Le 18 mars, le tribunal judiciaire de Paris a condamné l’Etat français pour fautes lourdes dans l’instruction criminelle concernant la mort de Bernard Borrel, assassiné à Djibouti dans la nuit du 18 au 19 octobre 1995, où il était détaché auprès du ministre de la Justice afin de réformer le Code pénal djiboutien. A l’époque, cette mort avait été officiellement qualifiée de « suicide », le juge d’instruction en charge du dossier n’avait pas ordonné d’autopsie contrairement à la loi, alors que les circonstances et les causes de sa mort restaient indéterminées et qu’il aurait alors été possible de les connaître. L’institution judiciaire a ainsi directement entravé la justice puis régulièrement retardé l’instruction d’un dossier criminel, laissant courir des rumeurs innommables sur la victime. Autre faute lourde, le 4 décembre 2014, tous les scellés essentiels de ce dossier ont été détruits au sein du greffe du tribunal de Paris, officiellement par « erreur », alors que certains magistrats instructeurs courageux tentaient depuis juin 2000 de se donner les moyens d’établir la vérité. Cela protège les auteurs des faits, qui ne pourront être identifiés formellement par l’analyse de leur ADN.
Dans cette affaire, c’est la famille qui a du porter l’action publique bien que celle-ci mette en cause deux États et que les magistrats instructeurs se voient opposer le Secret défense face à leurs demandes d’accès à des pièces utiles à la manifestation de la vérité. Elisabeth Borrel, elle-même magistrate, s’est retrouvée à affronter un État censé incarner l’intérêt public auquel elle a dévoué sa carrière : ce jugement rétablit en partie la protection que les institutions françaises lui devaient. Mais les assassins de son mari ne sont toujours pas inquiétés..