En février 2011, le site Reflets.info révélait les premières informations sur des systèmes d’écoute globale qui avaient été vendus à la Libye de Khadafi afin de perfectionner son appareil répressif. Depuis, de nombreux détails ont enrichi un dossier qui pourrait enfin déboucher sur le plan judiciaire.
Le 22 mai 2012, une « instruction judiciaire visant Amesys pour complicité d’actes de tortures en Libye » à la suite d’une plainte déposée par la LDH et la FIDH ... sept mois plus tôt. Le temps peut-être que le parquet, toujours pas indépendant en France, prenne acte du changement d’hôte à l’Élysée. L’affaire Amesys concerne d’un peu trop près le précédent gouvernement : la fille de Gérard Longuet y est directrice de la communication, les services français s’en sont mêlés (au moins en formant leurs homologues libyens à l’utilisation des systèmes d’écoute), pour Reflets « le contrat d’Amesys s’inscrit [...] dans le cadre d’une coopération scellée [...] lors du voyage de Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux à Tripoli le 6 octobre 2006 ».
Cerise sur le gâteau, c’est Ziad Takkiedine qui aurait servi d’intermédiaire, en empochant une commission de 4,5 millions d’euros. Les sujets de discussion ne manqueront donc probablement pas pour les juges s’ils décident d’auditionner les différents acteurs du dossier.
Au-delà du cas libyen, il y a aussi matière à s’interroger sur la vente de ces systèmes à des régimes aussi démocratiques que le Maroc, le Gabon ou le Qatar.
Qu’en est-il aussi du déploiement de tels systèmes d’écoutes globales (qui sont capables d’intercepter l’ensemble des communications internet d’un pays) en France ? Un article du Figaro l’évoquait déjà en septembre 2011 : « Une version du logiciel Eagle [nom du système d’écoute], conforme à la loi, est utilisée en France depuis 2009 ». La loi française, pourtant, soumet à l’autorisation d’un juge les écoutes ciblées sur une personne : on voit donc mal comment un tel système pourrait être « conforme à la loi ».