Survie

Tchad : K.O. présidentiel

(mis en ligne le 8 mai 2011) - Billets d’Afrique et d’ailleurs...

Groggy par le déroulé des récentes élections présidentielles au Tchad, les observateurs de l’Union africaine ont seulement pu déclarer timidement, quelques jours après le scrutin du 25 avril, que « le taux de participation a[vait] été plus faible que lors des élections législatives le 13 février, alors que 51% des électeurs inscrits avaient voté ».

Il semble en effet, même si les chiffres exacts n’existent pas dans une dictature, que le boycott de cette élection, auquel appelaient les principaux candidats de l’opposition, ait été suivi dans des proportions considérables, certain avançant une moyenne de 75% et atteignant jusqu’à 85% dans certaines circonscriptions du sud traditionnellement opposées au pouvoir d’Idriss Deby.

Comme lors des récentes législatives, la manipulation des chiffres se met en place. L’ensemble des fraudes constatées lors du scrutin de février, dont la manipulation de la carte électorale avait été l’un des principaux outils, avait amené à des résultats avalisant les candidats du pouvoir par des résultats de plus de 100% dans certaines circonscriptions.

Par ailleurs, des cartes d’électeur pouvaient encore être achetées par dizaines de milliers sur les marchés parallèles quelques jours avant le scrutin présidentiel. Les requêtes des candidats de l’opposition sur les fraudes constatées et sur la réédition de la carte d’électeur dans une autre couleur, ayant été rejetées par la Cour constitutionnelle et la CENI partisanes, Ngarlejy Yorongar, Saleh Kebzabo et Wadel Abdelkader Kamougué avaient alors retiré leur candidature et appelé au boycott de l’élection présidentielle.

Malgré la partialité du traitement de l’information, l’État policier et la corruption, les Tchadiens viennent d’exprimer leur refus à Idriss Deby au pouvoir depuis vingt et un ans déjà.

Après avoir avalisé le scrutin de février en parlant de son « bon déroulement », les « partenaires » du Tchad que sont la France et l’Union européenne vont certainement valider celui d’avril en lui accordant pour la forme quelques irrégularités mineures. La responsable de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, avait d’ailleurs affirmé publiquement « regretter » le boycott des principaux opposants (La Lettre du Continent, 7 avril).

Les résultats provisoires de la Commission électorale nationale (dite) indépendante doivent être proclamés le 9 mai, pour être ensuite validés par le Conseil constitutionnel. Si le résultat du scrutin en lui-même est assuré dans cette rencontre Deby contre Deby, le taux de participation est tout l’enjeu de cette présidentielle et de la stabilité du régime. La bataille de chiffres commence, mais, grâce à ce scrutin, Deby n’est plus dupe et le peuple tchadien non plus.

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