Le 9 mars 2011, les avocats d’Alassane
Ouattara adressaient au procureur et au
président de la CPI un memorandum afin
de dénoncer un certain nombre de « crimes
contre l’humanité » imputés à Laurent
Gbagbo. Le mémoire sera transmis une
semaine plus tard à la presse, créant un
nouvel épisode médiatique dans la crise
ivoirienne par le biais de très nombreuses
dépêches. Il a été rédigé par cinq juristes et
avocats français ainsi que par « des avocats
et juristes ivoiriens dont l’identité n’est
pas révélée pour des raisons de sécurité »,
augurant a priori un travail sérieux et des
révélations de première main. En réalité,
le contenu de ce texte ne méritait pas tant
d’attention puisqu’il liste de nombreux
crimes imputés aux forces de Laurent
Gbagbo déjà recensés par des travaux
d’ONG ou de l’ONU. L’intérêt principal
aurait dû consister en la démonstration de
la compétence de la CPI pour ces crimes.
Or cette démonstration se révèle, d’après
l’avis de juristes, plus que douteuse.
Elle est, en effet, en grande partie fondée
sur un copié-collé pur et simple du mémoire
d’un juriste renommé, le professeur Alain
Pellet, qui traitait alors d’une toute autre
question : la possibilité pour une entité
non-étatique, la Palestine, de reconnaître la
compétence de la Cour. Or, appliquée à la
Côte d’Ivoire cette démonstration n’a plus
de sens, et pour cause !
Les problèmes de droit posés par la situation
ivoirienne n’ont rien à voir avec ceux posés
par le cas palestinien. Il s’agirait plutôt de
s’interroger sur la validité, en décembre
2010, d’une déclaration faite par le
gouvernement de Laurent Gbagbo sept ans
plus tôt. Certes, le memorandum renvoie
très souvent au mémoire du professeur
Pellet et on peut relever les louables
tentatives de changer quelques débuts de
phrases (« en la présente occurrence »
devenant ainsi « en la présente espèce »)
avant d’allégrement recopier la suite.
Il n’en reste pas moins qu’un tel travail
venant d’un étudiant en droit lui aurait très
certainement valu un zéro pointé, pour
peu que le correcteur se soit rendu compte
du leurre. Le memorandum des conseils
d’Alassane Ouattara étant adressé aux
mêmes services de la CPI que le mémoire
d’Alain Pellet, il n’est pas inenvisageable
que ce soit le sort qui lui soit réservé...