Le 26 novembre 1999, cette journée de réflexion prospective organisée par Survie à l’Assemblée nationale, sur invitation de la députée Marie-Hélène Aubert, a réuni plus de 130 participants et suscité un débat très fructueux.
Le sous-titre de cette journée de débat désignait le défi à relever : De "l’aide" aux "biens publics à l’échelle mondiale".
Le premier concept est usé et dévalué ; le second est inéluctable, mais pas encore opérationnel. Il a été mis en avant dans un rapport publié en 1999 par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Il y est observé que dans l’histoire de la pensée économique, même les théoriciens les plus libéraux admettent la nécessité de biens publics, garantissant la sécurité et la justice (les fonctions régaliennes de l’État). D’autre part, chacun admet aujourd’hui qu’un certain niveau de solidarité concourt à la sécurité collective, accroît l’efficacité des producteurs et la demande des consommateurs. Les pays qui assurent un haut niveau d’éducation et de santé à leur population ont de meilleures performances économiques que ceux qui ne s’en soucient pas.
Si la nécessité des biens publics est incontestée, le débat est considérable autour de deux questions intimement mêlées : quel est le niveau souhaitable des biens publics ? à quelle échelle doivent-ils être garantis ?
La réponse est à la fois pragmatique et politique. La nécessité d’un secteur marchand dynamique n’est plus guère contestée. Les ultra-libéraux voudraient y verser l’éducation, la santé, la protection sociale. Les partisans du modèle social européen, qui a produit l’un des plus hauts niveaux de développement de la planète, incluent dans les biens publics une ample législation du travail, l’indemnisation du chômage, la recherche fondamentale, le droit au logement et à la culture, certains transports collectifs, etc. Si l’intérêt de nationaliser ou privatiser une compagnie d’aviation résulte d’un mélange de données techniques, économiques et culturelles, des choix comme le revenu minimum, le niveau des retraites ou le système de santé publique sont éminemment politiques. Ils sont aussi le produit d’un combat historique.
Dans la plupart des pays de l’Union européenne, l’économie des biens publics atteint ou dépasse la moitié de la production nationale, mais ce niveau de solidarité est le résultat de plus d’un siècle de mouvement social : il est la réponse à un foisonnement d’exigences de dignité, aux revendications organisées de la société. Cela a été possible parce que beaucoup l’ont demandé, et qu’un certain nombre de décideurs ont compris qu’une telle évolution était inéluctable, ou souhaitable.
Intervenants :
– Marie-Hélène Aubert, députée d’Eure et Loire (Les Verts)
– Sylvie Brunel, Directrice scientifique et conseillère stratégique d’Action contre la faim
– Jean Fabre, Directeur adjoint du bureau européen du PNUD
– Pierre Galand, Président du Forum européen Nord-Sud
– Suzanne Humberset, Secrétaire générale de l’AITEC
– Emile Le Bris, Président de l’OPCF
– Michel Levallois, Président du CADE
– Jean-David Naudet, Consultant auprès du Club du Sahel
– Jean Nemo, membre du bureau de la CADE
– François-Xavier Verschave, Président de l’association Survie
Ce sont les échanges d’idées et l’intérêt manifesté au cours de ce colloque qui ont conduit à la naissance de l’association BPEM