Survie

Au Tchad aussi ?

(mis en ligne le 1er octobre 2007) - Victor Sègre

HRW a également publié un rapport sur
le Tchad en juillet dernier, consacré aux
enfants soldats,
« Trop jeunes pour la guerre. Les enfants
soldats dans le conflit tchadien
 ». L’armée
et les forces paramilitaires tchadiennes
ont, dans leur rang, des mineurs, dont certains
âgés de 8 ans seulement. Comme
l’a expliqué un officier de haut rang de
l’armée nationale tchadienne (ANT) aux
enquêteurs de HRW : « Les enfants soldats
sont idéaux parce qu’ils ne se plaignent
pas, ils ne s’attendent pas à être payés
et si vous leur dites de tuer, ils tuent (...)
Le [président] Déby a du mal à trouver
des soldats disposés à combattre pour lui
mais les enfants, ils font ce que vous leur
dites de faire.
 »
Cette fois-ci, l’action de la France, qui
préside le groupe de travail du Conseil de
sécurité des Nations unies sur les enfants
et les conflits armés, est saluée par HRW.
À l’automne dernier, Michèle Alliot-Marie
(à l’époque ministre de la Défense) aurait
adressé, à ce sujet, une lettre confidentielle
à Idriss Déby – difficile de faire moins –,
« lettre que Déby aurait ignorée ». Notre
ministre aurait pourtant menacé de retirer
les troupes françaises ! Mauvaise liaison
postale ? Négligence du président tchadien
dans le dépouillement de son courrier
 ? On n’ose pas croire que ces menaces
n’aient pas été prises au sérieux...
Toujours est-il que le problème est resté
quelques mois en l’état, le gouvernement
tchadien continuant de nier la présence
d’enfants au sein de ses troupes,
concédant à la rigueur, en février 2007, que
« certains Tchadiens sont très petits » (RFI,
10 mai 2007, cité par HRW).
Il a finalement changé d’avis et cédé aux
pressions de l’Unicef avec laquelle il a
signé, en mai, un accord pour la démobilisation
des enfants soldats. 413 enfants
ont en effet été démobilisé depuis. Tous
anciens combattants du FUC (Front uni
pour le changement), rébellion récemment
ralliée (pour partie) au régime Déby, mais
aucun ne provenant de l’armée nationale.
Depuis, l’Unicef n’a eu l’autorisation de
visiter qu’une seule base militaire. HRW a,
en revanche, recueilli les confidences d’un
haut gradé qui a confirmé que la plupart
des enfants seraient cachés ou envoyés
au front pour ne pas être démobilisés.
On ne sait pas si le nouveau ministre de
la Défense, Hervé Morin, a repris à ce sujet
une activité épistolaire secrète avec le
dictateur tchadien. Le départ des troupes
françaises ne semble en tout cas plus
d’actualité, au contraire : il s’agit maintenant
d’inviter les petits copains européens.
Selon le Statut de Rome de la Cour pénale
internationale (CPI) adopté en juillet 1998,
et entré en vigueur au Tchad le 1er janvier
2007, le recrutement d’enfants de moins
de 15 ans ou leur utilisation dans des hostilités,
sont considérés comme un crime de
guerre. Quelle est la qualification juridique
pour une puissance néocoloniale qui persiste
à chaperonner ce genre d’armée ?

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 162 - Octobre 2007
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