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Retour sur une semaine d’actualités marquée par la complicité de la France dans le génocide des Tutsis du Rwanda

Publié le 4 juillet 2017 - Survie

La semaine du 26 juin a été médiatiquement marquée par la mise en cause pour complicité d’acteurs institutionnels publics et privés français dans le génocide des Tutsis du Rwanda, il y a 23 ans.
Bref rappel sur les révélations de la revue XXI, la plainte contre la BNP Paribas déposée par Sherpa, le CPCR et Ibuka France, la plainte contre X déposée par Survie, et -plus discrète mais tout aussi importante- la démarche engagée par le CPCR auprès du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU.

Dès lundi 26 juin, les médias ont commencé à se faire l’écho des révélations à paraître dans le numéro 39 de la revue XXI, en date du 28 juin 2017 : dans son article "Réarmez-les !", le journaliste Patrick de Saint-Exupéry y fait état du témoignage -sous le sceau de l’anonymat- d’un haut fonctionnaire ayant été chargé d’examiner quelles archives de l’Elysée pouvaient ou non être déclassifiées, suite à l’annonce en ce sens de François Hollande en avril 2015 [1]. Ce fonctionnaire a raconté au journaliste comment il a découvert, effaré, des documents impliquant la responsabilité de hauts responsables de l’Etat dans le réarmement des génocidaires hutus alors en fuite.
En écho aux révélations de XXI, l’ancien capitaine Guillaume Ancel a raconté à plusieurs médias dont France Info comment, alors qu’il était au Rwanda au titre de l’Opération Turquoise, il avait lui-même été témoin d’une telle livraison d’armes en juillet 1994.
Le mercredi 28 juin, l’association Survie a, comme elle le préparait depuis des semaines avec son avocate Safya Akorri, déposé au sujet des livraisons d’armes de 1994 une nouvelle plainte contre X visant les responsables politiques et militaires de l’époque, avec constitution de partie civile afin d’obtenir enfin la désignation d’un juge d’instruction.

En parallèle, deux autre initiatives doivent être saluées  :

  • la plainte déposée par Sherpa, le CPCR et Ibuka France contre BNP Paribas pour complicité de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, basée sur une autorisation de transfert de fonds opéré par la banque qui servit à l’achat d’armes par le régime génocidaire en juin 1994, alors même qu’un embargo avait été adopté par l’ONU.
  • une « soumission » par le Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda (CPCR) auprès du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies dans le cadre du troisième examen périodique universel de la France, prévu en janvier 2018. Retrouvez sur le site du CPCR cette soumission transmise le 28 juin, qui rappelle les défaillances françaises relatives au génocide (non-reconnaissance du rôle de la France dans le génocide ; refus de poursuites en vertu de l’article 11 bis ; refus de poursuite des présumés génocidaires résidant en France ; rejets injustifiés des demandes d’extradition ; manquement à répondre à une demande d’assistance juridique mutuelle ; manquement à la dé-classification les documents relatifs au génocide) et expose des recommandations.

Vingt-trois ans après le génocide, et précisément la semaine de commémoration des massacres qui ont eu lieu à la fin du mois de juin 1994 sur les collines de Bisesero [2], ce coup de projecteur est l’occasion d’alerter indirectement le nouvel exécutif français, pour qu’enfin justice soit rendue sur le rôle de la France dans le déroulement du génocide des Tutsis au Rwanda en 1994.

[2Massacres au sujet desquels une autre procédure judiciaire est en cours en France, suite à une plainte de victimes rwandaises visant des militaires français pour complicité de génocide. Survie, la LDH et la FIDH se sont également constituées parties civiles à leurs côtés. Voir par exemple "Bisesero : les parties civiles demandent des mises en examen", communiqué de la FIDH, la LDH et Survie, 26 novembre 2015

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