Survie

Arcanes et rouages de la coopération militaire : Qui décide ?

Publié le 12 novembre 1996

Les affaires africaines constituent le domaine réservé de l’Elysée. La coopération militaire faillit d’autant moins à la règle que le Président de la République est aussi le chef des armées. C’est le ministre de la Coopération qui met en oeuvre les directives du chef de l’Etat aux plans technique et financier. Toutefois, la caractéristique majeure de l’organigramme de la coopération militaire est un fractionnement des compétences. Du chef de l’Etat (et son conseiller aux affaires africaines) au ministre de la Coopération ou au ministre de la Défense, en passant par le Premier ministre, le Quai d’Orsay ou le Secrétaire général de la défense nationale, tous s’estiment concernés et responsables de la politique menée. La coopération militaire stricto sensu ne recoupe que les conventions d’assistance militaire techniques, tandis que les accords de Défense, conclus avec le " noyau dur " des pays du champ francophone, sont administrés directement par le ministère de la Défense. On se retrouve dans le cas de figure d’administrations concurrentes, gérant une politique d’autant moins harmonieuse que sa cohérence n’est tout simplement pas pensée (ni recherchée ?).

La Mission militaire de coopération (MMC) illustre cette situation. Organisme théoriquement autonome, elle est dirigée par un général, qui relève donc de la Défense, mais qui gère 17 % du budget de la Coopération... Depuis 1965, la MMC est rattachée au cabinet du ministre de la Coopération. Elle propose et exécute la politique décidée à l’Elysée, à travers cinq domaines d’action : études, finances, logistique, personnel et stages. Dans les pays concernés, les chefs de mission d’assistance militaire recueillent, filtrent et incitent les demandes des responsables africains.

Le champ d’action de la MMC est le même que celui de son ministère de tutelle. Comme ce champ, depuis les indépendances, n’a cessé de s’accroître - aux anciennes colonies belges, espagnoles et portugaises -, le nombre des pays concernés a doublé en 15 ans. Cette multiplication des partenaires fait partie d’une stratégie d’extension de l’influence française en Afrique : il s’agit non seulement d’élargir la francophonie, mais de se présenter à ces pays comme une alternative aux anciennes tutelles. C’est ainsi que la France a ravi le Rwanda, le Zaïre et le Burundi à leur parrain belge, ou la Guinée équatoriale à ses attaches espagnoles. Elle s’est substituée au grand frère soviétique dans les Etats anciennement marxistes (Guinée, Congo ...). Actuellement, des négociations sont en cours pour inclure le Mozambique, l’Angola ou le Zimbabwe (2).


2. L’intérêt de cette extension dépend évidemment de la qualité des relations de partenariat ou de clientèle ainsi établies. L’appréciation de cette qualité varie à son tour, d’autant plus que la situation du pays concerné est conflictuelle. En tout cas, une conjonction d’intérêts français pousse manifestement à une présence accrue dans le domaine militaire - à défaut d’avoir toujours la place souhaitée au niveau commercial.


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