Survie

Transport maritime, bien mondial ou danger public ? MSC Napoli.

Publié le 24 janvier 2007 - François Lille, Odile Tobner

Un grand porte-conteneur en perdition dans la Manche

L’événement, en temps réel

Rappelons que les 26 hommes de l’équipage avaient été être sauvés jeudi, après avoir abandonné le navire en train de se briser. Celui-ci repose depuis Samedi soir à un mille de la côte sud de l’Angleterre, volontairement échoué sur les hauts fonds de la baie de Lyme. Le pire, côté pollution, semble avoir été évité de justesse. Un grand hommage d’abord à l’équipage, et aux sauveteurs français et britanniques, une fois de plus. Et à nos deux plus récentes Abeilles, Bourbon et Liberté, qui ont réalisé le tour de force d’amener le navire là où il a le moins de chances de nuire. Les autorités britanniques paraissent avoir pris une sage décision sur le plan nautique, quoiqu’il soit beaucoup trop tôt pour en juger.

Dans la nuit de Dimanche à Lundi les nouvelles étaient plutôt mauvaises, au moins deux cent conteneurs et des centaines de tonnes de fuel à la dérive. La population essaie de se consoler en pillant les conteneurs qui viennent s’échouer sur la plage.

Lundi Cependant l’épave paraît stabilisée et les autorités maritimes se veulent rassurantes. Il est bien possible que les dégats restent localement limités, mais la baie est classée au patrimoine mondial par l’UNESCO. De nouveaux moyens sont amenés sur place.

Mercredi Les opérations de pompage du combustible (fuel lourd) ont commencé et devraient durer une semaine. Ce qui s’est échappé ces derniers jours était du gasoil, qui se disperse facilement. Des barrages anti-pollution ont été déployés autour du navire. Le débarquement des boites restantes devrait débuter le prochain week-end, mais pourraient durer longtemps. l’Abeille Liberté reste pour l’instant en baie de Lyme à la disposition des autorités maritimes britanniques. (Infos « mer et marine » 24/1/2006)

Le MSC Napoli est un grand porte-conteneur, de 15 ans d’age, pouvant porter 4688 de ces boites. Un ancien navire de la CMA-CGM, premier armement français, un des tous premiers du monde pour les conteneurs. On relève qu’il avait probablement subi de sérieux dégâts lors d’un échouement en 2001 dans le détroit de Malacca.

Qui porte la responsabilité ? Sous pavillon britannique, le navire a pour armateur déclaré la "Zodiac maritime agencies Ltd", groupe anglo-israélo-grec basé à Londres. Mais pourquoi diable s’appelle-t-il MSC Napoli ? La MSC (Maritime shipping company) est un autre armateur, suisse celui-ci, basé à Genève, et serait en position d’affréteur. Sait-on vraiment à qui il appartient ? Selon sa Compagnie de classification DNV (Det Norske Veritas) et la banque de données Equasis, c’est à la "société" Metvale Ltd. Cherchez-la, vous ne trouverez qu’une simple boite aux lettres, plantée à Road Town, capitale des Iles Vierges britanniques. Encore une "single ship company" (société ne possédant qu’un seul navire), selon une complaisance coutume de la navigation "moderne" ?

Certes il est trop tôt pour évaluer les responsabilités, mais ces caractéristiques, pour banales qu’elles soient, sont inquiétantes - précisément en raison de leur banalité.

L’équipage, et c’est encore terriblement banal, rassemble six nationalités : des britanniques, bulgares, ukrainiens, turcs, indiens et philippins. Rien ne permet de mettre en cause la qualité professionnelle de ces hommes. Bien au contraire, la capacité de réaction d’équipages aussi extraordinairement disparates dans des situations critiques est digne d’admiration. Mais ce genre de performance a des limites.

La cargaison : 2394 conteneurs, soit 41773 tonnes dont 1684 de produits classés dangereux, explosifs, gaz, autres produits inflammables, produits toxiques et corrosifs. Plus le combustible de soute, ce fuel lourd trop connu sur nos rivages.

L’importance de cet événement ? On a été à deux doigts de voir, à proximité de côtes déjà trop souvent meurtries. la première pollution marine majeure causée par un de ces "géants des mers" dont le nombre et la taille ne cessent de croître. Des milliers de conteneurs d’un coup dans une des mers les plus fréquentées du globe, chargés d’on ne sait trop quoi, bonjour les dégâts ! Mais les plus grands porte-conteneurs actuels sont déjà deux fois plus gros que le MSC Napoli. Les prochains, déjà en construction le seront trois fois plus. Qui peut évaluer leur dangerosité réelle, le risque que créent les conditions douteuses de mise en oeuvre d’une partie d’entre eux, le coût social et écologique potentiel de ces risques ?

Alors, bien mondial ou danger public, le transport maritime ? Actuellement la balance penche fort du mauvais côté !

François Lille, 23 Janvier 2007

Toute la presse en parle, de manière très répétitive. Voici l’adresse de deux articles que nous avons trouvé assez complets dans les premiers temps de l’événement,

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