L’économie du Gabon s’enfonce toujours plus depuis l’arrivée au pouvoir d’ABO. La dette extérieure a été multipliée par plus de 3,6, passant de 1 368 milliard de FCFA (2,08 milliards d’euros) en 2009 à 4 976,9 milliards FCFA (7,56 milliards d’euros) en décembre 2018. Dans ce contexte, le gouvernement, sous la pression des puissants lobbys des multinationales (notamment minières et pétrolières), mais aussi des partenaires internationaux (comme le FMI), a décidé de réformer de nouveau ses codes minier et pétrolier. Le secteur pétrolier concentre à lui seul 44 % du PIB du pays, 83 % des recettes d’exportations et 53 % du budget de l’État. La part du secteur minier dans le PIB est quant à lui passé de 2 % à 6 % entre 2016 et 2018. Le code minier en vigueur, voté en 2015, donnait déjà de nombreux avantages aux multinationales minières (à commencer par la Comilog – filiale d’Eramet – en tant que principale entreprise minière du pays depuis la période coloniale). Extrait de ce qu’en dit la direction générale du trésor français : « Le texte offre [...] plus de flexibilité en matière d’imposition [en gras sur le site du trésor] selon la nature et la taille de la mine, et met en place un taux à 0 % pendant la période de recherche. Sur la fiscalité minière d’aval, la taxe ad valorem fixée dans la convention minière est prélevée entre 3 et 5 % pour les métaux basiques, entre 5 et 8 % pour les métaux précieux et entre 8 et 10 % pour les pierres précieuses. Les compagnies auront, en revanche, droit à 5 ans d’exonération d’impôts sur les sociétés (toujours fixé à 35 %) sur tout nouveau projet et à une exonération de droits de douane sur les équipements importés. » Mais cela n’avait pas l’air d’être suffisant pour le lobby du secteur, soutenu par les « partenaires » internationaux. La nouvelle version de ce code (votée au Sénat et à l’Assemblée nationale respectivement en septembre et décembre 2018, mais non encore promulguée par le président malade) n’est pas encore publique, mais d’après le gouvernement, cette réforme avait pour premier objectif de répondre aux « attentes des opérateurs miniers ». On imagine donc mal que les multinationales du secteur seront davantage taxées...
Quant au nouveau code pétrolier, voté en mars 2019, celui-ci a été élaboré en liaison avec le FMI, l’université de Houston, le cabinet parisien Poulain-Cren, et « toutes les parties prenantes de la chaîne de valeurs du secteur pétrolier national » (Agence Ecofin, 5/03), donc les multinationales pétrolières notamment. Ces dernières, réunies au sein de l’Union pétrolière gabonaise (UPEGA), le syndicat patronal, ont semble-t-il bien réussi à influer sur la dernière mouture votée par les parlementaires. Alors que la présidente de l’UPEGA, Jacqueline Bignoumba-Ilogue, déplorait encore en octobre 2018 que « l’ancienne mouture du code comportait un impôt sur les sociétés (IS) de 35 % sur les parts du prix du baril revenant à la compagnie pétrolière (entre 15 % et 25 % du prix) » (Info plus Gabon, 26/10/18), le syndicat des pétroliers semble avoir eu gain de cause vu les dispositions du nouveau code : suppression totale de l’impôt sur le revenu des sociétés et taux de redevance encore réduit : 7 % pour le pétrole offshore conventionnel et 4 % pour le gaz. Ces taux seraient fixés à 5 % pour le pétrole et à 2 % pour les eaux profondes et ultra-profondes. Le dispositif prévoit également la suppression de la participation de l’État au capital de l’opérateur. De plus les taux de recouvrement des coûts pouvant atteindre 70 % pour le pétrole classique, et 80 % pour le pétrole et 90 % pour le gaz dans les eaux profondes et très profondes, cela revient à dire que ce sont les Gabonais qui payeront, via leur pétrole, les coûts des infrastructures des multinationales pour que celles-ci en tirent toujours plus de profits...