
L’enquête menée par plusieurs médias européens – Lighthouse Reports, Le Monde, Der Spiegel, le Times et Arte – et publiée le 16 septembre, conclut à la responsabilité de la police aux frontières (PAF) dans de nombreux naufrages dont sont victimes les Comorien·ne·s qui tentent de rejoindre Mayotte. Sur la base d’enquêtes judiciaires et administratives, ainsi que de témoignages de rescapé·e·s et même de cadres du ministère de l’Intérieur, elle dénonce une « pratique habituelle » des vedettes de la PAF chargées d’intercepter les kwassa kwassa transportant des migrant·e·s : les faire chavirer et même les percuter, provoquant blessures, mutilations, noyades. « La police française est responsable des morts ou disparitions d’au moins 24 personnes — y compris des femmes enceintes et des enfants — lors d’interceptions violentes en mer au large de Mayotte », écrit ainsi Lighthouse Reports. Est rapporté par exemple le témoignage glaçant de deux rescapés du naufrage du 15 juillet : « Notre embarcation s’est déchirée, tout le monde est tombé à l’eau […]. Ils nous ont regardé nous noyer sans bouger. »
Ce mépris pour la vie humaine exprime tout le racisme inhérent au colonialisme. « Nécessité fait loi, explique ainsi au Monde un cadre du secrétariat d’État à la mer. C’est un peu cynique mais c’est comme ça. Et puis, le risque médiatique et politique est sans commune mesure. À Mayotte, si dix personnes meurent, il n’y a pas de sujet. » À la tribune de l’ONU, le 24 septembre, le président comorien Azali Assoumani, pourtant « grand ami de la France », s’est senti obligé de réclamer une enquête.