Survie

Blaise, en faveur de la contradiction

rédigé le 30 août 2014 (mis en ligne le 25 octobre 2014) - Billets d’Afrique et d’ailleurs...

Arrivé au pouvoir par l’assassinat de Thomas Sankara en 1987, le très françafricain Blaise Compaoré n’entend pas quitter son fauteuil de président-dictateur du Burkina Faso, bien que son mandat se termine en 2015.

Il suffit pour cela de réviser la Constitution de 1991, et ça ne sera pas la première fois : la limitation du nombre de mandats avait ainsi été supprimée en 1997, pour être réintroduite en 2000, en même temps que l’abandon du septennat au profit du quinquennat, entré en vigueur en 2005. Blaise trouve ainsi toujours une argutie juridique pour se présenter : en 1991 comme président du Front populaire du Burkina Faso ; en 1998 pour son second septennat ; en 2005 et en 2010 pour ses deux quinquennats.

L’opposition, qui tente de se structurer, pourrait cette fois menacer le régime, au point que d’anciens piliers du parti au pouvoir ont rejoint ses rangs en janvier – les rats quittent le navire, s’est dit la rue ouagalaise. Du côté de la société civile, le mouvement du « Balai citoyen » initié par les chanteurs Smockey et Sams’K le Jah ajoute un élan indépendant de tout parti politique à cette vague populaire qui réclame l’alternance.

A un journaliste lui demandant s’il y aura un référendum sur la modification de la Constitution malgré la contestation de l’opposition, Blaise Compaoré rétorquait : « C’est pour cela même qu’il faut un référendum, c’est ça qui doit justement départager les uns et les autres. (…) Nous sommes dans un débat démocratique normal, il y a ceux qui sont pour et ceux qui sont contre. Et je crois que la Constitution a prévu qu’il y ait des situations où le recours au référendum peut aider à solutionner ce genres de débats ou de contradictions à l’intérieur des citoyens » (BBC Afrique, 6/08).

En réponse, une foule de plusieurs dizaines de milliers de personnes a répondu à l’appel de l’opposition en venant défiler dans les rues de la capitale Ouagadougou, le samedi 23 août (« plus de 100 000 manifestants » selon les déclarations des organisateurs à l’Agence France Presse, la police n’annonçant aucun chiffre). Le mot d’ordre était clair : pas de référendum, puisque son organisation ouvrirait de facto la voie à une révision constitutionnelle – les dictateurs n’organisant pas des élections pour les perdre, c’est connu. Mais si l’on suit la logique de Blaise, plus il y a de monde dans la rue, plus cela indique qu’il y a de « contradiction  » de la part des citoyens, et donc plus il y a de raison pour organiser un référendum...

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 238 - septembre 2014
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