentielle prévue ce week-end en raison de la montée des tensions de ce petit Etat de l’ouest africain, estimant que ce scrutin serait un « suicide ».

Deux jours seulement avant la présidentielle de dimanche, le ministre de l’Intérieur François Boko a convoqué les journalistes dans ses bureaux à 2h00 du matin pour lancer cet appel. Il a estimé qu’un gouvernement de transition d’un ou deux ans devrait être mis en place pour mieux préparer le pays à la démocratie.
On ignore encore si le scrutin sera effectivement reporté ou s’il aura lieu comme prévu.

« Les passions sont exacerbées et la campagne électorale a été émaillée de violences sans précédent dans l’histoire électorale de notre pays », a dit Boko, un poids lourd politique dans le gouvernement conduit par le président du Parlement Abbas Bonfoh, le chef de l’Etat.

« Les risques d’une confrontation sanglante qui résulterait de cette élection sont réels. Devant ce danger, l’organisation d’un tel scrutin est suicidaire pour notre pays », a souligné Boko.

Les manifestations violentes se poursuivent en prélude à ce scrutin alors que les leaders de l’opposition togolaise ont juré de mourir au combat en cas de victoire du candidat du parti au pouvoir Faure Gnassingbé. Gnassingbé, qui est le fils de l’ex-dictateur Gnassingbé Eyadéma qui a dirigé le pays de 1967 jusqu’à sa mort en février 2005, soit pendant 38 ans.

Président de l’ancien parti unique du Rassemblement du peuple togolais (RPT), Faure Gnassingbé est candidat face au principal leader de l’opposition Bob Akitani et deux autres adversaires Nicolas Lawson et Harry Olympio. AP

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A la veille des élections présidentielles tronquées au Togo : la responsabilité de la CEDEAO

Par Olivier Bocco
Source : LETOGOLAIS.COM - 20/04/2005

Dans quelques jours, une partie du peuple togolais ira aux urnes pour exercer un des droits fondamentaux du citoyen : le vote. Cet exercice n’est pas nouveau. Ce qui est nouveau, c’est le contexte dont il convient de rappeler les principaux éléments, pour que les trous de mémoires qui est la principale caractéristique du pouvoir politique togolais, ne fassent pas disparaître ces heures particulières de l’histoire de notre pays.

Une partie du peuple togolais ira aux urnes, mais une partie seulement, dans des conditions où les fondamentaux requis pour des élections libres et transparentes sont loin d’être réunis. Et pourtant, l’opposition unie n’a cessé d’alerter l’opinion nationale et internationale sur les conditions calamiteuses de préparation aux élections présidentielles du 24 avril 2005. Elle n’a pas cessé d’informer, de mobiliser, de sensibiliser, d’interpeller. Elle n’a pas cessé d’agir, de manifester, de résister en payant, chaque fois au prix fort, sa détermination pour faire enfin du Togo, un Etat où la démocratie, les droits humains sont respectés. Elle a ainsi perdu, depuis le 5 février, plusieurs dizaines de ses filles et de ses fils tombés sous les balles d’un pouvoir, qui s’est illustré pendant les quarante dernières années, comme l’un des pouvoirs les plus féroces du Continent africain.

Les fondamentaux requis pour des élections libres et transparentes sont connus. Il n’y a rien de nouveau dans cette matière où l’histoire a, au fil des ans, construit des modèles juridiques et jurisprudenciels. Ces fondamentaux s’appellent : cadre électoral clair. Articulé autour de neuf points négociés entre le pouvoir RPT et l’opposition démocratique sous l’égide de la CEDEAO, un cadre électoral consensuel aurait pu permettre l’organisation d’élections enfin démocratiques au Togo.

Dans ce processus, la communauté internationale avait un rôle prééminent. Après que ce rôle eût été délégué à la CEDEAO, proclamée médiateur en l’occurrence, le monde entier a pu observer la démission progressive de l’organisation régionale devant l’histoire. La CEDEAO a, en effet, opté pour la stratégie qui consiste à fermer les yeux et les oreilles devant les manipulations grossières de la liste électorale, la distribution partiale des cartes d’électeurs, la soumission inconditionnelle au pouvoir RPT de tous les organes chargés de la gestion des élections : ministère de l’intérieur, Cour constitutionnelle, Commission nationale électorale indépendante, Haute autorité de l’audiovisuel. Les représentants de la CEDEAO ont décidé de ne pas être au courant de cette situation, qui n’est pourtant pas nouvelle au Togo. Et ils le proclament urbi et orbi. Ils ont décidé d’ignorer le climat de terreur et de violences meurtrières qui a marqué le processus préparatoire aux élections. Ils ont décidé d’oublier qu’au Togo, depuis une quarantaine d’années, il n’y a jamais eu d’élections libres et démocratiques. Ce faisant, les représentants de la CEDEAO portent devant l’histoire les responsabilités d’une élection tronquée et truquée, s’inscrivant dans la longue série d’élections frauduleuses au Togo. Ils ont accepté de se couvrir de honte devant le peuple togolais et les peuples africains, qui n’ont cessé, pendant des décennies, de revendiquer la liberté et la dignité.

Au Togo, la CEDEAO avait, disions-nous, un rôle prééminent au regard du contexte togolais, pays où la Françafrique a prospéré et à partir duquel elle a essaimé à travers le Continent : coups d’Etat militaires récurrents, installation de dictatures brutales, violations massives des droits de l’Homme, dénis de justice, gestion maffieuse des ressources des pays, corruption endémique.

C’est au Togo qu’une dictature militaro-civile a pu, pendant quatre décennies, tout détourner, absolument tout : politiquement comme économiquement, au profit d’un clan, d’une famille.

C’est avec le Togo que l’Union Européenne a interrompu sa coopération pendant plus de douze ans pour « déficit démocratique » : deux mots-clés non négociables et sur lesquels le pouvoir togolais, dans son entêtement, a cru pouvoir gesticuler et divertir les partenaires européens. Le déficit démocratique est toujours là, les sanctions sont elles aussi là avec leurs conséquences désastreuses pour les populations togolaises.

C’est au Togo, que la moindre manifestation pacifique pour réclamer la démocratie et le respect des droits de l’Homme se transforme en chasse à l’homme, avec l’artillerie lourde, comme si le pays était en état de guerre, avec en prime des morts et encore des morts, des blessés et encore des blessés.

C’est au Togo que les représentants de l’opposition démocratique doivent vivre dans des maquis, ne jamais dormir deux fois au même endroit, rester en permanence sur leurs gardes.

C’est au Togo que le pouvoir RPT s’obstine à refuser que le monde a changé et que la démocratie est une condition incontournable pour aller vers le développement durable. Englué dans un obscurantisme lamentable, il s’agrippe à ses intérêts claniques tout en brandissant le spectre de la guerre civile, et autres phraséologies complètement anachroniques.

C’est au Togo, qu’au soir des élections présidentielles, en 1998 et en 2003, des préfets sous ordre et sans scrupules, se sont armés de leurs plumes pour rédiger les procès verbaux des élections, en lieu et place des organes électoraux chargés d’une telle opération. Les observateurs neutres ont pu vivre cela lors des présidentielles de 1998 et de 2003.

C’est au Togo, qu’au soir des élections, tout le réseau téléphonique et informatique est coupé pour permettre au pouvoir RPT d’opérer, en catimini, les fraudes dont il détient le record en Afrique et s’autoproclamer ensuite vainqueur.

Ce n’est pas un hasard si, dès à présent, le président de la haute autorité de l’audiovisuel a décidé d’interdire toute présence des médias libres dans la campagne et les élections elles-mêmes. Tout le monde sait que cette mesure vise à garantir au pouvoir toute latitude pour diffuser à sa guise l’information qui l’arrange, c’est-à-dire proclamer le candidat du RPT élu à un pourcentage qui n’a rien à avoir avec les votes réels des citoyens.

Ce que la communauté internationale, qui a suivi depuis des années les valses d’une dictature aux abois, a demandé à la CEDEAO, c’est de coordonner l’action des partenaires internationaux pour créer les conditions d’un scrutin démocratique et transparent. Dans la situation togolaise, pays où le pouvoir dispose d’une redoutable capacité de manipuler, d’endormir et de réprimer, la CEDEAO avait un rôle d’encadrement et d’appui à toute la classe politique togolaise. Elle avait un rôle d’arbitre neutre entre le pouvoir RPT qui dit une chose et fait le contraire et l’opposition démocratique qui subit cette situation et ces pratiques antidémocratiques depuis des décennies. Personne n’a demandé à la CEDEAO de s’aplatir devant les exigences du pouvoir RPT, en faisant fi des accords dûment conclus entre le pouvoir et l’opposition démocratique sous l’égide de la CEDEAO.

Au lieu de jouer ce rôle historique que lui a concédé la communauté internationale, la CEDEAO s’est laissée endormir et en fin compte corrompre, puisqu’elle accepte l’inacceptable. Elle s’est engagée dans des manœuvres dilatoires et dans des circonlocutions filandreuses, confirmant ainsi son incapacité à agir comme partenaire crédible en situation de crise. Agissant en cavalier seul, elle s’est coupée des autres partenaires crédibles comme l’Union Européenne et l’Allemagne, qui ont estimé les délais trop courts pour organiser un scrutin sérieux.

Au Togo, la CEDEAO est en train de perdre toute crédibilité et cela, les peuples togolais et africains ne l’oublieront jamais !

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Des affrontements ont précédé le scrutin de dimanche.
Election présidentielle à haut risque à Lomé

Patrick de Saint-Exupéry
[Le Figaro. 21 avril 2005]

Moins de trois mois après la mort du président Gnassingbé Eyadéma, décédé le 5 février après trente-huit années au pouvoir, le Togo va passer un week-end à haut risque. Plus de deux millions d’électeurs sont appelés à voter dimanche afin de désigner un successeur à l’ancien président.

Ouverte depuis le début du mois, la campagne électorale a été marquée par plusieurs affrontements, témoignant de la tension régnant dans le pays. Des dizaines de personnes ont été blessées le week-end dernier à Lomé lors de heurts entre l’opposition et les partisans de l’ancien parti unique. Selon les opposants, qui parlent d’« une attaque de miliciens armés de machettes, de gourdins cloutés et d’armes à feu », il y aurait eu un mort. Les autorités démentent. Des heurts identiques se sont produits hier dans la ville de Sokodé. Des militants de l’opposition ont été pris à partie par des jeunes de l’ancien parti unique brandissant, selon l’AFP, machettes et gourdins. Cinq manifestants ont été blessés.

Le candidat de l’ancien parti unique, le RPT, est Faure Gnassingbé, fils de l’ancien président Eyadéma. Agé de 39 ans, celui-ci affirme mener une « campagne à l’américaine ». Au lendemain de la mort de son père, l’armée togolaise lui avait « confié » le pouvoir. Ce « coup d’Etat », très mal accueilli par l’Union africaine (UA) et la communauté internationale, s’était clos lorsque Faure Gnassingbé avait, sous la pression, rendu les armes. Le principe de l’organisation d’une présidentielle anticipée avait alors été retenu. Au grand dam d’une opposition qui aurait préféré que s’opère une véritable transition.

Coalisées pour la première fois, les quatre principales composantes de l’opposition présentent un candidat âgé de 75 ans. Issu de l’UFC, le parti de Gilchrist Olympio, Emmanuel Akitani-Bob a recueilli plus du tiers des suffrages lors du scrutin présidentiel de 2003. Il mène campagne contre « l’ancien système » et fait face aux foudres des caciques du régime qui accusent l’opposition de comploter afin d’empêcher la tenue du scrutin de dimanche.

Les médias privés togolais ont été placés sous haute surveillance. L’institution chargée de garantir et d’assurer la liberté de la presse, la Haac, leur a interdit, à dater de mardi, « d’assurer la couverture médiatique de la campagne électorale ». A la mort du président Eyadéma, sept radios et deux télévisions avaient déjà été fermées pendant deux semaines pour « non-paiement » de redevances fiscales.

Dans un communiqué diffusé à Paris par le Secours catholique, les Eglises togolaises ont fait part de leurs grandes inquiétudes. « Pour la première fois, lit-on dans le texte, les Eglises presbytérienne, catholique et méthodiste du Togo se sont unies pour demander le report des élections. »

A son retour, le 8 avril, d’un exil en France de trois ans, l’ancien premier ministre togolais Agbéyomé Kodjo a été incarcéré sous l’inculpation de « détournement de fonds ». Faure Gnassingbé assure ne pas avoir « été consulté » sur l’arrestation de celui qui était considéré comme le grand argentier de son président de père, Gnassingbé Eyadéma.

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Togo : collusion

Article à Paraître dans "Billets d’Afrique d’ailleurs" n° 136 de mai 2005.

Dans le dernier paragraphe (sous-titré Collusion) d’un article paru dans le quotidien Libération ("Présidentielle à haute risques au Togo", 16/04), Thomas Hofnung cite un « proche du dossier » à propos de Faure Gnassingbé : « Agé seulement de 39 ans, il est en phase avec la jeunesse de son pays, et il dispose de la machine bien huilée du parti au pouvoir, le Rassemblement du peuple togolais, face à une opposition divisée. » Le journaliste affirme par ailleurs que la France envisage d’envoyer des observateurs au Togo à l’occasion des prochaines élections présidentielles. Il s’agirait de « parlementaires familiers du dossier ». Un mafieux à la tête d’une « machine bien huilée » et des « familiers du dossier » complices : et voilà le travail !

Lors d’une récente conférence de presse présentant l’ouvrage de Gilles Labarthe, "Le Togo, de l’esclavagisme au libéralisme mafieux" (1), le chercheur Comi Toulabor (2) a déclaré que, selon de nombreuses sources très crédibles, Jacques Chirac passe un temps non négligeable au téléphone avec les chefs d’État de la CEDEAO (3) afin de les « encourager » à ne pas se montrer trop regardants sur ce qui se passe à Lomé. Autrement dit, le Président français exercerait des pressions diverses sur ses homologues de l’Afrique de l’Ouest afin qu’ils favorisent le maintien au pouvoir de l’actuel système mafieux qui, au Togo, tient lieu de « gouvernance ».

Notons que la machine bien huilée ne cesse de tester la tolérance de la communauté internationale (les pays qui la composent et les diverses institutions dans lesquelles ils sont représentés, de l’ONU à l’Union Africaine en passant par l’Union Européenne et la Francophonie, entre autres) pour ses frasques. Cette tolérance semble de nature à susciter toutes les inquiétudes ! Qu’il s’agisse des tricheries en matière d’établissement des listes électorales ou de distribution des cartes d’électeurs, du non respect des engagements pris concernant l’accès de l’opposition au contrôle des élections, ou encore des arrestations arbitraires, on n’enregistre pas la moindre protestation.

Faure peut compter sur la collusion de la France (ou du moins de l’Élysée) pour l’aider à maintenir en place la vieille tyrannie qui détruit la société togolaise. Le peuple togolais semble ne pouvoir compter que sur lui même pour s’en débarrasser : il doit se sentir bien seul. Si les effets de cette collusion devaient conduire à un embrasement du pays, quelle terrible responsabilité ! Lorsque nous mettrons cette publication sous presse, les élections auront eu lieu, c’est en tout cas ce qui est annoncé. Nous espérons que ce que nous aurons à ajouter d’ici là ne correspondra pas à nos pires craintes. [SC]

1. Dossiers Noirs n° 20, Agir ici, Survie, Agone. Conférence de presse tenue au Centre d’accueil de la presse étrangère (CAPE) le 12/04.
2. Directeur de recherche FNSP, CEAN-IEP de Bordeaux.
3. Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest, sensée veiller sur le respect des modalités permettant aux élections présidentielles togolaises de se dérouler dans de bonnes conditions.


Libération

L’embarrassant cas Jean-Luc Mano

16/04 (Thomas HOFNUNG)

[...] Paris se trouve face à une affaire embarrassante à la veille du scrutin du 24 avril : le cas Jean-Luc Mano. Selon plusieurs sources à Paris, cet ancien directeur de l’information de France 2 [...] ferait profiter le fils Eyadéma de son expérience des médias. Or, à la tête d’une société de media training, Mano est aujourd’hui sous contrat avec les ministres de la Défense et de la Coopération Michèle Alliot-Marie et Xavier Darcos qu’il conseille personnellement..« Faure est un pote et un type prometteur, qui veut faire bouger son pays, mais ne je suis pas sous contrat avec lui » répond l’intéressé à Libération. Avant d’ajouter : « Mais s’il me demande des conseils, je les lui donne. ».

A Paraître dans "Billets d’Afrique d’ailleurs" n° 136 de mai 2005 :

Vous avez bien lu. Un conseiller de deux ministres français, et pas n’importe lesquels, conseille également Faure Gnassingbé lorsque ce dernier le lui demande. Il est bien entendu que Jean-Luc Mano est libre de faire ce qu’il entend, de ses fréquentations et de ses opinions. Aussi, à cet égard, répond-t-il sans faux fuyant aux questions de son confrère. Ceci n’empêche pas de constater, encore une fois, la collusion (voir page ?? cf salve Togo) entre le Paris d’une politique en cours d’application et le fils héritier du tyran togolais défunt. - Sharon Courtoux.


Les USA dénoncent des irrégularités dans l’organisation de l’élection au Togo

(A.P. 19/04/2005)

WASHINGTON (AP) — La préparation de l’élection présidentielle du 24 avril au Togo est entachée par les irrégularités électorales et la violence, alors que les autorités locales ont refusé que des observateurs américains forment le personnel d’encadrement du vote, selon le Département d’Etat américain.
« Nous avons relevé plusieurs cas de violence le week-end dernier et nous demandons à tous les camps de maintenir le calme pendant la période des élections », a déclaré lundi Richard Boucher, le porte-parole du Département d’Etat, le ministère des Affaires étrangères américain. Sept personnes sont mortes dans des affrontements à caractère politique ce week-end à Lomé, la capitale de ce pays d’Afrique occidentale.
Les électeurs togolais devront se choisir dimanche un nouveau président pour remplacer Gnassingbé Eyadema, au pouvoir depuis 38 ans et mort le 5 février dernier. L’Armée avait dans un premier temps mis au pouvoir son fils, Faure Gnassingbé. Ce dernier a démissionné le 25 février sous la pression des gouvernements internationaux et des manifestations intérieures.
« Nous sommes particulièrement déçus que le gouvernement togolais a refusé la formation des représentants des candidats par l’Institut National Démocratique. Nous demandons au Togo de revenir sur cette décision », a poursuivi Richard Boucher, qui s’est aussi déclaré inquiet par « l’enregistrement incomplet sur les listes électorales, des distributions irrégulières de cartes d’électeur » et l’ensemble des violences.
Faure Gnassingbé, candidat à l’élection présidentielle, a lancé un appel au calme ce week-end lors d’un rassemblement réunissant près de 40.000 personnes dans le plus grand stade de Lomé : « Je condamne tous les actes de violence politique, quel que soit leur camp d’origine », a-t-il déclaré. AP

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Togo : au moins 7 morts, 150 blessés

Source AFP - 18/04/2005

AFP [ Lomé - Togo ] ( 17/04/2005) La campagne électorale pour la présidentielle du 24 avril au Togo a basculé dans la violence, samedi, quand des militants rivaux se sont affrontés dans les rues de Lomé, faisant au total sept morts, dont six dans les rangs du parti au pouvoir, et plus de 150 blessé, selon les bilans dimanche d’une association proche du régime et de l’opposition

Ces violences sont les plus graves enregistrées depuis le début de la campagne pour la présidentielle, organisée à la suite du décès, le 5 février, du président Gnassingbé Eyadéma, après 38 ans au pouvoir.

La coalition de l’opposition et la jeunesse du Rassemblement du peuple togolais (RPT, au pouvoir) se sont rejetés la responsabilité de ces violences.

La situation était redevenue calme dimanche dans le centre de la capitale, où le candidat du RPT, Faure Gnassingbé, un des fils du président défunt, devait tenir un meeting.

"Faure" avait été désigné et porté au pouvoir par l’armée à la mort de son père, mais il avait dû se retirer sous la pression internationale, notamment africaine, qui avait conduit à l’isolement diplomatique quasi complet du Togo.

Les autorités togolaises n’avaient pas encore officiellement réagi dimanche à la mi-journée à cette flambée de violence, ni donné de bilan.

Les affrontements ont opposé des militants de la coalition de l’opposition à des membres du mouvement de la jeunesse du Rassemblement du peuple togolais (RPT, au pouvoir).

Six personnes ont été tuées dans les rangs du RPT, et plus de 100 autres blessés, selon un bilan du Mouvement togolais de défense des libertés et des droits de l’Homme (MTDLDH), proche du pouvoir.

Le mouvement des jeunes du RPT (JRPT) a accusé "horde de jeunes hommes aux têtes ceintes de foulards à l’effigie de l’Union des forces du changement" (UFC, premier parti d’opposition) d’avoir attaqué une caravane électorale "pacifique" du RPT à Lomé.

La coalition de l’opposition a elle accusé les militants du RPT d’avoir "provoqué et agressé" ses propres militants après un meeting animé samedi après-midi par le chef en exil de l’UFC, Gilchrist Olympio.

Le coordinateur de la coalition de l’opposition, Me Yawovi Agboyibo, a annoncé qu’un militant de l’opposition avait été tué et 55 autres blessés.

Ces violences sont intervenues alors que la campagne électorale battait son plein dans la capitale ce week-end.

M. Olympio, fils du premier président Sylvanus Olympio, assassiné lors du coup d’Etat mené en 1963 par Gnassingbé Eyadéma, était venu samedi galvaniser les troupes de l’opposition et soutenir le candidat unique de la coalition, Emmanuel Akitani Bob.

"A bas l’ancien système, vive le renouveau", a lancé M. Olympio devant plusieurs milliers de ses sympathisants.

Depuis plusieurs semaines, une polémique oppose le pouvoir et l’opposition, qui a organisé une série de manifestations pour réclamer, en vain, le report du scrutin, et la reprise de la révision des listes électorales, qu’elle juge entachée par la fraude.

M. Olympio avait toutefois indiqué samedi que la coalition de l’opposition ne boycotterait pas les urnes dimanche prochain, sauf si "les choses se dégradent cette semaine".

Des heurts étaient déjà intervenus, il y a quelques jours, entre militants de l’opposition et du RPT, faisant plusieurs blessés. Vendredi dernier, au premier jour de la campagne, un militant de l’opposition avait été tué par balles par les forces de sécurité dans l’intérieur du pays.

Au total, quatre candidats se présentent à la présidence, mais MM. Gnassingbé et Akitani Bob sont considérés comme les favoris.

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Meeting et affrontements à une semaine de la présidentielle
par Didier Samson www.rfi.fr
Article publié le 17/04/2005

La campagne pour l’élection présidentielle du 24 avril prochain est bel et bien lancée. L’opposition tient un meeting à Lomé, tout en laissant planer le doute sur la tenue réelle du scrutin. Mais à l’issue du rassemblement des échauffourées ont éclaté faisant de nombreuses victimes.

L’Union des forces du changement (UFC), le principal parti de l’opposition a pris l’initiative d’un meeting à Lomé, animé par son leader, Gilchrist Olympio, alors que le doute sur la bonne tenue du scrutin s’installe dans les esprits. Venu du Ghana voisin, le leader de l’UFC qui n’est pas candidat, exclu par une disposition de la constitution, est venu soutenir la candidature de son numéro 2, Emmanuel Bob Akitani, candidat unique de la coalition de six partis de l’opposition. « Nous venons d’entamer la campagne électorale et le 24 avril nous allons gagner les élections », a lancé Gilchrist Olympio qui prédit la fin de « l’ancien système » et l’émergence du renouveau dans son pays.

Mais au-delà des slogans et autres pancartes de propagande, ce sont les affrontements dans les rues de Lomé qui retiennent l’attention. En effet, des sympathisants du pouvoir, regroupés au sein du mouvement des Jeunes du rassemblement du peuple togolais (JRPT), ont organisé une « caravane électorale » qui, selon eux, aurait été pris à partie par des militants de l’UFC. Les échauffourées auraient fait sept morts et plus d’une centaine de blessés parmi les militants de la JRPT, annoncent les sympathisants du parti au pouvoir. Côté opposition, on déplore un mort et cinquante-cinq personnes blessées. Les deux parties s’accusent mutuellement de provocation et se rejettent la responsabilité des premiers coups portés.

Les affrontements entre camps rivaux vont probablement servir d’arguments pour tous ceux de l’opposition qui réclament le report du scrutin. Ils dénoncent des fraudes dans la révision des listes et la distribution des cartes d’électeurs. Yawovi Agboyibo, le coordinateur de l’opposition accuse la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) d’avoir échoué dans sa mission au Togo. L’opposition qui reconnaît la qualité du travail fournie par la CEDEAO dès l’annonce de la mort du président Gnassingbé Eyadéma et la succession organisée en faveur de son fils, déplore aujourd’hui la complaisance de cette organisation face au pouvoir togolais. Un fort courant de l’opposition soutient aujourd’hui la thèse du report de l’élection présidentielle. « Nous avons écrit à l’Union européenne, aux Etats-Unis, au président Olusegun Obasanjo (président en exercice de l’Union africaine) , et nous leur avons demandé de prendre le dossier togolais en main. Nous verrons les jours à venir ce qui va se passer », a précisé Yawovi Agboyibo.

« Risque de déflagration »

La question du report de l’élection présidentielle a mobilisé, la semaine dernière, l’archevêque de Lomé Philippe Kpozro, des religieux, des avocats et des personnalités de la société civile qui se sont rendus à la présidence de la République pour demander au président par intérim, Abass Bonfoh, le report du scrutin. Il leur a laissé entendre qu’il est désormais trop tard pour envisager une telle éventualité. Par ailleurs, le gouvernement se réfugie derrière la « stricte application des textes de la Constitution » pour justifier le maintien du scrutin. Mais pour l’association Initiative 150, qui regroupe des intellectuels et de nombreux cadres togolais, pour la plupart vivant à l’extérieur, il y a une autre lecture des textes « si seulement on se donne la peine de faire les choses dans les règles de l’art et avec du bon sens ». Pour cette association qui s’exprimait devant la presse internationale au Centre d’accueil de la Presse étrangère (CAPE) à Paris, le 14 avril, les mêmes textes (Constitution) évoqués par le pouvoir « ne font l’objet que d’une lecture partielle ».

Initiative 150 cite pêle-mêle des articles de la constitution togolaise « qui obligent » à repousser dans le temps la tenue du scrutin. Elle prévient « contre un risque de déflagration » au Togo si la date du 24 avril est maintenue. Mais devant la montée en puissance des militants du report de la date du scrutin et malgré ses propres réserves sur l’organisation du scrutin, Gilchrist Olympio, leader du principal parti de l’opposition, précise que la coalition ne boycotterait pas les urnes « à moins que les choses ne se dégradent cette semaine ».


L’opposition participera aux élections malgré les "conditions difficiles"

TOGO - 17 avril 2005 - AFP

La coalition de l’opposition togolaise participera à la présidentielle du 24 avril "malgré les conditions difficiles", a déclaré samedi à Lomé le chef du premier parti d’opposition, Gilchrist Olympio.

La coalition de l’opposition a réclamé un report du scrutin et a dénoncé des fraudes dans la révision des listes et la distribution des cartes d’électeurs.

"Nous ne sommes pas satisfaits" de l’organisation du scrutin "mais nous irons aux élections malgré les conditions difficiles", a déclaré M. Olympio, le chef de l’Union des forces du changement (UFC).

"Pour le moment, nous ne boycotterons pas ce scrutin, à moins que les choses se dégradent cette semaine", a-t-il cependant ajouté devant des journalistes.

Les autorités togolaises ont rejeté l’hypothèse d’un report.

M. Olympio, qui vit en exil en France depuis 1999, n’effectue que de brèves visites au Togo en raison de craintes pour sa "sécurité" après avoir été victime d’un attentat en mai 1992.

Il est arrivé samedi à Lomé pour animer un meeting de campagne avec le candidat unique de la coalition de l’opposition, le premier vice-président de l’UFC, Emmanuel Akitani Bob.

M. Olympio, 68 ans, ne peut pas se présenter à la présidentielle organisée à la suite du décès, le 5 février, du président Gnassingbé Eyadéma, parce qu’il ne réside pas au Togo.

Outre Akitani Bob, trois autres candidats sont en lice, dont Faure Gnassingbé, un des fils du président Eyadéma, représentant du Rassemblement du peuple togolais (RPT, au pouvoir).


Les Eglises chrétiennes et l’Ordre des avocats dans la rue de Lomé

Source CEDICOM - 15/04/2005

Les Eglises chrétiennes du Togo dans leur engagement en faveur de la construction d’un Etat de droit au Togo dans la justice et la paix, se sont mobilisées ce matin du 15 avril 2005 dans une marche pacifique organisée avec l’Ordre des avocats du Togo.

Cette manifestation qui a débuté à 8 heures sur l’esplanade de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), en face du « Campus-Nord » de l’Université de Lomé a abouti devant la résidence privée du président par intérim de la République Togolaise, M. Abass Bonfoh, sis à la Cité OUA.

D’abord refusée d’accès à ladite résidence, cette foule de dignitaires religieux (prêtres, pasteurs, religieux et religieuses) et d’avocats, femmes et hommes habillés en noir et en blanc, n’avait droit qu’à attendre debout pendant 2 heures de temps de l’autre côté du boulevard Eyadéma, à environ 500 m.

Seuls les délégués des Eglises chrétiennes et de l’Ordre des Avocats ont été finalement admis au domicile privé du président de la République pour lui faire part de leur démarche. Il s’agit de Mgr Philippe Fanoko Kpodzro, Archevêque de Lomé représentant l’Eglise catholique, le Pasteur Gerson Kodjo BESSA, Modérateur, représentant de l’Eglise Evangélique Presbytérienne du Togo, le Pasteur Félix Anani Aduayom, Président, représentant de l’Eglise Méthodiste du Togo et de Mme Akouété, Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du Togo.

A la sortie de cette audience quelque peu tumultueuse, Mgr Kpodzro a révélé les points de discussion à la presse privée notamment, à qui l’accès à la résidence a été interdit par les forces de l’ordre - car seule la Télévision Togolaise, média public, y a été autorisée.

Il s’était agi principalement de la demande réitérée du report des élections en vue de permettre plus de participation, de transparence et d’équité aux prochaines présidentielles fixées au 24 avril 2005, et de faire le point sur la situation d’insécurité qui règne actuellement dans le pays. Une lettre a été remise par la délégation au président de la République aux côtés de qui se trouvaient le Ministre de l’intérieur et le Ministre de la justice et garde des sceaux.

Mgr Kpodzro a fait part de la difficulté évoquée par les autorités gouvernementales au sujet du report des élections. Pour finir, il a jouté que des suggestions ont été faites pour la résolution de la crise que traverse le pays.

Lomé, le 15 avril 2005
Infos du CEDICOM
Centre Diocésain de Lomé
P. Miroslaw Wolodko, Directeur

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Déclaration de la LTDH

14 avril 2005

La Ligue Togolaise des Droits de l’Homme exige la cessation des traitements inhumains et dégradants infligés à l’ex-premier ministre Agbéyomé Messan Kodjo à la prison de Kara

La Ligue Togolaise des Droits de l’Homme vient d’apprendre avec indignation et horreur les traitements inhumains et dégradants que le régime militaire du tandem Faure Gnassingbe - Abass Bonfoh est en train d’infliger à l’ex-premier ministre Agbéyome Messan Kodjo arrêté à son arrivée au Togo, le 08 avril 2005, après trois années d’exil en France.

Dès son arrestation, M. Agbéyome Messan Kodjo a commencé à subir des violations de ses droits humains à travers son transfert de la prison de Lomé à celle de Kara. La stratégie étant de l’éloigner de ses juges et avocats et de sa famille.

Fait aggravant, son transfert s’est effectué de Lomé à Kara les menottes aux poignets en violation de la loi.

Son arrivée à la prison civile de Kara s’est transformée pour l’ancien premier ministre du général Eyadema en enfer. Il y est gardé par des militaires parachutistes dits « bérets rouges » dans une prison civile ! D’après les appels désespérés de son épouse à la Ligue Togolaise des Droits de l’Homme, il est enfermé dans une cellule dont la clé serait déposée la nuit, depuis le 12 avril 2005, au camp militaire de Landja. Isolé et privé d’eau, M. Kodjo a crié en vain pour réclamer de l’eau et a fini par faire une crise grave mettant sa vie en danger.

Voudrait-on le tuer qu’on n’agirait pas autrement. Tous les Togolais ont encore en mémoire la mort cruelle et tragique de feu Antoine Idrissou Meatchi, ex-Vice- Président de la République, soumis à la privation totale de nourriture, la fameuse « diète noire ».

La LTDH met les autorités togolaises devant leurs responsabilités, car elles auront à répondre de la sécurité et de la santé de M. Agbéyomé M. Kodjo sur lequel elles sont en train d’assouvir une vengeance politique. En effet, le pouvoir RPT ne semble pas avoir pardonné à M. Kodjo d’avoir dénoncé la corruption et les crimes du régime Eyadema.

La Ligue a écrit une lettre de protestation au Président de la République par intérim ,Abass Bonfoh, et attend de lui qu’il mette fin au drame que vit un citoyen togolais qui a eu le tort d’être en désaccord avec le régime qu’il a servi.

La Ligue Togolaise des Droits de l’Homme lance un appel urgent aux organisations des Droits de l’Homme et à la Commission des Nations Unies aux Droits de l’Homme afin qu’elles interviennent auprès des autorités togolaises.

Fait à Lomé, le 14 avril 2005
Le Secrétaire Général,
Ayayi Togoata Apedo-Amah

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La Coalition exige le retrait immédiat de la CEDEAO du processus électoral

Déclaration de la coalition ADDI, CAR, CDPA, PSR, UDS-Togo, UFC, le 14/04/2005

La Coalition de l’opposition démocratique a suivi avec consternation la déclaration faite le mercredi 13 avril 2005 sur la Radio France Internationale (RFI) par Mme Adrienne Diop porte-parole de la CEDEAO, propos suivant lesquels les opérations de révision des listes et de distribution des cartes auraient été régulières ; que la CEDEAO n’a été saisie d’aucune contestation émanant notamment de l’opposition ; qu’il n’y pas lieu, dans ces conditions, de reporter la date du scrutin présidentiel fixée au 24 avril 2005.

La déclaration en question est d’autant plus scandaleuse que Mme Adrienne Diop est censée être au courant des multiples plaintes que la Coalition a adressée à la CEDEAO depuis que celle-ci s’est saisie du dossier togolais.

C’est pourquoi, la Coalition a tenu à faire la déclaration dont la teneur suit.

La Coalition de l’opposition démocratique avait, au nom des populations togolaises, apprécié en février 2005, la promptitude et la fermeté avec lesquelles la CEDEAO a œuvré à la démission de Faure Gnassingbé, porté au pouvoir par une poignée d’officiers supérieurs de l’Armée au mépris des dispositions constitutionnelles. L’acte a été salué avec fierté par tous les Africains.

Et c’est du reste en raison de la confiance que la CEDEAO a ainsi suscitée, que l’Union Africaine et d’autres organisations internationales lui ont apporté leur soutien pour le suivi du processus du scrutin présidentiel organisé pour l’élection d’un nouveau président.

Le 28 février 2005, une mission de la CEDEAO conduite par son Président en exercice, son Excellence Monsieur Mamadou Tandja et son Excellence Monsieur Toumani Touré, Président du Mali, a effectué un séjour à Lomé. Pendant ce séjour la mission s’est employée à amener le pouvoir incarné par le RPT à s’accorder avec la Coalition sur un certain nombre de points qui les opposaient à propos du cadre électoral avant le décès du Général Eyadema.

Engagements pris par le gouvernement devant la CEDEAO

Lors des discussions, la délégation de l’opposition a souligné pour l’éclairage des deux Chefs d’Etat, que c’est durant la phase préparatoire, c’est-à-dire pendant la période de révision des listes et de distribution des cartes que l’Administration militante RPT réalise généralement les fraudes et irrégularités qui ont vidé de tout sens les diverses consultations que le Togo a connues dans le passé ; qu’il importe en conséquence que des garanties appropriées soient aménagées pour cette étape décisive du processus.
La mission de la CEDEAO a semblé avoir pris en compte cette préoccupation en amenant le pouvoir togolais à souscrire dans l’Accord intervenu ce 28 février 2005 aux 4 engagements fondamentaux ci-après :

(i) la représentation en tant que membres à part entière des partis politiques au sein des commissions administratives et comités administratifs chargés des élections au plan local, avec les pouvoirs de signer les procès-verbaux et le droit d’en recevoir copies ;
(ii) l’observation du scrutin par des organisations internationales crédibles, étant entendu que cette observation ne présente d’intérêt que si elle débute dès la phase préparatoire du scrutin c’est-à-dire celle concernant la révision des listes et la distribution des cartes d’électeurs ;
(iii) la nécessité pour l’Administration, les Forces de Sécurité publique et toutes les Institutions de la République d’être impartiales et d’observer une stricte neutralité ; et
(iv) l’implication de la CEDEAO, de l’Union Africaine et d’autres partenaires pour accompagner le processus électoral
La mission a désigné Monsieur Maï MANGA en qualité d’envoyé spécial et trois experts en vue d’assurer le respect des engagements pris par le pouvoir.
Très tôt, l’envoyé spécial et les 3 experts ont révélé leur impuissance à faire appliquer les 4 engagements face à l’obstination du régime togolais à ne rien céder sur ses mécanismes de fraude.
Impuissance des représentants de la CEDEAO à faire respecter les engagements pris par le gouvernement

En effet, le 02 mars 2005, soit 2 jours à peine après cet Accord, le Secrétaire exécutif de la CEDEAO, agissant de connivence avec le gouvernement a fait insérer dans un communiqué concernant d’autres sujets, une clause selon laquelle les personnes à désigner par les partis politiques en vue de les représenter au sein des commissions administratives et des comités des listes et cartes siègeront, non pas en qualité de membres à part entière comme convenu le 28 février 2005, mais comme de simples délégués observateurs.
L’envoyé spécial et les 3 experts, loin de s’indigner de l’acte posé par le Secrétaire exécutif de la CEDEAO, y ont au contraire apporté leur aval en réduisant les représentants de l’opposition dans les structures de gestion des listes et cartes au rang de simples observateurs à travers le protocole d’Accord du 29 mars 2005.

Le Secrétaire exécutif et l’envoyé spécial de la CEDEAO venaient ainsi délier le Gouvernement togolais de l’une des deux mesures anti-fraudes mises en place par la CEDEAO dans son communiqué sanctionnant l’Accord du 28 février 2005.
La seconde mesure, celle concernant la supervision du processus électoral par des observateurs internationaux a subi le même sort. L’envoyé spécial de la CEDEAO a laissé entendre à la Coalition qu’il ne conçoit la mise en œuvre de la disposition de l’Accord du 28 février 2005 concernant l’observation du processus électoral qu’à la date du scrutin et non durant la phase préparatoire.

Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que le processus de révision des listes et de distribution des cartes ait été émaillé de graves anomalies préfigurant l’ampleur d’un scrutin frauduleux à l’issue préétablie.
Pour mesurer l’ampleur des anomalies, il importe de les situer à ces deux étapes correspondant respectivement :
 aux opérations matérielles de révision des listes et de distribution des cartes et
 celles des recours.
(a) Phase des opérations matérielles
Parmi les anomalies constatées à ce stade et qui ont été toutes signalées à l’envoyé spécial, il importe de citer les suivantes :
1- les délégués observateurs que la Coalition s’est finalement résignée à désigner ont été interdits de siéger ou mis à l’écart dans la plupart des comités des listes et cartes (Lomé, Kloto, Golfe Moyen-Mono, Yoto, Tône ...) ;
2- le refus d’inscrire, dans les localités considérées comme favorables à l’opposition, des milliers de citoyens, ou de leur délivrer la carte d’électeur malgré la production par les intéressés des preuves exigées notamment ceux qui à défaut de pièces écrites ont attesté leur identitépardes personnes ressources ce, conformément aux dispositionsduCodeélectoral(Avé,Lacs,Est-Mono,Ogou...) ;
3-le détournementmassif et la pénurie des cartes d’électeurs dans les mêmes localités ;
4- la distribution des cartes d’électeurs sans exigence de preuves et hors des bureaux de vote dans les zones considérées comme des fiefs du pouvoir ;
5- l’établissement de deux ou plusieurs cartes au nom d’un même électeur (Tchaoudjo, Lomé, Dayes, Kozah, Binah, ...) ;
6- la distribution des cartes d’électeurs à des étrangers des villages frontaliers du Togo (le long des préfecturesde Dayes, Wawa, ...) ;
7- la remise des cartes d’électeurs moyennant versementd’une somme d’argent (Lomé, Baguida ...) ;
8- les opérations de révision des listes et de distribution des cartes d’électeurs ont été arrêtées le lundi 04 avril 2005 à midi dans la plupart des bureaux de vote alors qu’elles ne devraient prendre fin que le mardi 05 avril à 17 heures.
La conséquence de ces diverses anomalies, c’est que, selon les chiffres rendus publics le 08 avril 2005 par le Ministre de l’intérieur à la CENI, la proportion des électeurs ayant obtenu leurs cartes d’électeurs a été très élevée dans les zones considérées comme des fiefs du pouvoir (100 % dans les cantonsdeBoufalé, Sola et Pagouda de la Binah, 92,33 % dans la région de Kara, 74,83 dans la région centrale ...) alors qu’elle est très faible dans les localités votant en faveur de l’opposition (21 % dans la préfecture de l’Ogou, 16 % dans la préfecture de l’Est-Mono, 40 % dans la région des plateaux, 41 % dans la commune de Lomé... ).

Le comble, c’est qu’à l’issue des opérations, certaines préfectures considérées comme étant des fiefs du pouvoir se sont retrouvées avec une population électorale supérieure à la population globale (Sotouboua : 164.000/134 000 ; Kozah : 221 586/209 000 ; Binah : 68 318/65 000 ...).
Le Ministre de l’Intérieur ayant pris conscience de ces diverses anomalies, a déclaré lors de sa séance de travail du jeudi 07 avril 2005 avec les partis politiques qu’il voulait proroger de deux journées dans la commune de Lomé, la révision des listesetladistribution des cartes d’électeurs sous forme de ce qu’il qualifie de ’’séances foraines’’.
Les représentants de la Coalition à la réunion lui ont fait observer que la solution envisagée est inacceptable pour trois raisons :
(i) d’abord, les anomalies entachant les opérations de révision des listes et de distribution des cartes ne se limitent pas à la commune de Lomé, mais s’étendent à l’ensemble du territoire national ;
(ii) le manque de moyens financiers mis en avant par le Ministre de l’Intérieur pour justifier la limitation de la prorogation des opérations de révision des listes à la Commune de Lomé est inadmissible dans la mesure où plusieurs organisations internationales et pays amis sont disposés à contribuerfinancièrement au processus électoral si le délai du scrutin était moins court ;
(iii) la prorogation des opérations de révisiondes listes et de distribution des cartes n’est qu’une solution de façade dès lors que le Ministre de l’Intérieur a réaffirmé à la réunion du 07 avril son refus de permettre aux électeurs n’ayant pas des pièce d’identité, de recourir au témoignage de personnes ressources tout en sachant que ce refus relève de l’arbitraire au regard des articles 47, 65 et 66 du Code électoral.
(b) Suppression de la phase des recours
Le Ministre de l’Intérieur, s’attendant tout naturellement à ce que les anomalies affectant les opérations de révision des listes et de distribution des cartes d’électeurs provoquent des milliers de recours, a cherché à les empêcher en déclarant lors de la réunion qu’il a eue le 07 avril 2005 avec les partis politiques que les délais d’exercice de ces recours sont à décompter à partir du premier affichage des listes précédant la révision des listes.
C’est de l’aberration, tant il est évident que les recours en question ne se conçoivent qu’après le second affichage des listes reflétant le traitement réservé aux demandes d’inscription, de radiation et de retrait des cartes formulées par les citoyens lors des opérations de révision.
Il s’agit en réalité d’une manœuvre grave visant à supprimer après l’étape des opérations matérielles, celle des recours. Les listes révisées ne pouvant, en effet, être affichées avant une dizaine de jours, et les délais de recours s’élevant au total à 20 jours pour les trois niveaux prévus par le Code électoral (commission administrative, CELI, tribunal de première instance), le Ministre de l’intérieur a cherché en réalité à empêcher les citoyens de faire valoir leurs plaintes.

Si le Ministre de l’Intérieur s’était montré respectueux du droit des citoyens lésés par les anomalies entachant les opérations de révision des listes et de distribution des cartes, le scrutin présidentiel ne peut pas avoir lieu avant début juin 2005.
La manœuvre sous-tendant la fixation de la date du scrutin au 24 avril 2005 est donc grotesque.
Au fur et à mesure que les régularités, anomalies et autres abus ci-dessus décrits ont été constatés, la Coalition les a portés à la connaissance de l’envoyé spécial et des 3 experts de la CEDEAO. Elle a même adressé directement au Président en exercice de la CEDEAO, deux lettres datées des 03 et 15 mars 2005 à propos du refus d’application par le gouvernement de l’accord du 28 février 2005. Mieux, unresponsable de la Coalitionlui a apporté à Niamey, un dossier complet sur les irrégularités et anomalies.
Il est donc déplorable que la CEDEAO prétende par le canal de sa porte-parole qu’elle n’a jamais eu connaissance des irrégularités et anomalies en question.
La vérité est que toutes les plaintes de la Coalition ont été sans suite.
L’envoyé spécial de la CEDEAO s’est chaque fois borné à déplorer l’impossibilité d’amener le pouvoir à faire la moindre concession.
Face au manque d’ouverture du pouvoir, à l’accumulation des frustrations, la population est de plus en plus exaspérée et craint que la CEDEAO ne soit complice des manœuvres frauduleuses et d’une conspiration visant à assurer la victoire de Faure Gnassingbé au scrutin présidentiel.
Et si une telle catastrophe venait à se réaliser, elle serait lourde de conséquences pour la stabilité et le développement du Togo et de la sous-région.
C’est pourquoi la Coalition a jugé impératif et urgent d’alerter la communauté internationale avant qu’il ne soit trop tard, en demandant notamment à l’Union Africaine, à l’Union Européenne, aux Nations Unies et aux Etats-Unis d’Amérique de tirer les conséquences de l’impuissance de la CEDEAO de façon à s’impliquer activement dans le processus électoral en cours afin que le scrutin en perspective n’aggrave la situation déjà dramatique du pays.
La Coalition demande en conséquence à la CEDEAO de retirer son envoyé spécial et les trois experts du processus électoral.

Fait à Lomé, le 13 avril 2005
Pour la Coalition
Le Coordinateur Général,
Me Yawovi AGBOYIBO

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La Coalition promet une table-ronde nationale,un sauvetage de l’économie et une réforme de l’armée

(Xinhuanet 13/04/2005)

LOME, (XINHUANET) — La Coalition des six partis de l’opposition, dans son projet de société diffusé mardi par le site du gouvernement, promet une table-ronde pour conjurer l’impasse politique, un plan de sauvetage de l’économie togolaise rétablissant de grands équilibres macro-économiques et budgétaires, et une réforme à long terme des forces armées avec une réduction de ses effectifs.

La Coalition dont le candidat n’est pas encore en campagne, outre les manifestations dites de "campagnes revendicatives", entend panser, en vue d’une réconciliation nationale, les plaies de la Nation, cultiver la tolérance, tenir une table-ronde qui apportera la solution à l’impasse politique du Togo, et exclure l’inégalité.

Des Togolais ayant fuit le pays pour des raison politiques, elle se dit devoir organiser un retour volontaire des réfugiés estimés à 200 000, et veiller à garantir l’Etat de droit et le respect des droits de l’homme.

Une mise en oeuvre d’un plan de sauvetage de l’économie togolaise se fera pour rétablir les grands équilibres macro- économiques et budgétaires, a promis cette Coalition. Elle entend endiguer la criminalité économique, favoriser l’investissement productif, créer des emplois, et stimuler la production agricole à travers une meilleure rémunération des planteurs dans le but d’une lutte contre la pauvreté et d’atteindre l’autosuffisance alimentaire.

Elle fait état de la stimulation de l’esprit d’entreprise dans les secteurs de l’économie privée, de la promotion de l’épargne et des investissements, et l’organisation de la formation à l’esprit d’entreprise.

Le Togo, sous la Coalition, renforcera la coopération régionale avec un accent sur la coexistence pacifique et la prévention des conflits à travers des modalités pratiques de coopération, aura un système judiciaire moderne, et connaîtra une réforme de l’administration publique, le renforcement des services de santé de base, l’amélioration de l’hygiène publique, l’accès à la santé et à un habitat décent.

La Coalition promet de s’engager à organiser un débat de fond sur les services que la Nation attend de l’Enseignement supérieur, de réduire l’inégalité des garçons et des filles dans l’accès à l’éducation de base, et d’instaurer une réforme des méthodes et programmes scolaires.

Elle donne son engagement dans des réformes en vue d’écarter de l’Armée les éléments compromis et de faire de l’Armée un corps républicain. Elle veut cantonner l’Armée dans sa mission de gardien de l’intégrité territoriale de l’Etat, mettre en oeuvre une réforme à long terme des forces armées avec une réduction des effectifs, l’équilibre de leur composition ethnique, et la réduction des dépenses militaires dans le budget national. Fin

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Interview d’Adote Ghandi AKWEI (Président de la Ligue Togolaise des Droits de L’homme)

Libre antenne 13/04/2005

Togo. « ...le parti au pouvoir et l’armée ont décrété un état de terreur qui se traduit par la multiplication des violations de droits humains à laquelle nous assistons aujourd’hui. » Adote Ghandi AKWEI.

Ce que l’opposition demande c’est la révision du cadre électoral, qui englobe l’organisation générale des élections : le découpage électoral, la confection des listes ainsi qu’un recensement de la population le dernier remontant à 1995. C’est aussi la crédibilité de la Cour constitutionnelle qui est en question et ce sont tous ces éléments qui sont objets de tiraillements entre le RPT et l’opposition dans le cadre des 22 engagements pris au près de l’ Union Européenne.
Ce à quoi nous assistons aujourd’hui c’est une organisation des élections par la CENI qui est à majorité RPT : sur ses 13 membres, sept sont de la paroisse RPT et deux autres s’en sont rapprochés à un moment ou à un autre et se sont trouvés marginalisés par l’opposition dite radicale. Or le vote est à majorité simple, dès lors le doute existe que des décisions allant contre une organisation équitable des élections puissent être prises légalement"

Parmi ces décisions il pourrait y en avoir quant à la condition d’age pour être éligible, permettant la candidature de Faure Gnassingbé ?

L’age a déjà été revu à la baisse à 35 ans lors d’un tripatouillage constitutionnel dont le RPT est coutumier. Car la succession d’ Eyadema par son fils Faure se préparait déjà du vivant d’ Eyadema. Des rumeurs avaient déjà fait état de la volonté d’ Eyadema de placer Faure à la présidence de l’Assemblée nationale. Ceux qui croient que rien de ce à quoi nous assistons n’était préparé sont dans l’erreur.
Maintenant la désignation et la composition des bureaux de votes, parmi d’autres questions relèvent de la CENI, or pour le contrôle sérieux des élections il est nécessaire que cette composition soit faite sur une base transparente, autrementil y a tout lieu de craindre des manipulationsàceniveau.Il aété un tempsquestion quelesexigencesdel’oppositionsoientdiscutées,aujourd’hui ces discussions n’ont toujours pas eu lieu et la CENI avance à pas de géant vers les élections présidentielles pour lesquelles la date du 24 avril a déjà été fixée contre toute logique. La révision des listes, les dispositions budgétaires et matérielles nécessaires à l’information ne permettent pas d’envisager des élections libres et transparentes dans un délais si court. Parallèlement à ces inquiétudes le parti au pouvoir et l’armée ont décrété un état de terreur qui se traduit par la multiplication des violations de droits humains à laquelle nous assistons aujourd’hui.

Quel est le nombre de blessés et de morts que vous avez dénombré depuis le 5 février,

Nous avons dénombré 9 neuf cas de décès que nous avons pu vérifier, mais nous venons d’être saisis de nouveaux cas à la prison civile de Lomé. Une mutinerie y a eu lieu les 6 et 7 Février, qui officiellement avait fait un mort, mais des informations concordantes font aujourd’hui état de 3 morts. Ce qui porte pour nous à 12 le nombre de décès et un parti politique fait état de 14 morts depuis le 5 février. Nous avons également reçu ici plus d’une centaine de plaintes de blessés, nous venons de recevoir la plainte d’un jeune homme de 18 ans qui hier a été pris à parti par une patrouille de militaires qui ont juré de l’achever. Ils lui ont donné une centaine de coups sur les fesses, il est maintenant incapable de s’asseoir et ne fait que pisser du sang. Nous avons monté un dossier pour porter plainte, mais porter plainte devant quelle justice ? Devant cette justice corrompue que nous dénonçons ? Porter plainte de toute façons car nous avons l’espoir que cette justice soit réformée dans un Etat de Droit que nous appelons de nos vœux. Un état de droit ne peut venir que par des élections transparentes, or celles ci se préparent dans un contexte qui nous inquiète.
En tout état de cause notre communiqué est assorti d’une demande express d’ouverture d’enquête indépendante. Car le ministère de l’Intérieur a déclaré avoir ouvert une enquête pour déterminer les circonstances de la mort de 3 cadavres repêchés dans la lagune de Bè à Lomé, ces 3 hommes avaient les pieds et mains liés quand on les a retrouvé, enquête à néanmoins conclu à 3 cas de noyades ! Nous ne faisons aucune confiance à une enquête diligentée par le gouvernement en place. C’est pour cela que nous demandons l’ouverture d’une enquête indépendante. Dans ce même quartier de Bè nous avons offert un soutien psychologique aux femmes agressées que nous avons trouvé dans un état psychologique très bas. Nous soupçonnons les forces de l’ordre de les avoir violées, certaines ont été agressées dans leur lits ou leur toilettes pendant qu’elles se lavaient...si dans une période préélectorale nous vivons cette situation, que pouvons nous envisager lors des élections ?
Ces inquiétudes nous aimerions les porter à la connaissance de la commission de la CEDEAO chargée de surveiller les élections dont nous avons reçu la composition ce matin. Nous les avons déjà alerté de notre volonté de les rencontrer pour évoquer la protection de la population en cette période préélectorale. (cette commission a finalement refusé de rencontrer la LTDH ainsi qu’un collectif d’associations de la Société civile)

A propos de la CEDEAO (qui a levé ses sanctions à la démission de Faure), on a l’impression que la communauté internationale a cessé de se préoccuper du Togo dès la démission de Faure Gnassingbé, alors que celle ci semble être avant tout un retrait stratégique en vue des élections présidentielles. Parmi ceux que vous alertez, certains pays continuent ils de se préoccuper sincèrement du Togo ?

Nous avons entendu à la radio un communiqué de l’Allemagne disant qu’il ne suffisait pas de se contenter du départ de Faure et qui s’inquiétait des conditions dans lesquelles se préparaient les élections. C’est encourageant d’autant que l’UE semble avoir délaissé le dossier togolais. Alors que c’était le 1er interlocuteur international qui exigeait du Togo des avancées significatives vers un état de droit dans le cadre des 22 engagements du 14 avril 2004. On se demande si l’UE n’attendait pas la belle occasion pour se débarrasser de ce dossier. Ce désintéressement se manifeste par la décision selon laquelle elle ne peut pas envoyer d’observateurs pour le processus électoral. Or laisser ces élections entre les mains de la seule CEDEAO et du Togo nous inquiète. Car nous savons que la CEDEAO n’a pas les moyens de sa politique. L’UE dit également que tout déblocage de fonds pour appuyer ces élections ne peut se faire que par demande du gouvernement, or nous ne faisons pas confiance à ce gouvernement.
Ce que nous craignons c’est être abandonnés à notre sort et malheureusement c’est ce qui se dessine. Ainsi la France, partenaire privilégié du Togo ou plus exactement du gouvernement Eyadema, est aux abonnés absent.

Justement comment analysez vous l’attitude de ce "partenaire privilégié" ?

Cela ne nous étonne pas elle ne s’est jamais montrée regardante sur les Droits de l’Homme ou la Démocratie au Togo, plus préoccupée par l’exploitation de nos richesses, en phosphate notamment, après l’installation du dictateur Eyadéma. A la limite c’est la confirmation que la France soutient une dictature héréditaire, comme si en Afrique certaines choses étaient acceptables...à chacun sa Démocratie quoi !
Si nous voulons tousvivredansun espace francophone il fautseregarderdanslesyeuxetquel’opinionpubliquefrançaiserefuseinstammentl’attitudedugouvernement français face aux états africains."

Mais cette politique française, la Françafrique, peut paraître institutionnalisée aux yeux de l’opinion publique française qui semble dès lors renoncer à la voir changer.

Les régimes fascistes étaient des institutions qui avec le temps ont été déboulonnés. Aujourd’hui il est temps de déboulonner ces rapports privilégiés entre Chirac et la famille Gnassingbé. Il faut redéfinir les bases d’un rapport sain entre le peuple français et le peuple togolais, autrement on risque de se tromper d’adversaire. Aujourd’hui il y a un sentiment antifrançais qui se fait jour dans le cœur des togolais, qui ressemble un peu à celui présent dans le cœur des ivoiriens. Si rien n’est fait le peuple togolais pensera que le peuple français est à la base de ses incohérences. C’est là ou l’opinion publique française est interpellée. Et je ne suis pas d’accord quand on me dit que le peuple français est mal informé. Avec la niveau de développement en France et en Europe il vous suffit de cliquer sur Internet pour être informés, dès lors peut être informé qui veut vraiment être C’est comme si les gens tournaient la tête pour ne pas voir la détresse dans laquelle nous vivons."

Cela dit le silence des médias français peut venir de consignes venant de l’Elysée, plus que réticente à voir exposer sa responsabilité dans le dossier togolais. Les relations diplomatiques étant ce qu’elles sont entre les deux pays, les nouveaux rapports que vous appelez entre français et togolais ne semblent pouvoir naître que des échanges entre les sociétés civiles des deux pays, à qui il appartient de prendre les choses en main pour modifier ces rapports...

Absolument c’est ce que je crois aussi. Car l’institution dont nous parlons, qui désigne les rapports sulfureux entre les chefs d’état africains et Mr Chirac, est basée sur des pratiques mafieuses d’exploitations des richesses en Afrique rapportant beaucoup d’argent et permettant d’avoir de nombreux moyens pour se maintenir en place, dont la maîtrise des medias. Cela permet de détourner une partie de l’opinion publique de la réalité. Donc il est clair que l’opinion publique en désaccord avec cet état de chose doit se donner les moyens de combattre ce système qui autrement va continuer de gérer l’Afrique je ne sais jusqu’à quand...Si nous voulons vivre dans un monde humain il faut nous donner les moyens de combattre cette institution qui ne fait pas honneur à l’humanité. Je crois vraiment que l’opinion publique française doit faire un travail de fond pour obligerle gouvernementfrançais à prendre position, à faire en sorte que l’UE revienne sur le dossier togolais et exige que les conditions soient remplies pour la tenue d’élections libres et démocratiques une fois pour debon.Quela France s’illustrepar uncomportement plus engagé pour la recherche d’une alternance politique etnon pour la continuité du régime Eyadéma par le biais de son fils. L’opinion publique française, internationale et la communauté internationale peuvent à ce stade aider à sauver le Togo. Nous avons aussi une responsabilité évidemment mais le rapport de forces est tellement inégal, la répression tellement barbare que les gens cèdent au découragement. Le danger d’un tel désespoir c’est de penser que seule la violence permet de sortir de la crise et une fois que ça commence on ne sait jamais ou ça s’arrête.
Voilà nos craintes et en tant qu’organisation de défense des droits de l’homme, que membres d’organisations de la société civile nous avons le devoir de tirer sur la sonnette d’alarme et de tout faire pour que cela n’arrive pas.

Tirer la sonnette d’alarmes ça passe par beaucoup d’informations, or on sait que de nombreux médias ont été fermés lors du coup d’état, comment travaillent-ils désormais ?

Les journalistes prennent beaucoup de précautions avant de s’exprimer et d’accepter de relayer certains propos. C’est un métier vraiment difficile, ils sont toujours soumis à rude épreuve. Quand la haute autorité de l’audiovisuel (acquise au pouvoir) et le chargé de communication des Forces Armées Togolaises (FAT) comparent les médias privés à la radio rwandaise des 1000 collines (qui avait prôné la destruction d’une ethnie au Rwanda) cela n’augure pas d’un bel avenir pour ces médias là. Les autorités les ont à l’œil répétant que si Eyadéma a disparu les militaires sont toujours là. Nous avons régulièrement les responsables de ces médias qui se plaignent de harcèlements. A ce niveau aussi évidemment il y a un travail à faire et là je crois que Reporters Sans Frontières devrait élever le ton.
De plus les journalistes internationaux nous ont abandonné bien trop tôt car le plus difficile arrive, et eux ont cette chance de pouvoir s’exprimer librement avec comme seul danger celui être expulser ou de se faire refuser leur lettre d’accréditation, nous faisons donc appel à ces journalistes pour qu’ils viennent relayer les évènements qui se déroulent ici au Togo.

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Les forces de l’ordre ouvrent le feu sur les manifestants

(IRIN 11/04/2005)

LOMÉ, le 11 avril (IRIN) - Les affrontements qui ont opposé des manifestants de l’opposition et les forces de l’ordre dans la capitale Lomé et les villes de l’intérieur du pays ont fait un mort et plusieurs blessés, a indiqué vendredi la coalition des principaux partis de l’opposition.

Les forces de police ont tiré à l’arme automatique sur les manifestants dans la ville de Tabligbo, à 60 km de Lomé, tuant un homme et blessant plusieurs autres personnes, selon un communiqué de la coalition des partis de l’opposition.

Le communiqué déplore également d’autres victimes dans les villes de Kpalimé et de Keve à la frontière ghanéenne.

A Lomé, certains témoins indiquent que les forces de l’ordre ont fait usage de grenades lacrymogènes et de grenades à fragmentation pour tenter de disperser la foule de milliers de manifestants qui se dirigeaient vers la mairie pour exiger la délivrance de cartes d’électeur afin de participer aux élections présidentielles du 24 avril prochain.

Accusé par l’opposition de vouloir truquer les élections, le gouvernement, qui avait fixé la clôture des inscriptions sur les listes électorales au 5 avril dernier, a demandé que les inscriptions puissent se poursuivre jusqu’à la dernière minute afin de n’oublier personne.

Cependant, les autorités togolaises ont rejeté la demande de l’opposition de reporter la date du scrutin présidentiel pour garantir des élections libres et impartiales sous la supervision d’observateurs internationaux.

L’Union européenne a indiqué qu’elle n’enverra pas d’observateurs pour la supervision des élections et les Etats-Unis n’ont pas encore fait savoir leur décision.

Les six principaux partis de l’opposition se sont regroupés au sein d’une coalition pour soutenir un candidat unique contre le fils et l’héritier du président Gnassingbe Eyadema, décédé en février dernier après avoir dirigé le Togo d’une main de fer pendant 38 ans. L’opposition très divisée auparavant, demande à présent une nouvelle ère de liberté et de changement.

L’élection se résumera probablement en une confrontation directe entre Faure Gnassingbe, 39 ans, fils d’Eyadema, et Emmanuel Bob-Akitani, le candidat de la coalition des partis de l’opposition. Deux autres candidats, sans grande envergure politique, ne devraient recueillir que quelques voix.

Pour l’opposition, les autorités bloquent la distribution des cartes d’électeur dans les bastions de l’opposition et tentent de perturber le bon déroulement des inscriptions sur les listes électorales, à deux semaines de la tenue des élections présidentielles.

Selon le ministre de l’Intérieur, Akila-Esso Boko, deux distributions de cartes d’électeur ont été organisées le week-end dernier à l’intention de "ceux qui n’ont pas pu s’inscrire sur les listes électorales et récupérer leurs cartes" avant l’expiration de la date limite initiale fixée pour la fin des inscriptions.

"Dans tous les cas, les cartes d’électeur seront distribuées jusqu’à la veille du scrutin", a-t-il déclaré lors d’une rencontre jeudi avec les leaders des partis politiques.

Selon le ministre de l’Intérieur, pendant les 10 jours prévus initialement pour la révision des listes électorales, 450 000 nouveaux électeurs ont pu s’inscrire et 100 000 noms ont été rayés des listes. De nouvelles cartes ont été distribuées à quelque deux millions d’électeurs, a-t-il ajouté.

Dans un discours marquant l’ouverture officielle de la campagne électorale, le président par intérim, Abass Bonfoh, a exhorté "les candidats à ne pas alimenter les tensions et à ne pas perturber le climat de paix et de sécurité qui règne dans le pays."

Gnassingbe, qui s’est vu confier le pouvoir par l’armée à la suite du décès subit de son père le 5 février dernier, se présente comme le candidat du parti au pouvoir, le Rassemblement du peuple togolais (RPT), qui à la mainmise sur le gouvernement et occupe la quasi-totalité des sièges à l’assemblée nationale.

Gnassingbe a lancé vendredi dernier sa campagne pour les présidentielles en commençant sa tournée par le nord du Togo, le fief de la famille Eyadema.

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Téléchargez ici le Rapport de la Ligue togolaise des droits de l’Homme sur les violations des droits de l’Homme au Togo depuis le coup d’Etat du 5 février 2005 :

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