Des victimes rwandaises du génocide perpétré au Rwanda en 1994 ont saisi le 16 février 2005 la Justice française de plaintes pour complicité dans ce génocide.
Elles affirment que des militaires français auraient directement participé aux crimes dont elles ont souffert.
La Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris vient, pour la seconde fois en moins de deux mois, de déjouer les manœuvres retardatrices du Procureur militaire. En effet, après avoir soutenu que les constitutions de partie civile étaient fantaisistes et avoir demandé au Juge d’instruction de se rendre à Kigali pour s’assurer de leur solidité ; après avoir fait appel de l’Ordonnance du Juge d’instruction qui déclarait, contre ses réquisitions, les six plaintes recevables ; le Procureur du Tribunal aux Armées de Paris avait requis l’annulation des auditions auxquelles le Juge d’instruction avait procédé sur sa propre demande à Kigali.
Le 29 mai 2006, la Cour d’appel avait confirmé la recevabilité de toutes les constitutions de partie civile. Le 3 juillet 2006, elle a confirmé la validité des auditions faites à Kigali par le Juge d’instruction. Désormais, on peut espérer que l’instruction des six plaintes contre x pour complicité de génocide, pourra enfin être menée sereinement.
Toutefois, l’éventuelle constatation par la Justice de viols, de sévices, voire de meurtres commis sur le terrain du génocide par certains militaires français, peut constituer un leurre.
En effet, dans leur grande majorité, les militaires présents sur le terrain n’ont pas commis d’actes de ce genre. Ils ont exécuté, pour la plupart en toute bonne foi, les instructions qui leur avaient été données. Or, dans la mesure où ces instructions enjoignaient en réalité aux troupes de porter assistance aux autorités locales alors que ces autorités perpétraient un génocide, il faut considérer qu’elles sont à l’origine de la complicité reprochée aux Français.
En effet, l’assistance ainsi fournie était une complicité de génocide - même lorsqu’elle ne s’accompagnait pas de viols, de sévices et de meurtres.
Mais il est évident que la responsabilité première de cette assistance - comme des viols, sévices et meurtres qui l’auraient, parfois, accompagnée ; donc l’ultime complicité de génocide, incombe aux auteurs des instructions et, par conséquent, aux pouvoirs civils qui coiffent la hiérarchie militaire.
Dans ces conditions, la Commission d’enquête citoyenne (CEC) considère qu’il serait trop facile de dédouaner les véritables responsables au détriment de quelques lampistes. Elle considère également que la question des responsabilités essentielles resterait posée même si l’instruction n’établissait pas la matérialité des méfaits évoqués par les plaignants.
Enfin, elle suggère qu’en ces temps de débats préélectoraux, les différents candidates et candidats à la candidature soient appelés à prendre clairement position sur les responsabilités des dirigeants de l’État dans l’assistance accordée en 1994 aux auteurs du génocide des Tutsi du Rwanda.