Survie

Les télécoms, bien public mondial

Publié le 13 novembre 2003 - Survie

Jeudi 13 novembre de 14h à 17h, Académie Annie Fratellini à Saint-Denis.

Ce séminaire a notamment abordé les conséquences des politiques de libéralisation et de privatisation sur le service public : aménagement du territoire, égalité d’accès quels que soient les revenus et la localisation, relations entre les pays du Nord et du Sud en s’appuyant sur l’exemple de l’Afrique, etc. Il a cherché des réponses à deux questions :
Comment faire des télécommunications un bien public mondial ?
Comment agir face aux multinationales ?

Les principaux thèmes abordés :

La libéralisation des télécommunications remet en cause les bases mêmes du service public pour ne plus laisser subsister qu’un service minimum dit «  universel  », et placer le reste des activités sous la seule loi de la rentabilité à court terme.
Il en résulte une coûteuse duplication des infrastructures sur les créneaux les plus rentables, et un sous-équipement de ceux qui sont jugés les moins lucratifs.
La remise en cause des péréquations tarifaires antérieures se traduit pour les usagers les plus modestes par une dégradation du service rendu et une hausse des factures.
Cette politique s’accompagne dans le monde entier de la privatisation partielle puis totale des opérateurs historiques, et de la mise sur pied de nouveaux opérateurs par divers groupes financiers.

Au nom du dogme des « lois du marché », les grands groupes organisent en fait un véritable racket sur une activité en plein développement. La fonction réelle de la politique néo-libérale est en fait de remplacer les anciens monopoles publics par des monopoles (ou oligopoles) transnationaux privés.
La volonté de faire monter le cours de l’action se traduit par d’importantes suppressions d’emplois et la remise en cause des garanties statutaires du personnel.
Une telle soumission des opérateurs aux marchés financiers a ouvert la voie à toutes les dérives spéculatives, et à la crise financière actuelle.

Face aux multiples dégâts causés par la soumission des opérateurs aux lois de la Bourse, la question d’une renationalisation du secteur des télécommunications est désormais posée.
La transformation des opérateurs des pays dominants en multinationales s’accompagne par une sorte de recolonisation des pays du Tiers-monde.
Une approfondissement du débat est nécessaire en ce qui concerne ces pays, asphyxiés par le poids de la dette et les politiques d’ajustement structurel imposées par le FMI et la Banque mondiale. La gestion désastreuse des sociétés publiques par l’Etat a pu y faciliter l’acceptation des privatisations, souvent perçues comme le seul moyen de développer un réseau de télécommunications efficace.

Le rôle central joué aujourd’hui par les télécommunications nécessite de faire de cette activité un bien public mondial auquel les individus et les peuples doivent se voir reconnaître le droit d’accéder. Ces biens et services doivent être produit et réparti dans des conditions d’équité et de liberté.
Pour y parvenir, il est nécessaire de promouvoir une politique de rupture avec des « lois du marché » :
 faible tarif des prestations les plus utilisées par la majorité de la population,
 mesures de gratuité pour les plus démunis,
 mise en place de moyens modernes de communications sur l’ensemble du territoire,
 équipement des pays du tiers-monde basée sur des rapports égalitaires entre les peuples.

Alternatives

Un bilan de la libéralisation et des privatisations doit être réalisé en tenant compte du fait que ce processus n’est pas achevé. Et cela d’autant plus que se mettent en place la concurrence sur les télécommunications fixes ainsi que de nouvelles ruptures technologiques.
Dans l’immédiat nous préconisons un moratoire sur les privatisations. Un vaste débat est nécessaire sur le retour à la propriété publique et la refondation d’un service public des télécommunications au niveau national et international.

Outre la défense de l’accès de tous aux télécommunications, un combat idéologique prioritaire doit être mené : défendre, revaloriser le qualificatif public (bien ou service), le replacer au centre des débats, le faire à nouveau considérer par l’opinion comme des biens de civilisation en faisant référence au meilleur de notre histoire.
Faire des télécommunications un bien public mondial demande de mettre un terme au gâchis résultant de la concurrence entre les multinationales. Les Etats doivent reprendre la maîtrise de leur politique nationale et développer la nécessaire complémentarité des réseaux.
Il faut revenir à une coopération internationale basée sur l’égalité entre les peuples et disposant de moyens nouveaux. Il est possible de s’appuyer sur les expériences réalisées par des associations et les partenariats qu’elles ont constitué.

Face aux multinationales et aux institutions européennes et mondiales, il convient plus que jamais de bâtir un contre-pouvoir des peuples du monde.
Les syndicats de salariés ont dans ce cadre un rôle décisif à jouer en renforçant leur coopération internationale, à commencer lorsqu’ils sont présents dans les différentes implantations mondiales de la même multinationale.

Simultanément, des associations mettent en place actuellement des expériences concrètes de nouvelles formes de coopération, y compris avec des opérateurs publics, sur la base d’accords consignés dans des conventions. Ces associations ont notamment contribué au raccordement au réseau téléphonique de villages enclavés, à l’image de ce qu’a fait CSDPTT au Mali et au Burkina Faso.
Le Sommet Mondial de la société de l’Information a été l’occasion de mettre en place des propositions alternatives. Les réseaux constitués dans ce cadre, doivent continuer à travailler sur le terrain pour mettre en place des réalisations concrètes, et faire pression sur les décideurs à tous les niveaux. Il est nécessaire que les syndicats de salariés prennent toute leur place dans ce combat.

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