Survie

Mobilités d’Afrique en Europe - Récits et figures de l’aventure

(mis en ligne le 11 juillet 2012) - Billets d’Afrique et d’ailleurs...

Mazauric Catherine, Paris, Karthala, coll. Lettres du Sud, 2012.

Tandis que s’érige et se renforce la « forteresse Europe », aux avant-postes d’une guerre aux migrations, de nombreux récits – fictions, documents ou témoignages – émanent de l’Afrique subsaharienne, du Maghreb et d’Europe, voire d’Amérique du Nord, qui donnent à lire les conséquences tragiques de cette édification.

Ils rendent compte également des multiples formes de mobilités par lesquelles les migrants d’Afrique persistent à résister à ce processus de clôture et d’exclusion.

« [...] Ouvrir la parenthèse de l’aventure, c’est non seulement parvenir à s’arracher à une vie bornée, à un chez-soi sans perspective, mais c’est aussi redonner au temps la valeur d’une destinée, celle qui permet de se dire quelqu’un. Ainsi, ce que la criminalisation par l’Occident des parcours migrants cherche à combattre, c’est cet arrachement à une condition arrimée au local, cette sortie d’un temps redondant, par et dans l’aventure aussi bien individuelle que collective. C’est pourquoi la fiction, ou plus généralement l’œuvre littéraire, pourrait avoir un rôle significatif à jouer dans cet arrachement. » (p.337-338).

Les œuvres écrites de part et d’autre de la Méditerranée révèlent, tout en contribuant à les façonner, les représentations des migrants, de leurs dangereux périples, des sociétés qu’ils quittent, traversent ou rencontrent. Ainsi, des chemins d’eau ou de sable aux jungles froides de l’Europe, les figures d’aventurières et d’aventuriers, victimes ou héros, de « brûleurs de frontières », d’irréguliers, de « clandestins », de sans-papiers qui souvent se voudraient simples voyageurs, interrogent la fabrication actuelle des identités.

Mais au-delà de ce questionnement, au- delà même de la dénonciation des drames humains et de la déploration des victimes, ces récits, quand ils déjouent les discours désincarnés des pouvoirs, mettent en crise les murailles assassines, réelles et symboliques, qui cloisonnent aujourd’hui les humanités et déterminent pour chacune des régimes différenciés de circulation.

En parlant des impasses qui font quitter le lieu d’origine et de celles qui enferment à l’arrivée, en décrivant l’expérience des migrants illégalisés, écrivains et autres témoins contribuent à l’effort des arts et de la littérature pour redessiner les perspectives d’un monde commun.

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 215 - juillet-août 2012
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