Paris, le 4 septembre 2009
Madame, Monsieur le(a) député(e),
Les élections présidentielles qui viennent de se dérouler au Gabon et l’annonce des « résultats » se sont déroulées dans des conditions qui montrent une absence totale de sincérité du scrutin (cf. entre autres notre communiqué joint en annexe).
Le gouvernement français, ainsi qu’Ali Bongo, appellent au respect des voies légales de contestation des résultats. Il faudrait pour cela que les candidats puissent faire valoir des recours devant des institutions de recours fonctionnant de façon indépendante, démocratique et transparente. Mais cela n’est pas le cas de la cour constitutionnelle gabonaise actuelle, qui n’est pas davantage indépendante que l’était la CENAP (commission électorale).
Cette mascarade électorale, parodie de démocratie, n’est pas acceptable pour le peuple gabonais. Le gouvernement français ne doit pas s’en rendre complice en cautionnant la prise de pouvoir d’Ali Bongo par ce qui constitue un véritable coup d’Etat électoral.
Les atteintes aux biens symbolisant la France témoignent une fois de plus du rejet par les populations des pays africains de la politique de la France en Afrique, laquelle – en s’intéressant davantage au pétrole et aux ressources économiques qu’à la démocratie et aux droits de l’Homme –, loin de garantir une quelconque stabilité, participe au pourrissement de la situation de ces pays (despotismes, successions claniques…)
Nous vous demandons d’interpeller le gouvernement, et en tant que député de faire valoir votre rôle de contrôle de l’exécutif - y compris sur les sujets de politique extérieure - conformément à la constitution :
– en demandant au gouvernement de ne pas reconnaître dans ces conditions l’élection d’Ali Bongo comme président du Gabon
– en demandant à l’exécutif de s’expliquer sur le rôle dans la diplomatie française de l’homme d’affaire Robert Bourgi (cf. notre communiqué)
Nous vous prions d’agréer, Madame, Monsieur le(a) député(e), l’expression de nos respectueuses salutations.
Pour l’association SURVIE
Odile Biyidi Présidente
Objet : politique de la France au Gabon et en Afrique
Paris, le vendredi 11 septembre 2009
Madame la Députée,
Constatant, d’une part la position ambigüe de la diplomatie française face à l’élection contestée d’Ali Ben Bongo Ondimba à la présidentielle gabonaise du 30 août dernier et, d’autre part, les nombreuses accusations portées contre notre pays sur son rôle jugé obscur joué au Gabon comme lors de plusieurs processus électoraux récents en Afrique, nous tenons par la présente à vous faire part de notre préoccupation citoyenne et à en appeler à votre vigilance de parlementaire face aux atermoiements de la diplomatie française en Afrique.
Créée en juillet 2007 par 12 associations et ONG françaises, notre Plateforme citoyenne France-Afrique a érigé parmi ses priorités de plaidoyer la promotion d’une diplomatie française au service de la démocratie et du respect des droits de l’Homme dans les pays africains et l’exigence d’un réel contrôle parlementaire et citoyen sur la politique menée par la France en Afrique. Suite à la publication de son Livre Blanc pour une politique de la France en Afrique responsable et transparente, elle a entrepris de nombreuses démarches d’interpellation et de sensibilisation auprès des institutions françaises en charge de la coopération (Elysée, ministères), des partis politiques, des parlementaires, afin de les convaincre de la nécessité d’en finir avec une diplomatie de complaisance à l’égard de régimes autoritaires favorables aux intérêts français.
Malgré les promesses de « rupture » avec la Françafrique réaffirmées ça et là par les responsables de l’exécutif nous avons constaté que cette réorientation, déjà absente des 8 chantiers pour l’Afrique formulés en juin 2008 par le secrétaire d’Etat à la Coopération, semble avoir été bel et bien sacrifiée au profit des intérêts économiques et politiques de la France dans un certain nombre de pays.
Pour ne retenir que les exemples les plus récents, nous exprimons aujourd’hui la préoccupation que nous inspirent les ambigüités et renoncements de la diplomatie française face aux élections contestées du général Mohamed Ould Abdel Aziz en Mauritanie et du président congolais Denis Sassou Nguesso, en juillet dernier, aux dérives autocratiques du Président Tandja au Niger, à l’inquiétante crise politique à Madagascar. Sans oublier la caution apportée au Gabon au fils du chef d’Etat resté maître pendant 40 ans des réseaux et secrets de la Françafrique. Malgré les recours des opposants et le climat troublé régnant au Gabon, Nicolas Sarkozy a adressé le 7 septembre un courrier de félicitations au « vainqueur ».
En l’absence de signaux diplomatiques annonciateurs de changements dans la politique de la France en Afrique tant attendus par des sociétés civiles françaises et africaines exaspérées et tandis que les réseaux officieux incarnés notamment par l’activisme diplomatique de l’avocat Robert Bourgi continuent à parasiter l’action publique, nous nous en remettons à votre vigilance de parlementaire.
En effet, malgré l’interprétation souvent faite du texte de la Constitution, une opportunité réelle est donnée dans notre pays aux députés de contribuer au débat public sur la politique étrangère et d’instaurer des mécanismes de suivi de l’action diplomatique, militaire et économique de la France dans les pays africains.
Nos recommandations en la matière sont nombreuses, elles ont fait l’objet de plusieurs chapitres de notre Livre Blanc et continuent à être débattues avec les organisations françaises et africaines et communiquées aux décideurs politiques.
Sur le cas particulier du Gabon, nous souhaiterions en particulier vous voir saisir le gouvernement français sur :
– la nécessité d’encourager une enquête impartiale et incontestable sur l’exactitude des résultats et sur les actes de fraude dénoncés et, le cas échéant, le lancement d’un nouveau processus électoral
– dans ce délai, la mise en place d’un service diplomatique minimum, tel qu’il devrait être instauré avec les régimes issus d’élections bafouées ou ne respectant pas les droits de l’Homme
– la mise en application des dispositions prévues par l’Accord de Cotonou sur le respect de l’Etat de droit (Articles 8-9-96 entre autres) et par la Déclaration de Bamako de l’Organisation Internationale de la Francophonie portant sur le respect et la consolidation de l’Etat de droit dont le Gabon est signataire
– l’établissement de la vérité sur le rôle confié à Robert Bourgi dans les liens diplomatiques entre la France et le Gabon
Par ailleurs, nous souhaitons vous inviter à la vigilance, sur la nécessité, dans un contexte de remise en cause du juge d’instruction, de laisser la justice française faire toute la lumière sur les biens mobiliers et immobiliers détenus par la famille Bongo en France.
Dans l’espoir d’avoir attiré votre attention et dans l’attente d’une prochaine prise de contact, nous vous prions d’agréer, Madame la Députée, Monsieur le Député, l’expression de notre parfaite considération.
Pour la Plateforme citoyenne France Afrique,
Fabrice TARRIT, Michel ROY, Gérard HALIE, Jean-Paul SORNAY.