Survie

Combien de victimes au Togo avant que Jacques Chirac ne lache Baby Eyadéma ?

Publié le 15 février 2005

Combien de victimes au Togo avant que Jacques Chirac ne lache Baby Eyadéma ?

La France avait autrefois béni le remplacement de l’ubuesque dictateur haïtien François Duvalier, alias Papa Doc, par son fils Jean-Claude Duvalier, marionnette d’un clan milicien cherchant à prolonger son pouvoir. Le « règne » de Baby Doc n’a fait qu’empirer la situation d’un pays torturé.

Aujourd’hui, le clan milicien soudé par feu Étienne Gnassingbé Eyadéma a promu de manière expéditive - avec l’aide « juridique » du professeur français Charles Debbasch -, le fils du tyran Faure Gnassingbé. Un Baby Eyadéma.

La troupe a déjà tiré samedi sur les manifestants de la liberté. Le langage hyper-convenu de la diplomatie française cache mal la stratégie élyséenne, vieille comme la Françafrique : celle du « fait accompli ». Il s’agit de faire durer assez ce pouvoir caricatural pour lui permettre de faire, en position de force, de maigres propositions d’ouverture où s’engluera une partie des opposants. Et ainsi d’aboutir à une prolongation indéfinie de la dictature qui fait depuis 4 décennies le cauchemar des Togolais.

L’acharnement avec lequel l’Élysée prolonge une Françafrique totalement archaïque va devenir de plus en plus coûteux pour tout le monde. La France doit comprendre que c’est le moment de tourner la page. Elle doit comprendre que « le sentiment anti-français » qui se répand sur le continent africain correspond à une prise de conscience, par les peuples du continent, de la réalité du rôle de la France dans l’oppression dont ils sont victimes ; elle doit comprendre que les peuples africains veuillent et doivent s’en affranchir ; elle doit comprendre qu’elle n’a plus que le temps d’échapper, peut-être, à la réprobation générale. Elle doit exiger avec l’Union africaine et l’Union européenne des élections libres au Togo, et notamment une élection présidentielle - et s’impliquer, avec l’Union européenne et l’Union africaine, pour que cette exigence ne soit pas qu’un vœu pieux, non suivi d’effet.

Dans notre République monarchique, hélas, c’est Jacques Chirac qui dirige seul les relations franco-africaines - officielles et parallèles. Plus il tarde à mettre un terme à son soutien inconditionnel aux dictatures françafricaines, plus il se compose aux yeux des Africains (et du monde) le masque d’un Leonid Brejnev perpétuant le « Rideau de fer », ou celui d’un démiurge de la Maison blanche perpétuant le fascisme en Amérique latine.

En mai dernier, Survie lançait une campagne contre le soutien de la France aux dictateurs africains largement inspirée par la mascarade électorale togolaise de 2003 et son indigne cautionnement par la diplomatie française.
Depuis le mois de mai, celle-ci a rassemblé plus de 7000 signatures de citoyens et obtenu le soutien d’une douzaine de députés, ainsi que la mobilisation de personnalités africaines signataires d’une lettre ouverte au président Chirac. Une quarantaine d’événements (projections, débats, manifestations) ont été organisés dans ce cadre, dans plus de 20 villes françaises.

Parmi les revendications :
 le "service minimum" de relations diplomatiques avec les régimes qui ne procèdent pas d’une élection démocratique
 la levée de l’ambiguïté sur la nature officielle ou personnelle des relations entretenues avec les dictateurs africains
 la fin de l’envoi d’ambassadeurs "validateurs d’élections truquées"
 l’arrêt de la coopération militaire et des ventes d’armes en direction des régimes répressifs et/ou agressifs

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