Survie

Une affaire de nègres

(mis en ligne le 1er octobre 2009) - Odile Tobner

Long métrage
de Osvalde
Lewat-Hallade,
2006, sorti
en salles en
France le
23 septembre
2009.

En 1999-2000 le gouvernement camerounais
a créé un Commandement
Opérationnel (CO), composé
d’élément de l’armée, de la gendarmerie et
de la police, pour une grande opération de
répression du banditisme à Douala. Un des
éléments à l’origine de cette création est le
meurtre d’un riche commerçant français.
Résultat : pendant un an ces unités se sont
livrées à un millier d’exécutions extrajudiciaires.
On retrouvait les corps flottant sur le
Wouri ou abandonnés dans la brousse. Un
numéro de téléphone avait été mis en place
pour les dénonciations. Les arrestations suivaient,
suivies de détention de torture et de
disparition, sans que des procédures judiciaires
soient initiées.

Le scandale a culminé avec la disparition
de neuf jeunes gens dans le quartier de
Bépanda. Les familles des « neuf de Bépanda
 » ont constitué un comité, soutenu
par l’ACAT littoral, par Madeleine Affité
et par des personnalités de l’opposition
comme Djeukam Tchaméni, qui voulait
porter plainte en Belgique au titre de la
compétence universelle. Dans le film, on
voit un homme politique, transfuge du
parti au pouvoir, dire qu’on a alerté en
vain Amnesty International et Survie.
Début 2001, Survie était en plein procès
intenté par les chefs d’Etat à François-
Xavier Verschave. Ces démarches ont
néanmoins alerté les instances internationales
qui ont exigé des explications.
Le pouvoir camerounais a donc fait un
procès aux responsables du CO. Ce procès
n’a abouti à aucune condamnation.
Le Commandement Opérationnel a simplement
été dissous.

A la fin du film on voit une population
exaspérée par l’insécurité, mais sans information.
En effet, les premiers responsables
de l’insécurité au Cameroun sont
les pouvoirs publics, entièrement minés
par la corruption et incapables d’assurer
la moindre protection à la population. La
création d’un commando de la mort pour
terroriser la population n’est évidemment
pas un signe d’autorité et n’est pas de nature
à apporter de la sécurité, au contraire.
L’horreur liée à cet épisode macabre
donne la mesure de la triste situation de
l’état de droit au Cameroun.

Odile Tobner

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 184 - Octobre 2009
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