L’Expression (Alger), Sarkozy attendu dimanche à Alger. Sur la voie du « partenariat d’exception », 23/08 (Nadira BEL)
« Le périple de Bouteflika en terre hexagonale pour assister aux commémorations du 60 anniversaire du débarquement en Provence a été une occasion propice pour pousser les relations bilatérales dans le sens de la consolidation. Sarkozy, qui doit mettre en place les mécanismes de la refondation à travers le paraphe de plusieurs projets, revient le 29 du mois courant en ramenant dans sa valise des contrats tout aussi alléchants que ceux qu’il a pu décrocher lors de son dernier déplacement en juillet dernier. […] La célérité avec laquelle est engagé ce partenariat dénote l’importance qu’a pris soudainement le marché algérien d’autant plus que le vent tourne actuellement en faveur de l’Algérie qui engrange des réserves de change estimées à 40 milliards de dollars. […]
La dernière visite de Sarkozy s’était soldée par la signature d’un aide-mémoire sur le partenariat pour la croissance et le développement portant sur deux milliards d’euros. Le grand argentier de l’Hexagone avait alors eu cette subtile phrase pour qualifier son exploit : “Jamais la France n’a signé un accord économique aussi important”. Elle résume à elle seule l’importance des marchés accordés aux opérateurs français qui ne comptent pas s’arrêter à ce niveau d’échanges. Le montant de l’accord s’élève à deux milliards d’euros. 288 millions de conversion de dettes en investissements, 780 millions crédits concessionnels [à taux réduit], 1 milliard de crédits commerciaux garantis par la Coface destinés à couvrir de futurs contrats, notamment dans les secteurs des transports, des télécommunications, de l’électricité, des hydrocarbures, des biens d’équipements industriels, des services urbains et de l’habitat. Le secteur de l’eau a eu lui aussi une enveloppe financière conséquente. […] Un net intérêt est accordé à la sphère économique privée dans le but de « favoriser la croissance et l’emploi ».
Le ministre français avait déclaré : « La partie française soutiendra, auprès du Club de Paris [celui des créanciers publics], la demande de porter à 30 % le plafond de conversion de dettes en investissements actuellement limité à 10 % de la dette éligible. » […]
La visite de la ministre française de la Défense, Michèle Alliot- Marie, qui a séjourné à Alger les 16 et 17 juillet dernier, a permis de poser les jalons d’une coopération militaire efficiente. […] Le journal français Le Monde avait rapporté que l’Algérie compte acquérir des avions de chasse français de type Rafale. Le contrat aurait été formellement conclu entre les deux chefs d’État, algérien et français, lors du déjeuner privé qu’a offert Chirac à Bouteflika au fort Brégançon dans le Var, au lendemain de la commémoration du débarquement de Provence. »
Merci à ce journal algérois de nous exposer les termes du deal. En échange du soutien diplomatique et financier français à une dictature tortionnaire (les contribuables hexagonaux vont financer tout le dispositif et assumer les risques pris par la Coface), l’ami Dassault et les multinationales tricolores qui dominent les secteurs évoqués vont se goinfrer de contrats gonflés de commissions et rétro-commissions. Le Top 100 du MEDEF va pouvoir aussi récupérer les morceaux les plus juteux du secteur public. La rente pétrolière est trop sérieuse pour rester entre les mains du peuple algérien.
Le sujet est sensible : la référence à l’achat de Rafale a été retirée d’un article du Figaro sur ordre du groupe Dassault, propriétaire du quotidien et constructeur des Rafale, qui souhaitait davantage de discrétion... (cf. Libération du 27/08).