Le 8 mai dernier, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye demandait dans un communiqué de presse « l’audit du pavillon sénégalais » visé par des soupçons de prête-noms et « l’évaluation des accords et licences de pêche » négociés avec d’autres pays, notamment ceux de l’Union européenne (UE) (Jeune Afrique, 9/05/2024). Quelques heures plus tôt, l’ambassadeur européen au Sénégal, Jean-Marc Pisani, assurait que cette dernière n’avait « rien à cacher » et que la pêche européenne représentait moins de 1 % de la pêche au Sénégal. L’accord en vigueur depuis 2019 entre l’UE et le Sénégal expirant en novembre prochain, il fera donc l’objet d’une évaluation avant de nouvelles négociations entre les deux parties. Cette volonté du président Faye de reprendre la main sur la gestion de la pêche, qui concerne 50 000 pêcheurs artisanaux et fait vivre 600 000 Sénégalais·e·s, s’inscrit dans un courant plus large de remise en cause au niveau international de l’exploitation des ressources halieutiques par les grandes puissances. Dans un rapport publié en début d’année, l’ONG environnementale Bloom dénonçait ainsi le « modèle de prédation néocolonial des ressources de l’océan Indien » de la pêche industrielle européenne (Le Monde, 12/05/2024). L’ONG accuse les pays de l’UE (notamment la France et l’Espagne) d’avoir recours à des pratiques de pêche destructrices et à des stratagèmes et des pressions politiques pour assurer l’exploitation du thon tropical à leurs industriels, au détriment des écosystèmes et des États côtiers.