Survie

Togo : un rapport que l’on n’attendait plus

(mis en ligne le 1er octobre 2005) - Sharon Courtoux

Dernière minute : Le mois dernier, nous avons signalé que la publication du rapport de la mission d’enquête du Haut commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme (HCDH) « sur la situation au Togo entre le 5 février et le 5 mai (2005), en relation avec le scrutin présidentiel du 24 avril » prenait un retard « inquiétant ». Des informations selon lesquelles il fallait attribuer ce retard à un débat difficile, au sein de l’ONU, sur ce qu’il convenait de publier ou de taire, semblaient se confirmer. Ce document, susceptible de confirmer, au nom de la communauté internationale, d’autres rapports précédemment rendus publics (ou ayant fui leur lieu de détention...) sur la situation au Togo entre février et mai 2005, revêt une importance considérable. Outre qu’il appartient en toute propriété aux citoyens du monde, il a en charge de faire œuvre de vérité et de faire obstacle à ce que l’avenir des Togolais ne se fonde sur l’impunité. Or, au moment même d’achever ce numéro de Billets, le rapport du Haut commissariat est rendu public. Nos lecteurs comprendront que nous ne pouvons en faire l’analyse dans les minutes qui nous séparent de l’achèvement de notre publication. Nous attirons cependant leur attention sur quelques citations rapportées par l’Agence France presse :
 La "mission d’établissement des faits" a indiqué avoir mis au jour "le caractère massif et la gravité des actes de violation des droits de l’Homme attestées par le nombre élevé des victimes (entre 400 et 500 morts et des milliers de blessés)". La mission en attribue "la responsabilité principale" au pouvoir en place. Le rapport note "l’ampleur des disparitions, l’utilisation à grande échelle de la torture et des traitement inhumains et dégradants, les destructions systématiques et organisées des biens et propriétés".
 La mission conduite par Doudou Diène, rapporteur spécial de l’ONU, souligne "la responsabilité principale de la violence politique et des violations des droits de l’Homme de l’ensemble de l’appareil répressif et sécuritaire de l’État (police, gendarmerie, forces armées tous corps confondus)". Ces organes ont agi "en coordination avec des partisans organisés du pouvoir politique" souligne le rapport, qui dénonce "le principe de l’impunité" érigé par le pouvoir. "La mission a reçu des informations concordantes permettant de confirmer l’existence d’une réelle stratégie de répression". Ainsi, "2 500 soldats habillés en civil et armés de coupes-coupes, machettes et gourdins cloutés" auraient prêté main forte aux militants du parti au pouvoir pour réprimer les manifestations de l’opposition.
 Le rapport déplore "la culture de violence, fondement de la pérennité du pouvoir du président Gnassingbé Eyadéma".
 Le rapport souligne que "les déclarations d’amitié du président français (Jacques Chirac au défunt président togolais) et l’appui de la France au processus électoral ont été politiquement interprétés comme la confirmation du soutien de la France au pouvoir togolais".
Ajoutons que, depuis plusieurs mois, la Ligue togolaise des droits de l’Homme (LTDH) tente d’obtenir des autorités togolaises qu’elles se saisissent de cas d’arrestations arbitraires, de torture, de personnes que la LTDH considère comme des détenus politiques, victimes de graves violations de leurs droits sous prétexte d’atteinte à la sûreté de l’État. La LTDH poursuit sa mission dans des conditions périlleuses, avec courage, et des moyens quasi inexistants.

Sharon Courtoux

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 140 - Octobre 2005
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