Survie

La zone franc fête ses 40 ans

rédigé le 2 octobre 2012 (mis en ligne le 3 décembre 2012) - Raphaël de Benito

La Zone franc et sa monnaie le franc CFA constituent le seul système monétaire colonial à avoir survécu à la décolonisation. Quarante ans après, la politique monétaire de la Zone franc reste toujours décidée par la France lui permettant de contrôler économiquement et politiquement ses anciennes colonies au profit de son économie nationale.

Le système franc CFA est fondé sur quatre grands principes : la centralisation des réserves de change au Trésor public français, la fixité de la parité franc CFA/ euro, la libre convertibilité du franc CFA à l’euro, et la libre circulation des capitaux entre la France et les pays africains de la Zone franc.

Pour garantir l’application sans faille de ces quatre principes, la France participe aux instances de direction des banques centrales africaines, pièce maîtresse du système CFA. Un système monétai­re, pilier de la Françafrique et entrave à la souveraineté des États africains de la Zone franc qui fête donc ses quarante ans.

A cette occasion le minis­tère français de l’Economie orga­nisait le 5 octobre un colloque, « Regards croisés sur quarante ans de Zone franc » en présence de plusieurs personnalités politiques et patrons d’institutions financières de différents pays. C’est le chef de l’Etat ivoirien, Alassane Ouattara, économiste de formation et ancien gouverneur de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) qui a été chargé du discours d’ouverture. II s’est également prononcé sur l’avenir de la Zone franc.

Un économiste censé devrait constater que le modèle imposé par le système franc CFA induit une verticalité des échanges (Nord-Sud) au détriment d’une coopération horizontale (Sud- Sud).

Un économiste africain éclairé devrait souligner qu’un tel système financier, au service des intérêts économiques et politiques de la France, ne peut pas être le vecteur de l’autonomie monétaire et du développement. Un économiste, a fortiori chef d’Etat, devrait relever le problème de souveraineté posé par une politique monétaire toujours décidée par la France au préjudice du développement des relations entre pays africains. Il devrait aussi constater que le système perpétue les relations asymétriques et néocoloniales entre la France et les pays de la zone CFA. Et donc logiquement enterrer le franc Cfa plutôt que le fêter.


Une zone, deux régions

La Zone franc comprend deux régions en Afrique en plus des Comores : l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et la Communauté économique et monétaire des Etats de l’Afrique centrale (CEMAC). L’UEMOA regroupe le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et leTogo. La CEMAC comprend le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale et la République centrafricaine. La Zone franc est ancienne. Sa création remonte à la fin des années trente, à la veille de la Seconde Guerre mondiale.

  • 1939 Les décrets du 28 août, et des 1er et 9 septembre 1939 instituent un strict contrôle des changes entre la France et ses colonies d’une part, et le reste du monde d’autre part, pour se protéger des déséquilibres structurels en économie de guerre. L’expression « Zone franc » apparaît pour la première fois à cette occasion.
  • 1945 Le 26 décembre 1945 sont créés le franc CFA, « franc des Colonies Françaises d’Afrique » et le franc CFP, « franc des Colonies Françaises du Pacifique ». Un franc CFA vaut alors 1,7 franc français.
  • 1948 La valeur du franc CFA est portée à 2 francs français.
  • 1958 Le franc CFA devient le « franc de la Communauté Française d’Afrique ». Après les indépendances, il deviendra le « franc de la Communauté Financière d’Afrique » en Afrique de l’Ouest et le « franc de la Coopération Financière en Afrique centrale »
  • 1959 La Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et la Banque centrale des Etats de l’Afrique équatoriale et du Cameroun (BCEAEC) sont créées.
#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 217 - octobre 2012
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