Survie

Guinée Equatoriale : Rouler en Bentley ou s’écraser en Antonov

(mis en ligne le 1er octobre 2005) - Odile Tobner

La même semaine de juillet, deux informations ont montré, plus qu’un long discours, la principale plaie qui mine un grand nombre de pays africains, le scandale des dictatures. Teodoro Nguema Obiang Mangue est ministre de l’Agriculture et des Forêts dans son pays, la Guinée Équatoriale (environ 600 000 habitants), riche en pétrole (troisième producteur en Afrique subsaharienne), situé dans le Golfe de Guinée, où la vaste majorité de la population vit pourtant avec moins d’un dollar par jour. Il est largement considéré comme le successeur de son père, Teodoro Nguema Obiang Mbasogo.

Le Cape Times, le quotidien du Cap (Afrique du Sud), cite des sources anonymes qui affirment que Teodoro Nguema Obiang Mangue, âgé de 34 ans, a dépensé en un week-end, 1,5 million de dollars US (10 millions de rands) dans l’achat de deux véhicules de marque Bentley et d’une Lamborghini. De plus, il a entrepris de gros travaux de rénovation de ses deux résidences situées dans les banlieues riches du Cap. Le Cape Times publie des photos des voitures nouvellement acquises. Mangue a refusé de commenter ces informations.

Au même moment, en Guinée Équatoriale, la presse locale rapporte que les équipes de secours n’ont retrouvé aucun survivant dans l’épave d’un Antonov-24 d’une compagnie privée équato-guinéenne, qui s’est écrasé samedi 16 juillet à Malabo avec 60 personnes à bord. Selon le manifeste de la compagnie, 35 passagers et dix membres d’équipage avaient pris place dans l’avion qui s’est écrasé dans les minutes suivant son décollage de Malabo, sur l’île de Bioko, à destination de Bata, sur la partie continentale du pays. Il est courant que des passagers embarquent sans billet à Malabo, en soudoyant des responsables de compagnies aériennes, ont indiqué des sources aéroportuaires, dont certaines estimaient que près de 80 personnes pouvaient avoir pris place dans l’appareil.

Ecuatorial express airlines (Ecuatair) exploite des lignes intérieures avec deux appareils de fabrication soviétique, l’Antonov accidenté et un Yak-40. Plusieurs sociétés privées exploitent actuellement des lignes intérieures en Guinée Équatoriale, composée d’une partie continentale - la plus vaste et la plus peuplée - et de plusieurs îles, grâce à des appareils datant pour la plupart, de l’époque soviétique. Ces appareils, qui ne répondent plus aux normes internationales de l’aviation civile, sont pilotés par des Russes, des Ukrainiens ou des Arméniens.

L’Eldorado équato-guinéen profite exclusivement aux compagnies pétrolières, qui se sont ruées sur ses ressources, et au gang familial des Obiang Nguema [1].

[1Voir : Max Liniger-Goumaz, Connaître la Guinée Équatoriale, éditions des Peuples Noirs (disponible à Survie).

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 140 - Octobre 2005
Les articles du mensuel sont mis en ligne avec du délai. Pour recevoir l'intégralité des articles publiés chaque mois, abonnez-vous
Pour aller plus loin
a lire aussi