« Ne faudrait-il pas [...] laisser tomber [la catégorie de génocide] au profit d’une catégorie plus large, qui est la catégorie du crime contre l’humanité.
[... Nuremberg jugeait un génocide,] mais il entrait dans la catégorie, d’une certaine manière plus large, moralement sans doute plus consistante des crimes contre l’humanité » (Rony BRAUMAN, ex-président de MSF, sur France Culture, le 13/11/2004 de 11h à midi, Le bien commun).
Nous avons amplement commenté la rhétorique insoutenable de l’actuel président de MSF, J.-H. Bradol, concernant le Darfour, dont MSF conteste ardemment la qualification de génocide. Son mentor abat ici ses cartes : nous sommes invités à renoncer à cette « catégorie », qui pour nous continue à faire sens au regard de l’histoire, et surtout à obliger la communauté internationale à intervenir dès lors que l’Onu reconnaît cette qualification. C’est l’ultime argument de Brauman pour refuser cette qualification dans le cas du Darfour. Un argument qui évite de faire entrer dans la discussion des éléments (les plus embarrassants pour Khartoum, qui doit donner son accord pour les interventions de MSF) révélant la volonté de supprimer toute possibilité de survivance au Darfour : empoisonnement des puits, etc. Sous les apparences d’une “querelle sémantique”, MSF milite pour la fin de l’obligation faite d’intervenir dans le cas de la plus radicale négation de l’humanité, celle qui fit dire un temps : « plus jamais ça ». La fuite en avant d’un certain lobby humanitaire continue (cf. Billets n°129 Ils ont dit, Édito du n° 128).
Pierre Caminade