Survie

Mali - chronologie d’une guerre annoncée

rédigé le 2 octobre 2012 (mis en ligne le 15 octobre 2012) - Billets d’Afrique et d’ailleurs...

Rappel des événements au
Mali depuis janvier 2012.
Pays enclavé du Sahel, le Mali
(1.240.000 km2) est frontalier
de l’Algérie, du Niger, du
Burkina Faso, de la Côte
d’Ivoire, de la Guinée, du
Sénégal et de la Mauritanie.
Il y a environ 13 millions
d’habitants, dont 70% vivent
en milieu rural. Les forces
armées comptent environ
7 350 hommes, selon l’Institut
international des études
stratégiques (IISS, 2004/2005).

Janvier

  • 17 : première attaque par le Mouvement
    national de libération de l’Azawad (MNLA,
    groupe rebelle touareg), du camp militaire
    de Menaka au Nord du pays, signant le
    déclenchement de la rébellion

Très rapidement, les attaques du MNLA
se font conjointement avec Ansar Dine, un
groupe rebelle se revendiquant islamiste.

Février

  • 2 : Manifestation des femmes de soldat,
    à Kati, qui a un écho important dans
    l’opinion
  • 23 : L’AFP signale qu’un campement
    de civils Touaregs a été la cible de tirs
    d’hélicoptères de l’armée malienne.
  • 27 : Juppé, en visite au Mali, appelle au
    dialogue avec les rebelles

Mars

  • 22 : Des militaires faisant partie des
    « bérets verts », renversent le régime
    d’ATT, l’accusant d’ « incompétence »
    dans la lutte contre la rébellion touareg et
    des groupes islamistes dans le Nord. Un
    « Comité national pour le redressement de
    la démocratie et la restauration de l’Etat
     »,
    dirigé par le capitaine Amadou Haya
    Sanogo, dissout les institutions.
  • 27 : le sommet extraordinaire de la
    Communauté économique des Etats de
    l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) à Abidjan
    nomme Blaise Compaoré, président du
    Burkina Faso médiateur dans la crise
    malienne. La Cedeao menace le Mali
    d’embargo en l’absence de retour à l’ordre
    constitutionnel.
  • 30 : le groupe islamiste Ansar Dine,
    appuyé par le MNLA, mouvement national
    de libération de l’Azawad, groupe rebelle
    touareg et des éléments d’Aqmi, s’emparent
    de Kidal (nord-est). Le 31, les rebelles
    prennent Gao.

Avril

  • 1er : le MNLA prend Tombouctou,
    dernière ville du Nord encore sous contrôle
    gouvernemental. Le 2, les islamistes d’Ansar
    Dine et d’Aqmi s’en emparent, chassant le
    MNLA.
  • du 2 au 7 avril : embargo total de la Cedeao
    (sanctions économiques, financières et
    diplomatiques) à l’encontre de la junte
    à Bamako, levées par la signature sous
    pression de l’accord cadre.
  • 6 : « Accord-cadre » signé entre la junte
    militaire et la Cédéao prévoyant le transfert
    du pouvoir aux civils, la constitution d’un
    gouvernement de transition pendant 40
    jours, puis d’un gouvernement consensuel.
  • 12 : Dioncounda Traoré est investi
    président intérimaire pour une durée de
    40 jours, en tant qu’ancien président de
    l’Assemblée nationale.
  • 14-16 : la Conférence des forces vives du
    Mali, au Burkina Faso, sous l’égide de Blaise
    Compaoré, censée aboutir à la constitution
    d’un « gouvernement d’union nationale composé de personnalités consensuelles »
    ne débouche sur aucune avancée tangible ;
    la médiation de Compaoré est mise en
    cause par certaines coalitions politiques
    participantes.
  • 17 : l’astrophysicien Cheick Modibo
    Diarra est nommé 1er ministre de transition.
    Une nomination qui suscite des critiques à
    Bamako puisque Diarra est un proche de
    l’ancien dictateur Moussa Traoré et un ami
    de longue date de Compaoré, que le nouveau
    gouvernement comprend l’un de ses plus
    proches conseillers du président burkinabè
    (Sadio Lamine Sow, ministre des Affaires
    étrangères). Contrairement à l’accord-cadre,
    les « forces vives » n’ont pas eu leur mot
    à dire.
  • 30 : Les putschistes affirment avoir fait
    échouer une offensive des forces restées
    loyales à ATT, les « bérets rouges »,
    s’apparentant à une tentative de contre-coup
    d’Etat (au moins 22 morts).

Mai

  • 20 : suite à des tractations entre la junte
    et la Cedeao, le président intérimaire ;
    Dioncounda Traoré censé assurer la
    transition pendant les 40 premiers jours
    après le putsch est reconduit à la tête de
    l’Etat pour un an. Il est censé organiser
    des élections dans ce laps de temps.
L’Afrique sahélienne en ébullition
  • 21 : le président Traoré est blessé dans
    son bureau à la présidence près de Bamako
    par des manifestants opposés à son maintien
    au pouvoir. Il est soigné à Bamako, puis à
    Paris.

Juin

  • 27 : les islamistes du Mujao (Mouvement
    pour l’unicité et le jihad en Afrique de
    l’Ouest) prennent le contrôle de Gao après
    des combats avec les rebelles du MNLA
    (au moins 35 morts). Bilal Ag Cherif, le
    secrétaire général du MNLA, blessé est
    évacué par un avion militaire burkinabè
    et transporté à Ouagadougou. Le 28, les
    forces du MNLA quittent Tombouctou sur
    injonction d’Ansar Dine.
  • 30 : Des islamistes d’Ansar Dine entament
    la destruction de mausolées de saints
    musulmans à Tombouctou, en représailles
    à la décision de l’Unesco de classer la ville
    patrimoine mondial en péril.

Juillet

  • 5 : entretien téléphonique entre François
    Hollande et le président tchadien, Idriss
    Deby. le Conseil de sécurité des Nations
    Unies adopte à l’unanimité la résolution
    2056, présentée par la France, apportant
    son soutien aux efforts de la Cédéao et de
    l’Union Africaine pour résoudre la crise au
    Mali. Cette résolution, placée sous chapitre
    VII de la Charte des Nations unies, prend
    note des travaux de planification militaire
    des organisations régionales pour y déployer
    une force de stabilisation. Elle appelle tous
    les états à coordonner leurs efforts pour lutter
    contre le terrorisme d’Aqmi, du Mujao et de
    leurs soutiens. Elle demande l’adoption de
    sanctions.
  • 11 : le Représentant spécial du Secrétaire
    général de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest,
    l’Algérien Said Djinnit, déplore devant le
    Conseil de sécurité qu’en dépit des efforts
    louables de la Cédéao, les arrangements
    transitoires, y compris l’adoption d’une
    feuille de route pour la tenue d’élections et
    de la restauration de l’intégrité territoriale
    du Mali, n’aient pas encore été consolidés.
    « Cette situation, a-t-il noté, a conduit
    les dirigeants de la Cédéao à accélérer
    le déploiement de la Force en attente
    de la Cédéao au Mali, et ce, sans avoir
    recueilli l’accord préalable des autorités
    maliennes
     ».
  • 15 : Laurent Fabius est reçu à Alger par le
    président Bouteflika
  • 26 : Laurent Fabius débute sa tournée au
    Sahel au Niger et déclare que les « grands
    pays
     » comme la France apportent leur
    « soutien » aux Africains sur ce dossier « et
    si nous pouvons être un facilitateur de ce qui
    peut être fait dans l’intérêt des Maliens et de
    la sous-région, nous remplirons ce rôle de
    facilitateur, ni plus ni moins
     »
  • 27 : Laurent Fabius est au Burkina et
    s’entretient avec son homologue Djibrill
    Bassolé avant d’être reçu par Compaoré.
  • 27 : le président Traoré regagne Bamako
    après deux mois de convalescence à Paris.
  • 27 : la Cédéao bloque une livraison d’armes
    lourdes achetées par l’Etat malien sous
    Amadou Toumani. Blindés et munitions,
    sont bloqués dans plusieurs ports de la sous-région, notamment Conakry et Dakar
  • 28 : durant son passage controversé au
    Tchad, Laurent Fabius déclare aux côtés
    du président tchadien Idriss Déby que « le
    Tchad a fait part de sa disponibilité pour
    concourir à une solution de la crise au
    Mali
     », en relevant que ce pays dispose
    d’une certaine “capacité militaire” ».
  • 29 : Traore annonce de nouveaux organes
    de transition réduisant les pouvoirs de son
    Premier ministre
  • 31 : des militaires arrêtés après leur par­ticipation au contrecoup d’Etat de fin avril
    ont été victimes d’exécutions sommaires,
    de tortures ou ont disparu dans la ville de
    garnison de Kati (Amnesty International).

Août

Démarrage de la mission « civile » Eucap
Sahel Niger, visant l’appui des forces
nigériennes pour lutter contre le terrorisme
et la criminalité organisée : « Les intérêts
de l’UE dans cette région sont multiples :
ils comprennent la lutte contre l’insécurité
et la criminalité organisée, la sécurité
énergétique et l’immigration illégale.
 »

  • 4 : le ministre français de la Défense Jean-
    Yves Le Drian déclare qu’une intervention
    militaire africaine est « souhaitable et
    inéluctable
     », « la France la soutiendra et je
    l’espère, l’Union européenne aussi
     ».
  • 7 : le ministre burkinabè des Affaires
    étrangères, Djibrill Bassolé rencontre les
    milices islamistes armées qui contrôlent le
    Nord du Mali. En tant que médiateur de la
    Cédeao pour la crise malienne, le Burkina
    Faso dit vouloir favoriser des discussions
    directes entre les autorités maliennes de
    transition et les groupes armés du Nord.
  • 9 : Blaise Compaoré reçoit Saïd Djinnit.
    Celui-ci sera à Abidjan le 12 août pour une
    entrevue avec Alassane Ouattara, président
    en exercice de la Cédéao.
  • 10 : le Maroc propose à l’ONU de nommer
    un émissaire spécial pour le Mali, différent
    de l’Algérien Said Djinnit, « déjà surchargé
    de travail des questions allant de la
    piraterie dans le golfe de Guinée au coup
    d’ Etat en Guinée-Bissau
     ». L’ambassade
    de France à l’ONU, Gérard Araud déclare
    que c’est une idée française.
  • 21 : après de longues tractations,
    constitution d’un nouveau gouvernement
    d’union nationale au Mali loin de faire
    l’unanimité. Il change peu du précédent
    mais signe le retour des partis politiques
    traditionnels. Une première : création
    vivement contestée d’un ministère des
    Affaires religieuses et des cultes.
  • 27 : discours de François Hollande à
    la conférence des ambassadeurs : « Au
    nord du Mali s’est constituée une entité
    terroriste assumée et revendiquée comme
    telle, qui lance un défi à nos intérêts, à
    nous valeurs et à notre population (...)
     ».

Septembre

  • 1er : des islamistes du Mujao prennent
    totalement le contrôle de Douentza
    (Mopti, centre), après en avoir renvoyé
    des milices alliées.
  • 2 : selon les services de renseignements
    français, des armes auraient récemment été
    livrées, via le Burkina Faso, au Mujao.
  • 4 : le représentant spécial de la France
    pour le Sahel, Jean Felix-Paganon
    annonce depuis Abidjan que le Mali a
    officiellement demandé une aide militaire
    à la Cédéao.
  • 12 : le Président malien formule
    au secrétaire général de l’ONU, Ban
    Ki-moon, une demande « d’appui et
    accompagnement
     ».
  • 18 : Blaise Compaoré est en visite
    officielle en France. éclipsé par le chef
    de l’Etat ivoirien, Alassane Ouattara,
    président en exercice de la Cédéao, il
    tente, à cette occasion, de revenir au
    centre du dossier malien. Il rappelle
    que la Cédéao ne peut pas concevoir une
    intervention militaire sans avoir le droit de
    déployer des hommes à Bamako. Il déclare
    également qu’il est plus facile de négocier
    avec Ansar Dine qu’avec Bamako.
  • 20 : le Premier ministre malien Cheick
    Modibo Diarra s’entretient à Paris avec
    avec Laurent Fabius. Diarra rencontre
    également Compaoré. Les deux évoquent
    les points de discordance entre le plan
    d’intervention militaire de la Cédéao et
    celui des forces armées maliennes.
  • 21 : l’ONU se dit prête à « examiner une
    proposition réaliste pour le déploiement
    d’une force panafricaine
     ». Le président
    malien souhaite une libération du Nord
    par « la négociation ou par la force ».
  • 23 : le Mali et la Cédéao font part de leur
    accord sur les conditions de déploiement
    d’une force africaine, prévoyant notam­ment que le quartier général des forces
    africaines soit situé à Bamako.
  • 24 : Laurent Fabius, annonce à New York
    que Bamako avait officiellement demandé
    une intervention militaire internationale
    dans le nord du Mali, contrôlé par des
    groupes islamistes. Le même jour, Ag
    Mohamed Asseleh, membre du Conseil de
    transition de l’Azawad, le gouvernement
    provisoire du MNLA. menace de s’allier
    aux « groupes islamistes et terroristes »
    qui occupent le nord du Mali en cas
    d’intervention ouest-africaine, si un
    accord n’est pas trouvé avec Bamako.
    Déclaration faite à Ouagadougou où vivent
    plusieurs responsables du MNLA dont son
    chef, Bilal Ag Achérif, en convalescence
    dans la capitale burkinabè après avoir été
    blessé en juin dans des combats contre les
    groupes islamistes, avec lesquels il menace
    désormais de s’allier.
  • 26 : sommet sur le Sahel organisé en
    marge de la 67e assemblée générale des
    Nations unies à l’initiative de la France.
    A cette occasion, François Hollande
    demande « une convocation la plus rapide
    possible du Conseil de sécurité
     » sur le
    dossier malien. Le secrétaire général de
    l’ONU Ban Ki-moon annonce également la
    nomination prochaine d’un envoyé spécial
    pour le Mali, ce qui a deux effets : la mise
    sur la touche du médiateur Compaoré qui
    avait souhaité intégrer aux négociations le
    Qatar, soupçonné de soutenir les islamistes
    et d’écarter l’Algérien Said Djinnit,
    représentant spécial du Secrétaire général
    de l’ONU pour l’Afrique de l’ouest.
  • 27 : l’ONU, qui a consacré une conférence
    à la question le 26 septembre en marge de
    son Assemblée générale annuelle, admet
    l’ « urgence » de la situation. Mais se
    montre aussi, et surtout, très prudente,
    sur les objectifs et les modalités d’une
    force militaire internationale. « Toute
    solution militaire pour résoudre la crise
    sécuritaire dans le nord du Mali devrait
    être envisagée avec une extrême prudence.
    Elle pourrait avoir de graves conséquences
    humanitaires
     » , avertit Ban Ki-moon, le
    patron des Nations unies.
  • 26-27 : les ministres de la Défense de l’UE
    ont demandé aux autorités compétentes
    d’envisager « les options disponibles pour
    soutenir les efforts internationaux visant à
    venir en aide au Mali
     ».
  • 29 : dans un entretien publié dans Le
    Monde, le Premier ministre malien Cheikh
    Modibo Diarra rejette catégoriquement
    la perspective de négociation avec les
    islamistes armés, huit jours seulement
    après l’appel au dialogue lancé par le
    président malien aux groupes armés. « Les
    pays qui parlent de négociations nous ont
    fait perdre du temps
     », insiste-t-il, semblant
    évoquer implicitement le Burkina Faso ou
    l’Algérie.
    Au même moment, une source officielle
    malienne assurait cependant qu’une
    rencontre venait d’avoir lieu, à Alger,
    entre une délégation des islamistes du
    groupe Ansar Dine et un haut-gradé de
    l’armée malienne.
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Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 217 - octobre 2012
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