Survie

Greenwashing euro-congolais

rédigé le 25 février 2024 (mis en ligne le 26 septembre 2024) - Raphaël Granvaud

Malgré les prédations du pouvoir congolais, ce dernier continue de bénéficier de fonds internationaux destinés à préserver l’environnement, alerte Greenpeace.

« Six semaines après avoir signé un accord de protection des forêts de 50 millions de dollars avec des bailleurs de fonds, la République du Congo a donné son feu vert à l’exploration pétrolière dans le parc national de Conkouati-Douli, l’aire protégée la plus riche en biodiversité du pays et qui abrite des communautés de pêcheurs depuis au moins le XIIIe siècle », alerte Greenpeace (Communiqué du 21/02/2024) Cette décision d’octroyer un permis à une firme chinoise contrevient au « décret présidentiel de 1999 portant création de Conkouati [qui] interdit, entre autres, la prospection et l’exploitation pétrolières dans le parc et sa zone tampon », constate l’ONG. Mais il fait aussi voler en éclat les faux semblants des déclarations des « bailleurs de fonds dont l’engagement en faveur des forêts et de la biodiversité du Congo ne va pas au-delà du greenwashing du régime Sassou aux frais des contribuables européens » et « s’accommode des prédations des multinationales pétrolières, forestières et minières », dénonce le Dr Fabrice Lamfu Yengong, responsable de la campagne forêt pour le Bassin du Congo à Greenpeace Afrique.

UE-AFD-BM : trio gagnant pour Sassou

Les principaux bailleurs de fonds institutionnels de Conkouati sont en effet l’Union Européenne (UE), l’Agence française de développement (AFD) et le Fonds pour l’environnement mondial, administré par la Banque mondiale. En septembre 2022, l’UE a ainsi signé une convention de financement de 800 000 euros avec l’ONG française Noé pour « assurer la gestion durable » de la faune et de la flore du parc, suivie d’une « feuille de route du partenariat forestier] » destinée à « sauvegarder les forêts ». L’accord a été « soutenu par 25 millions d’euros supplémentaires », selon le commissaire européen à l’environnement. « En décembre, lors de la COP28, l’UE, la France et une poignée de donateurs privés se sont engagés à mettre en place un “partenariat pour les écosystèmes forestiers, la nature et le climat” au Congo, doté de 50 millions de dollars », commente Greenpeace. « Une semaine plus tard, le ministre des Mines a accordé un permis de prospection aurifère de 1 500 hectares, dans la zone tampon de Conkouati, à la société pétrolière chinoise Zhi Guo Pétrole. » Enfin, « en septembre dernier, l’UNESCO a inscrit le parc national d’Odzala-Kokoua, au Congo, sur sa liste du patrimoine mondial, passant mystérieusement outre la recommandation de l’UICN [Union Internationale pour la Conservation de la Nature] de différer cette inscription. » Or,« depuis des années, le parc (entouré de tous côtés par des concessions forestières) est le théâtre d’atrocités commises par des écogardes gérés par la firme sud-africaine African Parks. Le travail de cette milice devrait bientôt devenir plus facile. Le 7 février, le ministre congolais des Forêts a annoncé que le président avait ordonné la construction d’une nouvelle route goudronnée à Odzala… », ironise Greenpeace. « Quand les bailleurs de fonds apprendront-ils que le greenwashing de la kleptocratie ne fait que l’encourager ? », s’interroge et conclut le Dr. Lamfu. Vraisemblablement pas tant que les intérêts financiers qu’ils protègent y trouveront leur compte…

Raphaël Granvaud

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Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 335 - mars 2024
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