Début juillet, Amnesty International a publié un nouveau rapport sur la guerre dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest du Cameroun. Intitulé « Avec ou contre nous : La population prise en étau entre l’armée, les séparatistes armés et les milices dans la région du Nord-Ouest du Cameroun », il documente à nouveau les crimes commis dans ce conflit, qu’il s’agisse de ceux des séparatistes armés anglophones ou de ceux de l’armée nationale. Fabien Offner, chercheur à Amnesty, résume : « Les populations sont totalement prises en étau, d’où le titre "Avec ou contre nous". Soit, "vous êtes avec nous, l’armée camerounaise, et si vous n’êtes pas avec nous, ça veut dire que vous êtes contre nous. Donc, on se permet d’incendier vos villages, de procéder à des arrestations arbitraires", qui sont également très nombreuses et qui se terminent souvent - quand elles se terminent devant des tribunaux -, devant des tribunaux militaires. Ce qui est évidemment illégal au terme du droit international. Nous avons également documenté des viols et des violences sexuelles, qui sont également sans doute beaucoup plus nombreux que ce que nous avons recueilli. Nous avons également documenté ce que nous appelons des homicides illégaux, donc des meurtres commis par l’armée camerounaise. Les autorités camerounaises ont reconnu certains homicides illégaux dans certaines localités et ont annoncé certaines enquêtes et investigations. Malheureusement, ce que nous avons constaté, c’est qu’il y a eu beaucoup d’annonces et très peu d’enquêtes concrètes et très peu d’ouvertures concrètes de procès » (RFI, 04/07/2023). Dans ce contexte, le rapport revient sur la poursuite de la coopération militaire de la France (et d’autres pays) et la question des ventes d’armes : « La France est depuis longtemps l’un des principaux alliés militaires du Cameroun. (…) Les exportations d’armes de la France vers le Cameroun se sont poursuivies même après que des violations des droits humains commises par les forces de défense et de sécurité camerounaises ont été signalées dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest par plusieurs ONG de défense des droits fondamentaux et parfois reconnues par les autorités camerounaises elles-mêmes (...) En 2021, par exemple, la France a exporté vers le Cameroun 21 "véhicules de combat blindés", 100 "fusils de précision" et 30 "mitrailleuses", selon le rapport du ministère français des Armées au Parlement. » Or le Traité sur le commerce des armes (TCA) ratifié par la France interdit d’exporter des armes si ces dernières risquent d’être utilisées contre des civil.e.s. « Amnesty International a adressé des lettres de demande d’informations aux autorités britanniques, croates, françaises, israéliennes, russes, américaines et serbes, afin de savoir quelles mesures elles avaient prises pour que les armes transférées ne soient pas utilisées dans les régions anglophones où les forces camerounaises et les groupes séparatistes armés ont l’habitude de commettre de graves atteintes aux droits humains et des infractions au regard du droit national. Seuls les gouvernements des États-Unis et de la Serbie ont répondu. »