Survie

Dix ans de violences politiques en Côte d’Ivoire

(mis en ligne le 6 janvier 2011) - Odile Tobner

Recension non exhaustive des violences politiques qui ont affecté la Côte d’Ivoire ces dix dernières années. Bien des épisodes de ces violences restent inconnus à ce jour. Les informations proviennent de différents rapports de l’ONU et d’Amnesty International.

Le 22 octobre 2000 a lieu l’élection présidentielle.

Le 23 octobre, Robert Gueï se proclame vainqueur alors que le décompte des voix donne Laurent Gbagbo en tête. Le 24 et le 25 octobre la foule des partisans de Gbagbo manifeste dans la rue. Des tirs dans la foule font plusieurs dizaines de morts. Gueï désavoué par l’armée et la gendarmerie s’enfuit. Gbagbo est proclamé vainqueur.

Le 26 octobre les partisans de Ouattara, portant des armes blanches, quelques fusils, descendent dans la rue pour exiger l’annulation de l’élection. La répression fait une centaine de morts. Le lendemain on découvre, dans un terrain vague du quartier Yopougon, les cadavres de cinquante-sept personnes. Le témoignage de rescapés indique qu’elles ont été tuées dans l’enceinte du camp de gendarmerie d’Abobo. En décembre une enquête internationale est menée. Un procès contre les auteurs présumés ne prononcera aucune condamnation.

Du 19 au 21 septembre 2002, alors que Gbagbo est en visite officielle en Italie, une rébellion armée venue du Burkina-Faso tente de s’emparer des principales villes de Côte d’Ivoire. A Abidjan, dans la nuit du 18 au 19 septembre le ministre de l’Intérieur, Emile Boga Doudou est assassiné par les assaillants. Le matin du 19 septembre, c’est au tour de Robert Gueï, soupçonné d’être l’instigateur de la rébellion, d’être tué par des militaires loyalistes. Les combats font plusieurs dizaines de morts. Les rebelles sont repoussés. La rébellion prend le contrôle des villes de Korhogo et de Bouaké. De nombreux militaires, gendarmes et policiers, désarmés, ainsi que des agents de l’Etat sont exécutés. Certains évaluent à cinq mille morts les victimes de la rébellion dans le nord et l’ouest. Il s’ensuit une fuite massive des populations originaires du Sud. Le 6 octobre 2002, cent-dix personnes, gendarmes et leurs enfants, sont extraits de leur caserne et emmenés dans une prison où ils sont immédiatement abattus par des combattants du MPCI, dont le secrétaire général est Guillaume Soro. Aucune suite ne sera jamais donnée à cette tuerie. Les mois d’octobre, novembre et décembre 2002 sont marqués par quelques centaines de morts faits par l’armée nationale ivoirienne, lorsqu’elle reprend certaines localités comme Daloa ou Man. En mars 2003, quatre-vingts villageois fuyant Bangolo pour se réfugier à Duékoué sont tués par des unités du MPIGO (Mouvement populaire du Grand Ouest, un mouvement de rébellion, rejoint les FN en 2004) et du MPCI.

Le 25 mars 2004 à Abidjan la répression d’une manifestation des partis d’opposition, pour l’aplication des accords de Marcoussis fait cent-vingt morts, selon l’ONU.

Les 20 et 21 juin 2004, des affrontements entre la direction des Forces nouvelles (ex-rebelles) et les partisans d’Ibrahim Coulibaly, dit IB, font une centaine de morts à Korhogo.

Le 6 novembre 2004, un raid de l’aviation ivoirienne sur Bouaké tue huit soldats français et un civil américain. Dans les minutes qui suivent, Jacques Chirac ordonne la destruction de la totalité des moyens aériens de l’armée ivoirienne. C’est le début de trois jours d’émeutes anti-françaises. En même temps une colonne de blindés de l’armée française fait route de Man vers Abidjan. Neuf Ivoiriens sont tués à Duékoué en tentant d’y faire barrage. A l’entrée d’Abidjan, il y a également des victimes. Un hélicoptère français mitraille sur le pont de la lagune des Ivoiriens qui veulent se rendre à la base française de Port Bouet.

Le 9 novembre 2004, le contingent français, retranché devant l’hôtel Ivoire, fait face à des milliers de manifestants sans armes et tire dans la foule faisant une cinquantaine de victimes. Dans la nuit du 31 mai au 1er juin 2005, dans les villages de Guitrozon et de Petit Duékoué plus d’une quarantaine de personnes sont tuées dans leur sommeil. L’ONU expliquera cela par un malentendu entre milices à propos de primes de démobilisation.

Le rapport n°5 de l’ONU sur la Côte d’Ivoire de janvier à avril 2006 fait état de nombreuses exécutions sommaires, disparitions et tortures, aussi bien dans le sud du fait des FDS (Forces de défense et de sécurité, armée régulière ivoirienne) que dans le nord du fait des FN.

Le 28 juin 2006, huit personnes sont tuées dans l’attaque de Dieuzon, dans l’ouest, par des hommes armés. Décembre 2010 , les affrontements à Abidjan, à la suite de l’élection présidentielle dont la certification par l’ONU en faveur de Ouattara est contestée par Gbagbo font une centaine de morts.

Le 29 juin 2007, un attentat contre l’avion qui ramène Guillaume Soro àBouaké fait quatre morts.

L’accumulation des atteintes aux Droits de l’homme, du fait de toutes les parties en présence, caractérise la funeste décennie que vient de vivre la Côte d’Ivoire. La principale question qui se pose à présent est de mettre fin coûte que coûte à cette atmosphère de haine, alors qu’on la voit au contraire exacerbée par la situation actuelle.

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Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 198 - Janvier 2011
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