Survie

Une Décennie de guerre

rédigé le 15 janvier 2023 (mis en ligne le 22 février 2023) - Survie

Il y a 10 ans, le 11 janvier 2013, la France lançait l’opération Serval au Mali, au motif de contrer une avancée terroriste sur la capitale. Survie publiait alors une analyse qui alertait sur les zones d’ombres et les enjeux de cette opération, pointait l’illégitimité de la France à intervenir et l’échec programmé de cette intervention.
La France faisait partie de façon évidente du problème et non pas de la solution : ancien colonisateur empêchant le développement souverain et la vie démocratique, faiseuse de rois ou fauteuse de troubles, coupable de dizaines d’interventions militaires visant à soutenir des régimes ou ses propres intérêts contre la volonté des peuples, en incapacité manifeste à prendre en compte les risques d’une intervention militaire étrangère pour les Maliens et la région, surtout après la catastrophique opération de 2011 en Libye.
Malheureusement, nous ne nous étions pas trompés [1].
La réalité dépasse, et de loin, les évolutions anticipées à l’époque. A l’opération Serval a succédé l’opération Barkhane et Survie, depuis, n’a cessé d’observer les évolutions de cet interventionnisme militaire et l’ingérence française qui l’a accompagné. Son corollaire est connu : l’aggravation de la situation au Mali et plus largement dans la région, en particulier au Burkina Faso et au Niger, que ce soit au niveau de la sécurité, de la vie démocratique et sociale ou du développement de ces pays.
Il y a deux mois, Emmanuel Macron officialisait la fin de l’opération Barkhane.
Dix ans d’intervention militaire massive avec jusqu’à plus de 5400 soldats des forces conventionnelles et des forces spéciales positionnés au Sahel en même temps, entre 8 et 10 milliards d’euros de budget supplémentaire d’opérations extérieures (Opex), 59 soldats français et des milliers de soldats maliens, burkinabè, tchadiens morts – le chiffre officiel n’est pas connu, plus de 12 000 civils morts, 3 millions de personnes déplacées à la fin 2022 alors que les groupes djihadistes que l’on prétendait éradiquer n’ont cessé de s’étendre et de gagner en puissance. Quelques chiffres qui en disent beaucoup et sur l’ampleur de cette intervention française – la plus importante depuis la guerre d’Algérie, et sur l’ampleur de son échec prévisible. La réalité de cette intervention, ce sont aussi les mensonges, la propagande, l’opacité et l’absence de débat qui en sont constitutives depuis le début. En cela aussi, elle est parfaitement exemplaire de la politique néocoloniale de la France en Afrique.
Association Survie

[1Dossier d’information publié le 23 janvier 2013 puis ouvrage publié le 19 juin 2013.

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Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 324 - janvier 2023
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