Lors de sa "tournée" en Afrique centrale début mars, Emmanuel Macron n’a passé que quelques heures à Brazzaville, les journalistes insistant sur la tiédeur de sa relation avec Denis Sassou Nguesso. Un récit qui édulcore la perpétuation par le pouvoir macronien de la compromission française avec ce vieux despote françafricain.
« Les entretiens en tête à tête du président Denis Sassou Nguesso avec son homologue français Emmanuel Macron au palais de l’Elysée, s’inscrivent dans le prolongement de la séculaire et excellente coopération bilatérale qui existe entre la République du Congo et la République française », explique la voix off de la vidéo diffusée par le compte Twitter de la présidence congolaise le 22 décembre 2022. On y voit le président Macron descendre dans la cour de l’Élysée pour y accueillir son hôte du jour, Denis Sassou Nguesso, et l’embrasser tout sourire. La voix off poursuit : « Deux pays liés par le destin commun de l’Histoire. La France, qui entretient depuis toujours des relations de coopération avec le Congo, se place aujourd’hui au premier rang des bailleurs de fonds bilatéraux. » L’excellence des relations franco-congolaises est ainsi, « depuis toujours », mise en scène par le régime de Sassou Nguesso. En s’affichant une nouvelle fois à ses côtés, le président français lui offre ce type d’opération de communication permettant de passer un message clair à ceux qui pourraient être tentés, au sein de l’appareil sécuritaire, de tourner la page : comme du temps de Valéry Giscard d’Estaing et de tous ses successeurs jusqu’à Emmanuel Macron, Sassou bénéficie du soutien de la France [1].
Arrivé en 1979 à la tête du pays, le vieux militaire a en effet côtoyé plusieurs générations de personnels politiques français. Il n’a dû abandonner son fauteuil présidentiel que cinq ans, à partir de l’élection multipartite de 1992, avant de reprendre le pouvoir par les armes en 1997, avec le soutien de Jacques Chirac, au prix d’une effroyable guerre civile financée par le groupe pétrolier français Elf. Dans la région du Pool, au sud de la capitale Brazzaville, cette guerre durera jusqu’en 2002. À la tête d’un pays pétrolier mais surendetté et ruiné par la guerre, Sassou creuse l’endettement de son pays en même temps que se remplissent les comptes en banque de ses proches, comme le révélera à partir de 2007 l’affaire dite des « biens mal acquis », sur les soupçons de blanchiment d’argent sale via l’acquisition de biens luxueux en France-.
François Hollande, élu en 2012 sur différentes promesses dont celle de mettre fin à la Françafrique, donne de l’espoir aux Congolais lorsqu’il appelle, le 29 novembre 2014 depuis Dakar, à tirer les leçons de l’insurrection populaire qui vient de renverser le Burkinabè Blaise Compaoré : « Lorsqu’une constitution est modifiée pour permettre à un chef d’Etat de faire un mandat de trop, un mandat de plus, en violation de toutes les règles qui ont été posées par le peuple, alors, c’est ce qui s’est passé au Burkina Faso, il y a un moment où cela s’arrête. » Sassou, pense-t-on de Brazzaville à Pointe-Noire, est visé par cette déclaration, lui qui veut à son tour modifier la Constitution pour rester indéfiniment au pouvoir.
En réalité, la relation franco-congolaise ne pâtit nullement des intentions du dictateur de s’éterniser dans son fauteuil. En juin 2015, trois conventions de coopération militaire sont signées avec le régime, renouvelant la mise à disposition de conseillers français au sein de l’appareil sécuritaire, et le Premier ministre Manuel Valls décore de la Légion d’honneur Jean-Yves Ollivier. Ce Français occupe une place de choix dans la nébuleuse du clan Sassou, dont il assure la promotion notamment via la Fondation Brazzaville qu’il préside… et qui finance l’orchestre de la femme de Manuel Valls (L’Obs, 29/03/2016). Un mois plus tard, le Premier ministre socialiste rend visite à son hôtel à Denis Sassou Nguesso, qui s’en vante dans untweet avec une photo de la rencontre et ce commentaire : « Manuel Valls a félicité le Président d’avoir entrepris une large concertation avec les forces vives de la nation. »
Pour les Congolais qui avaient cru François Hollande un an plus tôt, la désillusion est sévère lorsque celui-ci, interrogé au sujet du référendum sur mesure organisé par le régime en octobre 2015, lâche : « Le président Sassou peut consulter son peuple, ça fait partie de son droit, et le peuple doit répondre. » Le peuple tente surtout de faire valoir son droit à manifester pour s’opposer à ce tripatouillage constitutionnel et subit en retour une répression inouïe, se traduisant par des dizaines de morts, des centaines d’arrestations et de blessés (Cf. Billets n°251, novembre 2015). « L’infatiguable bâtisseur », comme l’ont surnommé ses militants malgré l’état du pays après tant d’années au pouvoir, compte bien rester président à vie.
Cinq mois plus tard, en mars 2016, une parodie d’élection présidentielle offre au potentat le vernis constitutionnel pour rester au pouvoir. Dans l’année qui suit, des combats ravagent à nouveau la région du Pool, où l’armée traque le Pasteur Ntumi, un ancien chef rebelle ayant pris fait et cause pour un opposant à Sassou Nguesso lors de ce pseudo scrutin. Un autre opposant très populaire, le général Jean-Marie Mokoko, est jeté en prison dès le mois de juin 2016 et accusé d’« atteinte à la sûreté intérieure de l’État », motif pour lequel il est condamné en 2018 à 20 ans de prison.
En septembre 2018, Le Monde révèle que deux anciens agents de la DGSE viennent d’être mis en examen pour « participation à une association de malfaiteurs » et « détention d’explosif » : ils sont suspectés d’avoir préparé l’élimination physique d’un autre opposant congolais [2], Ferdinand Mbaou, réfugié en France – où il a déjà réchappé à une tentative d’assassinat trois ans plus tôt, lorsqu’il a pris une balle dans le dos en sortant de son domicile en banlieue parisienne.
Le régime se débarrasse de ses opposants politiques, mais il reste la proie de ses créanciers internationaux. En août 2017 éclate le scandale de sa « dette cachée » : il doit reconnaître auprès du FMI que son endettement s’élève à 120 % de son produit intérieur brut, et non 77 % comme il l’avait fait valoir jusque-là (RFI, 2/08/2017). Stupeur dans les milieux diplomatiques et financiers ! Il lui faut négocier avec l’institution financière internationale pendant deux ans, notamment grâce aux conseils avisés de deux Français, le banquier d’affaires Matthieu Pigasse et l’ex-ministre et ancien patron du Fonds monétaire internationale (FMI) Dominique Strauss-Khan. En juillet 2019, le Congo décroche ainsi un nouveau prêt de 448 millions d’euros sur trois ans, à condition que la Chine accepte aussi de restructurer ses créances bilatérales, c’est-à-dire d’alléger et d’étaler les remboursements par Brazzaville. « Une prime à la kleptocratie », s’étrangle l’opposant Andrea Ngombet (Le Point Afrique, 13/07/2019), qui a cofondé depuis Paris le collectif « Sassoufit » quelques années plus tôt.
Il faut dire que les scandales financiers se multiplient. En mars 2016, lors de la révélation des « Panama Papers », du nom de cette fuite de documents d’un intermédiaire financier panaméen épluché par un consortium mondial de journalistes, les noms de proches de Sassou Nguesso apparaissent – notamment son fils, Denis Christel Sassou Nguesso, alors directeur général adjoint de la Société nationale des pétroles du Congo, la SNPC. L’analyse des documents met au jour des circuits financiers offshore complexes permettant d’évaporer une partie de la manne issue de l’or noir.
En avril 2018, Le Monde révèle que le régime a bénéficié à partir de 2003 d’un gros coup de pouce de Total (qui avait absorbé Elf et ses activités africaines trois ans plus tôt). Alors que le pays était sous surveillance étroite du FMI, qui conditionnait son aide à l’absence de nouveaux emprunts, le groupe pétrolier français avait organisé un circuit de financement opaque via deux paradis fiscaux, Jersey et les Îles Vierges britanniques, et impliquant la BNP Paribas. Un champ pétrolier congolais servait de monnaie d’échange à ce contournement des règles du FMI.
En août 2019, rebelote : c’est cette fois l’ONG Global Witness qui publie un rapport montrant que le même Denis Christel Sassou Nguesso a détourné 50 millions de dollars via un circuit financier opaque, passant notamment par Chypre et l’État américain du Delaware – d’autres paradis fiscaux.
Et durant toutes ces années, l’instruction judiciaire de l’affaire des "Biens mal acquis" se poursuit, révélant de nouveaux indices du détournement à des fins personnelles des fonds provenant du pillage des ressources du pays (pétrole, mais aussi bois).
Comme d’autres despotes en mal de légitimité, Sassou Nguesso guette à partir de mai 2017 les occasions de s’afficher au côté d’Emmanuel Macron. En dépit d’un storytelling macronien de rupture, celles-ci ne vont pas manquer.
En novembre 2018, Sassou accepte naturellement l’invitation au premier Forum de Paris sur la paix, qui lui vaut d’être assis à la table du président français, avec une vingtaine de chefs d’États dont quelques autres dictateurs amis de la France… Début septembre 2019, le vieux despote est même reçu pour un entretien bilatéral. Puis il revient en novembre 2021 et novembre 2022 pour de nouvelles éditions du Forum de Paris pour la Paix.
Entre temps, il a été « réélu » en 2021, concourant désormais pour le podium de la longévité au pouvoir : selon un scénario désormais bien rôdé (et éprouvé au Gabon, au Cameroun, etc.), les recours des opposants ont été jugés « irrecevables » par la Cour constitutionnelle, qui a validé l’élection du potentat de 77 ans.
Mi-décembre 2022, c’est à Washington qu’il se rend, pour le Sommet États-Unis/Afrique. Mais il a prévu de faire le crochet par Paris au retour. Selon Jeune Afrique (22/12/22), ce rendez-vous a été négocié depuis quelques semaines auprès de Franck Paris, le "conseiller Afrique" d’Emmanuel Macron, par la discrète Françoise Joly. Nommée en février 2021 au poste de représentante personnelle de Sassou « pour la stratégie et les négociations internationales » (Africa Intelligence, 7/06/22), avec rang de ministre, cette conseillère franco-rwandaise est aujourd’hui une des personnes les plus puissantes dans l’entourage de Sassou.
L’Élysée est-il embarrassé par cette visite ? Prévue initialement le samedi 17 décembre, elle est décalée puisqu’Emmanuel Macron part au Qatar encourager l’équipe de France de football pour la finale de la coupe du monde. Alors pressentie le lundi 19, elle a finalement lieu le jeudi 22 décembre, sans tambour ni trompette du côté français. Mais l’essentiel pour Sassou est bien que ce type de rencontre ait lieu et qu’elle soit médiatisée.
La rencontre entre les deux présidents porte sur « l’Est de la RDC, la Centrafrique, la Libye et la protection de la biodiversité dans le Bassin du Congo » selon Jeune Afrique (22/12/22), qui précise que « le principe d’une visite officielle d’Emmanuel Macron à Brazzaville, en mars ou avril 2023, a également été acté ». L’Élysée organise en réalité une petite tournée régionale et veut réconcilier les frères ennemis, le Gabonais Bongo et le Congolais Sassou, en faisant venir ce dernier à Libreville (Africa Intelligence, 29/11/22). Le président français compte en effet se rendre au Gabon en mars pour un équivalent local du One planet summit de 2017 (Mondafrique, 13/11/22). Lui qui aime à se présenter comme un champion moderne de l’écologie, marche ainsi dans les pas de son prédécesseur Nicolas Sarkozy qui avait rassemblé à l’Élysée les chefs d’État d’Afrique centrale le 16 décembre 2009, à la veille de la clôture de la COP15 de Copenhague sur le changement climatique, au titre de la préservation de la forêt.
De telles bonnes intentions peuvent paver l’enfer, c’est connu, mais elles masquent aussi une volonté de marquer son territoire face aux velléités du grand méchant loup du moment, le groupe de miliciens Wagner. La venue au Congo du ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, en juillet, a en effet provoqué un certain émoi à Paris même si, comme le rappelle Africa Intelligence (28/09/22), Sassou a toujours conservé une forme de coopération avec Moscou, depuis son arrivée au pouvoir dans les années 1970 à la faveur d’une révolution d’inspiration socialiste. Côté français, on craint que cette visite du puissant ministre de Vladimir Poutine, malicieusement organisée au moment même où le président Macron se rendait au Cameroun pour tenter de contenir un hypothétique rapprochement de Yaoundé et Moscou (cf. Billets n°320, septembre 2022), permette au groupe Wagner d’obtenir une implantation sur le port de Pointe-Noire. La nébuleuse paramilitaire tente en effet de faciliter l’acheminement de matériel vers ses hommes en Centrafrique, pays enclavé. À Paris, toute la politique africaine est désormais réfléchie en réaction aux rivaux russes – lesquels sont brandis en épouvantail pour légitimer toutes les compromissions françaises. « C’est dans l’adversité que se révèlent les vrais amis », aurait dit Cicéron ; c’est en tout cas face à l’adversaire que se réaffirment publiquement certaines alliances.
La dernière visite d’un président français à Brazzaville remontait à mars 2009. Pour faire mine de maintenir une certaine distance, Emmanuel Macron avait prévu d’y rester seulement cinq heures, avant d’aller poursuivre sa tournée régionale au Congo-Kinshasa. Mais avec un amateurisme déconcertant, l’Élysée s’est laissé surprendre par le pouvoir congolais, qui a bouleversé le programme en organisant un accueil du président français en grande pompe à l’aéroport, avec fanfare, tapis rouge et revue des troupes. Puis le régime a obtenu l’improvisation d’un « point presse surprise » (Le Parisien, 4/03/23). « On ne voulait pas que cette visite passe inaperçue », a expliqué un officiel congolais à RFI (3/03/23). On se demande comment les conseillers élyséens ont pu l’ignorer, tant chaque opportunité pour Sassou de s’afficher au côté du président français est étalée dans les médias congolais.
Ce qui n’est pas passé inaperçu non plus, c’estla sortie d’Emmanuel Macron dès le lendemain lors du point presse à Kinshasa, où il a été interrogé sur son étape au Congo Brazzaville, qu’il n’avait visiblement toujours pas digérée : « Le président Denis Sassou Nguesso est président depuis longtemps dans son pays, bon ! c’est pas (sic) le choix de la France. Ça fait 14 ans qu’il n’y avait pas eu un président français qui était [allé] là-bas. Et c’est normal que ça ne soit pas le choix de la France, parce qu’il se trouve qu’il n’est pas président français. Donc on va au Congo Brazzaville, parce qu’il ne faut humilier personne, quand on fait une tournée régionale, ça me (sic) choque pas particulièrement que le président français rencontre le président du Congo, voilà ! Après la question, c’est qu’est-ce qu’on lui dit, c’est pas (sic) pour lui servir la soupe. » En passant de la compromission assumée à la posture hautaine et méprisante vis-à-vis d’un président africain, Emmanuel Macron a à nouveau choqué… tout en mentant par omission sur la nature des relations franco-congolaises.
Durant l’intervalle de deux mois qui sépare les deux entrevues bilatérales d’Emmanuel Macron et Sassou Nguesso, deux scandales sont venus rappeler la nature du régime congolais et les liens profonds de corruption que celui-ci a avec la France.
Le 2 mars, alors que les deux présidents sont déjà au One Forest Summit de Libreville, les médias Disclose et Investigate Europe révèlent un nouveau scandale de corruption à partir des "Perenco Files", des fuites de documents concernant le groupe pétrolier franco-britannique. Celui-ci est soupçonné par l’agence anti-corruption de Norvège, avec la filiale congolaise du groupe norvégien Petronor E&P, d’avoir fait des arrangements douteux avec des membres de la famille du président de façon à mettre la main en 2017 sur un champ pétrolifère au large de Pointe-Noire. Ces médias montrent que moyennant des sociétés-écrans et des prête-nom, le montage permet à la propre fille du dictateur, Julienne Sassou Nguesso de s’octroyer 3 % de la production de cette concession pétrolière. Une manne confortable, pour celle qui est déjà mise en examen en France depuis 2017 pour blanchiment et détournement de fonds publics, dans l’affaire des "Biens mal acquis".
Mais les plus gros pavés dans la mare ont été jetés en janvier par le journal Libération, avec les "Orion Files" : la fuite d’informations concernant un intermédiaire pétrolier au Congo, la société Orion Oil, qui intéresse beaucoup les enquêteurs français depuis une dizaine d’années. Son patron, Lucien Ebata, se fait prendre en janvier 2012 par les douaniers de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle avec 182 000 euros et 40 000 dollars en liquide, dissimulés dans ses affaires. C’est le début d’une enquête qui va mener, avec la perquisition de son domicile en France ainsi que celui du directeur financier de son entreprise, en 2017, à mettre à jour un tentaculaire système de détournement de fonds – plusieurs centaines de millions d’euros en quelques années. La société a été créée en 2008 au Royaume-Uni et placée sous le contrôle discret d’une holding aux Seychelles, paradis fiscal notoire. Elle traite exclusivement avec la SNPC, longtemps dirigée par Denis Christel Sassou Nguesso. Comme l’explique Libération (11/01/23), des documents permettent de suivre une partie de la manne pétrolière qui s’est évaporée, par des indications concernant des virements. L’un d’eux, qui affecte 17 millions de dollars à un certain « PR », pourrait ainsi avoir été à destination du président de la République du Congo. Les enquêteurs français soupçonnent aussi Lucien Ebata d’avoir a minima envisagé le versement de deux millions d’euros à Manuel Valls pour sa campagne lors de la primaire socialiste de janvier 2017, ce que dément l’intéressé. Des écoutes téléphoniques et l’agenda du patron d’Orion Oil témoignent des connexions politiques entre Lucien Ebata et Cédric Lewandowski, qui est alors l’influent directeur de cabinet du ministre de la Défense (et "ministre de l’Afrique") Jean-Yves Le Drian. Et l’enquête montre que le Congolais a été en lien étroit avec un proche de Manuel Valls, Stéphane Fouks, qu’ils soupçonnent d’avoir été l’artisan d’un tel deal. Libération (12/01/2023) publie au passage des courriels montrant que ce Français, vice-président du groupe de communication Havas (filiale de Bolloré), a été à la manœuvre pour gérer la communication autour du tripatouillage constitutionnel de 2015. Fouks a aussi permis un rapprochement avec un autre personnage politique français incontournable : en 2017, il a en effet mis en lien Lucien Ebata, qui cumule ses activités pétrolières avec celles de conseiller spécial de Sassou Nguesso, avec Dominique Strauss-Khan, pour aider le Congo à négocier avec le FMI. Les Panama Papers avaient déjà révélé que l’ancien patron de l’institution financière avait perçu cette année-là 1,4 million d’euros de la part d’Orion Oil (Le Monde, 4/10/21). Libération (12/01/23) montre que Orion Oil a encore versé au moins 800 000 euros à un associé de DSK dans le cadre d’un juteux contrat de conseil.
Obnubilées par l’influence russe et soucieuses de préserver les intérêts économiques et stratégiques dans la région, les autorités françaises espéraient jouer la carte de l’étape incontournable mais peu désirée : un jeune président qui a rompu avec la Françafrique mais qui se doit d’assumer quelques usages diplomatiques minimum. Sauf qu’en parallèle, la coopération militaire avec l’appareil sécuritaire se poursuit, de même que l’appui économique au régime, qui continue de brasser des millions d’euros détournés des caisses de l’État et d’engranger les dividendes symboliques de chaque image en présence du locataire de l’Élysée du moment.
Thomas Borrel
[1] L’instruction du volet « congolais » de l’affaire des BMA se poursuit. Depuis septembre 2022, elle est dans les mains du juge d’instruction Serge Tournaire (AI, 17/10/22).
[2] Une des deux barbouzes françaises ne sera jamais jugée : l’homme, qui a vraisemblablement trop parlé lors de son premier interrogatoire, a été exécuté de cinq balles sur un parking de Haute-Savoie quelques mois plus tard (Radio France, 25/05/2019)