Survie

Mali : une guerre sans images...

rédigé le 5 mars 2013 (mis en ligne le 13 mars 2013) - Raphaël Granvaud

Tous les journalistes l’ont signalé : jamais auparavant on n’aura connu un tel black-out sur les images d’une guerre. On devine certains intérêts de ce choix pour l’armée française, au-delà des prétextes avancés : difficile de manifester une opposition ou des critiques contre une guerre invisible.

On se doute aussi que cela permet de laisser dans l’ombre les inévitables et traditionnels « dommages collatéraux ». Ainsi par exemple, alors que les bombardements n’ont officiellement commencé que dans l’après-midi du 11 janvier (le conseil de Défense qui a officiellement donné l’ordre aux armées françaises d’engager les combats ne s’est réuni qu’à 11 heures), un rapport d’Amnesty International accuse les militaires français d’avoir procédé à des tirs dans la matinée du 11 janvier, qui ont fait cinq victimes civiles. (Amnesty International, « Mali, premier bilan de la situation des Droits humains après trois semaines de combats » , 1er février 2013).

...Et donc sans victimes

Toujours au chapitre des « dégâts collatéraux », on peut également mentionner deux faits dont le rappro­chement devrait interpeller, mais qui ne semblent pas avoir suscité beaucoup d’intérêt, sans doute en raison de l’absence d’images des bombardements français. D’une part, même si le flou a été maintenu sur le bilan humain de l’offensive française, le nombre de « plusieurs centaines » de morts sous les bombardements français était avancé à la fin janvier par les militaires (Blog Défense en ligne, 2 février).

D’autre part, on sait que les groupes armés occupant le Nord du pays ont, depuis plusieurs mois, procédé au recrutement de nombreux enfants soldats, ce qui constitue un crime de guerre en droit international. « Parfois placés en première ligne des combats, ils pourraient être nombreux à avoir été blessés ou tués lors des affrontements en cours. (...) ».

Les témoignages recueillis par HRW confirment que les enfants sont exposés aux plus grands périls : « Trois des sites d’entraînement de Gao où des témoins ont vu les enfants – soldats – dans et autour du camp Firhoun, au jardin de Njawa et dans le bâtiment de la direction nationale des douanes – ont été pris pour cible par les bombardements aériens français le 12 janvier », note l’organisation. (Lemonde.fr, 23 janvier).

Les enfants soldats auraient également été utilisés comme boucliers humains lors des affrontements qui ont opposé les forces spéciales françaises et les djihadistes qui avaient pénétré dans la ville de Diabali après les premiers bombardements. (RTS. ch, 17 janvier)

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 222 - mars 2013
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