Le 11 avril, des rassemblements de riverains ont perturbé le travail dans les plantations de palmiers à huile et d’hévéas dont Bolloré est actionnaire. L’avant-veille, des villageois avaient attaqué des miliciens d’Africa Security dans une autre plantation. La colère monte contre la Socapalm.
Six heures du matin, plusieurs dizaines de riverains bloquent les bureaux d’embauche de la Socapalm Tillo. Au même moment, à quelques kilomètres de là, c’est le chantier de la Pamraf, qui était perturbé par l’irruption de nombreux villageois, jusqu’à l’intervention des gendarmes.
A chaque fois, des tracts avaient été distribués aux responsables des plantations. « Depuis longtemps nous revendiquons le respect des droits des riverains de la Socapalm tel qu’il est décrit dans la convention de cession et le bail emphytéotique. Le mépris des dirigeants a été la seule réponse. » Le tract était signé par les « riverains des plantations Bolloré, Dibombarri, Mbongo, Kienké », laissant entendre des échanges et une coordination entre les différentes plantations du pays dont Bolloré est actionnaire.
Et, en effet, des rassemblements avaient lieu le même jour à Mbongo et dans la plantation de la Kienké, avec des barrages filtrants et la diffusion de ces mêmes tracts. Ces évènements s’inscrivent dans une continuité : celle d’une colère grandissante des populations riveraines des plantations Socapalm. Les villageois dénoncent l’appropriation de leurs terres par la Socapalm et l’absence totale de compensation. Ils se battent également contre les violences répétées de la milice Africa Security embauchée par la Socapalm pour faire régner l’ordre et la crainte parmi les villageois (Billets d’Afrique n°198, janvier 2011).
Dans une quatrième plantation, à Mbambou, ce sont d’ailleurs les miliciens d’Africa Security qui ont été la cible des villageois, deux jours plus tôt : après les avoir capturés, ils les ont déshabillés puis ont brûlé leur tenue !
En janvier, dans la Kienké, près de Kribi, un soulèvement avait bloqué des bulldozers mettant en oeuvre l’extension de la plantation récemment décidée. Deux personnes du village de Bikondo, d’où était parti le mouvement, l’avaient payé de plusieurs semaines de détention. Suite à la journée du 11, la répression a été plus limitée : six personnes de Mbambou auraient passé quelques nuits en cellule avant d’être libérées et à Dibombarri, les gendarmes sont venus à trois reprises pour interpeller un leader du mouvement sans jamais le trouver à son domicile.
La détermination semble en tout cas plus forte que jamais parmi les populations riveraines, qui affirmaient dans leur tract : « Nous ne voulons plus mendier auprès de la Socapalm. Revendiquer nos terres est un droit. C’est même un devoir, vis-vis de nos ancêtres, vis-à-vis de nos enfants. » Le mouvement ne pourrait être qu’à ses débuts.