Survie

Paradis fiscaux et judiciaires : la bataille ne fait que commencer

Publié le 22 octobre 2008 - Plate Forme Paradis Fiscaux et Judiciaires

Suite à la réunion des pays de l’OCDE sur les paradis fiscaux le 21 octobre, les ONG saluent l’engagement politique fort de mettre fin aux abus des paradis fiscaux et appellent à passer aux actes Les ONG membres de la plate-forme « Paradis Fiscaux et Judiciaire » (PFJ) saluent les engagements pris par les dirigeants français et leurs homologues de 16 autres pays de l’OCDE « de ne plus accepter que des Etats et territoires prospèrent sur la fraude ». Elles tiennent cependant à souligner que la réalité de cet engagement ne pourra être jugée qu’à l’aune des mesures effectivement adoptées. Elles veilleront également à ce que l’engagement soit aussi déterminé contre la fraude fiscale dont pâtissent les pays en développement.

Nicolas Sarkozy devant le Parlement européen, et Eric Woerth à l’issue de la réunion de 17 pays de l’OCDE sur les paradis fiscaux, ont pris hier des engagements politiques forts pour mettre fin aux abus des PFJ. Ils partagent le constat selon lequel les paradis fiscaux, « source intolérable d’injustice », ont participé à l’aggravation de la crise financière et qu’ils prospèrent sur le même terrain que le blanchiment et la corruption, celui du secret et de l’absence de transparence.

  • Première mesure saluée par la plateforme, la volonté du Président français – reprise par le Ministre du Budget dans son discours – d’interdire aux banques qui bénéficient du secours de l’Etat de travailler avec les paradis fiscaux. Cette déclaration pourrait avoir une portée considérable, car la plupart des banques ont des activités, et même des filiales, dans les centres offshore. Toutefois, la plate-forme paradis fiscaux et judiciaires s’interroge sur la réalité de cet engagement, puisque les six banques françaises qui bénéficieront du soutien étatique ont toutes des filiales dans des paradis fiscaux. Le gouvernement devrait exiger, à minima, que les banques bénéficiaires s’expliquent dans leur rapport annuel des liens qu’elles entretiennent avec les PFJ.
  • La plate-forme « Paradis fiscaux et judiciaires » se félicite aussi de la proposition d’Eric Woerth d’identifier et de nommer les Etats et territoires qui ne respectent pas les standards de transparence et d’échange d’informations fiscales en révisant la liste noire des paradis fiscaux, en l’élargissant à tous les pays qui offrent un secret excessif – y compris au sein de l’OCDE – et en mettant au ban les territoires non coopératifs. La plate-forme « Paradis fiscaux et judiciaires » sera attentive aux mesures de sanction prévues à l’encontre de ces territoires et veillera, par ailleurs, à ce que cette liste noire inclue effectivement l’ensemble des territoires non coopératifs, y compris ceux qui n’ont pas le secret bancaire mais utilisent le trust comme instrument d’opacité (c’est le cas du Royaume-Uni aujourd’hui).
  • La plate-forme PFJ salue également l’annonce visant une amélioration de la directive épargne de l’Union européenne – l’extension de sa portée géographique, son élargissement aux trusts, fondations et personnes morales et le réexamen du mécanisme transitoire de retenue à la source appliqué par quelques Etats –, ce qui correspond là encore à l’une de ses recommandations.
  • Enfin, la reconnaissance par les pays développés du fléau que représentent la fraude et l’évasion fiscales pour les pays en développement constitue un grand pas en avant qui devra être suivi d’effet lors de la conférence de Doha sur le financement du développement programmée fin novembre 2008. La plate-forme PFJ sera particulièrement vigilante aux mesures qui y seront prises. L’OCDE travaillant essentiellement pour ses membres, la plate-forme PFJ demande la création à l’ONU d’un organe intergouvernemental chargé des questions fiscales, avec une attention particulière aux pays du Sud. Elle demande aussi l’adoption du Code de conduite en préparation aux Nations Unies contre la fraude fiscale et la fuite illicite des capitaux.

Reste maintenant à savoir quelle sera la portée réelle de ces engagements qui restent en grande partie suspendus à l’adhésion des pays absents de la réunion, les Etats-Unis notamment. La plateforme « Paradis fiscaux et Judiciaires » attend donc de Nicolas Sarkozy qu’il mette ces sujets à l’ordre du jour des sommets mondiaux annoncés pour réformer le système financier mondial.

La plate-forme regrette également que la responsabilité de certains acteurs économiques n’ait pas été abordée :

 Les déclarations ne font aucune référence à la responsabilité des entreprises qui utilisent les paradis fiscaux alors même que les pays du Sud perdent près de 200 milliards de dollars de recettes fiscales par an, des sommes détournées vers les paradis fiscaux ;
 Aucune référence n’est faite à la possibilité d’obliger les firmes multinationales à rendre compte dans leurs rapports annuels de leurs activités, résultats et risques dans les PFJ où elles opèrent ;
 Aucun engagement n’a été pris en faveur de la révision des normes comptables internationales pour plus de transparence de l’activité des entreprises multinationales à l’étranger.

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La plate-forme « Paradis Fiscaux et Judiciaires », créée en février 2006, regroupe 13 ONG et associations qui travaillent ensemble pour faire progresser la réglementation relative aux paradis fiscaux et contribuer ainsi à la lutte contre la fraude fiscale, le blanchiment d’argent et la corruption.

Membres de la plate forme :

Attac France - CADTM France (Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers-Monde) - CCFD Terre Solidaire - CRID (Centre de Recherche et d’Information sur le Développement) - Droit pour la justice - Oxfam France Agir ici - Réseau Foi et Justice Afrique Europe - Secours catholique Caritas France - Sherpa - Survie - Transparence International France

Site internet : http://www.argentsale.org


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