La chaîne Arte se fait fort d’informer sur les sujets internationaux souvent délaissés par d’autres, et l’émission « Le dessous des cartes » prétend « décrypte[r] les enjeux de notre monde contemporain » depuis de nombreuses années. Avec des succès mitigés… Le site Acrimed (22/04) relève par exemple l’émission du 25 mars 2022 intitulée « Libye : le monde entier s’en mêle ». Consacrée aux ingérences étrangères dans la guerre civile et aux origines de la crise libyenne, l’analyse réussit l’exploit de ne pas mentionner l’intervention militaire de l’Otan de 2011 et le rôle de premier plan joué par la présidence française de Nicolas Sarkozy à l’époque ! Ajoutons que la période la plus récente fait également l’objet d’un traitement pour le moins superficiel. Si l’expression de « double jeu » est utilisée pour mentionner rapidement le soutien français au maréchal Haftar sous la présidence Macron, alors que la diplomatie française reconnaissait officiellement le gouvernement d’union de Sarraj, la journaliste Émilie Aubry ne s’attarde pas sur la nature de ce soutien (forces spéciales et clandestines, fournitures d’armes), ni sur son caractère pousse-au-crime pour l’apprenti dictateur que la France aurait aimé voir prendre le pouvoir par la force. En avril 2019, Haftar n’hésite pas à lancer ses troupes à l’assaut de Tripoli pour faire dérailler le processus de paix impulsé par l’ONU. C’était une époque où « la France cohabitait avec les mercenaires russes du Groupe Wagner en Libye », comme le rappelle Jean-Pierre Filiu dans Le Monde (10/04). A l’époque en effet, « l’Elysée ne s’inquiète pas outre mesure des liens de plus en plus étroits entre Haftar et Moscou, même quand le Kremlin décide, en octobre 2018, l’envoi d’un millier de mercenaires du Groupe Wagner en Libye ». La diplomatie française ne jugeait pas alors opportun de condamner les crimes d’Haftar et de ses mercenaires, contrairement à ce qu’elle fait aujourd’hui au sujet du Mali...
