Survie

La francophonie, un instrument de la Françafrique !

Publié le 29 novembre 2014 (rédigé le 27 novembre 2014) - Survie

Survie s’associe à cet appel diffusé lors du Sommet de la Francophonie à Dakar.

Nous diffusons aussi, plus bas, le communiqué envoyé par certains des initiateurs de l’appel suite à l’annulation du colloque qu’ils organisaient.

Pour l’Afrique, ce que l’on appelle pudiquement la francophonie consiste d’abord en l’imposition de la langue française comme unique langue officielle, donc d’administration et d’enseignement dans des pays où seule une infime minorité dominante en possède la maîtrise, créant ainsi un fossé insurmontable entre les élites et les masses. Jamais l’on a vu un pays, dans l’histoire de l’humanité, connaître des progrès significatifs dans une langue ignorée de la majorité de ses habitants !

L’aliénation culturelle que cela implique se double d’une politique de domination militaire qui s’est traduite par plus de 50 interventions armées de la France, de la Belgique et du Canada sur notre continent : depuis le Congo dit belge dès 1960 jusqu’à la récente exfiltration du criminel Compaoré en fuite par les aéronefs de l’armée française et sans compter la longue série de massacres inaugurée à Thiaroye le 1er décembre 1944, et couronnée par le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994…

En matière économique et financière, l’humiliante dévaluation du franc CFA, à Dakar (1994) suivie du rattachement scandaleux de la zone CFA à l’Euro, lors du remplacement du franc français par la monnaie unique européenne en 1999, confirment le statut de monnaie coloniale du franc CFA. Que l’on pense en outre à la mainmise des multinationales françaises sur les secteurs-clés des économies africaines captives (mines, électricité, eau potable, télécommunications, infrastructures, transports, banques etc.) ! Et que dire alors de la menace de ruine générale, agricole, artisanale et industrielle, représentée par la signature prochaine des Accords inéquitables dits de « partenariat économique » (APE), que les peuples africains concernés dénoncent et rejettent massivement ?

Comment, dans ces conditions, s’étonner que les pays dits francophones enregistrent les taux d’analphabétisme les plus élevés d’Afrique, que l’écrasante majorité d’entre eux figurent parmi les pays les moins avancés (PMA), et que tous se retrouvent au bas de l’échelle de l’indice de développement humain (IDH) du PNUD ?

C’est pourquoi, nous nous élevons contre cette seconde édition à Dakar du honteux Sommet de l’OIF, qui porte sur ‘les jeunes et les femmes, acteurs de paix et de développement’, objectif sécuritaire calqué sur l’agenda de l’Etat français, obsessionnellement focalisé sur la sécurité (et ce, quinze jours avant le prochain raout françafricains sur la sécurité organisé à Dakar les 15 et 16 décembre) alors que les politiques menées génèrent chez le jeunes la désespérance et des flux d’immigration suicidaires et que les femmes sont les premières touchées par les conséquences du modèle économique libéral.

A l’inverse, nous exigeons que se posent les questions politiques sous-jacentes au développement de l’Afrique, qui passe avant tout par la souveraineté. D’une part, il s’agit de mettre immédiatement fin au statut inadmissible de la langue française comme langue officielle exclusive dans les pays dits francophones et ériger les langues africaines en langues de travail constitutionnellement reconnues ;

D’autre part, il s’agit d’établir les valeurs de la souveraineté africaine et du patriotisme économique comme principes directeurs dans la stratégie d’unification, de reconstruction continentale et de développement endogène et de récuser par conséquent la signature ou la ratification des APE inégaux avec l’Union Européenne ;

Enfin d’instituer et appliquer effectivement les décisions du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine (UA), en donnant notamment à la Commission de l’UA les pouvoirs nécessaires pour, d’une part, négocier l’évacuation hors de l’espace continental de toute force armée non africaine ; et d’autre part, assurer le déploiement sans délai des Forces dites en Attente ainsi que l’opérationnalité de la Force Africaine de Réaction Rapide.

L’Afrique ne saurait, en effet, continuer à s’en remettre à de prétendues puissances étrangères pour garantir sa sécurité, sa souveraineté ou son développement démocratique, car son devenir dépend essentiellement des peuples africains eux-mêmes, à commencer par les femmes et les jeunes qui viennent d’en administrer une nouvelle preuve ces derniers jours au Burkina Faso.

A ce titre ces trois dernières années où les Tunisiens ont su mener à bien leur transition démocratique en parvenant à maintenir la paix et à contrer, dans une certaine mesure, les pressions extérieures, ouvrent des perspectives pour faire tomber les régimes autoritaires, toujours soutenus par un Etat français qui dénie aux Africain-e-s la liberté de choisir, au Tchad, au Gabon, au Cameroun, au Togo…

Liste partielle des signataires de la plateforme contre le sommet francophone de Dakar : Aminatou SAR, Présidente d’Honneur du RND, Sénégal ; Augusta EPANYA, représentante de l’Union des Populations du Cameroun, France ; Pierre EBOUNDIT, Président de la Ligue Panafricaine Umoja, France ; Aminata Dramane TRAORE, Mali ; Demba Moussa DEMBELE, Sénégal ; Boubacar Boris DIOP, Sénégal ; Dialo DIOP, Sénégal ; Odile TOBNER, France ; Fabrice TARRIT, France ; Mohamed TOURE, Guinée ; Mor DIOP, USA ; Coumba TOURE, Sénégal ; Hamadou Tcherno BOULANA, Niger ; Alioune SALL, Cheikh Tidiane SOUMARE, Afrique du Sud ; Jacques DEPELCHIN, USA ; Mohamed WADE, Maroc ; Amenophis LO, Canada ; Daniel BADJI, Zimbabwe ;

Et aussi : Issouf SAWADOGO : Génération Check Anta DIOP, Piiga Souleymane YAMEOGO, Dr. Denis NEBIE BETEO, Ignace YAMEOGO, Fatmata BANCE, Gisèle TOE, Mernepta ZOUGMORE, Idrissa BARRY, Wiraogo ZONGO, Pr. Basile GUISSOU, Calixthe OUEDRAOGO, Da Sie DE BINDOTE, Génération Léo FROBENIUS au Burkina Faso ; Herman OUALBIOGO, Alymana BATHILY, Makhily GASSAMA, Malick SY, Salimata KA, Fatou NDIAYE, Oumar DIOUME, Samba Boury MBOUP, Mamadou DIOUF, Moussa MBAYE, Samba KA, Marième Blondin DIOP, Omar Blondin DIOP, Gora NDOYE, Papa Malick NGOM, Bakary SARR, Amadou CAMARA, Mustapha DIOP, Galaye DIAO, Cheikh Hamallah Blondin DIOP, Generation Cheikh Anta Diop, Osiris Issouf SAWADOGO au Sénégal ; Hatamoussa DIARISSO KONARE, Francis SECK, Yoporeka SOMET en France

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