Le 18 janvier 1995, le gouvernement
Balladur décidait d’entraver la
circulation des personnes dans l’archipel
des Comores en imposant un visa
d’entrée à Mayotte aux habitant∙e∙s des
trois autres îles comoriennes (Mohéli,
Anjouan, Grande Comore). Ainsi se
concrétisait l’isolement de l’île de
Mayotte détachée vingt ans plus tôt de
l’État indépendant de l’Union des
Comores à la suite d’une décision
unilatérale française contestée par les
Nations unies. Depuis des siècles, des
petites embarcations dénommées
« kwassas » allaient d’une île à l’autre
tissant ainsi entre leurs populations
d’importants liens sociaux, familiaux et
professionnels : aucune frontière ne peut
effacer de tels liens. Or, avec le « visa
Balladur » ces voisins comoriens sont
devenus des « étrangers »
potentiellement « clandestins » s’ils ou
elles persistent à circuler dans leur
archipel commun. Trente ans après, ce
dispositif n’a pas stoppé les
déplacements ou les retours vers
Mayotte consécutifs à une expulsion.
Mais il a eu pour conséquence directe la
mort en mer de milliers de personnes.