La cour d’appel de Paris, qui devait statuer sur la demande d’extradition des deux prévenus vers le TPIR, a finalement demandé « un complément d’information afin de produire en original les documents » que le tribunal d’Arusha avait récemment fournis. Cette décision, qui pourrait laisser penser que la justice française fait tout pour retarder l’échéance, n’est en fait que la suite logique des débats qui ont eu lieu mercredi dernier devant ce même tribunal parisien. En effet, les prévenus, leurs avocats, Édith Boisette, la présidente de la cour d’appel, et même le procureur avaient fait remarquer que pratiquement tous les documents transmis par le TPIR étaient des copies, ni signées, ni certifiées conformes. Seuls les mandats d’arrêt étaient des copies certifiées conformes. Or, le Code pénal précise que la justice française doit être en possession des originaux. Rien d’étonnant donc à ce que les magistrats français aient pris cette décision. Le TPIR a donc jusqu’au 15 novembre pour fournir à la justice française les documents demandés. Il devra aussi préciser s’il a eu « connaissance de la condamnation de Wenceslas Munyeshyaka » par un tribunal rwandais.
De plus, demande est aussi faite aux deux juges d’instruction français, Fabienne Pous et Michèle Ganascia, de produire les copies certifiées conformes des différentes plaintes en leur possession, ainsi que celles des procès verbaux d’audition. Fabienne Pous devra en outre préciser si elle est en possession de documents émanant du TPIR et si le « projet de dessaisissement du TPIR au profit de la justice française » est abandonné ou pas.
Ce nouvel épisode semble souligner une certaine légèreté du TPIR qui n’aurait pas adressé aux juridictions nationales des documents qui soient acceptables par ces mêmes juridictions auxquelles il est censé confier des dossiers. Les parties civiles sont déçues de constater, une fois de plus, que de tels disfonctionnements retardent l’application de la justice. Il est à souhaiter que le TPIR puisse répondre positivement aux exigences de la justice française sous peine de voir cette saga judiciaire se poursuivre encore de longs mois. La cour d’appel de Paris devrait rendre sa décision le 21 novembre.
Alain GAUTHIER, président du CPCR (Collectif des parties civiles pour le Rwanda)