Appel aux organisations de la société civile et aux élus en Europe et en Afrique : les Parlements des pays concernés et les Institutions européennes doivent refuser les accords « de partenariat » (APE) entre l’Europe et les pays d’Afrique subsaharienne.
Le 10 juillet 2014, à Accra, capitale du Ghana, les 16 chefs d’Etat d’Afrique de l’Ouest ont approuvé un projet d’accord dit de partenariat économique (APE) entre l’Union européenne (UE) et les 15 Etats de la CEDEAO (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) plus la Mauritanie. Dans le même temps, un APE a été paraphé le 22 juillet avec six Etats de l’Afrique australe. Il s’agit en fait d’accords de « libre-échange » visant, dans le cas de l’Afrique de l’Ouest, à supprimer 75% des droits de douane sur les importations venant de l’UE et à limiter, au-delà des exigences de l’OMC, les possibilités des Etats africains de mener une politique commerciale autonome. Cet accord résulte de pressions exercées par les firmes multinationales européennes, au service desquelles se sont mises les Institutions européennes (Commission, Conseil et Parlement), parvenant à entrainer des chefs d’Etat africains qui, à quelques exceptions près, sont restés insensibles aux mises en garde de leurs sociétés civiles mobilisées depuis 14 ans.
Avec ces accords, les pays africains ne pourront plus taxer la plupart des produits européens qu’ils importent, entraînant des pertes budgétaires considérables, alors que leur développement requiert un renforcement des capacités d’intervention publique. Ce que l’UE promet de leur verser comme contrepartie est un mirage : il n’y a rien de plus que les sommes habituelles du Fonds européen de développement – 4 euros par habitant et par an ! – qui est un financement des Etats membres hors budget communautaire, plus le « recyclage » marginal d’autres fonds communautaires déjà programmés.
La production agricole et industrielle des pays africains se verra concurrencée par l’importation de produits européens plus compétitifs, souvent largement subventionnés, compromettant leurs possibilités de développement et leur intégration régionale.
Les pays africains s’engagent à ouvrir des négociations avec l’UE six mois après la conclusion de l’APE en vue d’une libéralisation encore plus poussée de leurs économies, intégrant le secteur des services, les marchés publics, les investissements, la propriété intellectuelle et la concurrence.
Il faut s’attendre à ce que les autres partenaires commerciaux des pays africains concernés (notamment les Etats-Unis et les grands pays émergents) exigent de ces pays dans les années à venir les mêmes avantages commerciaux que ceux qu’ils ont accordés à l’UE, menant à une libéralisation encore plus destructrice de leurs marchés et à une dépendance accrue vis-à-vis des cours des marchés mondiaux. Les conséquences prévisibles seront une amplification des cas de famines, de maladies et de manque de soins – la crise Ebola illustre la grande misère des systèmes de santé de la région –, et de plus fortes migrations de populations privées d’avenir dans leur pays, alors que la population d’Afrique de l’Ouest devrait passer de 340 millions d’habitants en 2014 à 510 millions en 2030 – autant que dans l’UE aujourd’hui comme en 2030 – et 807 millions en 2050, dans un contexte de réchauffement climatique accentué dans cette région.
Enfin, en Europe, ces accords favoriseront l’agriculture productiviste, pollueuse, destructrice d’emplois, et certains secteurs industriels non moins productivistes, exportateurs de biens de piètre qualité, au détriment de politiques d’agriculture durable, de souveraineté alimentaire et de transition industrielle écologique.
– REFUSER de ratifier ces accords d’autant plus inacceptables que la Commission européenne a refusé d’examiner toutes les options alternatives proposées notamment par la société civile, qui auraient permis de maintenir les avantages commerciaux accordés aux pays africains sans pour autant les contraindre à libéraliser leurs marchés ;
– S’ENGAGER en faveur d’Accords de Coopération et de Solidarité avec les pays africains (ACS) qui ne soient pas basés, comme le sont les APE, sur un « libre-échange » qui menace l’émancipation humaine.