Survie

Main basse sur la forêt

rédigé le 13 avril 2024 (mis en ligne le 3 octobre 2024) - Billets d’Afrique et d’ailleurs...

Dans une enquête en trois parties pour le média en ligne Afrique XXI, la journaliste Fanny Pigeaud expose les réseaux et acteurs français impliqués depuis plus de trente ans dans l’exploitation forestière dans le bassin du Congo (Afrique XXI, 18/03/24). Dès 1994, dans le cadre d’un plan d’ajustement structurel, la France et la Banque mondiale imposent au Cameroun un outil de gestion tricolore, le plan d’aménagement forestier, avec un appui technique et financier de l’AFD. Mais ce qui devait permettre une gestion plus durable des forêts n’a entraîné qu’une plus grande dégradation des écosystèmes, à cause d’une « vision rentière » de la forêt, qui devait avant tout rapporter « des recettes fiscales à l’État afin que celui-ci puisse rembourser sa dette aux bailleurs de fonds », selon un ingénieur interrogé dans le cadre de l’enquête. À la manœuvre des plans d’aménagement dans les pays de la région (RDC, Congo-Brazzaville, Gabon, Centrafrique), on trouve des bureaux d’étude, notamment l’omniprésent Forêt Ressources Management (FRM), basé à Montpellier, qui a profité des ouvertures de marchés du milieu des années 1990. Mais des entreprises partenaires de FRM sont accusées par plusieurs ONG et structures de contrôle indépendantes de pratiques illégales (exploitation sans permis, dépassement de quotas, vente d’essences protégées…) incompatibles avec l’objectif affiché de durabilité. De plus, par ses activités de consultance pour des organismes internationaux (Banque mondiale, Nations unies…), le FRM s’expose à des risques de conflits d’intérêt, en estimant la qualité des plans d’aménagement d’une main tout en en concevant de l’autre. Le FRM est par ailleurs un partenaire de groupes bien françafricains : en 2011, il cofonde avec l’industriel du bois Rougier l’entreprise Lignafrica (liquidée en 2018) ; et, depuis 2019, il travaille avec TotalEnergies sur des plantations qui ont pour but principal de générer des crédits-carbone au détriment de la biodiversité et des populations locales.

#GénocideDesTutsis 30 ans déjà
Cet article a été publié dans Billets d’Afrique 336 - mai 2024
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