Survie

Nicolas Sarkozy, l’ami de Bush

(mis en ligne le 1er octobre 2007) - Odile Tobner

Après l’élection de Nicolas Sarkozy
comme président de la République,
Condoleezza Rice, secrétaire
d’État des États-Unis, avait déclaré que
cette élection ouvrait une période tout à fait
excitante pour la politique française. C’était
dire toutes les attentes fondées sur un alignement
des positions françaises sur les positions
américaines. L’administration Bush,
en fin de course, largement contestée aux
États-Unis, avait bien besoin de ce renfort,
après également le départ du premier ministre
britannique Tony Blair, dû en grande
partie à son engagement dans la guerre
d’Irak. Le retour de la France dans le giron
de l’Otan s’est concrétisé en Afghanistan,
où l’engagement français a été plus direct.
Les déclarations belliqueuses de Nicolas
Sarkozy et de son ministre des Affaires
étrangères Bernard Kouchner sur l’Iran ont
surpris.

Pour se défendre du soupçon d’alignement
sur la politique des États-Unis, Nicolas
Sarkozy a cru bon de préciser, dans son discours
du 25 septembre à l’ONU, que « la
France est fidèle à ses amis et aux valeurs
qu’elle partage avec eux. Mais la France
veut dire que cette fidélité n’est pas une soumission,
cette fidélité n’est pas un enfermement.
Cette fidélité, la France veut la mettre
au service de l’ouverture aux autres. »

Mais c’est en matière de politique africaine
que la nouvelle collaboration avec
les États-Unis risque d’infléchir sensiblement
la politique de la France. Les sphères
anglophone et francophone, traditionnellement
en rivalité, devraient s’unir pour faire
front contre le développement de l’influence
de la Chine. C’est ce condominium qui
s’était révélé déjà, avant l’actuelle présidence,
dans la gestion de la crise en RDC.
Mais c’était là une vieille tradition remontant
à l’indépendance du Congo belge et
à l’arrivée au pouvoir de Mobutu – grâce
aux Américains – et à son maintien – grâce
aux Français. C’est un dispositif analogue
qui a été mis en place en réponse à la crise
du Darfour. La mission de l’ après Union
européenne, sous mandat de l’ONU,
composée majoritairement des éléments
français déjà présents sur le terrain, constitue
un cordon sanitaire sur les frontières du
Tchad et de la Centrafrique avec le Soudan,
tandis que, au Soudan, va être déployée la
force hybride UA-ONU. Le partage par la
France du contrôle d’une région où elle a
toujours régné souverainement est une nouveauté,
même s’il s’agit plutôt d’une caution
européenne à son action.

Les relations de Nicolas Sarkozy avec
l’Afrique se feront probablement davantage
dans le style impérialiste américain – pressions
politiques ouvertes, carotte et bâton – que dans
le style néocolonial français – menées occultes
et hommes de paille – qui n’est plus adapté
aux exigences d’efficacité de l’économie mondiale.
Une forme de « moralisation » comme
une autre. Il n’est pas sûr que les populations
africaines voient une grande différence entre
l’un et l’autre. Leur intérêt sera toujours la cinquième
roue du carrosse.

Odile Tobner

Soutenez l'action en justice contre Total !
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 162 - Octobre 2007
Les articles du mensuel sont mis en ligne avec du délai. Pour recevoir l'intégralité des articles publiés chaque mois, abonnez-vous
a lire aussi