Survie

Droits de l’homme, que de crimes...!

(mis en ligne le 8 mai 2011) - Odile Tobner

On pourrait écrire des
milliers de pages sur
l’instrumentalisation politique
de la rhétorique des droits
de l’homme. Le cas de la
Côte d’Ivoire en est une
illustration éloquente depuis
dix ans et particulièrement
ces derniers mois.

Depuis décembre, les médias nous
tympanisaient quotidiennement
sur les atteintes aux droits de
l’homme dans ce pays. Mais, bizarrement,
une fois le résultat politique obtenu, le
sujet a disparu des infos. C’est pourtant
à ce moment-là que le pire se déroulait
en Côte d’Ivoire en matière de violations
des droits de l’homme, massacres de
masse notamment à Duékoué dans
l’Ouest, chasse à l’homme et exécutions
sommaires de civils à Abidjan. Seule
Colette Breackman, dont les relations
des événements de Côte d’Ivoire sont
exemplaires, faits et commentaires, cite
le 18 avril, dans Le soir de Bruxelles ce
témoignage : « Ce qui est terrible c’est,
dans toute la ville, l’odeur des cadavres
en décomposition. Abidjan pue la mort.
 »
Pas d’information non plus sur la
situation actuelle de Laurent Gbagbo,
qui semble loin de satisfaire aux normes
internationales en matière de Droits de
l’homme.

Personne ne peut vérifier les vagues
informations qui sont données à son sujet.
Par qui est-il gardé ? Certains disent qu’il
est gardé par l’ONU, ce qui est quand
même une nouveauté du droit international
que l’ONU assure une séquestration de
type Guantanamó d’autres qu’il a été
remis au chef de la région de Korhogo,
ce qui est pire.

Martin Fofié Kouakou, ex-caporal de
l’armée régulière, devenu commandant de
la zone de Korhogo, a été signalé naguère
par l’Organisation des Nations unies pour
violations répétées des droits de l’homme
et enrôlement d’enfants soldats.

Enfin, il n’y a pas d’informations sur
le sort de nombre de personnalités
politiques dont on n’a aucune nouvelle
ou qui sont décédées dans des conditions
non élucidées. On a vu le ministre de
l’Intérieur Désiré Tagro arriver en marchant,
affreusement blessé, au Golf
Hôtel, siège de Ouattara. On y a vu aussi
le vieil homme Jean-Jacques Béchio,
ancien représentant de la Côte d’Ivoire à
l’ONU sous Houphouët-Boigny, ancien
conseiller de Ouattara, devenu soutien de
Gbagbo à l’élection présidentielle, subir
de graves sévices. On les dits morts l’un
et l’autre, sans plus.

Si la presse française se distingue, c’est
par son cynisme ou sa (fausse) naïveté,
deux faces d’un même refus de dire la
réalité. Le Point titre le 28 avril : « Côte
d’Ivoire : le pouvoir consolidé avec
l’élimination de la menace
« IB » » un
article sur la mort d’Ibrahim Coulibaly.
Drôle de façon de consolider le pouvoir
que de tuer tous ceux qui sont censés le
« menacer ». Gbagbo n’avait rien compris.
Le Monde quant à lui, le 27 avril, sous la
plume de Philippe Bernard, euphémise une
intervention française qui a déchaîné une
indignation quasi unanime en Afrique :
« La jurisprudence Gbagbo, fragile espoir
pour la démocratie africaine
 ».

Hé oui, mon frère, à quoi n’est-on
pas contraint pour rendre l’espoir aux
Africains !

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Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 202 - Mai 2011
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